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Crise à la Télévision nationale ou guerre contre les médias ?
17/11/2015 | 19:58
7 min
Crise à la Télévision nationale ou guerre contre les médias ?


Nouvelle crise à la télévision nationale. On limoge, via un communiqué gouvernemental, le directeur général de la Télévision nationale, et on provoque ainsi deux démissions à la tête des deux chaînes publiques, les Wataniya 1 et 2. De quoi mettre à mal une institution qui souffre déjà de nombreux dysfonctionnements.

 

 

La crise qui secoue la Télévision nationale, depuis plusieurs mois déjà, a vécu un nouveau tournant en ce début de semaine et tout présage qu’elle a, encore, de « beaux » jours à vivre devant elle.

En effet, le limogeage de Mustapha Ben Letaïef, suivi de la nomination de Rached Younès, à la tête de l’établissement de la télévision nationale a rapidement fait jaser.

Le secrétaire général du syndicat national des journalistes tunisiens, Néji Bghouri, a publié une longue diatribe sur sa page Facebook, dimanche 15 novembre 2015, afin de fustiger le chef du gouvernement Habib Essid. Dans cette publication, on peut lire : « La présidence du gouvernement a renversé une institution constitutionnelle [ndlr : la HAICA] ». Présidence du gouvernement qu’il accuse de perpétrer « des pratiques dignes du régime de Ben Ali », en regrettant le timing et la manière avec lesquels ce limogeage a été fait, étant donné que l’ancien PDG de la TV nationale aurait été démis de ses fonctions « un dimanche » et « au téléphone ». Cette décision de Habib Essid a été qualifiée par le président du syndicat des journalistes comme « une guerre menée contre les médias ».

 

Les mêmes reproches sont adressés du côté des deux anciens directeurs de la Wataniya 1 et de la Wataniya 2 qui se sont dépêchés, aussitôt ce limogeage rendu public, de présenter leurs démissions desdits postes, par solidarité avec leur collègue. Les deux directeurs des deux chaînes publiques, respectivement Iheb Chaouech et Chadya Khedhir, ont présenté hier leurs démissions contestant, notamment, le fait que le limogeage de Mustapha Ben Letaïef ait été prononcé sans consulter la Haute autorité indépendante de l’audiovisuel (HAICA).

Dans leur lettre de démission, les deux directeurs des chaînes publiques ont affirmé que cette décision a été prise « sans la consultation de la HAICA ». On y dénonce, par ailleurs, des procédures non conformes au décret-loi 116 et on y défend un principe : « la réforme de ce secteur ne supporte plus ce genre de pratique qui ouvre la porte au pouvoir exécutif pour contrôler les nominations et brider les libertés d’expression et de la presse, des acquis de la révolution ».

 

De son côté, la HAICA n’y est pas non plus allée de main morte en dénonçant cette décision. Dans un communiqué paru hier 16 novembre 2015. La haute autorité indique, en effet, « ne pas avoir été consultée dans la prise de cette décision, considérant cela comme une atteinte aux dispositions de l’article 19 du décret-loi n° 116 ».  L’instance régulatrice de la scène médiatique a appelé la présidence du gouvernement à « renoncer à cette sanction » menaçant de recourir, le cas échant,  à la justice pour « contrecarrer ce genre de pratiques liberticides ». En effet, l’instance rappelle que l’ancien PDG avait été nommé de manière consultative et qu’il fallait, par souci de transparence, suivre la même démarche quand il s’agit d’une sanction à prendre à son encontre.

 

S’agit-il donc d’une volonté de l’exécutif de mettre à genoux un établissement médiatique déjà fragilisé par des pratiques qui ne mettent pas tout le monde d’accord ? En réalité, les sanctions prises contre la télévision nationale sont loin de surprendre compte tenu des bourdes que la chaîne nationale ne cesse de collectionner.

 

La direction de la télévision nationale a reconnu, samedi 14 novembre, son erreur après la diffusion, lors du JT de 13h, d’une  image de la tête coupée du jeune berger de Sidi Bouzid. Une malencontreuse « erreur de jugement » qui a valu le limogeage immédiat, le lendemain même de l’incident, du rédacteur en chef du journal télévisé de la Wataniya 1. La chaîne publique a rapidement publié un communiqué dans lequel elle souligne « son respect de la dignité humaine et la sensibilité du téléspectateur », comme elle veille également à « présenter une matière audiovisuelle qui soit conforme aux normes du métier ».

Mais il ne s’agit sans doute pas de la première bourde commise par la télévision nationale. On se rappellera, sans doute, de la tristement célèbre diffusion des images des soldats tunisiens mutilés lors d’un autre JT de la chaîne datant du mois d’août 2013. La Wataniya 1, chaîne nationale ouverte à une très grande audience, avait publié des images, d’une extrême violence, de cadavres mutilés et dénudés de soldats assassinés, transportés par leurs collègues en pleurs et hurlant leur colère.

 

Par ailleurs, au sein de même de l’établissement de la Télévision nationale,  les mécontentements se font entendre. L’ancien PDG est accusé, notamment par le personnel, de ne pas avoir réussi à faire bouger les choses et d’avoir envenimé, davantage, la situation dans laquelle l’établissement se trouvait déjà.

Le secrétaire général du syndicat de base des employés de la Télévision nationale, Mohamed Saïdi, intervenant ce matin sur Shems Fm, s’est dit « pour ce limogeage ». Il a qualifié l’incident de samedi de « grave faute professionnelle » commise par le rédacteur en chef. Cependant, selon ses dires, le rédacteur en chef limogé aurait été « sacrifié » par l’ancien PDG afin d’éviter les éventuelles retombées d’un tel dépassement. Dépassement suite auquel une enquête n’a pas été ouverte.

« Après un an et 4 mois de sa nomination [ndlr : celle du PDG], rien n’a changé. Pire encore, les choses ont empiré. L’institution était meilleure en 2011 », a-t-il dit pointant du doigt « une volonté de sélection au sein de la chaîne ».

 

Cette volonté de sélection, le syndicaliste n’est pas le premier à en parler et à dénoncer. On rappellera de la démission de Zina Khemiri, ancienne présentatrice du JT, qui avait annoncé, lors du journal télévisé, son retrait de son poste. Interrogée sur les raisons de cette démission elle a affirmé que «la direction de la chaîne a procédé récemment, à l’organisation d’un casting pour le recrutement de présentateurs et présentatrices des infos, et j’ai été surprise de me voir contrainte à passer le même casting alors que j’ai une expérience de pas moins de 14 ans dans le domaine ». Une situation qu’elle condamne se disant, de par son expérience, au-dessus d’un tel test et se considérant comme victime d’une stratégie de sélection pratiquée au sein de la chaîne. 

 

Le limogeage de Mustapha Ben Letaïef suscite des condamnations uniquement à cause de la manière dont il a été prononcé. Les différents reproches ne semblent pas dirigés contre la décision même de mettre fin aux fonctions de ce directeur critiqué pour sa politique. Cependant, si la nomination du nouveau gestionnaire présage un changement au sein de l’établissement de la Télévision nationale, elle est d’autant plus critiquée. En effet, Rached Younes, contesté à la fois par ses confrères, la HAICA et le SNJT, entame sa mission  avec des aprioris pour le moins négatifs. Son capital sympathie est au plus bas et sa mission s’annonce, d’ores et déjà, périlleuse dans le contexte de crise actuel. Younes est, en effet, accusé d’être « l’un des symboles de la corruption pendant le mandat d’Abdelwaheb Abdallah ». Ce qui n’arrange certainement pas les choses. 

 

Mais au-delà des cafouillages gouvernementaux, la Télévision tunisienne n’est pas à sa première crise. Plusieurs experts appellent à une reconstruction rapide, fondée sur de bonnes bases et privilégiant le consensus, sans laquelle, la descente aux enfers de cette institution nationale pourrait s’avérer imminente.

 

 

Synda TAJINE

17/11/2015 | 19:58
7 min
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Commentaires (8)

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Mansour Lahyani
| 19-11-2015 09:39
Le rédac'chef du JT commet une bourde monumentale, innommable, il est renvoyé à ses chères études par sa Direction générale ; le P-Dg a des mots avec le Premier ministre, il est remercié, probablement pour avoir été trop irrespectueux' Où voyez-vous l'atteinte à la liberté de la presse, où avez-vous trouvé tout ce fuel pour alimenter cette bronca ?? Lajmi se jette sur cet incident et y voit un solide casus belli contre le Gouvrnement, qu'il menace de traîner sur les bancs d'infamie, pour avoir osé prendre les mesures nécessaires à un meilleur respect de l'éthique publique' MM. Bghouri et Lajmi, pour ne pas parler de ce pauvre Iheb Chaouch, ne pensez-vous avoir enfourché un trop mauvais cheval de bataille ??

MDO
| 18-11-2015 14:30
La principale question qui mérite d'être posée a t on besoin d'une chaine TV publique si elle ne se démarque des chaines privées que par son mode de financement payé par les citoyens avec la facture de la STEG ?
En effet, la chaine qui se nomme EL WATANYA n'a presque rien des qualités sensées être liées à ce nom, pire la dite chaine conserve le privilège du financement publique et se livre en plus avec les chaines privées à une compétions féroce pour accaparer une part des recettes publicitaires, en diffusant presque les mêmes catégories de programmes importés et sur lesquels le coté commercial est le plus dominant.
EL WATANYA se dit se conformer aux novelles exigences du paysage médiatique en conservant ses anciens valeurs de l'absence de transparence, les syndicalistes ont supplantées les RCDistes à telle point que les informations sur les grèves devancent toujours celles qui intéresse plus le pays comme les exploits scientifiques , les émissions éducatives et culturelles continuent à être reléguées aux dernières positions de ses préoccupation sans parler de son rôle quasi absent concernant la défense et la promotion de la culture et l'image du pays.
En définitif, pour bien jouer son rôle en tant que véritable chaine publique un chambardement total s'impose ainsi cette chaine doit accorder la priorité absolue à la culture nationale, multiplier les spots qui visent à éveiller chez le citoyen le comportement civique, en plus il faut absolument instituer une chaine de TV internationale qui diffuse les informations du pays dans les autres langues pour promouvoir son image et surtout soumettre la TV publique aux exigences de la transparence, l'égalité des chances et donner la priorités aux compétences pour animer les émissions ou gérer cette institution.

sassi
| 18-11-2015 12:16
que tous les techniciens et les fonctionnaires de cette institution continuent à assurer leur travail en respectant une ontologie professionnelle
en quoi une révocation d'un Pdg peut les toucher?

rzouga
| 18-11-2015 11:48
En tout cas et en tant que téléspectateur occasionnel de la tv nationale ( à laquelle je paie pas mal de taxes ERTT) , j'ai remarqué que depuis l'arrivée de ce PDG déchu, notre petit écran a été pollué par des présentatrices *** dès 7h du matin qui n'ont rien à dire sauf la nuisance et la pollution visuelle dès le début de la journée; personnellement je n'ai pas vu cela de bon 'il.. Peut être bien qu'il n'est pas directement responsable de la programmation, le pauvre?? Mais on veut plutôt une TV nationale qui représente bien une Tunisie moderne intelligente, ouverte et tolérante et aimant la vie et non pas une tv tristo, qui sème la dépression et la morosité à chaque début de journée.

LIBRESPRIT
| 18-11-2015 08:23
L'Information n'est ni un droit, ni une obligation; ele est FACULTATIVE et non vitale! Les Opérateurs Publics ou Privés doivent avoir un Cahier de Charges à respecter par les Employés et les Employeurs.
L'Information,depuis la nuit des temps,n'est considérée que dans le cadre de "Un Homme éclairé en vaut deux" !.La LIBERTE est celle qui n'accuse aucun mal!

veritas
| 17-11-2015 22:51
La télévision tunisienne et de devenu une antenne d'el jazira il y'a même leila chaieb d'el jazira qui sélectionne le personnel a recruter comme bon lui semble avec l'avis des responsables de la télévision qatari.
Après les infiltrations de tout genre et a tout les étages le gourou fait main basse sur la tv tunisienne avec l'aide du grand Satan qatari du conseil de coopération des pays du golf ,avec tout les pratiques d'ennahba la tunisie n'est pas sortie de la merde et pour très longtemps .

HatemC
| 17-11-2015 21:29
La Tunisie est colonisée par des Islamistes de Nahdha ....
Une partie du TERRITOIRE est colonisée .... ou je me trompe ?????

Toutes les montagnes sont colonisées ... et le DRAPEAU NOIR FLOTTE ....

Les enfants de Ghannouchi tuent et pillent le pays ...
L'objectif des Islamistes est la prise du pouvoir par le CONSENSUS autrement les "sportifs" dans la montagne vont s'en charger .....

Aucune volonté politique pour nettoyer et protéger la Tunisie et les Tunisiens ....

@Ce GVT ....

- Fermer les frontières terrestres avec l'Algérie et la Libye ...
- Construisez des enceintes avec barbelés et équipés avec les équipements moderne ....détecteurs de mouvement ... surveillance ... patrouille ...drones survolant les frontières et ... anticiper les RATISSAGES ....

- Formez des commandos équipés pour nettoyer les montagnes et UNIQUEMENT chargé à cette mission ....Reprendre le pays des mains de DAECH ....HC

https://www.facebook.com/hatem.chaieb.5/videos/1726435384255868/?pnref=story

Jilani
| 17-11-2015 21:29
Essid utilise les manières de benali mais sans intelligence. Il l'a fait avec le ministre de la justice et maintenant avec un PDG qui mérite bien son poste mais qui ne veut s'aligner à la politique d'essid. Comment peux t-on comparer karoui de nessma avec une personne hautement cultivée. Ce sont les lobbies *** de la télévision nationale qui ne veulent plus de lui. Et comme toujours essid a obéi ***.