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Chroniques
Avant, on se la bouclait !
13/01/2017 | 15:59
6 min

 

Avant, c’était mieux, beaucoup mieux ! Avant, on se sentait en sécurité dans cette Tunisie, la Verte. Ni barbus au regard hargneux, ni prêches haineux, ni mosquées qui ne désemplissent pas de ces moutons de Panurge endoctrinés et aveugles à tout esprit critique, quoique sur ce dernier point, ça reste à prouver !

 

Avant,on pouvait sortir à toute heure, faire la fête jusqu’au bout de la nuit ou simplement s’acheter un paquet de cigarettes au coin de la rue, sans être inquiété. C’est en sûreté qu’on vivait. Aujourd’hui, ce n’est plus possible ! On s’est mis à se barricader chez soi, on n’ose plus mettre le nez dehors, tellement c’est dangereux ! Nos femmes se permettaient de sortir en mini jupes, en décolleté, sans être inquiétées par des harceleurs, parce que les harceleurs n’ont vu le jour en Tunisie qu’après la révolution. Ils ne vivaient pas parmi nous !

Avant, les acquis de la Femme étaient protégés et même améliorés, n’en déplaise aux obscurantistes ennemis des libertés. Aujourd’hui, nous sommes juste en train de lancer des débats sur les libertés sexuelles, sur l’égalité dans l’héritage, sur les violences à l’encontre des femmes. Nous sommes juste en train de proposer des textes de loi qui vont opérer des changements dans la société. Mais ça ce n’est pas très important, car avant ça reste toujours mieux.

 

On mangeait bien et à notre faim, pour la plupart. Les prix étaient raisonnables. Des pauvres, on en voyait que rarement, parfois à la télé, rassemblés en troupeaux applaudissant à la venue du sauveur. En même temps, on avait la conscience tranquille. On contribuait à la réduction de la pauvreté. On faisait des dons, on s’inscrivait volontairement dans ce noble élan de solidarité nationale !

Les ménages s’en sortaient, pouvaient se permettre des loisirs. Aujourd’hui, ce n’est plus possible, n’est-ce pas ! On y pense même à deux fois avant d’emmener ses gosses au manège… Une éducation de qualité était prodiguée dans nos écoles publiques. Toute une génération d’érudits en a découlé, et on voit le résultat aujourd’hui. Toute une génération foutue en l’air, oui ! Le système de santé publique était au top. Chaque citoyen avait le droit à un service de santé irréprochable. Chaque fonctionnaire empochait son salaire sans trop y penser, cela allait de soi. Les investisseurs investissaient, les entrepreneurs créaient leurs sociétés dans la quiétude et l’assurance de trouver des employés qualifiés et de réussir à tous les coups. Mais quand ils réussissaient, ils n’étaient pas assurés de la garder leur société… Il n’y avait pas de mouvements sociaux ! Les grèves se faisaient rares et étaient mal vues. L’administration était une machine bien huilée et tous travaillaient sans relâche.

 

Avant, on avait constamment des ponts en construction, des routes et des autoroutes. Nos rues étaient toujours propres, on se serait cru en Suisse tellement c’était nickel ! On avait de beaux et immenses portraits qui ornaient nos ronds-points et des slogans qui nous donnaient du peps et nous empêchaient de baisser les bras. Notre économie était florissante, notre taux de croissance était au beau fixe et tous les pays courtisaient cette nation, petite par sa superficie, grande par son histoire et ses réalisations. Le tourisme ! C’était le fleuron de cette économie. Des milliers de touristes affluaient vers les stations balnéaires pour profiter, à bas prix, du soleil et du sable fin. Les hôtels étaient tellement  remplis d’étrangers, qu’on refoulait les autochtones, afin de préserver la sérénité de nos invités. Gare à celui qui s’en offusquait.

 

Les policiers faisaient leur travail à merveille, allant même jusqu’à tomber dans l’excès de zèle.Mais ça c’était pour l’intérêt général et pour préserver la sûreté du pays. Ils étaient parfois obligés. Ne leur en tenons pas rigueur !

On n’exportait pas de jihadistes et notre islam ne s’était pas encore mis en colère. Nos enfants ne se faisaient pas exploser dans un marché de Bagdad ou n’écrasaient pas, au camion-bélier des dizaines d’innocents à Nice. Quoique des jihadistes, on en exportait en Afghanistan ou ailleurs, c’est juste qu’on n’en entendait pas parler.

 

Mais avant, on se la bouclait !

On vivait la peur au ventre de prononcer un mot de travers et de se retrouver « derrière le soleil » ou de « passer la nuit chez sa tante » (expressions bien de chez nous, qui veulent dire emprisonné). On s’échangeait des informations sous cape, de peur que notre voisin de table ne s’avère être un gentil policier en civil. Faire entrer dans le pays un livre sur la régente, tenait de la mission suicide. Passez-le à un ami passionné de lecture, et vous vous mettrez dans la peau d’un Pablo Escobar en puissance. Feuilleter un bouquin pouvait faire de vous un hors-la-loi.

Surfer sur internet, c’était la galère, le parcours du combattant. Notre génération tombait à tout bout de champ sur le fameux chiffre, devenu depuis iconique.

Critiquez le pouvoir en place et vous serez le pestiféré. Vous serez pourchassé, vous et les membres de votre famille par une horde d’inconnus, qui deviendra, par la force des choses, bien familière. Le verbe s’opposer et tous ses dérivés étaient à bannir.

 

Il y a 6 ans de cela, une rupture s’est opérée et tout le monde s’est mis à parler, fort, très fort. Un flux continu et ininterrompu de paroles qui donnait le tournis. Ca a donné une telle cacophonie ! Cacophonie qui se poursuit d’ailleurs aujourd’hui. On s’est lâché, on a vomi tout ce qu’on retenait depuis des décennies. Cependant, le terme se lâcher portait en lui le germe d’un relâchement et d’un laxisme généralisé. Après l’excitation due à la situation nouvelle, on s’est réveillé avec une gueule de bois carabinée. On s’est retrouvé face à un système en pleine déconfiture. Mais où est passé le modèle de réussite et de solidité tant vanté ? Pourquoi tout partait en vrille ? Toutes les défaillances, tous les maux tus de cet avant, nous explosaient en pleine figure : Une économie fragile, un système éducatif et de santé en chute libre, une administration essoufflée, une corruption systémique et j’en passe !

Tout ce qui était réprimé en nous par la force du bâton a refait surface et ce n’était pas très beau à voir. Ne nous voilons pas la face, le ver était dans la pomme bien avant !

 

6 ans durant qu’avons-nous fait, qu’avons-nous accompli pour ce pays ? Une transition de ce genre ne se fait pas en un claquement de doigts. La médiocrité générale et notamment de notre classe politique trouve son origine dans ce modèle de façade qu’on nous vendait.

Alors, pleurer ce « paradis » perdu servirait-il à quelque chose ? Pleurer sur les ruines d’un passé pas si reluisant qu’on veut le faire croire aujourd’hui, se mettre des œillères et continuer à vilipender cette satanée «révolution de la Baskula », nous permettrait-il d’avancer ?

Tout n’est pas négatif, en dépit des difficultés. Une grande frange de la société s’intéresse et participe au débat public. Des sujets qu’on ne pensait pas pouvoir mettre sur la table sont débattus de long en large et c’est une première en Tunisie. Alors, bien évidemment beaucoup reste à faire, mais tout n’est pas perdu. Essayer d’occulter ce changement crucial qui s’est fait dans le pays, ne voir pas plus loin que le bout de son nez et pas plus loin que son confort personnel immédiat et on passera à côté de l’Histoire.

 

Avant, ce n’était pas forcément mieux…

 

 

Ikhlas Latif, rédactrice en chef adjointe à Business News

13/01/2017 | 15:59
6 min
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Commentaires (41)

Commenter

Bechir Toukabri
| 20-01-2017 09:12
La dernière phrase-conclusion contredit tout le texte.Quelle logique surprenante?
Dans les faits, avant c'était mieux, mais depuis cette foutu révolution, c'est 100 fois pire.Avant on vivait au moins? Aujourd'hui on survit mas dans la déprime permanente et le désespoir? Tout ça au nom de quelques concepts très beaux auxquels on n'a rien compris et qu'on a déformée?Un peu de jugeote SVP.

KHOUROUTOU
| 16-01-2017 08:46
....Car le niveau politique surtout est trop bas.

Et la MÉDIOCRITÉ est de mise malheureusement.

...Peut être que les prochains "14 janvier" seront meilleurs.

Espérons-le tout de même.

Tunisienne
| 14-01-2017 23:26


Bonsoir (beau) ténébreux !

OK, je vais vous laisser fêter votre «Révolution» en paix...

Au fait, vous la fêtez comment, la Révolution tunisienne en Allemagne ?



Abel Chater
| 14-01-2017 21:20
@Tunisienne
Quand la beauté tunisienne parle, les nez crochus se taisent et disparaissent.
Ce langage bidon, épargne-le pour ton lobby de l'outremer, avec lequel tu te ridiculises sans cesse et sans trêve.
Laisse-nous fêter notre Révolution en paix.

Anti rats
| 14-01-2017 19:40
Mais dans quelques années tu seras une sefira mais ty as la liberté de d exprimer.. quel niveau
Faut savoir que la liberté ne donne pas à manger aux gens et la liberté ne gache pas l image de la tunisie comme on etait avant
En tous cas regalez vous avec la liberté avant que vous deveniez des esclaves

Mounir
| 14-01-2017 15:17
pour Mr. Nizar! Quel hasard :)

déja-vu
| 14-01-2017 15:14
Merci à vous ainsi qu'à tous les patriotes rcdistes qui n'ont jamais vendu leur pays ni retourné leurs vestes.
Merci pour 23 ans de fierté d'être Tunisien partout où j'ai voyagé.

Merci pour mon thé en visionnant le carnage en Algérie dans les années 90 en compagnie de collègues hommes et Femmes qui riaient tout haut sans être traitées de trainées ou de mécréantes.
Merci pour tout.

Leur "révolution": Import de terroristes pour gouverner, puis export de terroristes en contrepartie pour détruire le monde arabe et maintenant rapatriement de mercenaires terroristes pour la prochaine mission...

Ils n'aurons jamais la paix. Elle n'est pas propice au trafique d'esclaves...
pratiqué par des charlatans en cravates ou en quamis ...

C'est du déja-vu...Ils sont revenus à leur ancien trafique d'avant, bien avant l'indépendance perdue de poussieres d'individus bedouins cruèls: harems et ennuques...dinars la tête.

L'Histoire se répète...et se répetera encore...prochainement.

Il ont acquis le droit de hurler leur frousse sur les toits, qu'ils prétendent. héhéhé...Comme si Ben Ali avait pu empêcher les cybercollabos de nuire, comme si c'était une largesse à l'ère de l'internet...Ils se cherchent désespéremment des excuses même ridicules pour justifier le sacrifice de générations aux requins de la mer et des réseaux du terrorisme.

Attention à cette propention à croire que ca n'arrive qu'aux autres!

Voila pourquoi "va-nu-pieds incultes" n'est pas une insulte. C'est une description. Avec beaucoup de tristesse et d'amertume.

Restez fier. Vive la Tunisie.

Forza
| 14-01-2017 14:51
Eux aussi avaient la nostalgie des régimes communistes après le changement. Certains ont même voté les communistes 4 ou 5 ans après la liberté. Certains habitants de l'ex RDA sont encore nostalgiques de la DDR malgré que leur vie soit 10 fois meilleure sur tous les plans mais certains d'entre eux n'arrêtent pas de pleurnicher et c'est entre eux que les partis d'extrême droite trouvent la majorité de leurs sympathisants. C'est humain, tout changement est difficile et la nostalgie fait oublier aux gens les points négatifs des ex régimes, ils relativisent alors et ainsi de suite. La Tunisie malgré tout s'en sorte plutôt bien. Nous n'avons pas le support qu'a eu l'Europe de l'est de 'EU et encore plus la RDA de sa s'ur de l'ouest mais le pays résiste comme même, en Russie et après les changements des millions de femmes russes se sont trouvées prostituées, des milliers mourraient dans les rues et les stations de métro, en Roumanie plus de 250000 enfants ont été donnés a l'adoption a l'étranger après la chute de Ceausescu, le changement est difficile car il détruit des structures et des autorités avant de créer des nouvelles.

TNN
| 14-01-2017 14:46
J'ai lu seulement quelques lignes. Visiblement, cette femme ne vivait pas en Tunisie. Même dans les années 80, lorsque j'ai foutu le camp de ce pays (avec mon doctorat, ma jeunesse, ma bonne santé, mon savoir faire et tous attibuts dont une société a grandement besoin), les rues en Tunisie étaient invivables pour les femmes. Demander aux murs de la rue Charles De Gaulle.

Nos hommes ne respectent pas les femmes, parce qu'ils sont élevés par nos mères! Cherchez l'erreur.

Je lirai autre chose plus tard. Beaucoup plus tard!

kamel
| 14-01-2017 13:29
vous avez toute fait raison.