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L'affaire Ladgham, la énième bourde de Rafik Abdessalem
05/03/2013 | 1
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L'affaire Ladgham, la énième bourde de Rafik Abdessalem
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Quelques mois auparavant, l’affaire « SheratonGate » a retenu l’attention de l’opinion publique tunisienne pendant des semaines. Devenue le sujet préféré de toutes les conversations scabreuses, elle a même été rapportée par des médias étrangers, friands d’anecdotes croustillantes.
Mais le très controversé ministre des Affaires étrangères ne saura rester longtemps dans l’ombre. Un nouveau scandale vient secouer aujourd’hui le monde de la diplomatie tunisienne. Rafik Abdessalem démet de ses fonctions Zohra Ladgham, chargée d’affaires à l’ambassade de Tunisie à Helsinki. Une décision jugée hâtive, non appuyée par une enquête et dont les accusations ont été vivement réfutées par la principale intéressée et qui lui a valu le feu roulant des critiques sur la scène politique mais aussi au sein même de son cabinet ministériel…

Au ministère des Affaires étrangères, Rafik Abdessalem évolue tel un éléphant dans un magasin de porcelaine. Celui qui soutenait, non sans arrogance, que la Tunisie avait 500 kilomètres de côtes, confondant ainsi la géographie de son pays avec celle de l’Etat qatari, n’a pas fini de faire parler de lui.

Le 26 décembre dernier, Rafik Abdessalem se retrouve au cœur du « SheratonGate », une affaire de gaspillage d’argent public qui doit son nom à l’hôtel Sheraton dans lequel - selon des investigations réalisées par la journaliste Olfa Riahi - le ministre des Affaires étrangères aurait séjourné, entre-autres en compagnie d’une « mystérieuse compagne », et a fait passer la note de 10 nuitées sur le compte du ministère. Mais au-delà de cette affaire, Olfa Riahi accuse également le chef de la diplomatie tunisienne d’avoir reçu un virement, dans un compte du département tunisien des Affaires étrangères d’un montant de 1 million de dollars, relatif à un don accordé par la Chine à la Tunisie. Un don qui aurait dû, légalement, atterrir dans la Trésorerie de l’Etat et non dans celui du ministère des Affaires étrangères.
Même si Rafik Abdessalem riposte et dément l’ensemble de ces accusations, cette affaire fait l’effet d’une bombe, surtout que ce dernier ne serait autre que le gendre du leader du parti au pouvoir, Ennahdha, Rached Ghannouchi.

Aujourd'hui, mais hormis cette affaire, le chef de la diplomatie tunisienne, connu pour ses innombrables bourdes et ses outrageuses maladresses, se retrouve aujourd’hui mêlé à un nouveau scandale. Pas plus tard qu’il y a cinq jours, Zohra Ladgham, chargée d’affaires à Helsinki, se voit démettre de ses fonctions et rappeler à Tunis par le ministre sur la base d’une vidéo ayant fait le buzz sur les réseaux sociaux.
Dans une déclaration à Naoufel Ouertani, sur Mosaïque Fm, Rafik Abdessalem affirme que cette vidéo - jugée « authentique » - montrant Mme Ladgham interrogée par la police finlandaise « en évident état d’ébriété », constitue une preuve de la « moralité légère » de la chargée d’affaires et représente ainsi un motif de limogeage. Des vérifications auraient été entreprises auprès des autorités finlandaises et des preuves seraient disponibles pour attester de cet état, précise le ministre qui déclare, également, qu’une commission a été, une fois cette décision prise, dépêchée à Helsinki pour procéder à une enquête sur les lieux et établir un rapport.

La rapidité dans la prise de cette décision, avant même l’enquête, fait soulever des points d’interrogation. De plus que, selon les usages diplomatiques, un ambassadeur ou chargé d’affaires ne se fait habituellement relever de ses fonctions qu’après avoir été rappelé à Tunis et auditionné par le ministère sur la base d’une enquête de deux jours. Selon les procédures en vigueur dans ce genre de cas, le dossier de Zohra Ladgham aurait dû être traité par le Conseil général du ministère, seul habilité à infliger des sentences disciplinaires. Ce genre de décision ne relève donc pas des prérogatives du ministre, en l’occurrence Rafik Abdessalem.

C’est ce que confirme Touhami Abdouli, secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes et responsable direct de Mme Ladgham, qui ne manquera pas de soulever la défaillance dans la procédure engagée par le ministre, auquel, les usages recommandent de s’entretenir avec la principale intéressée avant de décider des sanctions qui s’imposent.

Selon Touhami Abdouli, la décision du ministre n’aurait pas été prise sur la base de la vidéo, objet de controverse et vivement démentie par Mme Ladgham elle-même, mais suite à une autre erreur diplomatique, à savoir, l’utilisation du véhicule diplomatique par une personne étrangère à l’ambassade.

Mais si ces accusations semblent être ambigües et auraient été, selon Mme Ladgham, colportées par un de ses deux chauffeurs qu’elle souhaitait licencier, force est de rappeler que, dans ce genre de situation, les usages diplomatiques imposent la discrétion.

Les déclarations de Rafik Abdessalem, remettant en cause la moralité de Zohra Ladgham, chercheraient-elles à discréditer la chargée d’affaires ?

Une thèse que soutient Mohamed Bennour, porte-parole du parti Ettakatol, membre de la Troïka au pouvoir, qui affirme, dans un entretien accordé au journal « Ettounissia », que le ministre des Affaires étrangères a intentionnellement écarté Zohra Ladgham en usant d’une vidéo montée de toutes pièces à son encontre. Mohamed Bennour taxe Rafik Abdessalem de « misogyne », l’accusant de refuser de voir une femme à la tête d’une mission diplomatique, et appuyant ses propos par l’absence de diplomates féminines dans la liste des ambassadeurs publiée en septembre 2012.

Aussitôt limogée et avant même son audition, Zohra Ladgham se voit vite remplacée par un successeur qui ne serait autre, selon de nombreux bruits de couloir, que Souheïl Chelly, ancien de l’Institut national de la Statistique et réputé être proche de Rafik Abdessalem. Quant à l’affaire « SheratonGate, elle semble avoir fondu comme neige au soleil, après tous les remous qu’elle a suscités sur la scène politique. Olfa Riahi, interdite de voyage, est aujourd’hui accusée de « diffuser de fausses informations, de s’appuyer dans ses accusations sur des documents obtenus illégalement et de manquer de preuves matérielles ». Elle attend, ainsi, sa sentence.

C’est un ministère des Affaires étrangères en pleine déconfiture que cède Rafik Abdessalem à son successeur, avec de nombreuses affaires en suspens, des nominations compromettantes qui ne se basent sur aucun critère de qualification, selon les membres du syndicat de ce même département, et un personnel en colère qui menace de faire grève.
Selon les récentes fuites, quasi-officielles, le nouveau chef de la diplomatie tunisienne ne serait autre que l’ancien diplomate Othmane Jarandi qui aura le lourd fardeau de redorer l’image de la diplomatie tunisienne ternie par des mois d’amateurisme et de calculs partisans et étroits.


Synda TAJINE
05/03/2013 | 1
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