Le sport, c’est aussi et surtout une affaire de politique. Cette assertion est communément admise et souvent vérifiée. La défaite du Club africain face à l’Espérance Sportive de Tunis en finale de la coupe de Tunisie de football n’est pas que la défaite d’une équipe sportive contre une autre, ni une ligne supplémentaire dans la longue histoire des derbys. Elle est surtout la défaite personnelle de Slim Riahi qui a connu, en cinq ans, en politique comme en sport, une ascension atypique et fulgurante pour connaitre en une semaine seulement un crash assourdissant. En politique, en sport, comme dans toutes les autres sphères du spectacle de la vie, le jeu de paillettes peut éblouir un temps, jamais pour longtemps.
Venu de nulle part avec une richesse présumée dont on ne connait ni l’importance, ni l’origine, Slim Riahi est une pure, certains diront la pire, émanation de la révolution tunisienne. Une chose est sûre, c’est que l’homme avait un objectif clair : être l’un des barons du paysage politique. Pour cela, il s’est entouré d’une bande de mercenaires chichement payés qui lui ont balisé le chemin du sport et de la politique. Certains de ces mercenaires ont vite déguerpi une fois leurs missions accomplies et leurs rémunérations encaissées. D’autres continuent de le servir espérant décrocher un jour le gros lot.
Seulement, Slim Riahi a un handicap de taille : il n’a pas la culture spécifique qui pourrait faire de lui un chef politique ou un dirigeant sportif. Il n’a pas l’aura, le charisme nécessaire, ni la facilité du verbe et le contact naturel pour aborder les gens, les convaincre et les faire rêver. Il ne maitrise ni les concepts, ni les techniques qui feraient de lui un leader, et malgré ses moyens financiers, il ne dispose tout simplement pas des moyens de ses ambitions.
En plus, en sport comme en politique, Slim Riahi est un personnage instable. Au sein du Club Africain, ses décisions contradictoires ont été une source de perturbation pour le club et ses annonces de démission à répétition ont fini par lasser. En politique aussi, ses tergiversations lui ont ôté tout crédit auprès des autres partenaires politiques au point de se retrouver aujourd’hui le principal perdant du gouvernement d’union nationale. Il faut dire que trainer le pied, claquer la porte et opter systématiquement pour le chantage politique et le bras de fer avec ses partenaires, lui a bien réussi au moment de la constitution du gouvernement Habib Essid, contribuant sans le vouloir, à la fragilisation jusqu’à l’échec de ce gouvernement. Face à Youssef Chahed, cette tactique n’a pas marché parce que tout simplement, le contexte politique a changé. Pour ne pas avoir pu s’apercevoir de ces changements, Slim Riahi s’est retrouvé malmené, écarté et obligé d’apporter son soutien à celui qui l’a écrasé à plate couture pour ne pas se désintégrer.
En sport comme en politique, Slim Riahi s’est accaparé les décisions, souvent intempestives, créant les malaises les plus profonds et les crises à peine voilées. Au sein du Club Africain, cette crise couvait depuis des mois. La défaite en finale de la coupe n’en est que la manifestation. En politique, la crise au sein de son parti est ouverte depuis longtemps. Les démissions périodiques de ses cadres et de ses députés auxquelles, il répond systématiquement par le déni et le dénigrement, l’isolent de plus en plus.
Mais si sur le plan sportif, l’avenir de l’homme ne peut en aucun cas être lié au sort de l’équipe, le Club Africain, fort de son histoire et de sa popularité est toujours capable de rebondir et retrouver sa place parmi les équipes phares du sport tunisien, sur le plan politique par contre, il serait difficile de parier sur la longévité de Slim Riahi ou de sa formation politique. Le pronostic le plus réaliste serait de le voir connaitre le même sort que Hechemi Hamdi et sa formation Al Mahabba.


Commentaires (27)
CommenterEurêka ! un de moins
@Conquérant
Voilà un poème qui va plaire à notre ami A4 :
Les conquérants
Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal,
Fatigués de porter leurs misères hautaines,
De Palos de Moguer, routiers et capitaines
Partaient, ivres d'un rêve héroïque et brutal.
Ils allaient conquérir le fabuleux métal
Que Cipango mûrit dans ses mines lointaines,
Et les vents alizés inclinaient leurs antennes
Aux bords mystérieux du monde Occidental.
Chaque soir, espérant des lendemains épiques,
L'azur phosphorescent de la mer des Tropiques
Enchantait leur sommeil d'un mirage doré ;
Ou penchés à l'avant des blanches caravelles,
Ils regardaient monter en un ciel ignoré
Du fond de l'Océan des étoiles nouvelles.
@CONQUERANT
Belle inspiration ! C'est toujours un plaisir de vous lire . . .
Merci
désolé, analyse populiste
@Kaméléon
Bonjour,
"Rien à voir Slim Riahi et Hachemi Hamdi avec les deux politiciens chevronnés, Hamma Hammami et Marzouki, ce n'est pas le même parcours ni la même culture politiques" (Sic!)
Mon idée n'était pas de comparer entre les différentes personnalités citées, mais plutôt de dire qu'ils ont tous utilisé la même démarche, celle qui consiste à vouloir séduire par tous les moyens, ce qui leur a réussi dans un premier temps, tant qu'on les a pas vu à l'action, mais en fin de compte, ils ont tous échoué dans l'exercice de leurs fonctions politiques et ont été jugés sur la base de leurs échecs, indépendamment de leurs indépendamment de leurs parcours et de leurs culture politique. . .
PAROLE D'ESPERANTISTE A ZARBIA !!!!!!!!
Le pouvoir de l'argent
A LA RECHERCHE DE LA BOITE NOIRE !
Une bonne chronique , qui synthétise très bien le profil de ce (par)venu en politique qu'est Mr Riahi !
" Venu de nulle part avec une richesse présumée dont on ne connait ni l'importance, ni l'origine...." ! dites-vous . Mais comment , dans une démocratie qui se respecte , cela peut-il être possible ?
Que font les limiers du fisc ou de la BCE ?
Comment un homme " politique " peut-il , au vu et au su de tout le monde , continuer à maintenir le flou et le secret , sur son patrimoine financier ?
Même pour un narco , on sait d'où vient son argent !
Dans la plupart des pays du monde , le public sait , chaque année , quel est le montant de la richesse d'un Gates , d'un Buffet , d'un Carlos Slim ,d'une Bettencourt , d'une Elizabeth II, ou d'un Bin Talal ,etc...
Il n'ont rien à cacher , tout est public , car obtenu d'une manière transparente et vérifiable !
Sauf en Tunisie , où nos services fiscaux sont d'une pudeur de violette vis-à-vis de ce monsieur !
Qu'ils s'adressent donc à " Tracfin International " , si leurs moyens sont limité , et ils seront vite éclairé sur la provenance et le montant réel de cet " ex-résistant politique " , qui aime jouer au foot , et qui se joue... de tout le monde !
Article magnifique
C'est simple, quand j'apprécie un article, je le lis et le relis, afin de savourer la justesse de ses propos.
Cet article est si savoureux que je l'ai copié et gardé dans mon ordi.
Merci à son auteur.