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Monoprix - La grande distribution face à une conjoncture difficile
13/05/2022 | 17:47
11 min
Monoprix - La grande distribution face à une conjoncture difficile


Contrairement à ce que les Tunisiens perçoivent, la crise économique a fini par rattraper le secteur de la grande distribution. La baisse du pouvoir d’achat avec une inflation importante qui perdure et le développement du commerce parallèle, le tout accouplé à une concurrence de plus en plus rude en plus d’une conjoncture économique difficile ont fortement impacté ce secteur. Chose ressentie dans les chiffres communiqués par les deux enseignes de la grande distribution cotées en bourse. Malgré cette situation, la SNMVT Monoprix poursuit son programme de transformation, l’objectif étant de renouer avec le bénéfice au plus vite.

 

C’est globalement ce qui ressort de l’assemblée générale ordinaire pour l’exercice 2021 qui s’est tenue jeudi 12 mai 2022 à l’Institut arabe des chefs d’entreprise, sous l’égide du président du conseil d’administration, Nabil Chettaoui, et du directeur général, Seifeddine Ben Jemia.

 

 

En effet, 2021 a été marquée par un environnement macroéconomique difficile, avec une reprise modeste de la croissance, des niveaux élevés de l’inflation, un taux de chômage élevé, une classe moyenne largement touchée par la crise, une économie informelle en progression avec une prolifération des étals anarchiques et une concurrence rude et agressive. Le tout avec des périodes de confinement et de couvre-feux qui ont engendré une baisse de la consommation et un marasme économique général.

Concrètement et selon les chiffres communiqués par Monoprix (le rapport d’activités de Magasin Général de 2021 n’étant pas encore publié), la chaine estime qu’elle a perdu durant le mois de janvier 2021, et à la suite du premier confinement général de quatre jours, 1,4 millions de dinars (MD) de chiffre d’affaires par rapport à 2020 essentiellement par l’interruption des ventes de produits alcoolisés dans plusieurs magasins. Elle estime sa perte en chiffre d’affaires à 4MD lors du deuxième confinement qui a été décrété fin juin jusqu’à mi-juillet dans les régions à forte contamination.

 

La société a essayé de limiter les dégâts en avançant dans son plan stratégique. Elle a ainsi poursuivi son diagnostic de rentabilité de ses magasins et décidé la fermeture de Monoprix Sakaiet El Daier le 24 septembre 2021 pour défaut de rentabilité. De l’autre côté, elle a poursuivi sa politique d’extension avec l’ouverture d’un nouveau magasin à Ain Zaghouan Nord en juillet 2021, qui représente un succès commercial grâce à une innovation : une collaboration avec Décathlon. L’enseigne a aussi rénové huit magasins en 2021 : Kram, Gammarth, Djerba, Mhamdia, Marsa, Korba, Zéphyr et Jendouba.

En parallèle, Monoprix a notamment réalisé une baisse étudiée des prix, renforcé sa stratégie promotionnelle, réduit les ruptures de marchandises dans les magasins, poursuivi son programme de développement des rayons frais et de réduction des coûts, optimisé les effectifs du siège et des magasins. Elle a aussi renforcé les conditions d’assurance de ses magasins et dépôts, surtout après le pillage du magasin de Korba en 2021.

Le Lancement d’un programme d’amélioration de la performance énergétique a permis de couvrir fin 2021, 25% du réseau.

Le tout a permis d’enregistrer des résultats encourageants du programme de transformation et de développement sur les produits frais, l’efficacité de la logistique, la mise à jour des assortiments et l’automatisation des tâches manuelles en back office.

 

 

 

Grâce à quoi, la SNMVT Monoprix a clôturé 2021 avec un résultat déficitaire de 0,43 millions de dinars (MD) mais en amélioration de 0,21 MD par rapport à un an auparavant et cela malgré un impôt de 1,34 MD. Le résultat d’exploitation est passé de 2,91 MD fin 2020 à 1,09 MD fin 2021 (en baisse de 1,81 MD), malgré une baisse des charges financières de 0,75 MD.

La marge nette a été en régression de -0.2 point par rapport à 2020 à cause de l’effet du mix des ventes. Pour leur part, les charges d’exploitation étaient en hausse de 0,5% par rapport à 2020 compte tenu d’une augmentation des charges de personnel de 1,4%, une augmentation des dotations aux amortissements de 4,1%, une augmentation des provisions sur des risques d’exploitation mais aussi d’une baisse des achats stockés d’approvisionnement de -3,8% suite à l’optimisation du consommable dans les magasins et une baisse des diverses autres charges de -3,5% matérialisée principalement par une optimisation des charges d’entretien et réparation technique et des charges de déplacement du personnel liées aux mesures de restriction sanitaire.

Le chiffre d’affaires TTC est passé de 649,18 MD fin 2020 à 641,7 fin 2021 en régression de 1,15% alors que le chiffre d’affaires net hors taxes est passé de 624,14 MD fin 2020 à 618,32 MD fin 2021, en régression de 0,93%.

 

Pour le groupe, le résultat net de l’ensemble consolidé passe de -8,54 MD en 2020 à -1,08 MD en 2021. Le déficit a significativement baissé grâce à une belle opération de vente immobilière du pôle immobilier du groupe, a indiqué le management. Le DG a spécifié que les filiales sont en train de s’améliorer et qu’in fine cela va permettre à la société mère d’engranger les gains les années prochaines, se soldant pas une distribution de dividende

 

Prenant la parole, l’actionnaire Abdel Aziz Ben Youssef a tenu à remercier le management pour la rigueur et le respect des règles sanitaires du staff Monoprix lors de la pandémie. Il s’est interrogé aussi sur la stagnation de la marge de la société et si la société ne réalisait pas de plus-values sur les stocks. En outre, il a demandé les raisons de la fermeture des magasins le soir, pendant le mois du ramadan.

Abdessatar Ben Brahim a fait remarquer que la chaine ne faisait pas assez de promotion et que ses prix sont beaucoup plus chers que la concurrence.

Moncef Ouaghlani s’est demandé pourquoi faire une provision sur les clients alors que l’enseigne est supposée être payée au comptant. Il a posé une question sur la livraison à domicile.

Mustapha Chouaïb s’est interrogé sur le représentant des petits-porteurs au sein du conseil. Il s’est aussi interrogé sur le membre du conseil Elyes Jouini, son apport et les raisons de son absence lors de cette assemblée. Et de marteler qu’il faut trouver une solution pour baisser l’impôt.

 

 

En réponse à diverses interrogations des actionnaires, Nabil Chettaoui a remercié les actionnaires pour leur amour de l’enseigne, en assurant que la direction tiendra compte de leurs remarques.

En ce qui concerne les remarques sur la cherté de Monoprix par rapport à la concurrence, le président du conseil d’administration a souligné : «Les critiques faites sur la cherté de Monoprix, c’est une perception. Nous avons des études : on est aussi bon que l’ensemble de nos concurrents. D’ailleurs, il y a mille produits tous les jours en promotion chez nous. C’est un travail de tous les jours. La perception prix est erronée par rapport aux études exhaustives qu’on a, et qui cartographient nos prix et ceux de la concurrence. Et nous sommes aussi bons, sinon meilleurs sur plusieurs produits. Si on arrive à faire, mieux qu’en termes de croissance de chiffres d’affaires, c’est à cause de notre politique de prix qui a été initiée depuis quelques mois »

Pour sa part, Seifeddine Ben Jemia a soutenu que dans les prix, il y a deux volets : le permanent et les promotions.

« Pour les promotions, on a une position de leadership en Tunisie : toutes les études ont montré que Monoprix est dans le top of mind des Tunisiens. Les promotions concernent les produits dont les dates limites de consommation sont proches. On a même des promotions anti-gaspillages. Pour les permanent, on travaille avec data science, car nos assortiments contiennent plus 18.000 produits », a-t-il expliqué.

Et d’affirmer : « Nous sommes très avancé sur les questions de tarification ».

 

M. Chettaoui a promis à Mustapha Chouaïb qu’avant la prochaine AGO, les actionnaires minoritaires seront représentés au conseil, en spécifiant que la procédure est en cours. Concernant Elyes Jouini, il a indiqué qu’il s’agit d’une sommité internationale et qu’il apporte une grande valeur ajoutée à la société. Quant à sa présence à l’AGO, le président du conseil a expliqué qu’il n’y avait pas de raison.

S’agissant de la provision sur client, le directeur contrôle de gestion, responsable de la communication financière, Mohamed Youssfi a expliqué que les fournisseurs participent au budget marketing de leurs produits et que la provision concerne cette activité, les fournisseurs devenant des clients.

En ce qui concerne l’impôt, il a indiqué que la société paye déjà le minimum d’impôt soit 0,2% du chiffre d’affaires.

 

Sur le volet des plus-values sur les stocks, le président du conseil a indiqué que l’enseigne ne fait pas de stock sur les produits à forte rotation, notamment alimentaire. D’ailleurs, elle est en rupture de stocks dans certains produits. M. Ben Jemia a précisé que l’enseigne a eu des difficultés à répondre à la récente forte demande sur certains produits de base (sucre, semoule, huile, farine et riz), l’offre étant moins que la demande, et cela bien que les magasins étaient quotidiennement approvisionnés.

Et d’ajouter : « Nous sommes très vigilants face au respect des procédures et des règles de contrôle interne, en ce qui concerne ce sujet. Mais il y avait des ruptures importantes au niveau de l’office du commerce et au niveau de nos fournisseurs de farine, les minotiers étaient largement dépassés par la demande.

Nous sommes dans une approche d’amélioration continue. Nous pilotons de très près ce sujet qui est une priorité. Au-delà des résultats financiers de l’entreprise, c’est notre raison d’être, de garantir l’alimentation des Tunisiens et on y travaille sérieusement ».

« C’est un sujet qui concerne l’ensemble du marché et pas interne à Monoprix. Au contraire l’enseigne en termes d’efficacité opérationnelle a été meilleure que d’autres opérateurs de loin », a-t-il affirmé.

 

 

 

S’agissant des ouvertures de magasins pendant les soirs du mois de ramadan, le management a expliqué que la chaine a cartographié tous ses magasins et connait l’affluence heure par heure ainsi que la rentabilité en se référant sur l’expérience des années passées et sur cette base a décidé d’ouvrir certains points et seulement les derniers dix jours du mois

En ce qui concerne la livraison à domicile, le DG a expliqué que l’enseigne dispose du plus grand assortiment alimentaire en ligne et de onze magasins participant, le tout en faisant bénéficier la clientèle des promotions et des prix disponibles dans les magasins. Et de noter que les clients peuvent être livrés, à la demande, dans les deux heures suivant la commande, pour les zones couvertes par ce service. Pour lui, il s’agit d’une activité d’avenir.

 

En outre, plusieurs actionnaires ont noté la baisse du cours du titre Monoprix et ont réclamé son soutien par l’entreprise. Ils ont aussi réclamé des bons d’achat ou une baisse lors des achats effectués chez l’enseigne comme celle de 10% accordée au personnel.

Et de spécifier que la baisse du cours n’est pas propre à Monoprix, c’est tout le marché qui est à la baisse. Il s’agit d’une conjoncture nationale et pas propre à l’enseigne.

A ces deux demandes, le président de conseil leur a demandé de leur laisser le temps d’étudier les propositions avant de répondre.

Nabil Chettaoui a martelé : « Nous sommes dans un métier difficile, très lié à la conjoncture, dans un environnement international incertain, un environnement national compliqué, avec une concurrence énormissime, avec une prolifération excessive de l’informel : une entreprise qui s’améliore dans cette conjoncture, croyez-moi c’est une prouesse de tous les jours.

On est loin de satisfaire les actionnaires, on l’admet ! Mais, la trajectoire prise par l’entreprise et la trajectoire en cours, ne peut présager que du bon. Nous sommes sur la bonne voie et les chiffres montrent que nous suivons la bonne direction ».

 

 

S’agissant des perspectives 2022, le DG a indiqué que l’année 2022 présente des perspectives de croissance ainsi que des risques dont il faut prendre compte.

Côté positif, suite à la sortie de la pandémie, il y a un retour à une exploitation normale des magasins et de la logistique ainsi qu’une reprise du tourisme outre un retour des Tunisiens résidents à l’étranger, des Libyens et des Algériens. Côté négatif, il y a une inflation sur les prix d’achats des marchandises, des consommables et des investissements. Par ailleurs, l’enseigne appréhende les nouvelles mesures de la Loi de finances 2022 qui inclue un nouveau champ d’application de la TVA qui intègre désormais les produits alcoolisés et l’application d’un timbre de 100 millimes par ticket de caisse. Interrogé par Business News sur l’estimation du manque à gagner relatif à ces deux décisions, le DG n’a pas voulu se prononcer.

Nabil Chettaoui s’est montré optimiste quant à l’avenir, en affirmant que 2022 sera une année fructueuse (« Saba » en dialecte tunisien, ndlr). Seifeddine Ben Jemia a assuré, quant à lui : « On pense qu’il y aura de bons résultats lié à la rénovation des magasins engagés et aux magasins qu’on a fini de rénover sur 2022 (trois qui ont été ouverts avant le mois de ramadan). On va poursuivre la maitrise des coûts notamment en agissant sur la performance énergétique de nos équipements ».

En effet, la SNMVT-Monoprix compte accélérer son programme de transformation et de développement du groupe à travers notamment la rénovation totale de 3 points de vente, le réaménagement partiel de treize autres points de vente et la poursuite du programme d’amélioration de la performance énergétique couvrant quinze magasins.

 

Pendant ces deux dernières années, la grande distribution a été mise à rude épreuve, les chiffres SNMVT-Monoprix étant une preuve à l’appui. L’enseigne poursuit ses efforts pour le développement de son activité et l’amélioration de ses services, tout en maitrisant ses coûts, en espérant qu’en 2022, elle va renouer avec un résultat bénéficiaire.

 

Imen NOUIRA

13/05/2022 | 17:47
11 min
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Commentaires
FETHI EL MEKKI
Previsible !! mais vraiment prévisible !!
a posté le 15-05-2022 à 14:59
Chers messieurs comparez vos prix avec ceux de la concurrence et vous comprendrez !!!! tiens jetez un coup d'?il du cote de la chaine AZIZA !!
Les conclusions sont facile à tirer !!! ce n'est pas sorcier !!
Il y a quelques années j'ai interpellé un de vos big boss lors d'un mariage "mais pourquoi c'est plus cher que chez les autres ? et ce d'une manière aussi flagrante ?"
Comme réponse j'ai eu droit à la bizarrerie suivante " les gens font la queue et continuent à acheter chez nous en dépit des prix affichés ........
Et bien maintenant c'est FINI !!
c'est bien dommage car vos magasins sont très agréables !!!
De plus le manque de personnel aux caisses !!! est inadmissible ( du coté du LAC 1 , de la Marsa et d'El Menzah 1 )
Un EX client très fidèle ( 20 ans) de Monoprix !!!
A bon entendeur !!
Famous Corona
Il fallait s'y attendre !!!
a posté le 14-05-2022 à 23:20
Quoi de plus normal avec des prix souvent supérieurs à leurs concurrents et une très mauvaise qualité des fruits et légumes présentés aux clients, qui n'en croient pas leurs yeux !!!
Agatacriztiz
Il y a distribution et redistribution
a posté le 14-05-2022 à 21:02
La grande distribution est arrivée aux limites du circuit de l'économie de la "rente".
Elle a du mal à se réinventer car, à force de stagner dans le même schéma commercial insipide, avec la distribution de produits standards de sempiternels industriels dénués de toute inventivité et innovation, elle a fini par sombrer dans la monotonie et l'absence de créativité commerciale.
Le futur se trouve dans la "rénovation" et "l'inventivité" des marchés traditionnels classiques, qui grâce au "digital" accessible à tout un chacun, peut contribuer à développer d'une manière exponentielle la "distribution" directe au niveau de chaque quartier.