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Chroniques
La prochaine bataille de Mechichi sera avec le syndicat
Par Marouen Achouri
09/09/2020 | 15:59
4 min
La prochaine bataille de Mechichi sera avec le syndicat

 

Nous ne sommes pas à une aberration près en Tunisie, mais la dernière en date fait quand même mal aux vrais patriotes. Le Groupe Chimique va se mettre à importer des engrais au profit des agriculteurs vu que la saison des semences approche à grands pas. Il s’agit de la matière communément appelée « amonitre », dont la Tunisie était l’un des principaux exportateurs mondiaux. Aujourd’hui, on est obligés de dépenser près de 45 millions de dinars pour en importer.

Cette anecdote montre à elle seule la déliquescence dans laquelle nous sommes, entre conservateurs crieurs et progressistes rêveurs, mais tous incapables. Aucun gouvernement depuis la révolution n’a réussi à établir un semblant de paix sociale. Des dossiers comme celui du phosphate, d’El Kamour, des caisses sociales, des entreprises publiques et j’en passe, n’ont pas été résolus, donc les problèmes s’aggravent et nous en arrivons à des aberrations.

 

Le gouvernement Mechichi devra s’atteler à régler ce genre de dossiers. Ce sera l’un de ses principaux tests dans les semaines et mois à venir. Des dossiers que personne parmi les politiciens de la nouvelle troïka (Ennahdha, Qalb Tounes et Al Karama) n’a évoqué, notamment par manque de compétence. Eux, ce qui les intéresse, c’est le pouvoir et le vacarme, rien d’autre. Par contre pour Hichem Mechichi, s’il souhaite faire correctement son travail, ce seront des dossiers de première importance, loin des vieux slogans désuets qu’il a utilisé lors de son discours d’investiture.

 

S’il y a bien une partie prenante avec laquelle tout devra être discuté pour espérer arriver à un changement, ce sera l’UGTT. Tous les vœux pieux du chef du gouvernement ne pourront avoir une chance d’exister que si la coordination avec le syndicat est optimale. Conscients de cotte réalité, plusieurs ministres ont déjà commencé les rencontres avec les syndicats concernés notamment Habib Ammar au Tourisme et Faouzi Mehdi à la Santé. Les batailles à mener avec le syndicat sont très nombreuses au vu de la situation du pays à tous les niveaux. Reste à savoir si le gouvernement se battra en compagnie de l’UGTT ou se battra contre l’UGTT. Là est la vraie question.

 

Ce gouvernement a été jeté dans l’arène politique et sociale par le président de la République, Kaïs Saïed, qui lui-même n’est pas initié à ce genre de difficultés. Donc, le gouvernement Mechichi n’a aucune légitimité électorale et ne pourra même pas bénéficier d’un « report de légitimité » venant du président. Par conséquent, ce gouvernement a été repêché par Ennahdha, Qalb Tounes et Al Karama qui se proposent de lui fournir un soutien politique. Les jours prochains nous montreront la nature de la contrepartie. Mais ce soutien politique négocié ne suffira pas au gouvernement pour tenir tête à l’UGTT si jamais il fallait en arriver là. Il faudra également prendre en considération le fait que l’un des soutiens politiques de ce gouvernement, à savoir Al Karama, affiche une hostilité assumée envers la centrale syndicale, ce qui n’est pas de nature à faciliter les relations. Celles entre l’UGTT et Ennahdha ou Qalb Tounes ne sont pas non plus de la meilleure qualité.

 

Il faudra également beaucoup de courage pour affronter les vrais dossiers d’une Tunisie en panne. Les fameuses « réformes douloureuses » dont tout le monde parle mais que personne n’arrive à mettre en place. Un courage qui a fait défaut lors de la phase de formation et d’adoption de ce gouvernement. Le triste épisode du ministre des Affaires culturelles imposé de force par le président de la République, en plus d’autres ministres à des postes importants, ne laisse rien présager de bon concernant le volontarisme du gouvernement et de son chef, Hichem Mechichi.

De son côté, les représentants de la centrale syndicale, en bons politiciens qu’ils sont, observent un silence prudent concernant ce gouvernement et ne donnent pas encore d’indication claire. Il faut dire qu’il n’y a pas eu d’échange réel, outre le fait rassurant pour l’UGTT de voir Mohamed Trabelsi aux Affaires sociales. Les premières empoignes risquent d’être déterminantes pour la suite de la relation entre le gouvernement et la centrale.   

 

Les intervenants de ce bras de fer qui se profile ne doivent pas non plus oublier le contexte dans lequel ils évoluent. En filigrane de ces tractations, il existe une grogne sociale qui s’amplifie au fur et à mesure des difficultés économiques. Il y a un grand nombre de personnes qui se retrouvent aujourd’hui sur la paille à cause de la crise Covid-19 et surtout de l’incapacité de l’Etat à préserver les emplois et les entreprises. La démission collective de la chose publique que l’on observe chaque jour ne tardera pas à se transformer en colère. Aucun de ces intervenants ne semble conscient de l’ampleur de l’hécatombe sociale et économique engendrée par le virus. Tout cela avec une menace terroriste toujours présente, comme cela nous a été douloureusement rappelé dimanche.

La quantité de problèmes que doit affronter la Tunisie est grande, mais cela deviendrait un détail si l’on arrivait à acquérir la conviction que ce gouvernement en sera à la hauteur. Aujourd’hui, nous ne l’avons pas encore.

Par Marouen Achouri
09/09/2020 | 15:59
4 min
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Commentaires
Rationnel
L'UGTT est innocente des vos accusations
a posté le 10-09-2020 à 13:36
L'UGTT est innocente des vos accusations, elle reste le dernier rempart contre Ennahdha et c'est ce qui vous gêne.
L'UGTT n'est un syndicat pour les privilégiés: la Tunisie a une économie socialiste en grande partie. L'état contrôle un grand nombre d'activités: l'enseignement, la santé, la justice, le transport, l'extraction minière, la défense, électricité, l'eau, l'assainissement, la police, 40% des banques, 600 000 hectares de terres agricoles.
Il reste très peu au prives. Les activités qu'on laisse aux prives sont des activités ou les travailleurs ne sont pas bien payes comme le tourisme, l'agriculture, le peu d'industrie qui reste. On ne paye un serveur comme un docteur. Aux USA un docteur est paye 200 fois plus qu'un serveur (300000 pour le docteur vs 15000 dollars pour le serveur).
L'UGTT représente les enseignants qui sont le plus grand groupe au sein du syndicat et ils/elles ne sont pas des privilégiés. L'UGTT représente le personnel soignant et la aussi ce sont des gens qui méritent d'être bien payes sinon beaucoup de pays sont a la recherche de ces professions comme le Canada, l'Allemagne. De même pour la police, le juges et le personnel des différents ministères.

L'UGTT est un frein contre l'injustice sociale. Dans les pays ou les syndicats sont très faibles comme les USA tout les gains de l'économie sont retenus par les plus riches. Aux USA pendant les 40 dernières les salaires de la majorité n'ont pas augmente malgré que la productivité a augmente. Durant le Covid la fortune d'Elon Musk s'est multiplie par 4 et 23 millions de travailleurs ont perdu leurs emplois, Musk a exige une réduction de salaire de 10%. La fortune de Bezos a dépassé les 200 mille milliards de dollars soit 5 fois le produit national brut de la Tunisie.
Bezos ou Musk sont des oligarques, ils ont un pouvoir parallèle visible, mais qui sont les oligarques en Tunisie? Pouvez nommer un seul? Des fortunes qui peuvent s'ils le veulent former des armées plus puissante que celle des USA.
Les problème économiques en Tunisie sont du a la banque centrale, aux banquiers, la corruption generalisee, et le système administratif colonial qui est toujours de vigueur.
Forza
L'UGTT accentue l'injustice sociale
a posté le 10-09-2020 à 07:11
Ce titre peut paraitre provocant mais c'est la réalité. L'injustice sociale et la mauvaise répartition des richesses existent bien sûr entre les familles oligarque qui possèdent la grande partie de la richesse du pays et la majorité du peuple. Cela dit, cette injustice existe aussi entre ceux qui travaillent pour l'état d'un côté et les ouvriers précaires du privé, les femmes rurales et les chômeurs de l'autre côté. L'UGTT agit comme un syndicat pour les privilégiés de la fonction publique, c'a là ou elle impose à l'état des augmentations de salaires, des primes, des avantages sociaux. Ces sommes payées par l'état sont bien sûr au détriment des investissements pour les couches les plus démunies, qui n'ont aucune protection sociale (femmes rurales, ouvriers dans l'informel, chômeurs). En agissant comme un lobby des fonctionnaires, l'UGTT accentue l'injustice sociale. Rendre le pays plus attractif pour les investissements créera de l'emploi pour les chômeurs, qui eux n'ont aucun avocat pour les défendre et aidera à améliorer les conditions des ouvriers du privé et à intégrer l'informel.
Aussi la pratique imposer par l'UGTT de faire hériter son job au sein des entreprises, est tout sauf social car elle ferme de cette manière la porte aux fils et filles de ceux qui n'ont pas eu la chance d'entrer dans le cercle des privilégies défendus par l'UGTT.
L'hégémonie actuelle de l'UGTT va contre les intérêts du pays.

DUS
Canossa
a posté le 09-09-2020 à 22:29
Comme tous ses prédécesseurs , Hichem Mechichi finira lui aussi par ' aller a Canossa '
Rationnel
La bataille contre le syndicat: une perte d'energie et de temps
a posté le 09-09-2020 à 20:21
Mechichi devrait se concentrer sur des projets réalisables.
- L'UGTT malgré les critiques est un grand acquis pour la Tunisie, ce n'est pas l'ennemi. La Tunisie n'a pas de couverture sociale ou une assurance de chômage suffisante donc l'excédent d'emplois dans la fonction publique est une forme de couverture sociale. Les pays qui ont détruit leurs syndicats comme les USA se retrouvent maintenant dans une impasse. Les inegalites sociales rendent les pays ingouvernables. La qualité de vie de la majorité se dégrade.
- 45 millions de dinars, soit 15 million de dinars est une somme très modeste.
- La première priorité pour Mechichi est : encouragement des projets d'énergie renouvelables. Ces projets vont aider a réduire le déficit commercial (l'énergie représente le 1/3 du déficit) et vont attirer des capitaux étrangers et réduire le prix de l'électricité, électricité a partir d'énergie solaire coûte le tiers de celle a partir du gaz naturel.
- La Tunisie a conclu des marches pour l'installation de 500 MW en 2019. C'est un investissement d'au moins 500 millions de dollars. On un potentiel pour l'installation d'au moins 1000 Mw par, un investissement d'au moins 1000 millions de dollars avec la création de centaine de milliers d'emplois et l'acquisition d'une expertise qui sera très prisée partout dans le monde. Le plan France Relance France compte investir 30 milliards d'euros, le Plan de relance Allemand un autre 30 milliards additionnels.
- La deuxième priorité devrait être l'introduction des voiture et camions électrique. L'importation de voiture électrifie a n'importe quel moment pour tout citoyen sans droit de douanes. Ceci va réduire nos importations d'hydrocarbure, améliorer l'environnement et réduire les frais de transports.
- Troisième priorité: travailler avec la banque centrale pour la réduction de l'inflation et des taux d'intérêts d'au moins 3%. Il n y a aucune raison d'avoir une inflation de 6% quand le reste du monde a une inflation de 0% et que le Dinar est stable. La BCT mène une politique de taux d'intérêts élevés pour sauver les banques en sacrifiant l'économie, les banques se portent il est grand temps de demander aux banques de sacrifier un peu de leurs gains pour l'intérêt de l'économie.
- quatrième priorité: la BCT doit procéder au quantitative easing comme le reste des banques centrales au monde. La BCT peut acheter la dette du gouvernement (la Banque centrale américaine: la Fed a acheté pour 7 mille milliards de dollars de dettes), la BCE a des programmes similaires, la Banque du Japon a acheter des bonds de trésors du gouvernement qui représentent 150% de l'économie. La BCT peut acheter la dette de la STEG et les autres sociétés étatiques avec un taux de 0%. ce sont les banques centrales qui financent une grande partie des plans de relance et la BCT doit faire de même.
Forza
Les deux problèmes de la Tunisie l'administration
a posté le 09-09-2020 à 17:35
et l'UGTT. Ils sont les problèmes majeurs car ils présentent des handicaps pour une meilleure compétitivité, l'administration par sa bureaucratie et manque d'efficacité et l'UGTT pour ses grèves et sa défense de la fonction publique et ses privilèges ainsi que des sociétés étatiques et leurs pertes.
Le vrai combat est la responsabilisation de l'UGTT et ça va être un combat difficile car
- L'UGTT est une organisation forte et elle a des alliés politiques de poids en commençant par Kais Saied (il recevait Taboubi presque quotidiennement) et des partis proches de Saied comme Echaab.
- Elle a avec la fonction publique et ses fonctionnaires un outil de pression et de sabotage énorme à travers les syndicats de l'éducation, de la santé et du transport

Cette bataille avec l'UGTT est la vraie bataille pour rendre le pays attractif pour les investissements et pour augmenter sa compétitivité. Notre balance commerciale déficitaire avec la Chine et la Turquie est le résultat du manque de compétitivité.
La coalition d'Enanhdha, de Qalb et d'elkarama est la bonne coalition dans ce 'combat' car la base de ces partis n'est pas proche de l'UGTT. Les autres partis comme Echaab ainsi que le président ont besoin de l'aide de l'UGTT dans leur combat contre Ennahdha donc difficile de les voir dire la vérité a l'UGTT et exercer des pressions pour l'inviter à accepter les reformes. Le but devrait être avoir une UGTT responsable comme les syndicats allemands.