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La Tunisie et l'après-démission de Jebali : incertitudes et inquiétudes
19/02/2013 | 1
min
La Tunisie et l'après-démission de Jebali : incertitudes et inquiétudes
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Presque quinze jours, plus précisément le 6 février 2013, jour de l’assassinat du militant opposant Chokri Belaïd, après l’annonce solennelle faite par Hamadi Jebali de son initiative de former, en son âme et sa conscience, un gouvernement de technocrates, n’appartenant à aucun parti politique, s’engageant à ne pas se présenter aux prochaines élections et à servir un agenda de consensus accéléré et clair, on a cru aboutir à un consensus positif…
A lieu de cela, quinze jours après, on se retrouve à la case départ du lendemain du scrutin du 23 octobre 2013, c’est-à-dire que nous disposons, juste d’une Assemblée nationale constituante. Pour le reste, nous n’avons pas de gouvernement officiel mais juste un cabinet pour liquider les affaires courantes, nous n’avons ni Constitution, ni loi électorale ni Instances indépendantes pour les élections, les médias et la magistrature…

En pleine révolte et en pleine émotion, en ce jour d’assassinat de Chokri Belaïd, cette proposition de M. Jebali avait créé un contre-choc psychologique et les Tunisiens étaient nombreux à croire que l’initiative allait marcher dans le sens où le ton, ferme et sincère, du chef du gouvernement laissait entendre qu’il était déterminé à concrétiser son idée et qu’il allait mettre tout le monde devant le fait accompli…en son âme et conscience !
Mais ses détracteurs, notamment parmi son propre camp de la Troïka, à savoir Ennahdha et le CPR, ont vite fait de noyer le poisson dans l’eau en tergiversant et en réclamant des délais de réflexion sans opposer un refus catégorique. Mais au fil des jours, ils étaient tellement nombreux à faire des déclarations chez le parti islamiste qu’on ne savait plus qui croire.
Certains évoquaient un rejet formel et d’autres parlaient de discussions et d’éventuels compromis. En ces mêmes moments, la majorité des partis de l’opposition exprimait son soutien à l’initiative de M. Jebali. Les rôles étaient inversés.

Entre les deux, le chef du gouvernement n’a pas dérogé à la réputation et l’image qu’on donnait de lui comme étant un homme hésitant et manquant de fermeté. Pourtant, nombreux étaient les conseillers et les juristes chevronnés qui l’exhortaient de procéder au remaniement parce qu’il pouvait légalement le faire et que, de ce fait, il mettait ses détracteurs devant leurs responsabilités historiques.
En effet, en composant le gouvernement qu’il avait promis en cette soirée du 6 février, il mettait Ennahdha devant un dilemme : soit il acceptait le fait accompli et M. Jebali aurait été, effectivement, le sauveur du pays ; soit Ennahdha déposait une motion de censure pour faire chuter le gouvernement et, dans ce cas, ce parti aurait été, aux yeux de l’opinion publique nationale et internationale, comme étant le parti qui, par son esprit hégémonique, voulait faire semer la discorde et faire tomber la Tunisie dans le chaos.
Or, Hamadi Jebali n’est pas allé jusqu’au bout et le résultat était prévisible depuis plusieurs jours, à savoir le blocage et la démission. Et c’est ce qui est arrivé ce soir.

Pour être pratique, il est utile de faire des projections sur l’avenir. Maintenant, le pays se trouve, officiellement sans gouvernement. Deux options sont possibles, selon les observateurs. La première consiste en la reconduction de M. Jebali pour former une nouvelle équipe gouvernementale avec les conditions qu’il a posées, à savoir une majorité de compétences et un nombre réduit de politiciens, le tout avec un agenda clair pour le reste de l’étape transitoire à venir.
Mais cette hypothèse a peu de chances d’aboutir dans le sens où elle aurait été possible sans tout ce branle-bas ayant abouti à la démission du gouvernement de la Troïka. A moins que d’autres partis de l’opposition, dont éventuellement Al Joumhouri et l’Alliance démocratique, acceptent de se joindre à la coalition, ce qui pourrait amener Ennahdha à faire des concessions sur les portefeuilles de souveraineté.
Mais là aussi, cette probabilité est difficile à concrétiser puisqu’elle était plausible auparavant n’eût été l’intransigeance du parti islamiste concernant le département de l’Intérieur. Une exigence qui reste, plus que jamais, de mise jusqu’à aujourd’hui.

La seconde alternative, qui semble aller avec la logique d’Ennahdha, consiste en la nomination d’un autre candidat, probablement un « faucon », pour former un gouvernement de jusqu’au-boutistes ralliant éventuellement les illuminés du CPR et du mouvement Wafa d’Abderraouf Ayadi et quelques autres opportunistes.
Dans ce cas, aucun parti de l’opposition, rejointe, peut-être, par Ettakatol, ne se rallierait à cette équipe. Mais là, nous préférons ne pas prévoir ce qui pourrait advenir de la Tunisie. Ce serait une porte ouverte à tous les extrémismes et à l’incertitude la plus totale. Car les voix libres et démocrates ne se tairont pas. Et la communauté internationale qui, n’en déplaise à Ennahdha, suit de près la situation dans notre pays, aura son mot à dire et pourrait influencer le cours des événements dans la mesure où toute notre économie est dépendante, à plus de 80%, de nos relations, nos rapports et nos échanges socio-politico-économiques avec cette communauté.

C’est dire que les perspectives se présentent, plutôt, sous de mauvais auspices, dans le sens où la Tunisie se trouve à la croisée des chemins et que par leur refus de l’initiative de M. Jebali, Ennahdha et le CPR ont, déjà, placé le pays sur la mauvaise pente qu’il faudra savoir remonter au plus vite.

Hormis ces hypothèses et perspectives d’avenir, il y a lieu d’évoquer ce que susurrent certains, parmi les amateurs des théories de complot, que tout ce branle-bas entamé le 6 février avait pour objectifs, entre autres, l’apaisement du climat socio-sécuritaire qui était au bord de l’explosion suite à l’assassinat de Chokri Belaïd. Mais, franchement, nous préférons ne pas y penser, car ce serait une approche excessivement grave, pour ne pas dire diabolique et machiavélique.

Finalement, l’imbroglio est tellement enchevêtré que le plus fortiche des analystes ne peut prétendre avoir la faculté de le démêler en parfaite connaissance de cause. Mais un constat s’impose.
Depuis le scrutin du 23 octobre 2011, nous n’avons pas avancé. Pire encore, nous avons réussi le tour de force d’avoir av avancé, mais à reculons ! Sans oublier la situation sécuritaire encore trop difficile, comme l’a attesté le chef d’état major de l’Armée nationale en personne, la situation économique préoccupante comme l’atteste la toute récente note à la baisse accordée par l’Agence internationale Standard &Poors.
Pourtant, il n’y a que les Jaziri, Abdessalem, Mekki, Zitoun, Laârayedh, Bennani et autres Ben Salem qui voient que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Plus encore, à en croire les chiffres « magiques » de l’Institut national des statistiques, depuis que son directeur a été remplacé par le pouvoir en place, la Tunisie a réalisé des bonds dans tous les domaines.

Mais, les Tunisiens avertis, et ils sont désormais nombreux, savent que les gouvernants actuels sont passés maîtres dans l’art des parlotes, des affirmations gratuites et des contrevérités qu’ils débitent en direct sur les plateaux. Le dernier exemple typique est celui de Slim Ben Hemidane qui a « menti » à propos du général Ammar, un mensonge qui, dans une autre démocratie qui se respecte, aurait entraîné son limogeage, sans coup férir.

Et dire que nous risquons d’avoir ces mêmes personnages au pouvoir pour une période encore indéterminée. Ces mêmes personnages pour conduire le pays et les Tunisiens, notamment à des élections libres, neutres et démocratiques et à avoir une Constitution fiable et viable pour plusieurs générations !...
19/02/2013 | 1
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