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Chroniques
Chahed, Fakhfakh, Mechichi : jamais deux sans trois ?
Par Houcine Ben Achour
03/09/2020 | 19:41
3 min
Chahed, Fakhfakh, Mechichi : jamais deux sans trois ?

 

Fallait-il s’attendre à des nouveautés dans le discours d’investiture de Hichem Mechichi devant les députés de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) par rapport à ceux qui l’ont précédé, particulièrement de 2016 avec Youssef Chahed et 2020 avec Elyes Fakhfakh ? Ni les constats, ni les diagnostics, ni les priorités n’ont changé. Les crédos demeurent encore les mêmes. Faudrait-il pour autant prédire d’ores et déjà l’échec de ce gouvernement en invoquant l’adage du « jamais deux sans trois » ? Ce serait trop simpliste.  

Le gouvernement de Hichem Mechichi doit avoir lui aussi le droit de bénéficier d’une centaine de jour de grâce, comme tous les gouvernements précédents. Un délai qu’il devrait rapidement mettre à profit pour révéler son savoir-faire et venir à bout de la crise économique sans précédent qui secoue le pays.

 

Malheureusement, en reprenant la démarche discursive de ses prédécesseurs, le chef du gouvernement n’a pas tenu compte de l’évolution du contexte économique et particulièrement de l’impact de la pandémie du Covid-19. Certes, Hichem Mechichi a énuméré des données socioéconomiques importantes telles la baisse vertigineuse de la demande de consommation de 25%, la dégringolade des taux d’épargne et d’investissement, la flambée de l’endettement pour résoudre le problème des déficits jumeaux, de budget et de paiements extérieurs, la montée du chômage, etc. pour illustrer l’ampleur des problèmes à résoudre. Cependant, le chef du gouvernement a omis de signaler une donnée économique essentielle sinon existentielle qui résume à elle seule la situation économique du pays : le taux de croissance du Produit intérieur brut.

L’effondrement de l’activité économique durant le 2e trimestre 2020 ne présage absolument rien de réjouissant. Car, le recul de plus de 20% du PIB durant cette période n’a pas pour seule raison l’impact de la pandémie. L’économie du pays entrait déjà en récession depuis le 1er trimestre 2020. Le Covid-19 n’a fait qu’amplifier la trajectoire de décroissance de l’activité économique. En tout cas, l’estimation du gouvernement sortant d’un recul du PIB de 7% en 2020 apparait bien optimiste sinon illusoire. Il faudrait craindre en effet une récession à deux chiffres. Certains situeraient la baisse autour de…14%  du PIB, d’autres avancent des taux encore plus calamiteux.

 

Compte tenu d’une telle hypothèse, c’est le projet de loi de finances complémentaire dont l’élaboration est quasi-achevée que le gouvernement Mechichi serait amené à revoir. C’est le projet de loi de finances et de budget pour l’exercice 2021 qui nécessitera une première série de douloureux arbitrages. En effet, il ne faudra pas trop compter sur une reprise de la  croissance l’année prochaine. Ce ne sera qu’un « rebond technique », comme le qualifie les statisticiens. Autrement dit, la création de richesse sera supérieure à celle réalisée en 2020, mais demeurerait inférieure à celle affichée en 2019.

 

Dans une telle configuration, on peut se demander de quelle manière le nouveau gouvernement envisage d’ « arrêter l’hémorragie des finances publiques » et redresser le cadre macro-économique. Il serait tout aussi intéressant de savoir comment il compte améliorer les ressources propres de l’Etat tout en poursuivant l’accompagnement des entreprises impactées. Il serait également opportun de connaître les intentions du gouvernement sur la réforme de l’Impôt sur les sociétés (IS) qui devrait entrer en vigueur à partir de l’année prochaine. Il serait aussi logique que le gouvernement affirme sa position sur la loi votée à la sauvette à l’ARP obligeant l’administration à recruter les chômeurs de plus de 10 ans d’inactivité, une véritable bombe à retardement qui transpose l’empoisonnant dossier d’El Kamour à l’échelle nationale. Ce gouvernement va-t-il soutenir le projet de loi d’amnistie de change sans s’interroger sur ses fondements éthiques ?

 

C’est à ce genre de question qu’on attendait des réponses claires dans le discours d’investiture du chef du gouvernement et non pas à des généralités sur lesquelles s’accorde tout un chacun. Sinon, cela sera effectivement du « jamais deux sans trois ».  

Par Houcine Ben Achour
03/09/2020 | 19:41
3 min
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Commentaires
Dr. Jamel Tazarki
L'urgence d'une réforme sociale!
a posté le 04-09-2020 à 22:02
Une réforme sociale est indispensable en Tunisie, c'est de savoir comment nous pourrions aider aujourd'hui le fonctionnaire, le paysan, le travailleur et les chômeurs à se fournir les objets, les produits et le minimum de consommation dont ils ont besoin. C'est cela que les classes pauvres attendaient de la Révolution de Jasmin. Elles n'attendent pas que nous leur donnions tant et tant de billets, elles attendent seulement la possibilité de se dégager de l'emprise de la faim et de la misère et de pouvoir vivre, c'est-à-dire de consommer et de produire des produits.

Ce que la classe pauvre attend, c'est de lui apporter la possibilité de sortir de la situation qui leur a été faite en tant que classe qui a été toujours ignorée et désavantagée (Je sais ce que c'est d'avoir faim). Ne pas répondre aux espoirs et à l'attente de ceux qui ont cru en la Révolution de Jasmin est une grande déception.

Comment répondre aux nouveaux besoins sociaux? Est-ce que nous en avons les moyens financiers? Les politiques sociales pourraient-elles soutenir la nouvelle croissance économique? Quels sont les investissements nécessaires aujourd'hui pour ne pas aider et subventionner dans les années à venir? Comment minimiser les charges sociales? Comment passer des politiques sociales de prise en charge et de distribution gratuite à une politique dont la base est l'investissement social? Il est temps de concevoir autrement les dépenses sociales. Non pas comme une charge qui gêne la croissance économique, mais comme un investissement qui soutient le passage vers une meilleure économie avec moins de chômeurs et de meilleurs salaires.

Les politiques sociales en Tunisie doivent avoir une fonction économique en tant que paramètre de fortunes futures. L'accroissement des richesses produites est la condition la plus évidente de la réduction de la misère matérielle.


Ce n'est pas normal qu'il n'y a pas assez de chaussures à bon prix et de bonnes qualités pour tous les Tunisiens dans un pays qui compte un million de chômeurs. Ce n'est pas normale que le gouvernement tunisien distribue de l'argent gratuitement sur les pauvres alors que l'on peut les faire travailler à domicile afin de créer des biens indispensables et qui manquent en Tunisie.


@Si Houcine: si l'etat tunisien me paye les salaires de ceux qui sont chômeurs depuis plus de 10 ans, je pourrais les faire travailler dans des projets qui seraient plus bénéfiques pour la Tunisien, pour tous les Tunisiens et pour eux mêmes. ---> Certains de ceux qui nous gouvernent sont vraiment bloqués...

Dr. Jamel Tazarki, Mathématicien

C'est dans l'intensité, la régularité et le renouvellement du débat socio-politique que se forge le gouvernement du peuple. La bonne santé de notre jeune démocratie tunisienne se mesure à ses contre-pouvoirs. Voilà pourquoi l'indépendance des médias, de la justice, l'activité syndicale et la qualité du débat parlementaire concernent tous les Tunisiens.

Emeli Sandé - Read All About It
https://www.youtube.com/watch?v=vaAVByGaON0
Dr. Jamel Tazarki
une production décentralisée et à domicile...
a posté le 04-09-2020 à 21:55
Il y a quelques années un homme d'affaires français voulait produire des chaussures à Tazarka. Il a commencé d'abord par donner une formation à ses nouveaux employés. Il les a réunis dans une grande salle à la commune de Tazarka et il leur a montré les techniques de la fabrication des chaussures d'une façon artisanale (j'étais parmi les présents, j'avais 17 ans en ce temps-là). Il nous a fourni la formation nécessaire pour assurer la qualité du travail. Puis, il a introduit une nouveauté dans notre monde rural, un système de salaire différentiel aux pièces. On recevait une somme fixe par pièce produite. Puis, cet homme d'affaires nous payait même plus cher car on respectait les normes qu'il nous a fixées pour la production (encore plus de motivation afin de fournir un travail de qualité). Ce Monsieur, venu de l'étranger, a révolutionné notre monde rural en introduisant la même base de calcul du salaire pour les hommes et pour les femmes pour un travail égal ou d'égale valeur. Oh mon Dieu, c'était un bouleversement socio-culturel dans notre petit village où les femmes gagnaient beaucoup moins (et travaillaient beaucoup plus sur les champs des autres). Ce Monsieur, venu de loin, a su motiver tout le monde. Je produisais durant mes vacances scolaires des chaussures de très hautes qualités et ceci par dizaines et par centaines! Je ne me faisais pas de soucis pour la vente de ma production. En effet, Je savais que ce Monsieur, venu de très loin, allait acheter toute ma production.

Puis un jour, l'entrepreneur français qui m'employait en travailleur indépendant (freelancer) est rentré chez lui, en France. J'ai décidé alors de continuer à fabriquer des chaussures. J'étais à Nabeul, j'ai acheté du cuir et j'ai démarré avec des Amis de mon village une petite entreprises qui produisait des dizaines et des centaines de chaussures de très bonne qualité et en particulier confortables. Mais seulement, on ne savait pas où les vendre. Les boutiques, les grands magasins, la police municipale sur le marché de semaine avaient des doutes sur l'origine de notre production...

Je me suis adressé à la mairie de Nabeul, les fonctionnaires n'étaient e pas d'accord non plus, les uns prétendaient que oui, je pouvais vendre notre production sur les marchés communaux, mais à titre occasionnel, et les autres prétendaient que l'on n'avait pas le droit de vendre sur le domaine public, (marchés du village ou bords de routes), sans être commerçant inscrit au registre du commerce (j'avais à peine 18 ans, en ce temps-là).

Et ainsi je me suis inscrit au registre du commerce et de ce fait quelques boutiques ont accepté de mettre notre production (les chaussures que l'on a fabriquées) dans leurs vitrines. Certes, les chaussures ont été vendues mais on ne nous a jamais donné un centime! Ce qui est encore plus grave, j'ai reçu une lettre du fisc pour déclaration de notre "chiffre d'affaire", sinon mon activité à domicile pourrait être considérée comme du travail dissimulé (voir un délit). Eh ainsi, on a dû arrêter à fabriquer des chaussures bien qu'il en manquait en Tunisie!

==> mon projet était condamné à la faillite car je n'avait pas de couverture juridique gratuite
et car je ne trouvais pas de réseau de distribution afin de vendre ma production (un manque de logistique).

Je propose une production décentralisée et à domicile pour tous nos chômeurs. La vente se ferait centralisée par l'état tunisien qui serait dans l'obligation de collecter la production décentralisée. On laisserait produire à domicile par nos chômeurs tout ce qui est vital et tout ce qui manque en Tunisie. Un exemple: Les aveugles en Allemagne produisent d'une façon décentralisée et à domicile des brosses, des pinceaux, des balais, etc.. Tous les vendredis, il y a quelqu'un de la commune qui passe chez les aveugles/handicapés chercher la production afin de la faire vendre d'une façon centralisée.

J'étais en Thaïlande et j'ai rencontré des familles pauvres qui mènent une vie paisible et arrivent à survivre grâce aux élevages traditionnels des crevettes, souvent sur les rives des petites rivières. C'est l'Etat Thaïlandais qui donne les moyens de productions et collecte aussi la production/récolte des crevettes afin de l'exporter vers l'Europe ou la commercialiser dans le pays. ==> Oui, mon projet de production de chaussures a échoué car je n'avait pas eu d'assistance juridique et logistique!

Je résume, nos chômeurs veulent produire beaucoup de choses, Ils souhaitent subvenir à leurs propres besoins et ne pas dépendre uniquement des autres. Ils désirent également faire pleinement partie de la société et que leur place y soit reconnue. Généralement, ils n'ont pas un problème de financement afin de développer seuls des projets, ils ont besoin plutôt d'assistance juridique et logistique ==> avoir des facilités et une garantie afin de vendre leur production sans parler d'économie informelle. L'Etat tunisien doit organiser le travail à domicile des nécessiteux et de servir d'intermédiaire pour la vente de leur production.

Je produit 80Kg de pommes de terre sur ma terrasse en utilisant seulement les bourgeons des patates, --> et ce que je fais, chaque Tunisien pourrait le faire. Mais enfin, il faut faire remuer le Tunisien de sa passivité

Jamel Tazarki

Beyoncé - I Was Here:
https://www.youtube.com/watch?v=i41qWJ6QjPI
Nord africain
L'art du possible
a posté le 04-09-2020 à 14:35
Le scientifique mesurable ne se compare guère à la superstition du jamais deux sans trois.
L'homme est conscient de ce qu'il a à faire après des des discussions bénéfiques et mesurées à partir desquelles il a pu diagnostiquer et dresser ses priorités qui seront détaillées chacune avec le ministre concerné. Les priorités urgentes socio-économiques sont évoquées.
Donc personnellement je ne vois aucun rapport avec ses prédécesseurs des chefs de gouvernement.
Souhaitons que les agitations manquent et les buzzeurs et les aboyeurs se taisent et laisseraient la place la participation positive.
Gg
Naturellement!
a posté le 03-09-2020 à 22:25
Rien ne va changer, donc en effet dans 3 mois ce sera le même bazar!