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Tribunes
Le « cadrage », devenu nécessaire, de la classe politique
03/01/2013 | 1
min
Le « cadrage », devenu nécessaire, de la classe politique
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Par  Adnane BELHAJAMOR *


Quelqu’un a dit un jour que le pouvoir était le meilleur des alibis .Mais personne n’a dit que l’opposition pouvait aussi être un alibi .En effet, rien ne pourrait expliquer que « concourir » pour satisfaire son ego en essayant de devenir « calife à la place du calife » pouvait justifier la division, le verrouillage de tous les systèmes et le sabotage des mécanismes.

Dans les dictionnaires généralistes classiques , on définit un cadrage comme une mise au point destinée à mettre un sujet correctement sur une photo ou un film .Et le verbe « cadrer » est apparu en politique , signifiant l’acte d’intervention en vue de rappeler à l’ordre un collaborateur qui se serait permis un écart de geste ou de discours par rapport aux choix en vigueur et lui faire prescription impérieuse de se positionner en harmonie avec son groupe et la logique qui sous tend les besoins de pérennité de ce groupe
On oublie souvent que si la démocratie suppose une certaine marge dans la pensée et dans l’expression , elle n’en impose pas moins un alignement sur ses fondamentaux et notamment l’obligation de se conformer aux choix dont le caractère majoritaire ne souffre pas de mise en cause .Et souvent, l’on voit foulés , pressés et même écrasés des choix prétendus convenus et cela par une classe politique qui tend, de plus en plus, à faire dans l’improvisation .Cela se passe comme si la démocratie n’était pas à l’image de tout concept universel , soumise à des normes et standards internationaux .
Pour expliquer ceci et imaginer quelques pistes à même de permettre de sortir de cet état des choses, il y a l’une ou l’autre de deux manières de procéder. Soit, mettre tout , globalement et au détail près sur le dos d’Ennahdha et de ses partenaires .C’est une façon simpliste qui donne une illusion de délestage mais qui conforte une grande partie de l’opinion dans son idée que la Troïka est le seul maître à bord et cela ne contribuera en rien à avancer vers le but recherché .On en restera à être contre tout, sans avoir d’alternative .Tout le temps sera consacré à décompter les fautes de ceux de « la maison d’en face », des fautes qui vont de la simple erreur de vocabulaire à la grosse bourde sur le dossier du gaz de schiste , en passant par l’attitude clownesque de tel ou autre ministre .Et en « catimini » comme on croit, des alliances se font et se défont presqu’au gré des vents avec les chefs du « triumvirat ».

Peut être , serait-il alors plus indiqué de regarder sa propre bosse .En effet, grand nombre de Tunisiens commencent à douter que la frange dite progressiste et éclairée soit vraiment composée en majorité de démocrates rompus au débat contradictoire , opposant argument à argument , ne se considérant pas comme la seule faune intéressante du paysage et détentrice de l’intelligence de relever chez les autres nuances, différences et divergences C’est la seule façon de faire les distinguos utiles, parce qu’en politique , il faut savoir composer et que pour ce faire, il va falloir discerner avec qui et comment amener les habilités à s’associer aux compromis incontournables, les compromis des braves .
Il y a des moments où on a une impression de classe politique trop centrée sur elle-même et qui ne réalise pas qu’elle pourrait n’être qu’une minorité ou peut-être une majorité mais pas forcément la plus active et influente.
Les plateaux de télévision ne draineront bientôt plus que des « fanas » des gallodromes, ces aires prévues en Amérique du sud pour les combats de coqs Les protagonistes ne s’y afficheront plus pour pratiquer une saine polémique politique argumentée mais davantage pour injurier et invectiver à tire larigot.

Les partis politiques, à qui échoit en démocratie la mission de canaliser et de catalyser, se multiplient par un paradoxal phénomène, celui de la division !! Les mouvements migratoires des affiliés aux partis n’obéissent à aucune règle ni saison Presque tous se réclament du libéralisme et du centrisme et on ne voit pas émerger de projet à contours économiques, sociaux et culturels clairs .C’est pourtant à travers cela que l’on mobilise sérieusement et à moyen et long termes.
Pour ce qui est de la Constituante, rien à dire de plus que le fait que c’est curieusement l’enceinte la plus courue et la plus boudée .On aime ses rémunérations mais l’on n’est forcément pas un féru de ses travaux pour autant. (44 présents sur 217, le 27/12 en plein débat budgétaire !).
Jamais auparavant en Tunisie, autant de citoyens ne s’étaient autant concernés par l’actualité politique .Mais , ils n’en sont pas moins bien maintenus en dehors de l’évolution des faits jusque-là .Néanmoins, ce serait un leurre que de croire ce maintien en dehors des champs d’influence indéfiniment sauvegardés Les reflexes de régionalisme, de tribalisme et de clanisme ont vite fait de remonter à la surface .Et lorsque l’on y ajoute les difficultés croissantes de la vie quotidienne avec un chômage de plus en plus pesant et un taux d’inflation qui crève tous les plafonds, on saisit à quel point le cocktail risque d’être détonnant, surtout dans un contexte régional des plus exécrables .

Il est anormal et surtout injuste qu’un peuple et sa jeunesse paient parce que ceux qui leur font miroiter leurres et illusions sont occupés à essayer de satisfaire leurs ambitions démesurées et refusent d’opter pour le choix de mobiliser autour d’un projet et avec un leadership naturel et up to date.
La classe politique est dans une obligation impérative d’être cadrée dans une nouvelle configuration et sur la base d’un projet tel qu’indiqué ci avant ; pour rompre avec cette image devenue répandue de tenants de petites boutiques s’évertuant à retenir leur limitée et de plus en plus hésitante clientèle. Elle va devoir faire preuve de bien plus d’imagination et réagir vite pour ne pas se laisser distancer sans avoir mis en place les mesures qu’il faut à cette situation nouvelle qui s’est créée .Et s’il y a conflit de générations, et il y en a objectivement, il va falloir résoudre le problème de manière à pouvoir assurer la continuité et d’être dans l’air du temps.

C’est cela ou rien.

*Consultant et activiste politique
03/01/2013 | 1
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