Nidaa ni personne
Selon Abdelaziz Kotti, nouveau porte-parole de Nidaa Tounes, les présents au congrès du parti ont applaudi Rached Ghannouchi car Béji Caïd Essebsi était entré dans la salle au même moment. Il fallait la sortir sans trembler du menton celle là ! C’est dans la même veine des déclarations à propos d’un nouveau Nidaa Tounes qui sortirait grandi, plus fort et uni.
Le bateau « Nidaa tounes » est en train d’être déserté par ceux qui l’ont fait. Deux membres importants en ont fait de même aujourd’hui, Mahmoud Ben Romdhane et Said Aïdi qui lui, s’est contenté de geler son adhésion. En fait, tout le monde se barre du parti. Tout le monde sauf Hafedh Caïd Essebsi et ses lieutenants. C’est le fils du président qui a hérité du parti fondé par Béji Caïd Essebsi, et cette mainmise ne semble pas plaire.
Le président de la République s’est directement impliqué dans la crise de Nidaa Tounes, à au moins deux reprises. Béji Caïd Essebsi était présent à l’ouverture du congrès de Sousse en tant qu’invité d’honneur, nous disent les services de la présidence. Cependant, il est clair que l’intervention du président dépasse de loin celle d’un simple invité.
L’excuse du président était de dire que la crise de Nidaa Tounes est une affaire nationale puisque c’est le premier parti du pays. C’est complètement faux, évidemment. Le pays a d’autres problèmes, d’autres crises, bien plus importantes que celle de Nidaa Tounes et plus urgentes que la chose politique.
Par contre, il existe une possibilité qui rendrait cette crise effectivement nationale. Si jamais Habib Essid décidait de démettre de leurs fonctions les ministres « politiques » qui ont choisi de quitter Nidaa Tounes. Il pourrait prendre cette décision pour garantir la représentation politique de Nidaa Tounes, dans sa forme actuelle. Mais pour que tout cela puisse arriver, il faudrait déjà que Habib Essid décide quelque chose, et ce n’est pas gagné.
Il a exécuté un remaniement dernièrement et est arrivé à obtenir la confiance du parlement. Il a réussi une autre belle performance : rendre Samia Abbou sympathique. Dans un long monologue, elle avait mis en pièces le remaniement, le rendement gouvernemental, les nouveaux ministres choisis…. Cela a fait d’elle la coqueluche des réseaux sociaux. Mais comme on a la mémoire courte, on oublie qu’elle est ouvertement homophobe et qu’elle nous expliquait que le terrorisme n’est qu’un épouvantail.
Nidaa Tounes se disloque et s’éparpille. De la création de nouveaux courants, aux démissions en passant par les gels d’adhésion, Nidaa est mort.
En face, il y a l’ancien fils prodigue, Mohsen Marzouk. Il cherche à créer un Nidaa bis et récolte parmi les déçus de l’ancien Nidaa, et ils sont nombreux. Le 2 mars prochain, il annoncera officiellement la création d’un nouveau parti politique basé sur la même rengaine du courant bourguibiste moderniste. Ses chances de réussite restent très floues et tout dépendra de sa capacité à se montrer convaincant et à représenter une alternative.
Il y a aussi le parti « Al Irada » de Moncef Marzouki dont les dirigeants se délectent littéralement de la crise à Nidaa Tounes. Adnène Mansar dit que Nidaa Tounes ne représente aucun projet politique et qu’il est composé de lobbies. Tarek Kahlaoui se pose en objecteur de conscience qui distribue les bons points « moraux » aux uns et aux autres, comme à son habitude. Les dirigeants de ce parti doivent avoir une idée précise sur ce qui se passe à Nidaa vu qu’ils comptent parmi eux l’un de ses anciens mais néanmoins vigoureux soutiens.
Il semble clair que la politique en Tunisie n’est pas prête d’être professionnelle. C’est en dilettante que les politiciens du pays prétendent gérer les affaires du pays. Ils n’ont pas d’idéologie ou de plan d’action. Leur seul programme politique est d’être contre telle ou telle formation. Jusqu’à quand continuera-t-on à procéder de cette manière ? Jusqu’à quand on s’étonnera du fort taux d’abstention à chaque élection ? Je ne sais pas, mais je pense que ça va durer un bon moment.