alexametrics
vendredi 17 mai 2024
Heure de Tunis : 07:39
A la Une
Quand Al Joumhouri ne sait plus où il en est
30/04/2014 | 1
min
Quand Al Joumhouri ne sait plus où il en est
{legende_image}

Le parti Al Joumhouri revient sur la scène politique à travers les apparitions de ses dirigeants dans les médias, surfant sur la vague de la polémique déclenchée par l’entrée en Tunisie de touristes israéliens venus effectuer le pèlerinage à la synagogue djerbienne de la Ghriba. Par ailleurs, la position d’Al Joumhouri quant à l’adoption de la nouvelle loi électorale a causé des remous au sein de la classe politique, notamment le bloc parlementaire démocratique qui s’y était opposé.  Force est de reconnaitre que les dernières positions du Joumhouri se radicalisent. Le parti fait bande à part et s’isole des forces démocratiques.

 

Connu pour ses innombrables volte faces, Al Joumhouri a été au centre de la polémique entourant la venue de pèlerins israéliens en Tunisie. En effet, cinq députés de la formation politique à l’Assemblée nationale constituante ont signé une pétition pour la motion de censure à l’encontre du ministre délégué chargé de la Sûreté, Ridha Sfar, et la ministre du Tourisme, Amel Karboul. Il s’est avéré que les députés signataires sont Maya Jeribi, Iyad Dahmani ainsi que Ahmed Néjib Chebbi, Kais Mokhtar et Issam Chebbi. Ces figures du parti Al Joumhouri ont de ce fait rejoint les élus du CPR, du mouvement Wafa et du Tayar. Le hic dans l’histoire est que ces élus sont pourtant des habitués des réceptions organisées à l’ambassade américaine et que par conséquent leur prise de position apparait comme de la surenchère politique et rien d’autre. D’autre part, les personnalités d'Al Joumhouri annoncent une rupture dans leur ligne de conduite avec le bloc démocratique dont ils font pourtant partie. D’ailleurs, la présidente du bloc démocratique à l’Assemblée constituante, Salma Baccar, s’est exprimée contre cette motion de censure impliquant les deux ministres du gouvernement Jomâa, expliquant que l'ANC n'a plus de rôle à jouer et devrait céder sa place à l'instance de contrôle de la constitutionnalité des lois.

 Poussant le bouchon un peu plus loin, Issam Chebbi a sommé Mme Karboul et M. Sfar d'avouer leurs erreurs et de présenter des excuses officielles quant à la signature de l’autorisation d’entrée des Israéliens, en soulignant que nul n’était au dessus d'une potentielle audition par l'Assemblée nationale constituante.

 

Pour ce qui est du projet de loi électorale, le parti Al Joumhouri est encore allé à l’encontre des décisions du bloc parlementaire démocratique, en votant pour cette loi. En effet, le bloc parlementaire présidé par Salma Baccar s’est retiré de la séance de négociation de la commission des consensus samedi 26 avril, en raison de conflits relatifs au projet de loi électorale. Le député d’Al Watad, Mongi Rahoui, a indiqué qu’il ne pouvait être témoin d’une loi électorale ne garantissant pas la tenue d’élections libres et transparentes. Il a expliqué que les mêmes règles pour le financement public des campagnes électorales adoptées durant les élections du 23 octobre 2011 seront maintenues aux prochaines élections. Le député de gauche a signalé que le contrôle des financements ne sera pas fiable et que seuls les partis ayant des journaux pourront bénéficier de publicités électorales.  M. Rahoui a par ailleurs dénoncé la position de certains partis politiques qui ont donné leur accord sur la loi électorale. Il a relevé en particulier la position du parti Al Joumhouri, qui a dévié du rang des forces démocratiques, d’après lui. La réaction d’Iyed Dahmani a été virulente considérant que les déclarations de M. Rahoui sont puériles et expriment un manque de maturité politique.

D’après le sondage de l’institut Emrhod qui vient d’être publié, mercredi 30 avril 2014, si les élections avaient lieu demain, Al Joumhouri occuperait la sixième place dans les intentions de vote avec 1,8%. Il est certes vrai, toujours selon le sondage, que le parti gagne 0,2% mais il reste très loin derrière Nidaa Tounes, Ennahdha et le Front populaire. Cela démontre que les prises de positions impopulaires du parti Al Joumhouri, tout au long de son parcours, ont sérieusement entaché sa popularité. Le poids réel de la formation politique est confirmé par les chiffres qui peinent à atteindre des taux confirmant leur forte représentation sur la scène politique. Ahmed Néjib Chebbi caracole dans les sondages parmi les présidentiables. Alors que le score en termes d’intentions de vote d’Al Joumhouri baisse de façon notoire.

 

Revenons un peu en arrière,  plusieurs adhérents du parti ont été obligés de claquer la porte du fait des prises de position chancelantes d'Al Joumhouri . Après le départ de deux groupes, celui d’Afek Tounes, mené par Yassine Brahim et celui de Saïd Aïdi, l’ancien ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle dans le gouvernement Caïd Essebsi, Al Joumhouri a été touché par une importante vague de démissions, mettant à mal les instances du parti : le clan des Chebbi n’était pas réputé pour son attachement aux règles démocratiques, en interne. A la suite de ces départs successifs, la formation politique avait intégré l’Union pour la Tunisie, une stratégie dira-t-on pour fortifier sa position. Mais cette apparente union n'a pas duré.

La rupture avec l’UPT a commencé à se dessiner lorsque le parti de Béji Caïd Essebsi a accepté l’adhésion de plusieurs démissionnaires d’Al Joumhouri. Voulant se rapprocher d’Ennahdha pour contrer Nidaa Tounes et s’assurer une porte de sortie, Al Joumhouri se voit devancé par la rencontre effectuée entre BCE et Ghannouchi. Chebbi s’est mis alors à dénoncer haut et fort une alliance entre le parti islamiste et Nidaa Tounes afin de se partager le pouvoir. Encore une volte face ! La rupture est consommée, Al Joumhouri quitte l’UPT démontrant une prise de position oscillante en matière de politique.

 

Après avoir perdu en cours de route ses adhérents et ses sympathisants de même que ses alliés politiques, Al Joumhouri chercherait à se refaire une virginité et à revenir avec fracas sur la scène politique en suscitant la polémique et en surfant sur la vague de populisme ambiante. Par ses prises de position, le parti a réussi à s'isoler des forces démocratiques du pays et s'est marginalisé alors que la plupart de ses militants réclamaient l'union. Pourtant les premiers à dénoncer les dangers d'un éparpillement des voix comme au 23 octobre 2011, les dirigeants d'Al Joumhouri persistent à faire bande à part, à leurs risques et périls.

 

Ikhlas Latif

30/04/2014 | 1
min
Suivez-nous