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Tunisie : Une poubelle grandeur nature
23/06/2014 | 1
min
Tunisie : Une poubelle grandeur nature
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Encore une fois depuis l’avènement de la révolution et suite à une énième grève des agents municipaux (éboueurs), les 18 et 19 juin 2014, on assiste au même spectacle désolant. Le Grand Tunis et la plupart des villes tunisiennes se transforment, de nouveau, en une sorte de dépotoir à ciel ouvert au vu des tonnes d’ordures et autres immondices qui s’y entassent. Et avec ces temps de grandes chaleurs qui s’installent dans le pays, les choses ne peuvent qu’empirer…

Tout le monde tire la sonnette d’alarme : citoyens, gouvernement, ministère de la Santé, secrétariat d’Etat chargé de l’environnement et services municipaux. Il y va de la qualité de la vie et de la santé de tous. En effet la canicule étouffante de l’été ne peut que favoriser la prolifération des insectes et générer diverses maladies.
Une action salvatrice est nécessaire et urgente pour éviter un point de non retour en la matière aussi bien de la part des autorités officielles concernées que de la part de la société civile et des citoyens eux-mêmes.

En tous cas, du côté gouvernemental, la prise de conscience du danger qui guette le pays semble bien sérieuse, cette fois-ci, avec une réunion de la cellule de crise créée à cet effet et présidée par Mehdi Jomâa, chef du gouvernement. A l’issue de cette séance, M. Jomâa n’a pas mâché ses mots : « La situation est devenue insupportable et elle prive le citoyen de son droit à un environnement sain et propre, un droit garanti par la Constitution», a-t-il déclaré en substance, avant d’ajouter que «l’action syndicale est préservée et que le dialogue reste ouvert ; mais avec la saison d’été et l’avènement du mois de Ramadan, en plus de la saison touristique qui bat son plein, la pression exercée sur l’Etat est inadmissible, d’où la nécessité d’appliquer la loi ». D’ailleurs, une série de mesures et de décisions viennent d’être arrêtées dans ce sens afin de préserver le prestige de l’Etat et garantir un environnement sain aux citoyens.

Mounir Mejdoub, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Equipement chargé de l’Environnement a tenu à expliciter ces mesures, lors de l’émission Midi Show d’aujourd’hui, lundi 23 juin 2014. Elles consistent en la possibilité de réquisitionner un certain nombre d’agents municipaux ainsi que l’éventuel recours à des services d’entreprises privées, sans oublier les décisions prises à l’égard de certaines délégations spéciales défaillantes.
 Il faut dire que l’ouverture du secteur aux entreprises privées permettrait, selon certains, de mieux organiser le système de ramassage des ordures et de contribuer à la création de plus d’emplois, surtout avec la multiplication et la périodicité des grèves qu’on ne compte plus depuis la révolution. Pis encore, les agents municipaux ne sont pas réguliers dans leurs tournées. Dans certains quartiers, il est devenu presque normal que l’agent s’absente un ou deux jours par semaine.
Ceci fait dire à d’autres qu’on avait droit à des artères et places propres lorsque les agents touchaient 180 dinars par mois sans être titulaires, et maintenant qu’ils ont été titularisés et touchent plus de 400 dinars par mois- ce qui est leur droit le plus absolu - la propreté laisse vraiment à désirer.

Il est à souligner, toutefois, que la détérioration de la situation n’est pas uniquement due au « laxisme » des agents municipaux. D’autres facteurs sont à mettre au banc des accusés.
On citera, à ce propos, le  manque de main-d’œuvre, car il est indéniable que les agents de la propreté aient, désormais le droit à des congés hebdomadaires et annuels d’un mois. Ils ont aussi le droit à un congé de maladie de deux mois, ce qui explique l’irrégularité de leur travail et l’absence, parfois, des services municipaux sur le terrain.

Il faut remarquer, aussi, que « plusieurs municipalités souffrent d’un manque flagrant d’équipements nécessaires, puisque, souvent, les machines et les engins, faute de disponibilité de pièces de rechange, restent, pour la plupart, immobilisées dans les entrepôts.». D’où la nécessité de renforcer le plus tôt possible des parcs des municipalités, par l’acquisition des équipements et des outils nécessaires.

La société civile et les citoyens ont, également, un rôle à jouer puisque tout en essayant d’avoir un comportement civique en la matière, ils sont appelés à entreprendre des actions efficaces pour atténuer ce fléau.
Dernière trouvaille, progrès technologique oblige, est cette « Selfie poubella » sur les réseaux sociaux. Une idée de Cheker Besbes, juriste de formation et journaliste de métier à Mosaïque Fm, qui a posté, le 16 mai 2014, une image d’une décharge publique sauvage qui a fait le buzz sur les réseaux sociaux. Il lance, aussitôt avec quelques amis, une page Facebook intitulée « Selfie poubella ». En quelques jours, près de 15.000 internautes deviennent fans et des milliers de Tunisiens se prennent à leur tour en photo devant des immondices dans des quartiers chics ou populaires, sur des plages ou à la campagne. « Nous voulons choquer pour que la question environnementale devienne une priorité du gouvernement », assure le jeune journaliste.
Cette action semble produire un meilleur effet que celui recherché par opérations entreprises par des officiels. En effet, au lieu de mener des actions radicales, des campagnes, à la limite du populisme, ont montré de hauts responsables, voire des membres du gouvernement ramasser les ordures, l’espace d’une séance photo.

Pourtant, rien n’a été dit sur les effets néfastes de cette situation d’insalubrité de l’environnement et ses conséquences ravageuses pour l’état de santé des citoyens, puisqu’il ne s’agit pas uniquement d’une question d’esthétique des villes, mais surtout d’une affaire d’ordre sanitaire.
Il ne faut pas oublier, que ces ordures sont composées à 80% de matières organiques. Et qui dit matières organiques, dit prolifération facile de germes de toutes sortes : microbiologiques, comme les bactéries, les virus, les parasites ; insectes, comme les mouches et moustiques. Elles sont aussi de véritables vecteurs potentiels de transmission de maladies via les animaux tels les rats, les souris.
Autre problème auquel la santé des citoyens se trouve confrontée. Il s’agit du phénomène de l’incinération sauvage de ces ordures, résultat de l’attitude de nombreux citoyens qui, croyant bien faire, y jettent une allumette.
Or, au cours de l’incinération, la combustion n’est jamais complète, seules les matières sèches, comme le papier, brûlent en surface, et à l’intérieur la température chauffe provoquant une émanation de gaz toxiques, dont les dioxines.

Et la chaleur persistante depuis quelque temps n’arrange guère les choses. On ne peut plus gérer cette situation car plus il fait chaud, plus la prolifération des germes est rapide dans le sens où elle voit sa vitesse se multiplier de façon exponentielle.
C’est dire l’urgence pour toutes les parties concernées et impliquées d’agir pour l’intérêt général loin de toutes les considérations étroites et de toute exploitation conjoncturelle pour engranger des dividendes aux dépens de la santé des Tunisiens.


Sarra HLAOUI
23/06/2014 | 1
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