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Tunisie – Algérie : Quand Bouteflika joue les entremetteurs
17/09/2013 | 1
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Tunisie – Algérie : Quand Bouteflika joue les entremetteurs
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Le premier ministre algérien, Abdelmalek Sallel, visitera la Tunisie dans les semaines à venir. Une visite chargée de sens à l’heure où les entrevues se multiplient entre Alger et Tunis. Face à la tournure prise par les affaires politiques, mais aussi sécuritaires, internes de la Tunisie, les rencontres Bouteflika-Ghannouchi et Bouteflika-Caïd Essebsi demeurent porteuses d'un message.
Discret depuis le 14 janvier 2011, le voisin algérien n’a pu rester de marbre et devait jouer son important rôle géopolitique. Alors que l’Algérie dément une éventuelle « médiation », le pays a tout intérêt à ce que la crise en Tunisie soit dépassée, afin de conserver son statut dans la région et protéger ses frontières d’une menace terroriste imminente.


Le premier responsable politique accueilli par Abdelaziz Bouteflika, après trois mois d’absence lors desquels il était hospitalisé à Paris, était Rached Ghannouchi, leader d’Ennahdha, un parti fort et second du pays d'après les sondages. Un jour après, c’est son rival, président de Nidaa Tounès, Béji Caïd Essebsi, qui s’entretient avec le président algérien. « L’Algérie est l’Etat le plus important pour nous », avait déclaré Rached Ghannouchi lors d’une interview accordée à Nessma Tv. Béji Caïd Essebsi précisera de son côté que « la sécurité de la Tunisie est une partie de celle de l’Algérie et que la sécurité de l’Algérie est une partie de celle de la Tunisie ».

En effet, la situation sécuritaire plus que jamais délicate de la Tunisie actuellement, à cause des attentats survenus au mont Chaâmbi, sur les frontières algériennes, suscite une grande inquiétude chez le voisin algérien. Plusieurs accords de coopération sécuritaire et économique ont été réactivés avec la Tunisie. A l’heure actuelle, régler la crise politique, avec ses retombées sur le volet sécuritaire, devient une urgence, non seulement pour la Tunisie, mais aussi pour l’Algérie qui se trouve directement impliquée. La position, autrefois discrète de l’Algérie qui a préféré ne pas commenter les évolutions politiques en Tunisie, ne pouvait, aujourd’hui, perdurer face à la menace du terrorisme jihadiste qui secoue les frontières entre les deux pays.

L’Algérie ne pouvait rester indifférente aux tournures prises par les affaires politiques tunisiennes et a tout intérêt, aujourd’hui, à ce que la crise politique soit enterrée afin que son statut de « grand voisin » ne soit pas compromis par l’intervention des pays du Golfe. Le vide, très mauvais pour les affaires, permettra également au terrorisme de fleurir, comme c’est le cas en Libye.
Du côté algérien, on dément une éventuelle « médiation » affirmant que ce serait à la demande des deux hommes politiques tunisiens que ces entretiens ont été planifiés. L’ambassadeur d’Algérie en Tunisie précise, dans une interview accordée au journal local « Al Khabar », que « la solution à la crise tunisienne viendra de l’intérieur et non de l’extérieur ». Selon ses dires, aucune feuille de route n’a été proposée par l’Algérie pour la période à venir, mais de simples conseils ont été émis, comme celui de ne pas dissoudre l’Assemblée nationale. La presse algérienne est unanime : Ghannouchi et Caïd Essebsi se seraient rendus à Alger, afin de solliciter l’aide et le soutien de Bouteflika dans la poursuite du processus démocratique, mais pour l’informer, également, de l’accord conclu lors de l’entrevue secrète de Paris, le 15 août dernier. La Tunisie quémanderait-elle du soutien à son voisin de l’ouest ? L’histoire semble se répéter si on rappelle la dernière rencontre tenue entre Habib Bourguiba et Chedly Benjedid. L’ancien président tunisien avait alors déclaré à son homologue de l’époque que « la Tunisie est sous ta responsabilité ».

Aujourd’hui, à l’heure où la crise politique est plus que jamais attisée, force est de reconnaître que les décisions de la Tunisie sont importantes pour le voisin algérien. Si rien n’a encore filtré sur l’objet de ces entrevues, elles semblent, incontestablement, faire passer le message d’un Bouteflika jouant les entremetteurs, en vue d’un rapprochement entre les deux partis en perpétuel conflit. S’agirait-il de simples visites de courtoisie comme l’affirment les deux leaders politiques tunisiens avec cet « ami de longue date » ? En Tunisie, les politiques espèrent que Bouteflika puisse être le garant d’un accord, face à la crise de confiance entre pouvoir et opposition. Les entrevues de Bouteflika avec Ghannouchi et Caïd Essebsi sont porteuses d’espoir quant à une proche réconciliation due à la médiation algérienne. En revanche, ceux qui se sont vus écarter de la solution n’hésitent pas à tirer sur ces rencontres qualifiées d’ « ingérence de l’Algérie dans les affaires tunisiennes ». Tel est le cas, notamment, du leader du Front Populaire, Hamma Hammami, qui n’hésitera pas à dire que : « Nous croyons que la Tunisie n’avait pas besoin d’intervention d’aucun État, bien que l’Algérie soit un pays frère et ami, il aurait fallu qu’Ennahdha cherche des solutions à l’intérieur du pays et non pas à l’extérieur ».

Liée à la Tunisie par des coopérations économiques, sécuritaires et politiques, l’Algérie a tout intérêt à ce que le calme règne de nouveau chez nous, afin de ne pas voir ses affaires compromises, rebutée par la vision d’un nouveau scénario à l’algérienne qui se faufile à l’horizon. Mais à l’heure où la hache de guerre ne semble pas encore être enterrée entre les rivaux politiques, ces intermédiations désamorceront-elles la crise et dirigeront-elles le pays vers la sortie ?

Synda TAJINE
17/09/2013 | 1
min
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