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L’INS décortique la situation des entreprises après le confinement
27/07/2020 | 19:59
5 min
L’INS décortique la situation des entreprises après le confinement

 

Le passage de l’épidémie du Covid-19 n’a-t-il eu que des effets négatifs ? La question semble saugrenue tant la réponse est évidente. Pourtant, cet épisode a permis de focaliser toutes les attentions sur l’entreprise. Au moins celle de l’opinion publique à défaut d’avoir attiré celle de nos honorables représentants à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) plus prompts à réagir sur des futilités que de se préoccuper de la situation de cette cellule fondamentale de création de richesse.

 

A cet égard, il n’est qu’à chercher à savoir combien de nos élus à l’ARP ont effectué une visite dans les zones industrielles, les marchés hebdomadaires et autres de leur circonscription électorale pour saisir, in-situ, l’ampleur des problèmes vécus par les entreprises en raison du Covid-19 et parfois aussi bien avant l’apparition de la pandémie, pour s’en convaincre. Leur absence est quasi-totale pour saisir le pouls des entreprises, petites, moyennes ou grandes, les réconforter à défaut de les rassurer. Passons. L’essentiel n’est pas là.

 

La pandémie a eu un effet positif. Elle a permis un foisonnement d’enquêtes, d’études et de sondage dont les résultats fournissent un éclairage supplémentaire sur la situation socioéconomique en général et celle des entreprises en particulier. L’Institut arabe des chefs d’entreprise (Iace) avait ouvert le bal aux premières semaines de confinement dévoilant, à travers un sondage auprès de chefs d’entreprise, la multiplicité et l’ampleur des défis qu’affronteraient les entreprises suite à la pandémie ; défis en termes d’activité, d’emploi et même d’organisation de l’entreprise. L’Institut national de la statistique (INS) est venu affiner davantage les résultats du sondage de l’Iace par la publication des résultats d’une enquête tâtant le pouls de l’entreprise, « Business pulse survey ». L’enquête, effectuée entre mai et juin 2020 auprès de 2 500 entreprises du secteur privé évoluant dans des secteurs clés de l’économie, a abordé six pistes. On a cherché à connaître l’état de fonctionnement de l’entreprise tout au long de la pandémie (confinement puis déconfinement), puis les facteurs ayant affecté son activité, ensuite les politiques publiques et l’efficacité de leur mise en œuvre. Dans la foulée, l’enquête visait aussi à savoir quels sont les mécanismes d’ajustement adoptés par l’entreprise pour s’adapter au contexte. Last but not least, l’enquête aborde le volet de la pérennité de l’entreprise et plus généralement ses attentes et ses incertitudes.

 

Au 30 juin, 10% des entreprises n’ont pas repris le travail

Durant le confinement, plus de 70% des micro-entreprises et 60% des PME ont baissé leur rideau ou fermé leurs portes, alors que cette situation n’a concerné que 40% des grandes entreprises du pays. Au 30 juin 2020, près de 89% des entreprises étaient ouvertes compte tenu du fait que 25% des établissements sont restés ouverts sans interruption et 64% ont rouvert après une interruption. Cependant, plus d’une entreprise sur dix était temporairement fermées à cette date. L’enquête de l’INS dévoile aussi que plus de 80% des entreprises exportatrices ont fermé leurs usines durant le confinement, mais elles ont aussitôt rouvert leurs portes.

En effet, au 30 juin 2020, elles étaient plus de 90% à avoir repris le travail. Toutefois, cela ne peut cacher les énormes pertes subies. Plus des trois-quarts des entreprises enquêtées ont enregistré une baisse de leur flux de trésorerie et plus de 70% d’entre elles ont vu leur carnet de commandes fondre comme neige au soleil. Cela est particulièrement le cas de 75% des entreprises exportatrices de l’échantillon. Du coup, c’est le nombre d’heures travaillées qui a baissé. Cela a concerné particulièrement les entreprises des industries mécaniques et électroniques et celles des services d’hébergement, de restauration et de café. Pourtant, au plus fort du confinement, au mois d’avril, l’enquête constate « une incidence limitée sur l’emploi formel ». Seulement 4,5% des entreprises interrogées ont déclaré avoir eu recours à des licenciements alors que près de 40% ont préféré des mises en congé ou bien des baisses salaires.

 

12,5% des entreprises ont augmenté leur présence sur la toile

L’INS a voulu recueillir également le sentiment des chefs d’entreprise concernant les mesures de soutien prises par le gouvernement pour les accompagner à traverser, sans trop de dégâts, l’impact de la pandémie. Le constat est renversant : « Au total, moins de 10% des entreprises déclarent avoir bénéficié des mesures gouvernementales », indique l’INS, ajoutant que près de 38% des entreprises n’on pu bénéficier de ces mesures alors qu’elles en ont fait la demande. L’enquête montre aussi que les grandes entreprises ont bénéficié bien plus que les micro-entreprises des mesures gouvernementales. C’est la même asymétrie qui est constatée entre les entreprises exportatrices et les entreprises tournées vers le marché local.

Quant à l’avenir, il semble rempli d’incertitudes. L’enquête de l’INS révèle d’ailleurs que seulement un peu plus de 13% des entreprises interrogées ont déclaré avoir un Plan de continuité des activités (PCA). L’enquête montre, en outre, que cet atout serait surtout l’apanage des entreprises des secteurs des Tics et de l’industrie mécanique et électronique. Plus de 25% des entreprises présentant un PCA ont intégré la possibilité de télétravail dans leur plan. Près de 60% des entreprises du secteur des Tics l’ont inclus dans leur PCA. La possibilité de travail concernerait aussi près de 43% des entreprises du secteur des BTP ayant un PCA. Elle révèle aussi que plus de 54% des entreprises interrogées ont déclaré « risquer la fermeture ou sont incertains dans les conditions actuelles ». Cette proportion augmente à près de 75% chez les entreprises du secteur de l’hébergement, restauration et café. Pire encore, plus de la moitié des entreprises de l’échantillon affirment ne pas pouvoir maintenir leur activité au-delà de l’horizon de 12 mois.

 

Dans ce magma de sombres constats, il y a quand même quelques éclaircies. En effet, 12,5% des entreprises ont augmenté leur présence sur Internet pour faire face à la crise du Covid-19. Elles sont 45% environ à avoir augmenté leur utilisation d’Internet pour satisfaire aux exigences du télétravail et plus de 60% pour améliorer la gestion administrative de l’entreprise. Cette démarche mériterait désormais de toucher des segments comme la vente où seulement 10% des entreprises s’y sont initiées. Le marketing et les modes de paiement ont un meilleur allant puisqu’ils sont les faveurs de 20% des entreprises enquêtées.

L’INS ne compte pas s’arrêter à cette seule enquête. Celle-ci n’est qu’une première vague. Deux autres sont prévues pour suivre l’évolution des entreprises.

 

Houcine Ben Achour

27/07/2020 | 19:59
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