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Chroniques
Quand la presse éternue, la démocratie s’enrhume
Par Nizar Bahloul
03/05/2020 | 14:00
4 min
Quand la presse éternue, la démocratie s’enrhume

 3 mai, Journée mondiale de la presse. Comment se porte la nôtre ? Dans ce genre d’anniversaires, les rapports et les articles de presse se concentrent généralement sur les questions des libertés et des atteintes à l’indépendance des journalistes. Rares sont les analyses touchant les entreprises de presse dans lesquelles exercent ces journalistes. Le raisonnement absurde que les journalistes peuvent exister sans entreprises de presse demeure dominant. Pourtant, force est de rappeler que sans de bons récipients, sans de bons ustensiles, sans de bons robots ménagers, on ne pourra jamais cuisiner un bon plat.  

Aujourd’hui, plus que jamais, les entreprises de presse sont menacées dans leur existence. Il y a d’abord un problème structurel qui touche l’ensemble des médias aussi bien audiovisuels qu’écrits. Les télévisions classiques sont menacées par les nouveaux venus Netflix, Amazon TV ou Disney +, la presse imprimée est menacée par la presse électronique et cette dernière est menacée par les réseaux sociaux qui avalent tous les budgets publicitaires. A cette crise structurelle mondiale, s’ajoute la crise conjoncturelle du coronavirus. Les télévisions remercient les annonceurs qui n’ont pas suspendu leurs commandes publicitaires, la presse imprimée se cherche une place sur le web. Quant à la presse électronique, elle balbutie encore entre un lectorat sceptique à l’achat des lectures qu’il consomme et un marché publicitaire en dégringolade.

La crise qui touche la presse est mondiale et la Tunisie ne fait pas l’exception. Nos télévisions bradent leurs prix, jusqu’à 200 dinars le spot pub, contre 5000 dinars avant la crise. Il n’y a quasiment plus de presse imprimée et la presse électronique habituée au télétravail, dans sa majorité, est frappée elle aussi par la décroissance du marché publicitaire.

 

J’ai l’avantage d’avoir cette double casquette de journaliste et de chef d’entreprise et, en ce 3 mai, je ressens le besoin d’analyser en tant que patron de presse. Une fois n’est pas coutume, mais c’est nécessaire pour comprendre que les difficultés que rencontre un patron de presse ont des répercussions sur le travail des journalistes et, conséquemment, sur la liberté de la presse et la démocratie. C’est une vérité de La Palice.

En tant que chef d’entreprise et après 6 semaines de confinement, je n’ai pas pu établir de factures, puisque je n’ai pas eu de commandes de mes hypothétiques clients, eux-mêmes en confinement. Je n’ai pas pu recouvrir les factures déjà établies puisque mes clients sont en confinement.

Vu que notre activité d’entreprise de presse s’est poursuivie normalement, on n’a pas droit aux 200 dinars (65€) d’aide de l’Etat, d’après le décret 4/2020 de la présidence du gouvernement. 200 dinars pour lesquels on doit remplir une montagne de paperasse et  franchir des obstacles infranchissables et qui représentent peanuts comparés aux salaires des journalistes, souvent à quatre chiffres pour les trois ans et plus.

En revanche, j’ai dû payer les impôts fin mars et fin avril (à cinq chiffres), ainsi que la CNSS (cotisations sociales, cinq chiffres également) mi-avril, les salaires de mars et d’avril (en intégralité pour les journalistes de Business News, mais seuls 54,3% des journalistes tunisiens sont dans ce cas) et l’Etat nous a obligés à payer une journée de travail en sus par le biais du décret 5/2020.

On pense que le cauchemar est fini avec la fin du confinement total demain, mais non, car ce même Etat qui ne donne rien et qui ponctionne, m’impose (en tant que chef d’entreprise) un manuel de procédures et de mettre à la disposition du personnel les dispositifs de protection et de sécurité sur le lieu de travail. Un manuel de procédures imposé par le décret 208/2020 du 2 mai 2020, mais qui n’est pas encore prêt, alors que la reprise est pour demain ! Last but not least, ce même Etat interdit aux mamans de mon équipe (et j’en ai !) de rejoindre leur lieu de travail !

Alors comment faire pour ne pas fermer boutique, pour continuer à assurer sa mission et à employer ses journalistes, tout en respectant la loi ? Ce qui est valable pour moi l’est aussi pour l’ensemble des entreprises de presse tunisiennes, mais aussi pour l’ensemble des entreprises.

 

Dans tous les pays développés, les Etats font tout pour aider les entreprises à reprendre leurs activités afin de renouer avec la croissance ! Des dispositifs particuliers sont pris pour certains secteurs sinistrés dont la presse sans qui il n’y a pas de démocratie. Sauf chez nous, on ponctionne, on impose, on interdit ! C’est comme si on voulait que les entreprises se cassent la gueule et ferment boutique !

En cette journée de fête de la presse, je tiens à rappeler quelques points fondamentaux, des Lapalissades, il ne saurait y avoir de démocratie sans liberté de la presse, il ne saurait y avoir de liberté de la presse sans journalistes indépendants, il ne saurait y avoir de journalistes indépendants sans entreprises de presse autonomes et il ne saurait y avoir de journalistes tout court s’il n’y a plus d’entreprises de presse.

Par Nizar Bahloul
03/05/2020 | 14:00
4 min
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Commentaires
Justinia
@ cesarius.
a posté le 06-05-2020 à 16:51
bonjour,
"La liberté d'expression est à gogo" dites-vous."Mais il faut crypter une femme avant de la montrer..."
On n'est pas sorti de l'auberge...
Cordialement.
cesarious
la liberté d'expression est à gogo , que vouLez-vous encore?
a posté le 05-05-2020 à 19:28
parlez , déclarez, criez,écrivez, commentez ce que vous voulez, dans n'importe quel média, à l'avenue HABIB BOURGUIBA, à n'importe quel lieu, matin, soir et méme le dimanche, aucun entendant; la caravane passe, aboyez ce que vous voulez, on s'en fout, rien ne peut nous bouger un seul poil ou un cheveu? on vous a octroyé la liberté d'expression, qu'est-ce - que vous voulez encore, estimez-vous heureux de respirer , nous on est là jusqu'à nouvel ordre, les lois, c'est nous qui les confectionnent, c'est nous qui les promulguent, c'est nous qui gouvernent, c'est nous qui commandent, vous n'avez qu'à boire l'eau de la méditerranée vous a ordonné LA fameuse représentante CAMELEON" de mille couleurs" keskeslou arjaa laslou"
Justunia
@ BN
a posté le 05-05-2020 à 15:22
J'adhère totalement à votre dernier paragraphe.
aldo
==== BN , que se passe t 'il ====
a posté le 04-05-2020 à 15:34
aujourd'hui c est au ralenti , peu ou pas d articles , dommage y a pas de TAKTII OU TARRIICH ..
naif
Collecte
a posté le 04-05-2020 à 12:13
@NB t'inquiete Nizar, on va faire une quête. On ne laissera pas tomber ce journal libre, même si je suis aux antipodes de sa ligne éditoriale. Mais au moins les haineux, les nostalgiques de la dictature, les islamophobes, les anti-Nahdha maladifs, les chambres de soutien à Abir pourront s'exprimer et croire qu'ils sont nombreux malgré les claques électorales qu'ils n'ont cessé de subir.
Et franchement, comparé aux autres sites similaires (avec la même ligne éditoriale) BN est la meilleure, et il faut tout faire pour qu'elle ne disparaisse pas à cause de petits soucis financiers.
Le marseillais
BN
a posté le 04-05-2020 à 11:49
Pensez a changé vos 2 modératrices 2 saboteuses
DHEJ
Liberté d'expression...
a posté le 04-05-2020 à 10:02
Article 7 : Est considéré comme journaliste professionnel au sens des dispositions du présent décret-loi, toute personne titulaire au moins d'une licence ou d'un diplôme équivalent et dont l'activité principale et régulière consiste à recueillir et à publier les nouvelles, les informations, les opinions et les idées et à les transmettre au public, dans une ou plusieurs entreprises de presse quotidienne ou périodique, dans des agences d'information ou dans une ou plusieurs entreprises de communication audiovisuelle ..


Alors tu ne peux pas être les deux



Encore tu n'es pas un chef d'entreprise mais plutôt un Président-Directeur Général d'une Société Anonyme...


Tu commets les erreurs que nos stagiaires superficiallistes.


Merci de ne pas censurer !
DHEJ
La plus ancienne presse libre...
a posté le 03-05-2020 à 18:51
Le Coran...

On a attribué à ALLAH une femme, des enfants

Il y a ceux qui ont usé de la liberté pour demander des miracles...

Puis en puisant de la liberté il y a ceux qui ont nié son existence...

Mais qui osera user de la liberté de se proclamer ALLAH ?

PERSONNE !

La liberté a ses limites, ses bornes !


Joyeuse fête pour les êtres humains.
Nephentes
Vous avez raison
a posté le 03-05-2020 à 15:23
Vous evoquez les difficultes de votre activite avec pudeur mais avec clarte et dignite
L 'information et l'analyse independante sont des metiers precieux et fragiles qui necessite une protection financiere juridique et deontologique
Helas en Tunisie il faut de grands compromis pour trouver des protecteurs et menager la chevre qui peut se transformer soudainement en chou
BN n'echappe pas a la regle cela pollue son aura de media engage mais objectif
Lotfi Tirellil
Et les suites logiques, qu'est-ce que vous en faites ?
a posté le 03-05-2020 à 14:04
C'est une drôle de façon de l'exprimer ! Généralement et plus logiquement, on dit que lorsque la démocratie s'enrhume, la presse éternue : simple logique de cause à effet... Ou, encore, que lorsque la presse s'enrhume, c'est la presse qui éternue : encore une suite logique ! Mais là, on est juste au milieu du gué !
mansour
La pandémie contribue à renforcé le pouvoir d'Ennahdha-Elyes Fakhfakh-Abbou et contribue à appauvrir le peuple,le pays et ses acquis
a posté le 03-05-2020 à 13:10
la dictature de la santé public franchit le pas inquiétant avec les pleins pouvoirs et dérives autoritaires des responsables incompétents au Bardo+Kasba+Carthage et ministère de la santé
Belha
Veritas
a posté le 03-05-2020 à 12:27
bonne fête , bonne continuation et courage nous avons besoin de vous.
Merci a vous et vos collaborateurs .
Abir
Bonne fêtes à tout et toute les journalistes patriotes
a posté le 03-05-2020 à 12:19
Et en particulier Business News et toute son équipe avec d'avantage de réussite et d'objectivité ! Mais aussi, nous attendons de vous tous plus d'informations et de contrôle au gouvernement et surtout où sont et seront dépensés l'argent de 1818 sous par sous !?