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Chroniques
Un père fouettard pour la télé
20/09/2010 | 1
min
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Par Nizar BAHLOUL


Enfin ! Il était temps ! Il a fallu que le ministre intervienne et publie un arrêté pour faire cesser le manège de la télé qui n’a que trop duré !
Ce manège n’est pas celui des plates émissions que l’on voit onze mois durant (ramadan excepté), mais celui des pages publicitaires qui durent des dizaines et des dizaines de minutes.
En manque total d’autodiscipline, les télévisions devraient subir maintenant un arrêté pour qu’elles daignent enfin respecter leurs téléspectateurs.
Un arrêté est enfin publié et, désormais, le téléspectateur peut souffler, il ne subira plus de déferlante publicitaire à tout va.
Ce n’est hélas pas une première et ce n’est pas une dernière. Nos chaînes de télévision, et particulièrement les chaînes publiques, ont besoin de père fouettard pour les rappeler à l’ordre et à la déontologie. Parfois d’une manière brutale, via un décret, un arrêté ou une loi. D’autres d’une manière délicate et subtile comme l’a fait le président de la République récemment en recevant Sami Fehri et Moez Ben Gharbia suite à la suspension, brusque, de leur émission hebdomadaire.

Passons le cas des chaînes privées, elles n’ont pas de compte à rendre au public. Que celui qui n’apprécie pas leurs émissions aille voir ailleurs. La télécommande est faite pour ça.
Mais il en est autrement des chaînes publiques qui ont une triple rente : le contribuable via taxes et impôts, les usagers de la Steg via la redevance et la publicité.
Jusqu’à quand ce modèle économique anticoncurrentiel va-t-il subsister ? D’autant plus que la télévision ne nous fournit pas le produit de qualité digne d’un pays qui tient à rejoindre les pays développés.
Non contente de cette triple rente, la télévision tunisienne publique, ou plutôt ses décideurs, sont partis à la recherche d’une autre source de revenus.
C’est légitime, direz-vous ? Pas vraiment, puisqu’une télévision publique n’a pas pour mission de courir derrière le fric. Mais passons.

Après avoir acheté les droits de retransmission des matches de championnat de foot auprès de la FTF, la télévision nationale a décidé de revendre une partie de ces droits.
C’est légitime, c’est une pratique qu’on voit partout et cela est même prévu par le cahier des charges de la FTF puisqu’il est du droit des autres chaînes de diffuser quelques minutes des matchs de foot (et notamment les buts) et d’accéder aux stades.
Sauf que la télévision nationale adore réinventer la route et créer un modèle tunisien à elle toute seule. Ce droit d’accès au stade, la télévision publique veut les revendre au prix d’achat de l’ensemble des droits.
En plus clair : la télévision a acquis pour 5,2 millions de dinars le gâteau des droits de retransmission de l’ensemble des matches du championnat national de la Ligue 1 et des matches de l’Equipe nationale durant toute la saison. A la revente des miettes, la télé réclame … 5,2 millions de dinars aux chaînes privées ! Soit une marge de 1000% ! Les plus cupides des commerçants n’ont pas margé autant ! Sans parler des droits de rediffusion des 90 secondes qui étaient valables, avant, pour chaque match et qui sont, désormais selon le nouveau diktat de la télé, pour l’ensemble de la journée !
Et dire que celui qui exige de telles marges est une entreprise publique payée, déjà, par le contribuable ! Une entreprise publique dont la mission est d’épouser le programme du gouvernement lequel encourage à la création des entreprises, à la création de l’emploi, à la création de la croissance.

Si la télévision s’est permis de tels écarts, c’est qu’elle a eu les mains totalement libres par le nouveau cahier des charges de la FTF.
Il faut, en effet, savoir que la fédération de football a confectionné, il y a deux ans, un cahier des charges professionnel, selon les normes internationales. Ce qu’elle a fait cette année aussi et c’est ce qu’elle a envoyé aux chaînes. Mais on ne sait pas quelle mouche a piqué les responsables de la FTF qui s’est, soudain, rendue compte que le professionnalisme ne lui sied pas. A la dernière minute, elle a remplacé le premier cahier des charges par un second offrant la possibilité à l’adjudicataire (la télé publique dans le cas présent) de se permettre certaines libertés totalement contraires aux règles élémentaires de la concurrence. Et la télé publique s’en est donnée à cœur joie ! Au diable les privés, au diable la concurrence, au diable les téléspectateurs qui aimeraient voir et entendre un autre son de cloche que celui des animateurs de la télé publique !

En résumé. D’un côté, nous avons un programme gouvernemental qui énonce une chose (emploi, encouragement du privé, croissance…) et des fonctionnaires qui pratiquent tout le contraire !
La question est comment remédier à la situation sans bousculer ces fonctionnaires sans qui, hélas, la machine ne peut tourner ?
Viendra-t-il un jour où les responsables de la télévision (et la FTF) comprennent d’eux-mêmes ce qu’ils ont à faire sans qu’ils n’y ait besoin que le président de la République reçoive un producteur et un animateur ou qu’un ministre publie un arrêté pour mettre le holà à une indiscipline et un manque de respect qui n’ont que trop duré ?
Un père fouettard ? Ce n’est pas digne de la Tunisie du XXIème siècle, mais s’il faut en arriver là !...
20/09/2010 | 1
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