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Chroniques
Kaïs Saïed explore les confins du populisme
Par Marouen Achouri
01/04/2020 | 15:59
4 min
Kaïs Saïed explore les confins du populisme

 

Les services de la présidence de la République, dont le président, ont jeté, hier 31 mars 2020, les bases d’un nouveau mode de communication, jusque-là inconnu dans le monde.

En deux heures, nous avons eu droit à un discours d’avant-réunion, à un communiqué d’après-réunion et à un communiqué explicatif par rapport à un point évoqué dans le discours.

Il devient limpide que ce pauvre peuple, assailli par le coronavirus, par la peur de ses conséquences économiques et sociales et par la misère, ne trouvera aucun réconfort dans les mots ni dans les gesticulations du président de la République. Sur la forme, les interventions de la présidence sont tout bonnement catastrophiques. La majorité du peuple ne comprend pas ce qu’il veut dire et ne sait pas où il veut en venir. Lui-même donne l’impression de naviguer à vue, au moins en termes de communication, puisque ses services sont obligés de publier des communiqués explicatifs de ses interventions.

A l’heure où une communication claire et pertinente est une nécessité impérieuse, le président de la République bafouille. Il reste convaincu qu’il a la capacité de discourir comme il faudrait en improvisant. Il pense avoir des talents d’orateur, à l’image des grands rois d’autrefois, qui ont sans doute bercé par leurs histoires une grande partie de sa vie. Sauf qu’il n’en est rien, lui et ses équipes sont les seuls qui ne s’en sont pas encore rendu compte.

 

Mais le discours du président de la République ne pêche pas seulement sur la forme. Loin s’en faut. Il pêche aussi par son contenu largement populiste. A ce stade, il parait nécessaire de procéder à une mise au point. Le populisme est un choix politique, et ce n’est pas forcément un terme péjoratif. Kaïs Saïed semble avoir fait ce choix depuis longtemps. Le populisme est une approche politique partagée par plusieurs courants en Tunisie, dont Al Karama. Il s’agit de mettre en opposition le peuple et son élite, et bien sûr de prendre le parti du peuple. Il s’agit d’exacerber des sentiments de peur, d’exclusion ou de colère chez le peuple contre une caste de privilégiés dont on n’hésitera pas à exagérer la mainmise ou la nuisance. Il faut dire au peuple qu’il a en lui toutes les capacités nécessaires pour gouverner, bien mieux que son élite, sans jamais se hasarder à définir ce qu’est le peuple. Au contraire, il faut garder ce mystère et même l’élever au rang de dogme intouchable.

 

Mais il y a lieu de s’interroger : est-ce qu’une telle approche politique reste valable quand on est président d’une République confrontée à la pire crise sanitaire de son Histoire ? Est-ce que le contexte de pandémie mondiale permet d’user de tant de populisme ? C’est l’avenir qui nous le dira mais il est indéniable que cela laisse un goût amer dans la bouche, qu’il y a une impression persistante d’indécence, de quelque chose de déplacé.

On a vu un président se ranger du côté de ce peuple d’opprimés et de malheureux. En soi c’est une bonne chose. Mais Kaïs Saïed s’est rangé de ce côté-là pour mieux attaquer et critiquer le gouvernement dans un règlement de comptes pour le moins inapproprié. Elyes Fakhfakh et son gouvernement sont largement critiquables. Effectivement, il y a eu des erreurs qui ont été commises et l’action gouvernementale est très loin d’être parfaite. Mais est-ce au président de la République d’en faire le constat ? Comment un président qui prône la solidarité peut-il, en même temps, en manquer si cruellement ?

 

Par ces agissements, Kaïs Saïed explore les confins du populisme politique et pourrait même prétendre en devenir l’un des pionniers. Il en profite pour éluder toutes les thématiques qui lui seraient préjudiciables. La première est que c’est lui qui a choisi Elyes Fakhfakh comme étant la personnalité la plus « apte ». Il est donc tout aussi responsable que lui s’il y a des manquements ou si l’action de l’Etat n’est pas au niveau souhaité.

 

Autre question importante, le président de la République a déjà activé, en catimini, l’article 80 de la constitution qui lui donne toute latitude pour prendre les décisions qu’il juge nécessaires. Il a activé cet article dans le cadre de la guerre de prérogatives qu’il s’est échiné à nier, d’ailleurs. Donc, où sont vos décisions monsieur le président ? Montrez-nous la voie puisque le gouvernement se trompe apparemment. Cela lui permet aussi de ne pas évoquer le braconnage qu’il opère sur les aides internationales, dont il s’attribue le mérite. Les aides parvenus de Chine grâce à la générosité de Jack Ma seraient arrivées avec ou sans l’intervention de la présidence de la République.

 

Beaucoup d’internautes et d’observateurs ont dit que Kaïs Saïed était encore en campagne et qu’il continue à tenir le même discours pour tenter de s’attirer la sympathie de ses électeurs. Je ne le crois pas. Kaïs Saïed fait ce qu’il fait et dit ce qu’il dit pour la simple raison qu’il n’a rien d’autre à proposer. Ce n’est pas un choix opéré dans une panoplie de stratégies et d’approches politiques. Il n’y a que ce discours faussement savant et il n’y a que cette approche politique populiste. Tout ce qu’on verra, ce sont des variations dans l’intensité mais le fond restera toujours le même.

Par Marouen Achouri
01/04/2020 | 15:59
4 min
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Commentaires
Faouzi
De quoi on se plaint
a posté le 03-04-2020 à 13:07
Les élites de notre pays sont presque tous parti et il ne reste plus que les pauvres Tunisiens confronté a des bandits qui sont rempli de rancoeurs avec une seule idée en tête:
1. Gouverné les élites et tous ceux qui ont réussi avec leurs travail acharné à tout prix.
2. Se remplir les poches
Bon nombres parmis ceux qui sont instruit déclarent qu'ils ont eu tort après avoir voté pour tel ou tel personne ou parti politique.
Ne vous cassez pas la tête, vous n'avez que ce que vous méritez.
Nous ne vivons pas aux temps des grands de notre grand pays hélas et nous mourons avec le goût amer d'être gouverné par des ignorants
MBJ
Chaab yorid
a posté le 03-04-2020 à 10:53
Il nous rappelle bien le discours de Mammar gaddafi,
Chaab yorid !!!
Nizar
Bravo pour le titre
a posté le 02-04-2020 à 19:12
Il suffit de mettre ce titre pour tout dire
Raouf
Muppets show. .....
a posté le 02-04-2020 à 19:05
A pauvre peuple ( comme vous dites) , pauvre président, lamentable.....
HSE1994
'?a fait un peu trop
a posté le 01-04-2020 à 23:00
Tout le monde est confronté à la corona
Nous nous avons en plus KS
Ca fait un peu trop !
MED
Le déjà lu et vu...
a posté le 01-04-2020 à 22:47
" Ce n'est pas la peine d'être trop intelligent, trop loyal, trop travailleur; appartenez plutôt à une coterie".
Stendhal
A4
A ses pauvres étudiants:
a posté le 01-04-2020 à 22:43
ROBOCOP
Ecrit par A4 - Tunis, le 14 Octobre 2019

Et Robocop parla
Récita sa leçon
Slogans et tralala
Sous forme de chanson

Il nous parla enfin
Tel un disque rayé
Répétant son refrain
A gorge déployée

Il se vanta même
De son programme absent
De ses grands dilemmes
Sur un rythme lassant

Il dit et répéta
Qu'il n'avait pas le sou
Que c'est bien à l'Etat
De se charger de tout

C'est bien l'Etat qui doit
Se mettre à vos pieds
Ne bougez pas le doigt
C'est à lui de casquer

C'est cet Etat maudit
Qui a pour punition
Gérer la tragédie
De cette révolution

L'Etat est mieux soumis
Faible, sans édifice
Victime du tsunami
De tous vos beaux caprices

A vous de rêvasser
De chemins balisés
L'Etat doit se presser
De tout réaliser

Il répéta encore
Des vieilles obsessions
Hurla son désaccord
Sur toutes concessions

C'est beau à entendre
Me dit l'ami Lénine:
"Quand on n'a que vendre
On vend la Palestine ..."
Jaghali
Urgence
a posté le 01-04-2020 à 22:34
Et dire qu'on va supporter tout ce cirque encore pendant longtemps. A quand les prochaines élection?
Faut programmer Nermine Sfar chaque fois qu'il decide de parler.
TunisienLucide
Kaïs Saïed ou l'art de parler pour ne rien dire...
a posté le 01-04-2020 à 20:53
Au vu de la qualité de ses dernières prise de parole, le doute n'est plus permis : the wrong man at the wrong place at the wrong time.
Welles
4 ans encore
a posté le 01-04-2020 à 20:12
M. Achour il faut s'armer de patience. Le meilleur est devant nous.Quelle catastrophe !!
Nazou de la chameliere
M'enfin Mr Achouri
a posté le 01-04-2020 à 19:16
Il ne faut rien attendre de quelqu'un qui n'a pas compris le principe du confinement.
Il n'a même pas compris que la justice est en stand-by !!
Il n'a pas compris la difficulté pour le gouvernement, a restructuré le fonctionnement étatique !!
Il critique son propre gouvernement !!
Il est toujours et il restera un éternel ado !!
Puisqu'en période de crise grave, il déterre une espèce de solution qui date de 2012 ( si jai bien compris) .
Perso : moi pas être déçue. Moi rien attendre d'un Mr sur orbite !!
Moi même pas l'écouter !!
MH
Kais Saeid le Khaddhafi Tunisien
a posté le 01-04-2020 à 17:00
Après tout, un président farfelu existe ailleurs, e. g., Johnson, Bolsonaro, Trump... Le problème est que KS n'est pas de même trempe. J'ai voté pour lui, une belle tromperie.