alexametrics
mercredi 07 mai 2025
Heure de Tunis : 00:02
A la Une
Tunisie – Le gouvernement manie la carotte et le bâton jusqu'aux prochaines élections
04/06/2012 | 1
min
Tunisie – Le gouvernement manie la carotte et le bâton jusqu'aux prochaines élections
{legende_image}


Comme pressenti dans les propos favorables à une révision des salaires, annoncés par le chef de gouvernement depuis le jeudi 24 mai, les derniers rounds des négociations sociales tenus samedi 26 mai, jeudi 31 mai et vendredi 1er juin se sont avérés fructueux et le gouvernement a accepté de généraliser l’indemnité spécifique de soixante-dix dinars à tous les agents de la fonction publique.
Restent les détails d’application de cette révision de salaires et son échéancier. Qu’en est-il et comment pourrait-on expliquer cette volte-face du gouvernement qui n’avait cessé d’assurer l’impossibilité matérielle de la révision des salaires.

Le chef du gouvernement Hamadi Jebali n’a cessé de répéter depuis deux semaines qu’il n’a jamais été question de la part du gouvernement « d’année blanche ou noire » concernant la révision des salaires. « Le gouvernement a juste dressé des priorités et placé la lutte contre le chômage et la précarité en avant », a-t-il déclaré, tout en déplorant les spéculations dans le dossier des négociations sociales.
Par conséquent, la délégation gouvernementale a accepté la généralisation de l’indemnité spécifique de 70 dinars à tous les agents de la fonction publique et proposé de répartir cette somme sur deux ans, en rapport avec les possibilités financières limitées du gouvernement en cette période de crise.
Cette proposition est venue au moment où le super ministre-conseiller des affaires économiques, Ridha Saïdi, n’a cessé d’expliquer aux médias durant ces deux derniers mois que « la condition fondamentale pour la réussite du programme économique et social du gouvernement, c’est le blocage des salaires ». Il a fait appel au « patriotisme » de l’UGTT pour admettre une année 2012 sans révision des salaires.

M. Saïdi a martelé les médias par des justifications telles que « le gouvernement a pris le risque de tolérer un déficit budgétaire de 6,6 %, selon une approche néokeynésienne, pourvu que le déficit aille dans les investissements, pas dans les salaires ». Il a averti que « les augmentations de salaires ne pourraient se traduire que par une inflation assez sensible ».
Le chef du gouvernement, Hamadi Jebali, a balayé d’un revers de main toutes ces considérations économiques et accepté l’option de réviser les salaires pour la bonne raison que le choix politique ne peut tolérer que l’année soit blanche sur le volet de la révision des salaires. Comment se justifierait le gouvernement face aux employés meurtris par une hausse vertigineuse des prix ?
Pour ce qui est de l’inflation, pas de problème, murmure-t-on du côté de la Kasbah, il faut parer au plus pressé. « Il s’agit de gagner du temps et de parvenir à maîtriser l’inflation durant le mois de Ramadan, très important aux yeux des Tunisiens. Après, il y aura la bonne année céréalière et touristique qui arrangeront les choses », ajoute-t-on.

M. Jebali et son gouvernement ne sont plus à la phase initiale de « dire la vérité au peuple ». Ils sont plutôt en phase de « tempérer pour parvenir aux prochaines élections avec les moindres dégâts ». C’est ce qui explique par ailleurs le fait qu’ils n’aient pas encore entamé les projets de développement prévus en 2012 qui constitueraient le socle de leur prochaine campagne électorale.
Des observateurs ont remarqué que si le gouvernement avait entamé depuis janvier 2012 ses projets à l’échelle régionale, dans la perspective d’obtenir une rallonge à travers la Loi de finances complémentaire, les caisses seraient vides en octobre et les politiques seraient alors de nouveau sous pression, ce qui ne sert pas leur cause sur le plan électoral en mars ou avril 2013.

Par contre, cette tactique attentiste a fait que le gouvernement ne va entamer ses projets de développement régional que durant la deuxième moitié de 2012. Donc, avec l’aide de bonnes saisons dans la céréaliculture, la pêche et le tourisme, tous les clignotants seraient au vert et aideraient dans les préparatifs de la prochaine campagne électorale.
En plus, le gouvernement a compris qu’il ne pouvait pas entamer un véritable bras de fer avec l’UGTT ; du moins, pas maintenant. Les quelques accrochages ont montré que la centrale syndicale dispose d’un grand pouvoir de mobilisation comme l’indiquent les 90 % de réussite de la grève des instituteurs et, avant, la grande mobilisation du 1er mai. Jebali a donc compris le message. Il a intérêt à calmer le jeu.

Cette attitude de conciliation trouve davantage sa raison du moment que l’UGTT est la seule force capable de rationaliser les chômeurs qui ne cessent de monter au créneau en reprenant les blocages des centres névralgiques de production à l’image de la compagnie des phosphates de Gafsa. Les syndicats de l’UGTT peuvent aider à protéger le droit au travail.
Or, le gouvernement sait pertinemment que l’UGTT ne pourrait marcher dans ce programme qu’une fois ses revendications salariales satisfaites, partiellement au moins. C’est pourquoi, et après de vaines tentatives de convaincre la centrale syndicale d’accepter une année blanche, Hamadi Jebali surgit pour nier ce flottement et dire que ce n’était qu’un malentendu.

Jebali est donc revenu à la thèse que n’a cessé de véhiculer Khalil Zaouia, ministre des Affaires sociales, qui a récemment déclaré que « le gouvernement et la centrale syndicale partent du même constat sur la situation socioéconomique et visent les mêmes objectifs de réaliser ce qui est possible parmi les objectifs de la révolution ». « Nous allons donc trouver des accords viables », avait-il conclu, en vieux routier de ces négociations.
Pour ce qui est des économistes, comme Ridha Saïdi, il aura à se creuser les méninges pour endiguer l’inflation car la situation ne serait pas facile, ne serait-ce qu’en se référant au dernier déclassement de deux crans de la note souveraine de la Tunisie par l’Agence de notation « Standard ans Poor’s ».
Ce déclassement indique, comme l’a expliqué Mohamed Haddar, président de l’Association des économistes tunisiens, que « le travail du gouvernement n'était pas convaincant et les indicateurs économiques et politiques étaient alarmants. Conséquence : la Tunisie aura du mal à contracter des crédits et ce malgré l'accord entre la Tunisie et les États-Unis, selon lequel les Américains se porteront garants d’une partie des dettes Tunisiennes ».

L’avenir ne s’annonce pas rose…

04/06/2012 | 1
min
Suivez-nous