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Tribunes
Ennahdha, une épine dans le pied du gouvernement ?
03/05/2012 | 1
min
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Par Ali Gargouri*

Le 23 octobre est passé, le parti d’Ennahdha est sorti gagnant des premières élections démocratiques en Tunisie avec 90 sièges à l’Assemblée constituante. L’annonce de la composition du gouvernement de Hamadi Jebali a pris deux mois et a été proclamée le 23 décembre un mois après la première réunion de l’assemblée constituante.

Ennahdha et à travers son chef Rached Ghannouchi a semé un climat de terreur pendant des semaines en louvoyant sur la Chariâa en tant que source principale de la Constitution tunisienne, jusqu'à la fin du mois de Mars où ils a renoncé à l’inscrire dans la nouvelle Constitution du pays. Pendant ces semaines, l’opposition et la société civile étaient sur le qui-vive. Cette annonce a déclenché le mécontentement des salafistes qui ont manifesté le dimanche 25 mars pour l’adoption de la Chariâa et ont agressé les membres de l’association tunisienne du théâtre qui se trouvaient le même jour sur l’avenue Habib Bourguiba pour fêter la journée mondiale du théâtre, sans que la police n'intervienne pour protéger ces derniers.
Suite à ces confrontations, une interdiction de manifester sur l’avenue Habib Bourguiba a été annoncée par le ministre de l’intérieur Ali Laârayedh, le 29 du même mois. Cette décision a été mal accueillie par les élus de l’opposition ainsi que la société civile et un appel pour casser cette décision a été lancé par le secrétaire général du Parti républicain (Al Joumhouri) et les partis de l’opposition.
Le 9 avril de nombreux affrontements ont été constatés entre la police, des milices suspectées d’être proches du mouvement islamistes et les manifestants pacifistes. Des manifestants et des journalistes ont été victimes de coups et de blessures, dont la correspondante de l’hebdomadaire français Le Point. Cette dernière, agressée et arrêtée un moment par les policiers, a témoigné dans un billet publié sur le site du Point et dans lequel elle précise qu’elle a été libérée après l’intervention d’un militant d’Ennahdha qui l’a reconnue.

Quelques jours après, la décision d’interdire les manifestations sur l’avenue Habib Bourguiba a été annulée et une requête afin de désigner une commission pour enquêter sur les violences, a été soumise par les élus de la majorité et de l’opposition. Cette commission n’a vu le jour que le 3 Mai. Cette dernière aura aussi pour tâche d’enquêter sur les violences subies par le collectif des chômeurs diplômés qui ont manifesté le 7 avril à Tunis.
Depuis la fin de l’année 2011 quelques salafistes ont occupé la faculté de la Manouba pour demander l’autorisation à des étudiantes portant le niqab d’accéder au cours et de pouvoir passer leurs examens. Les cours et les examens ont été perturbés. Le ministre de l’Enseignement Supérieur, Moncef Ben Salem (un des fondateurs du parti Ennahdha), ne se prononce pas (le doyen de cette faculté, M. Khazdaghli étant apparenté de gauche, ceci aurait joué en sa défaveur au cours de cet épisode ubuesque).
Le gouvernement de Jebali surfe inlassablement sur la victimisation, Lotfi Zitoun (ministre-conseiller du premier ministre) a déclaré que le gouvernement était victime d’un complot perpétré par les partis de l’opposition qui veulent sa chute. Cette information a été relayée sur beaucoup de plateaux TV, jusqu'à ce que le porte-parole du gouvernement, Samir Dilou, ainsi que Ameur Laârayedh, ne viennent la démentir.
Le président Marzouki, quant à lui, a prolongé jusqu'à la fin du mois d’Avril l’état d’urgence qui interdit tout rassemblement de plus de 3 personnes sans autorisation.... Pourtant des manifestants et partisans du parti au pouvoir ont campé 52 jours face aux locaux de la télévisions sans être inquiétés par la police, ils ont même bénéficié de visites de soutien de la part des élus d’Ennahdha.
Les médias n’ont jamais été épargnés par les critiques des membres du parti Ennahdha et des ministres nahdhaouis jusqu'à privatiser de vendre la télévision tunisienne.

Le parti au pouvoir accuse encore une fois l’opposition, les associations, la société civile de tenter de mettre des bâtons dans les roues pour que ce gouvernement ne réussisse pas sa mission.
Rappelons que beaucoup de dossiers n’ont jamais été traités par ce gouvernement.
Le dossier des anciens responsables du RCD n’a pas été traité et à notre surprise, beaucoup d’anciens cadres qui ont servi la dictature déchue ont été nommés comme conseillers du Premier ministre Hamadi Jebali.
Les dossiers des martyrs et des blessés de la révolution n’a jamais été traité qu’après des confrontations dans les locaux du ministère des droits de l’Homme et de la justice transitionnelle et la « pilule » donnée par le ministre Samir Dilou a été l’envoi de quelques blessés se soigner au Qatar.
Le dossier des snipers n’a jamais été ouvert, la liste des juges corrompus, la liste noire des journalistes qui ont servi Ben Ali et qui ont profité de sommes d’argent versées par l’ATCE n’a jamais été communiquée, malgré les appels et les demandes du syndicat des journalistes…

Le Premier ministre Hamadi Jebali vient juste de présenter à l’Assemblée constituante le programme de son gouvernement pour l’année 2012, juste 8 mois avant la fin de l’année et à l’approche des vacances d’été. Le gouvernement n’a jamais réussi à discuter avec le principal syndicat tunisien pour instaurer une période de calme et de sérénité pour pouvoir travailler, le dossier des hommes d’affaires interdits de voyage n’a pas été clôturé.
Aussi, Ennahdha et ses ministres n’ont jamais pris une position claire sur les agressions subies par des membres de l’opposition, la société civile par des salafistes ! Ont-t-ils peur d’eux ou pensent-ils les utiliser pour faire régner la peur et la division dans la société tunisienne ?
Le gouvernement n’a jamais voulu avoir un vrai débat avec l’opposition pour trouver des solutions et avancer dans la gestion du pays.
Beaucoup de ministres et de conseillers ont montré leur incompétence et leur amateurisme avec leur sorties médiatiques.
Nous sommes en droit de nous interroger : est-ce que ce gouvernement traîne des pieds pour gagner du temps pour les prochaines élections ? Fait-il la sourde oreille aux revendications les plus élémentaires, à savoir, LE TRAVAIL ? +20% de taux de chômage frappant avant tout les moins de 30 ans, les zones du Sud-Est et Sud-Ouest de la Tunisie !
Que font les "gouvernants" temporaires, oui, temporaires, ne l'oublions pas, sur ce dossier brûlant ? Comment restaurer LA DIGNITE à ce peuple malmené ? Les actions symboliques ne suffisent pas et ne réussiront pas à nous berner.
Peut-on dire alors qu’Ennahdha avec le comportement de ses membres et les ministres issus de ce parti sont en train de mettre des bâtons dans les roues et empêche le gouvernement de travailler ?

*Entrepreneur tunisien basé en France, investi dans des projets sociaux et politiques en tant que citoyen indépendant. Actif sur les réseaux sociaux, notamment twitter sous le pseudonyme @Ooouups (Moi en vrai).
03/05/2012 | 1
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