
Par Nizar BAHLOUL
Elle s’appelle Aya et elle a dix ans. Elle est passée en sixième année de l’école primaire (école de base dans le nouveau jargon) avec une moyenne supérieure à 19/20.
Aya voulait obtenir une excellente moyenne et elle l’a obtenue. Ce ne sera pas le cas avec la récompense qu’elle tenait également à avoir. C’est que cette belle moyenne a été obtenue dans un moment très dur de sa vie, suite au récent décès de sa maman. Et si son père en est fier, cela ne semble pas être l’avis de son école. Une école publique, comme des milliers d’autres, située à la rue de Russie à Tunis. Quand on a dix ans et qu’on appartient à la classe moyenne, on ne rêve pas de voyage ni d’un séjour à l’hôtel comme récompense. Aya ne rêvait que d’un satisfecit des mains du directeur de son école.
Un satisfecit, rappelons-le, est ce bout de carton qui coûte 200-250 millimes et sur lequel on inscrit le nom de l’élève et sa classe avec des mots d’encouragement. Quand on a dix ans, ça motive énormément et, pour certains, ça motive plus que tout. Aya est dans cette situation, mais Aya n’a pas obtenu son satisfecit. Pourquoi ? Restrictions budgétaires, lui aurait dit une institutrice sincèrement désolée.
Il semblerait que l’école n’a pas suffisamment de moyens pour payer quelques cartons à 250 millimes l’unité, pour encourager les Aya and co.
Il faut aller voir le directeur pour en avoir, aurait suggéré une autre instit à un autre parent. Le 19 à lui seul ne suffit pas ! Ce n’est pas le cas de toutes les écoles.
Faut-il aller voir le directeur ? Il part à la retraite, m’a-t-on dit.
Un jour, un ministre est allé voir le leader Habib Bourguiba pour lui dire que l’éducation coûte cher. « Essayez donc l’ignorance » a répondu le défunt. Et le ministre de revenir sur ses pas !
Je voudrai cependant qu’on m’explique. Cette politique de l’éducation n’a pas changé, depuis, d’un iota à la baisse, au contraire, et les différents gouvernements du Président Ben Ali ont toujours donné la priorité à nos générations futures. Le Premier ministre, Mohamed Ghannouchi, l’a d’ailleurs rappelé jeudi dernier, en évoquant l’important budget alloué à l’éducation et à la formation.
Pourquoi donc existe-t-il encore des directeurs d’école qui ne savent pas gérer leur budget et trouver ces 250 millimes pour acheter à nos enfants un carton de satisfecit ?
****
C’est une faculté à Nabeul. Dans cette faculté, il y a une enseignante voilée qui se dit très engagée religieusement. Ne cherchez pas le rapport entre ses convictions et sa profession, il n’y en a pas. Mais elle s’est débrouillée pour qu’il y en ait.
Au cours d’un examen, elle a exclu une étudiante sous le prétexte que celle-ci avait les bras nus. Peu importe le traumatisme psychologique subi par la jeune fille qui ne demandait qu’une chose, passer son examen, l’essentiel pour la professeure est de ne pas voir un bras nu !
Cette même enseignante, qui entre dans un examen en imposant clairement à autrui ses propres interprétations religieuses, figure parmi celles qui défendent la liberté vestimentaire de l’individu. On voit bien ce que certains font de la liberté dès qu’ils ont un semblant de pouvoir !
****
C’est un mufti. On en trouve à la pelle, ces derniers temps, dans toute télé branchée sur Nilesat. Un mufti, ça sert à dire ce qui serait autorisé par le bon Dieu et ce qui ne le serait pas. Un mufti, ça sort des fatwas. Et des fatwas, on en voit de toutes les couleurs dans cette télé branchée sur Nilesat.
Il parait qu’il est interdit de ramener des fleurs à un malade hospitalisé, selon l’un, qui motive sa décision par le fait que c’est une habitude importée de chez les mécréants.
Un autre interdit la souscription à des forfaits téléphoniques, car si l’on ne consomme pas entièrement son forfait, on aurait payé quelque chose qu’on n’a pas consommé, ce qui serait un péché. Et quand on commet un péché, on va en enfer.
Tunisiana et Tunisie Telecom, vous savez ce qu’il vous reste à faire pour que vos abonnés n’aillent pas en enfer ! Les paroles des muftis n’engagent que ceux qui les écoutent. Heureusement.
Ces muftis cathodiques ne m’intéressent pas cependant. Le nôtre si.
Et le nôtre a été contacté dernièrement par une bonne dame dont l’époux lui avait crié trois fois au visage : « tu es répudiée ! ». Sa question : doit-elle se considérer comme étant divorcée ? La réponse du mufti tunisien est… positive !
Cela se passe à Tunis et en 2008. Pour ceux qui l’ignorent, notre fort précieux Code du Statut Personnel a 52 ans d’âge.
Et grâce à ce Code, un divorce en Tunisie ne peut être prononcé que par un juge dans un tribunal ! Ni mufti, ni walou ! Heureusement !