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Tunisie – Démissions à Ennahdha : Début de scission à Montplaisir
18/11/2013 | 1
min
Tunisie – Démissions à Ennahdha : Début de scission à Montplaisir
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Toute la classe politique et le commun des citoyens reconnaissent que les principaux points forts du parti islamiste d’Ennahdha résident dans son organisation, sa rigueur et sa discipline. C’est pourquoi l’annonce de sa démission, par Riadh Chaïbi, membre du bureau exécutif et du Conseil de la Choura de ce mouvement, a fait l’effet d’une bombe dans les milieux politiques en Tunisie.


Au parti islamiste et à part la première réaction de Ajmi Lourimi qui a affirmé qu’aucun document officiel dans ce sens n’est parvenu à la direction du parti, il n’y a pas eu de réaction officielle : Ni déclaration d’un dirigeant de taille, ni de communiqué officiel.
Il faut dire qu’au parti d’Ennahdha et à n’importe quel autre parti islamiste à travers le monde, on ne démissionne pas. Ce qui a fait dire à certains observateurs que les partis des Frères musulmans, en général, fonctionnent au mode d’une secte. Une fois dedans, il est difficile voire impossible d’en sortir.

Ainsi, si les autres partis politiques ont enregistré de nombreux mouvements de départs, de ralliements, de création de nouveaux blocs, de nouvelles adhésions, le mouvement d’Ennahdha reste imperturbable. Tout y va pour le meilleur des mondes. C’est à peine si on entend des membres critiquer des collègues. Et encore ! On se ravise aussitôt pour édulcorer les déclarations en question et les présenter dans le cadre de l’argument bateau : « cela illustre que l’esprit démocratique règne au sein du parti »…

Or, cette fois-ci, le départ de Riadh Chaïbi est net et sans équivoque. Certes, il n’a pas voulu donner plus de précisions sur les motifs de sa démission, mais il a tenu à la confirmer à l’agence de presse officielle de la TAP après en avoir fait part sur sa page Facebook tout en la faisant accompagner d’une tribune publiée sur le site d’Al Jazeera (décidément !) où il critique ouvertement la mollesse de l’attitude de la troïka, donc forcément d’Ennahdha, qui a daigné accepter le « diktat » de l’opposition et s’asseoir à la même table du dialogue national. Un dialogue qui consacre, selon ses propres termes, l’esprit putschiste contre la légitimité
Dans cet article, Riadh Chaïbi a, également, dénoncé l’attitude de soumission de la Troïka au pouvoir, estimant que «ses positions et son discours prêtent à équivoque».

Cette démission constitue donc une première dans les annales d’Ennahdha. D’abord de par le «gabarit» de ce dirigeant qui constitue un des piliers du mouvement islamiste et de par son standing intellectuel et des fonctions qu’il occupe.
En effet, Riadh Chaïbi est titulaire d’un master en philosophie politique. Membre fondateur du Centre pour les études et prévisions de Tunis, il est aussi membre du Conseil d’administration du Centre «Méditerranée pour les Études et les médias ». Marié et père de deux enfants, il a été prisonnier politique pendant cinq ans sous le régime de Ben Ali
Membre du bureau exécutif et du Conseil de la Choura du mouvement Ennahdha, M. Chaïbi avait présidé, en 2012 le Comité d’organisation du 9ème congrès d’Ennahdha.

Ainsi, dans un parti où le linge sale se lave, toujours en famille et dans la discrétion la plus absolue et où il n’y a pas de place à la critique en public entre ses membres, voilà qu’un « poids lourd » qui ose enfreindre ces lois et traditions en mettant son parti devant le fait accompli de son départ !
S’agit-il d’un précédent qui pourrait être suivi d’autres ? Difficile à dire en attendant les réactions officielles au sein du parti islamiste qui avait connu, d’autres tentatives de départs.

On mentionnera, bien entendu, les multiples déclarations fracassantes d’Abdelfattah Mourou qui a toujours gardé, en sa qualité de dirigeant fondateur et historique du mouvement, une certaine indépendance et une forte personnalité pour exprimer ses opinions et divergences avec son compagnon cheikh Rached.
Mais Ennahdha a toujours permis à son enfant terrible Abdelfattah Mourou cette liberté de manœuvre en assurant qu’il lui reviendra toujours et que tel un poisson qui ne peut se passer de l’eau, il ne pourra jamais avoir un avenir politique en dehors d’Ennahdha.

On signalera, aussi, la tentative de Fattoum Attia qui avait annoncé sa démission à travers les réseaux sociaux avant de la confirmer dans un entretien, publié dans l'hebdomadaire arabophone ''Akher Khabar''. Cette démission était présentée comme étant la première à Ennahdha, parti au pouvoir, depuis les élections du 23 octobre 2011.
Dans cette longue interview, Fattoum Attia s’était expliquée sur les causes de son départ, à savoir la rupture de confiance et son refus de continuer à induire en erreur les gens qui ont cru en elle et l'ont élue pour les représenter à l'Assemblée nationale constituante (ANC).
Parmi les autres raisons qui l'ont poussée à rendre le tablier, elle soulignait : «Ennahdha ne veut pas combattre la corruption et il doit se retirer et dégager. Le parti semble avoir des ambitions autres que la réalisation des attentes du peuple… ».
Mais c’était compter sans le rouleau compresseur du parti islamiste qui, à coups de communiqués et de déclarations intimidantes, a fini par avoir raison des velléités de son élue.

On parlera, bien évidemment, du coup d’éclat d’Abou Yaâreb Marzouki qui, tout en claquant la porte au nez d’Ennahdha qui l’avait parrainé et fait élire sur l’une de ses listes, avait écrit sur sa page Facebook officielle « qu'Ennahdha a un projet islamiste et qu'il ne fait que multiplier les discours religieux, croyant que le pouvoir est un butin de guerre, en distribuant les responsabilités sur les amis, les alliés et autres proches, sans compétence aucune et ne pensant jamais à placer l'homme qu'il faut là où il faut». L’incident était vite circonscrit et entouré du black-out.

Certains citeront, également, une autre démission, celle d’Amanallah El Jaouhari, un jeune présenté comme membre du Conseil de la Choura. Mais jusqu’à ce jour, on n’en sait pas grand-chose sur cette information qui reste à vérifier sans oublier qu’il ne s’agit pas de personnalité marquante ou influente au sein du parti.

En tout état de cause, la démission de M. Chaïbi constitue une véritable alerte, voire une sérieuse secousse au sein d’Ennahdha qui semble déstabilisé par les derniers événements dans le sens où des divergences sont apparues quant à la participation au dialogue national. Mais encore, l’acte de Riadh Chaïbi est-il isolé ou annonciateur d’autres gestes similaires ?
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