Par Nizar BAHLOUL

Nous sommes le 17 mai et nous fêtons aujourd’hui la Journée mondiale des Télécommunications. Un peu partout dans le monde, on va fêter l’internet, le GSM, la 3G et différentes autres technologies dont on ne connaît que le nom, ici en Tunisie. C’est qu’en matière de télécommunications, nous n’en connaissons qu’une partie. Voire même une infime partie.
Modérés comme nous sommes, nous adorons faire les choses à moitié. Prenez donc l’exemple d’internet. Partout où vous voyagez, il fonctionne parfaitement et vous naviguez où vous désirez.
Chez nous, nous n’en avons ouvert que la moitié et les Tunisiens n’ont le droit de navigation que dans une sélection de sites. Et comme il y a tous les jours de nouveaux sites web qui se créent, alors de temps à autre on filtre quelques uns pour les retirer de la liste des sites dans lesquels nous sommes autorisés d’y naviguer.
Comme ça, vous ne pourrez pas exiger de votre FSI un remboursement quelconque sous prétexte que vous n’arrivez plus à naviguer dans vos sites préférés. Il vous dira, c’est vrai que ces sites sont devenus inaccessibles, mais vous en avez plein d’autres nés depuis et vous n’avez qu’à vous trouver de nouvelles préférences.

Il se trouve que cette histoire n’est plus drôle et beaucoup se plaignent d’être privés de leurs activités et lectures favorites avec cette liste de sites inaccessibles qui s’allonge de jour en jour. Beaucoup disent que ces filtrations nuisent à leurs activités professionnelles ou de recherches académiques, ludiques ou culturelles.
Alors en cette journée de fête qu’est la Journée mondiale des Télécommunications, j’aimerai suggérer quelque chose qui ménage la chèvre et le chou. Modérés que nous sommes, c’est dans notre nature de vouloir satisfaire tout le monde, bien que l’on soit convaincus que nul n’arrivera jamais à satisfaire tout le monde.
Les sites inaccessibles en Tunisie sont officiellement jugés contraires aux bonnes mœurs. Comme nous voulons faire de l’internet un outil sois disant éducatif et familial, il y a une certaine logique de rendre inaccessibles des sites comme You Tube, Daily Motion ou Flickr (incontournable pourtant pour les photographes et passionnés de l’image).

La solution ménageant la chèvre et le chou est simple : c’est d’offrir deux types d’Internet en Tunisie. L’internet classique actuel où l’on navigue que dans une petite partie du web mondial et un internet international où l’on navigue où bon nous semble, comme si nous étions aux Etats-Unis, en France ou au Maroc.
Le premier sera appelé l’Internet familial vendu à un prix accessible au bon papa qui aimerait être tranquille quand son enfant est en train de surfer. Ce sera un internet comparable à la chaîne de télévision nationale où il n’y a que de belles choses et un monde fait de merveilles, de succès, de culture et d’instruction.
Le second internet pourra être appelé l’internet diabolique vendu à un prix élevé destiné aux personnes qui aimeraient parasiter leur cerveau de trucs débiles et idiots tels les sites de vidéo, de photos et de journaux.
Après tout, chaque citoyen est libre de polluer son cerveau comme il le désire. Il y a ceux qui regardent Iqraa et ceux qui ne jurent que par XXL. Ceux qui préfèrent les documentaires animaliers et ceux qui sont hypnotisés par le foot. Dans toute société, quel qu’elle soit, il y a toujours eu depuis la nuit des temps une école et une prison, un lieu de culte et une maison close

Aberrant comme proposition, dites-vous ? Pas aussi aberrant de voir autant de sites inaccessibles dans le pays parce que quelques fonctionnaires (aussi bien intentionnés soient-ils) ont décidé à notre place quels sites internet doit-on visiter et quel comportement doit-on avoir lorsque nous sommes seuls devant notre écran !