Tensions à Kasserine:Témoignage d'une jeune chômeuse diplômée
Suite aux troubles ayant éclaté depuis dimanche dernier à Kasserine, après le décès d’un jeune diplômé au chômage, Business News a recueilli le témoignage d’une jeune de la région. Sameh, chômeuse titulaire d’un master en gestion-entrepreneuriat à Kasserine, a bien voulu nous livrer son témoignage. Nous le reproduisons tel quel :
« Je suis chômeuse diplômée de la Cité Ezzouhour à Kasserine et je fais partie des jeunes sit-inneurs depuis près d’un an, sachant que plusieurs noms se trouvaient sur une liste d’attente dont feu Ridha Yahiaoui et moi-même. Or, à notre grande surprise, bon nombre de ces noms ont disparu de cette liste suite à la visite dans la région d’un émissaire de Kamel Hamzaoui, député du bloc de Nidaa Tounes à l’Assemblée des représentants du peuple.
En effet, les noms disparus ont été remplacés par d’autres connus comme étant des parents ou des proches du même Kamel Hamzaoui et de l’autre député d’Ennahdha, Walid Bennani, ce qui a déclenché la colère des sit-inneurs et la réaction du jeune Ridha Yahiaoui, connu pour son sérieux et sa morale exemplaire.
Le défunt a eu la malchance de se trouver sur le poteau électrique par une journée pluvieuse et humide, ce qui a entraîné son électrocution et son décès. Il n’en fallait pas plus pour faire déclencher les protestations des autres demandeurs d’emploi.
Je fais partie de ces manifestants contestataires et je témoigne des grandes violences constatées. On ne comprend pas comment nos protestations pacifiques se sont transformées en actes d’agressions caractérisées. On est entré, alors, dans un cercle vicieux de violences et contre-violences.
Les forces de sécurité ont fait usage massif de gaz lacrymogènes et, épisodiquement, de tirs de chevrotine alors que les manifestants lançaient des pierres et des cocktails Molotov tout en faisant brûler des pneus. Je dois avouer que plusieurs individus, qui n’ont rien à voir avec notre groupe de chômeurs diplômés, ont fait leur intrusion sur la scène donnant une nouvelle tournure à notre action et lui conférant, plutôt, un caractère trop agressif.
D’ailleurs, je tiens à dire que près de 200 jeunes garçons vont passer cette nuit au siège du gouvernorat, alors que les jeunes filles ont dû rentrer chez elles… ».
On notera qu’au moment même de recueillir le témoignage de la jeune Sameh, par téléphone, après 20 heures de ce soir, on entendait clairement les tirs de gaz lacrymogène ainsi que des voix de jeunes lui réclamant de l’eau, de la nourriture et de l’aide, sachant qu’elle se trouvait chez elle.
Sarra HLAOUI