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Chroniques
La politique tue
22/12/2017 | 17:59
3 min

 

C’est une bien triste histoire qui est pratiquement passée inaperçue cette semaine, happée dans le tourbillon des intarissables querelles politiques. Une histoire comme on en voit souvent en Tunisie et qui ne font plus le buzz. Ce n’est qu’une enfant de 2 ans qui est morte faute de soins. Une enfant parmi tant d’autres, dont la situation précaire des parents, conjuguée à un système de santé défaillant, a joué de pas de chance.  Un système pourri qui broie les plus démunis, alors que la classe moyenne, de plus en plus paupérisée, peine à se soigner dignement.

 

Pourtant sur le papier, l’égalité de tous à l’accès aux soins est un principe fondamental sur lequel est axée notre législation sanitaire. La meilleure constitution au monde, celle de 2014, le dispose même dans son article 38. L’Etat devant garantir la prévention et les soins à tout citoyen et fournir tous les moyens afin de garantir la qualité des services de santé. La gratuité des soins pour les personnes à faible revenu est censée l’être aussi.

 

Tout cela est bien beau, n’est-ce pas ? Sauf que tout Tunisien sait ce qu’il en est réellement. On connait l’état de décrépitude de nos hôpitaux, le manque de moyens et d’équipements, les longs mois d’attente pour pouvoir subir une intervention chirurgicale ou tout simplement une IRM. Parfois, le patient trépasse en cours de route avant de pouvoir accéder à ces soins. Une situation aggravée par les disparités régionales, puisque les régions intérieures du pays sont encore plus défavorisées et enregistrent, à titre d’exemple, une mortalité infantile deux fois plus élevée que la moyenne nationale.

 

Cette semaine un bébé de deux ans est décédé parce que dans sa région, il n’y avait pas de SMUR pédiatrique [ndlr. Service Mobile d'Urgence et de Réanimation]. Parce qu’en 2017, dans cette belle Tunisie qui a réalisé tant d’acquis dans le secteur de la santé, on a tiré sur les freins, on marche désormais à reculons en espérant sauver un tant soit peu ce qui reste des meubles. Triste sort que celui de cette petite fille que ses parents ne verront pas grandir, triste sort que celui de ce petit pays ployant sous la médiocrité et qui ne deviendra, au rythme actuel des choses, jamais grand.

Cette semaine la classe politique était occupée à commenter la rixe au sein d’Afek Tounes. Elle était occupée à s’indigner du très bas taux de participation aux élections législatives d’Allemagne et à l’élection, pas si surprenante, d’un certain Yassine Ayari. Exit la classification de la Tunisie sur la liste noire des paradis fiscaux, exit une loi de finances qui impactera sévèrement le citoyen, exit la dette publique qui s’alourdit de jour en jour, exit la décrépitude à tous les niveaux et dans tous les secteurs.

 

 

La politique en Tunisie, tue. Elle tue par l’incompétence de responsables qui n’ont rien fait pour changer les choses ou les ont empirées. Des gosses meurent parce que l’Etat n’a pas été capable de faire face ou de trouver des solutions aux inégalités de santé qui touchent tout particulièrement les personnes les plus démunies. Il s’agit là d’une priorité de santé publique, mais chacun a ses propres priorités.

La politique en Tunisie tue, parce que l’énergie dépensée par les politiques à se chamailler, à entraver le travail gouvernemental pour servir des intérêts purement partisans, passe avant tout, avant l’intérêt de la patrie et du citoyen. Entre des ministres qui déposent leur démission sous la pression de leur parti, fragilisant encore plus le gouvernement, un parti au pouvoir qui n’arrête pas de pleurnicher depuis son échec aux législatives partielles et qui menace son partenaire, les chantiers pourtant essentiels à l’avancement du pays restent en suspens.

Au point où l’on est, ça ne sera pas le dernier petit Tunisien qui mourra à cause de l’échec de générations de politiques, à cause de l’échec de l’Etat.

22/12/2017 | 17:59
3 min
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Commentaires (7)

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kamelbou6
| 30-12-2017 22:03
Notre pays va mal, va très mal. Vous avez raison Madame LATIF, les politiques n 'ont qu'à faire du peuple qui souffre. Les dirigeants, l 'Administration, les lobbies, les corporations ne voient pas venir le danger d'eclatement social et de guerre civile que risque notre pays....

Platon
| 23-12-2017 11:51
1- personne ne peut dire qu'un patient "aurait pu" être sauvé. Le ministre dans sa Mercedes roulant à "tombeau" ouvert n'a pas échappé à son destin.
2- l'égalité est une utopie. Quand vous habitez un coin perdu sans pouvoir accéder rapidement à une structure sanitaire "efficiente" vous n'aurez jamais les mêmes chances que celui qui est à quelques minutes d'un service d'urgence bien équipé en personnel et en matériel.
3- aucune mesure ne pourra obliger les médecins à rester là où ils n'ont pas envie de s'installer. En France toutes les incitations matérielles et fiscales ont échoué. Et il est trop tard pour user de la force.
4- la plupart des nouveaux traitements dits "ciblés" (particulièrement contre certains cancers) sont inabordables pour nos faibles moyens. Aucune chance de les voir disponibles chez nous.
Conclusion: comme le dit le fameux dicton: il vaut mieux être riche et en bonne santé, que pauvre et malade.

hadj
| 23-12-2017 09:33
le secteur de la santé est sinistré et le reste n'est guère mieux! c'est le résultat de politiques désastreuses menées par ceux qui se sont relayés aux commandes du pays depuis 2011.une classe politique infestée d'opportunistes d'égoïstes et d'incompétents .il faut en tenir compte lors des prochaines échéances électorales et congédiér toute cette belle racaille!

Leila Ben Salem
| 22-12-2017 22:19
Les premiers responsables de cette misere que vivent les citoyens sont le couple Caied essebsi et Ghannouchi,ce sont ces deux vieilards qui ont pourri et laisser pourrir la scene politique tunisienne qui a entraine la destruction du tissu economique national et par ricochet la situation sociale du pays.Ces 2 vieillards tiennent a gouverner seuls et a se maintenir au pouvoir aussi longtemps

DHEJ
| 22-12-2017 19:03
Allah yarham notre ange et mes sincères condoléances à sa famille.


Pour la politique des TRAÎTRES elle tue L'ESPOIR...


Un vieux égaré, un outsider et un GAMIN...

Zohra
| 22-12-2017 18:50
Feu Slim Chaker avait compris la nature et l'étendue de la souffrance, de la santé. C'est curieux depuis sa mort (allah yarhmou) plus rien énormément de dossiers de corruption ????????????????????. C'est une honte

Milles excuses et milles pardons a la petite ange qu'elle repose en paix, elle est l'une parmi des milliers de victimes de ce système pourri et déchéance de ce pays malheureusement

Forza
| 22-12-2017 18:45
Vous avez bien dit que le taux de la mort enfantine dans certaines régions de l'intérieur est le double de la moyenne nationale, il est probablement 4 fois plus important si on compare avec la capitale. La constitution a défini une discrimination positive mais rien n'est fait en pratique, même des initiatives comme celle de Said Aidi de placer six spécialistes dans chaque hôpital régional, nous ne savons pas si elle est encore pratiquée ou non donc la mort d'enfants et des femmes enceintes dans ces régions va continuer tant que rien n'est fait pour adresser la situation.
Bon article d'Ikhlas