« Vous ne nous connaissez pas ! », c’est ainsi que l’un des employés de la CPG a interpellé le conseiller présidentiel, Noureddine Ben Ticha, lors de la visite du président à Gafsa. Une visite mouvementée malgré le discours officiel, une visite qui a montré, s’il le fallait, le décalage entre les préoccupations du peuple et sa classe politique.
Nos dirigeants ne nous connaissent pas, et ne connaissent pas les Tunisiens. Pour exemple, notre chef du gouvernement qui découvre subitement qu’il existe encore des gens qui habitent dans des huttes en Tunisie. Et après cette découverte, il s’en indigne en disant que ce n’est pas normal, à la manière de Hammadi Jebali quand il demandait où était le gouvernement ! Il a fallu qu’il aille à Jendouba pour le voir de ses yeux. Quelqu’un devrait lui dire qu’il en existe beaucoup dans la périphérie de Tunis…
Autre exemple, la vague de froid qui a frappé le Nord-ouest tunisien. On aura beau dire, mais il n’y a rien de nouveau sous le soleil, ça arrive chaque année. Mais pour se donner de la consistance et pour donner le change, on envoie une délégation gouvernementale pour constater que…la neige tombe. Pour pousser la blague au cynique, la délégation gouvernementale n’a pas pu parvenir à sa destination parce que la route est coupée, évidemment. Quelle utilité que le ministre de l’Equipement, par exemple, soit présent sur les lieux ? Et s’il fallait prendre des mesures exceptionnelles, pourquoi ne pas accorder plus d’égards aux pompiers, policiers et agents de la Garde nationale qui sont déjà sur place ?
Hier, le président de la République, M. Caïd Essebsi a reçu le président d’Ennahdha, Rached Ghannouchi. Jusque là rien d’exceptionnel. Mais dans le communiqué publié suite à la rencontre, on évoque « l’amélioration de la situation sécuritaire et les indicateurs économiques positifs en ce début 2017 », rien que ça ! Parlent-ils vraiment de la Tunisie ou s’agit-il d’un autre pays ? Y a-t-il un seul opérateur économique en Tunisie qui qualifierait la situation de « positive » ? Est-ce que la situation sécuritaire tunisienne comporte aussi les contestations et les manifestations dans les régions ou s’agit-il de la situation sécuritaire de la route entre Montplaisir et Carthage ? Et puis, quels indicateurs économiques peut-on dégager en 18 jours de « début 2017 » ? Il ne peut s’agir que des chiffres pipés de l’INS à propos du chômage car c’est le seul cas où tout va bien…
Parlons aussi des élections municipales. L’assemblée devrait pouvoir voter, aujourd’hui, pour le remplacement de trois membres au sein de l’ISIE. Toutefois, ce n’est aucunement une garantie pour que ces élections aient lieu. Les seules élections qui pourront –ou pas- instaurer une démocratie locale et participative ne semblent pas être une priorité pour nos dirigeants. Eux ne subissent pas les tracas de centaines de milliers de citoyens avec, pour cause, les délégations spéciales installée à la va-vite. La mise en place d’une démocratie directe, qui influe sur le quotidien des citoyens et qui permettra d’enraciner les traditions de vote, non ce n’est pas si important, le prix politique serait trop lourd à payer pour des partis politiques incapables de remplir une salle des fêtes.
Puisqu’on parle de l’assemblée, évoquons le vote sur la commission d’enquête de l’IVD. Ennahdha et le Front populaire se sont opposés à la mise en place de cette commission parlementaire. Soyons d’accord, elle ne servirait à rien de toute façon. Mais est-il si difficile de donner des gages de bonne volonté ? Est-il si difficile de cacher, un tant soi peu, les petits arrangements à un peuple qui en a marre ? Soyons rassurés, l’IVD a demandé à la cour des comptes d’auditer ses comptes pour l’année 2015. Et après ? Les résultats d’une telle audition, s’ils ne font pas plaisir à qui-vous-savez, rejoindront les décisions du Tribunal administratif.
Autre exemple ? La loi 52. Je ne vais pas entrer dans le débat sur l’opportunité ou pas de supprimer les peines de prison pour les simples consommateurs même si je trouve ridicule une telle punition. Les gens qu’on a élus en 2014 ont pris l’engagement ferme de faire modifier cette loi pour enlever, justement, ces peines de prison abusives. Toutefois, en 2017, on nous prend pour des débiles en essayant de passer une version de la loi qui garde quand même ces peines de prison ! La moindre des choses aurait été de ne rien faire, ça aurait au moins évité le gaspillage de ressources et de temps.
Ils ne nous connaissent pas, ne connaissent pas les quartiers, les régions, les gens. La parlotte et les promesses ne marchent plus. Le temps du diagnostic et des états des lieux est fini. Il est temps d’assumer.
Commentaires (9)
Commenter@Chdoula
@ Marouen Achouri (bis)
Si ce n'est pas trop vous demander...quels petits arrangements...?
Quand on insinue qu'il y a je ne sais quels "petits arrangements" ( et bientôt un complot ?) entre les islamistes et le Front populaire, on fournit des explications...à défaut de preuves...
Maxula.
@ Marouen Achouri
"Les résultats d'une telle audition"...
Vous confondez "auditionner" et "auditer"...ainsi que "audition" et "audit"...
Macula.
B.N : merci d'avoir attiré notre attention.
@Zohra - correction
Pas grave !
À la manière de Zola : j'accuse tout le monde
@correction
désolée
y a quelqu'un?
la région du Nord
Cette région c'est elle fait vivre une bonne partie de la Tunisie c'est grâce à cette région qu'on est deservie en eaux, ils ne faut pas l'oublier.
Espérant qu'un jour on tombera sur une âme charitable et qui prendra les bonnes décisions
Si, ils nous connaissent...
Mais pour différentes raisons, ils ne veulent pas agir : Parce qu'ils s'en fichent, parce qu'ils sont trop contents de s'en être sortis et que ça leur a ouvert l'appétit, parce qu'ils voient plus l'intérêt de défendre leurs partis (corrélativement à leurs ambitions) que la patrie (notion abstraite et largement secondaire par rapport à tout le reste), parce que ça nécessite de l'abnégation et un effort authentique et de longue haleine qu'ils ne sont pas prêts à consentir, et parce qu'ils savent au plus profond d'eux-mêmes que si le peuple sortait de sa détresse socioéconomique et s'en sortait, il ne voudrait certainement plus d'eux comme gouvernants.