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Chroniques
Quel rôle pour l’UGTT ?
Par Synda Tajine
23/01/2024 | 15:59
4 min
Quel rôle pour l’UGTT ?

Il est loin le temps où l’UGTT était un acteur influent sur la scène politique. C’était une stratégie opérée du temps de Houcine Abassi et continuée depuis, au début du mandat de Noureddine Taboubi. Rappelez-vous, en 2015, le Quartet – dont l’UGTT a fait partie aux côtés de l’Utica, de la LTDH et de l’Onat – avait conduit un dialogue national qui lui a permis de décrocher le premier prix Nobel pour la Tunisie. Celui de la Paix.

C’est d’ailleurs en tant que récipiendaire de cette distinction que les prisonniers politiques, victimes du régime Kaïsiste, ont lancé un appel au Quartet pour leur prêter main forte. Il s’agit d’un appel de la dernière chance, ou plutôt d'un appel désespéré compte tenu du rôle que certaines des composantes du Quartet ont adopté ces derniers mois. D’ailleurs, des quatre organisations qui ont conduit le dialogue national en 2014, seule la Ligue des droits de l’Homme continue à batailler pour faire entendre les voix des opprimés.

 

D’ailleurs, la réponse a été sans équivoque. C’est un niet que l’UGTT oppose à leur appel. Mais, il ne le dit pas en assumant clairement sa position en faveur du pouvoir actuel. Il le dit à demi-mots en préférant se cacher derrière des généralités que n’importe quelle partie « neutre et impartiale » auraient proférées : présomption d’innocence oui, mais confiance en la justice ; accélération des procès oui, mais les juges ont leurs raisons pour faire ce qu’ils ont décidé de faire.

La position de l'UGTT de Taboubi est tout sauf courageuse. Certains observateurs de la scène politique y voient une position « de raison », pensée et réfléchie. L’UGTT préfère clairement, d’après eux, se consacrer à son rôle social en enterrant celui, politique. Est-ce vraiment ce que la centrale syndicale a décidé de faire ? S’agit-il réellement de privilégier le calme afin de veiller à l’intérêt du pays ?

 

Ces dernières années, l’UGTT nous avait pourtant habitués à être la principale force du pays, à occuper le devant de la scène avec ses positions fortes et tranchées et avec sa grande force de frappe et de mobilisation. Ce n'est plus le cas aujourd’hui. C’est une centrale syndicale inoffensive qui se tient sur la scène nationale. Elle ne se prononce plus sur les polémiques et les injustices, elle attend qu’on la sollicite pour esquiver subtilement la question.

L’UGTT a raté le coche depuis longtemps. Elle avait, début 2023, enrobé son initiative de sauvetage de sucre afin de ne pas froisser le pouvoir. De dialogue national bis, elle s’était contentée d’une initiative fourre-tout dont personne ne se rappelle plus aujourd’hui. « La Tunisie de l’avenir », ce nom vous dit quelque chose ? Non, vous n’êtes pas le/la seul(e).

Le Syndicat de Noureddine Taboubi a aussi raté le coche un certain 25 juillet 2021, lorsqu’il s’est dépêché de soutenir le pouvoir putschiste sans se méfier une seconde des retombées hégémoniques qu’une tel coup de force allait engendrer. Rappelez-vous, la centrale syndicale avait fait partie de ceux qui avaient applaudi les mesures du 25 juillet et salué le gel du Parlement et la disgrâce des islamistes au pouvoir...pour se rétracter par la suite.

 

La relation entre l’UGTT et le pouvoir n’est en effet pas des plus limpides. Elle est faite de moments d’accalmie et de tensions contenues. Le gouvernement a clairement décidé de mettre l’UGTT à l’écart des discussions importantes auxquelles elle a toujours participé, notamment les pourparlers avec le FMI, et le Président, lui, n’est pas connu pour affectionner les soutiens, les négociations ou les concertations avec ceux qui se disent « amis ».

L’UGTT est consciente que le pouvoir actuel ne ressemble à aucun autre et que s’y frotter un peu trop constituerait un point de non-retour. Le régime lui, s’est mis à dos la quasi-majorité des organisations nationales, acteurs politiques et médias, il ne semble pas non plus enclin à déclarer une guerre ouverte avec le Syndicat. Surtout qu’il pourrait lui être utile.

L’Exécutif joue en effet avec les nerfs du Syndicat. Les menaces de grève générale ne le font pas sourciller. Il refuse pourtant toute confrontation frontale qui pourrait lui porter préjudice mais ne traite pas avec l’UGTT comme la « force » du pays qu’elle a toujours été et qu’elle pense encore être. Un jeu subtil face auquel la centrale syndicale ne sait pas comment réagir ni quelle position adopter.

 

Loin d’être une centrale syndicale « classique », l’UGTT tire sa légitimité de ses combats sociaux mais aussi politiques, de ses positions face au pouvoir et de son parcours historique. Ceci ne pourrait être effacé d’un coup de baguette magique ou de déclarations prudentes et hésitantes. Encore faut-il que le Syndicat de Noureddine Taboubi se mettre d'accord sur sa position et le rôle qu'il a vraiment envie de jouer sur la scène nationale. Autrement, il risquerait de n'en jouer aucun...

Par Synda Tajine
23/01/2024 | 15:59
4 min
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Commentaires
Crow85
l'UGTT a peur
a posté le 23-01-2024 à 21:49
On me dit que des élections auraient dû être organisées au sein de l'UGTT et que Tabboubi risque de perdre sa place...mais encore, l'UGTT a profité durant 10 ans de la faiblesse de l'Etat pour se faire une place qui n'aurait jamais dû lui revenir. Défendre les travailleurs c ok, faire de la politique non. Il est claire qu'entre temps bcp de dossiers de corruptions planent au dessus de l'UGTT...(on pourrait même revenir à l'époque de Abdeslem Jrad..) et les responsables d l'UGTT savent parfaitement que KS est capable de mener une petite enquête et de les traduire devant la justice (il n'a pas eu peur de ghannouchi et de Kamel Ltaief ou Marouen Mabrouk, c pas des syndcalistes qui lui feront peur.)
Citoyen_H
à MON AVIS,
a posté le à 09:02
cela a été déjà fait, et les preuves sont, en stand by, bien au chaud.
Mais pour maintenir une certaine paix sociale, Kaissoune temporise. !!
La période qui s'étala de 2011 à 2021, et peut-être même, jusqu'à ce jour, fut celle ou l'ensemble des diverses factions de racailles pulvérisèrent le paroxysme de "l'acceptable".
Son heure viendra. Tout est question de temps. C'est inévitable.

"KS est capable de mener une petite enquête et de les traduire devant la justice".

momo
Notre UGTT est en phase terminale .
a posté le 23-01-2024 à 16:45
L'UGTT est en phase de décomposition accélérée, pour des raisons simples ,ils ne sont plus de leurs temps ,il sont hors course, l'effritement du syndicalisme est une réalité dans le monde ,leurs ADN de gauche ne fait plus rêver ,le monde se droitise ,alors que les syndicats campe à l'extrême gauche .Notre UGTT est en phase terminale ,mauvaise gouvernance, corruption et trahison envers leurs bâtisseurs et surtout le militantisme réel et sincère de jadis n'existe plus.