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Tunisie - Haro sur Kamel Jendoubi !
13/11/2012 | 1
min
Tunisie - Haro sur Kamel Jendoubi !
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Articles anonymes de presse s’attaquant à la gestion financière de l’Instance supérieur indépendante des élections (ISIE) et fuites des sphères proches d’Ennahdha indiquent clairement que les islamistes au pouvoir veulent se débarrasser de Kamel Jendoubi, trop indépendant à leurs yeux, pour rempiler à l’ISIE.

Un communiqué de la Troïka, signé par Rached Ghannouchi, Mustapha Ben Jaâfar et Mohamed Abbou, a annoncé le 13 octobre dernier que la Troïka est parvenue à un consensus sur la personnalité pressentie pour diriger l’ISIE. Le membre du bureau politique d’Ennahdha, Ameur Laârayedh, a déclaré aux médias dans la foulée qu’il s’agissait de Kamel Jendoubi.
Mais, depuis, le projet de loi sur l’Instance des élections a évolué et l’actuelle version en discussion à l’Assemblée nationale constituante (ANC) prévoit d’élire le président de l’ISIE par les neuf membres la composant, élus eux-mêmes par l’ANC.
Même s’il ne s’agit plus d’un consensus entre les trois présidents, les trois blocs parlementaires de la Troïka, forts de leur majorité à l’Assemblée, peuvent toujours s’entendre afin de porter des noms à la structure de l’ISIE et, plus tard, à mettre quelqu’un à sa tête. La majorité requise pour élire un membre au sein de l’instance des élections s’élève toutefois aux trois-quarts aux deux premiers tours, rendant inévitable le consensus.

Le schéma se prête donc, plus que jamais, à une instance indépendante, surtout après la rencontre de recherche de compromis entre des représentants du bloc des islamistes d’Ennahdha et ceux du bloc démocratique, les virulents défenseurs d’une administration électorale indépendante. Côté présidence, le bloc démocratique propose, lui aussi, le nom de Kamel Jendoubi pour rempiler à la tête de l’ISIE. Mais, si tout le monde est quasi-unanime, que justifie donc cette nouvelle tempête autour de la gestion de l’ISIE ?
Un satisfecit général s’est certes dégagé de la prestation de l’ISIE et de Kamel Jendoubi lors des élections du 23 octobre 2011. Acteurs politiques, société civile, ainsi qu’observateurs internationaux et nationaux ont salué la transparence du processus électoral.
Il y avait certes quelques lacunes. Mais, c’est dans l’ordre des choses dans la mesure où l’ISIE n’avait que cinq mois pour mettre en place ses structures, inscrire les électeurs et préparer la logistique des élections. Elle a été élue en mai 2011 et les élections étaient prévues, d’abord pour juillet (mission suicidaire selon Kamel Jendoubi), avant d’être renvoyées au 23 octobre 2011.
« L’essentiel, c’est que les concurrents, vainqueurs et vaincus, n’aient pas contesté les résultats », ont surtout constaté les observateurs. « Le reste est corrigible, encore faut-il renforcer les acquis et palier les défauts », ont-ils ajouté. Pourquoi donc ce récent acharnement contre Kamel Jendoubi ?

Ennahdha aurait été obligé d’accepter le nom de Kamel Jendoubi dans l’accord du 13 octobre 2012 au sein de la Troïka. L’essentiel était alors pour les islamistes de saborder l’initiative de l’UGTT, prévue pour le 16 octobre, qui cherchait à parvenir à un consensus national sur les grandes problématiques fondamentales comme l’instance et les échéances électorales, le régime politique, l’instance des médias, etc.
Il fallait donc anticiper cette initiative par un accord au niveau des composantes du pouvoir pour vider l’initiative du contre-pouvoir de sa consistance. Il n’empêche qu’Ennahdha ne supporte pas la personne de Kamel Jendoubi, trop expérimenté et trop cassant à leurs yeux.

Jendoubi a certes chapeauté les élections du 23 octobre 2011 d’une main de maître et ces élections ont abouti à la victoire d’Ennahdha. Mais rien ne l’empêche de mener à bon port d’autres élections pouvant mener d’autres fractions politiques à la victoire, ce qu’Ennahdha ne voit pas avec indifférence. Ennahdha considère que la personne du président de l’ISIE peut influencer le résultat.
M. Jendoubi paie donc les frais de son fort caractère et de son indépendance, voire même de son expérience et sa compétence. Il dispose d’un crédit qui le met au dessus du lot et qui lui permet de traiter d’égal à égal avec le gouvernement.

Kamel Jendoubi a rejeté la proposition de Béji Caïd Essebsi de réaliser des élections le 24 juillet et proposé le 16 octobre, obligeant le gouvernement à proposer la date du 23 octobre 2011. Il s’agit d’un homme de poigne. Or, les gouvernants n’aiment pas toujours avoir affaire à de telles personnes. C’est le mal-aimé de l’étape.
C’est pourquoi Ennahdha ne cesse de multiplier les ballons d’essai afin de déstabiliser Kamel Jendoubi et le pousser à l’erreur. Le dernier en date parle de dépassements constatés par la Cour des comptes. Le contentieux de l’Etat serait même sur le point d’entamer des poursuites contre l’ISIE car « 42 millions de dinars manquent de justificatifs de dépenses », ont annoncé certains médias. Or, le coût total des élections du 23 octobre ne s’élève qu’à 37 millions de dinars.

Autre échantillon, un avocat connu pour ses procès tapageurs contre les antis-pouvoir, la Troïka parle d’un coût exorbitant des élections s’élevant à plus de quatre mille dinars par électeur et un coût total de quarante milliards de dinars, soit une fois et demie le budget de l’Etat.
Il se peut bien que la gestion des élections ait connu certaines carences aux niveaux administratifs et financiers à l’image de ce qu’on observe pour les fonds alloués par l’Etat pour les listes candidates. A ce niveau, l’erreur est permise. Tous les ministères reçoivent régulièrement de telles remarques.

Mais, il est clair que Kamel Jendoubi se trouve, bel et bien, au milieu d’une campagne de discréditation, dont Ennahdha est le chef d’orchestre. C’est le tribut de la réussite, diront d’autres. C’est toute la transition démocratique en Tunisie qui est en jeu…

Mounir Ben Mahmoud
13/11/2012 | 1
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