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Qui peut sauver Tunisair ?
23/03/2011 | 1
min
Qui peut sauver Tunisair ?
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Tunisair va droit dans un mur. Ses concurrents actuels se réjouissent et ses concurrents futurs (les compagnies lowcost) sont hilares. La raison ? Le comportement de certains de ses syndicalistes qui, à force de grèves, sit-in, pressions et communiqués spectaculaires, essaient de faire revenir la compagnie au moyen-âge du transport aérien.
Aux dernières nouvelles, ils refusent toute négociation avec la direction générale et ne jurent, désormais, que par le ministre. L’intérêt et la pérennité de Tunisair, quant à eux, passent derrière leurs propres intérêts de syndicalistes. Une bonne partie du personnel est consciente des enjeux de l’avenir et a désavoué ces syndicalistes. En vain, ces derniers jouent la fuite en avant et il y a lieu de s’interroger à quoi et pour qui jouent-ils.


S’il y a une erreur que Mohamed Ghannouchi a commise au lendemain du 14-Janvier, c’est bel et bien sa gestion calamiteuse du dossier Tunisair. Face à la menace de grève générale et le risque de voir les avions bloqués au sol, l’ancien Premier ministre a rapidement cédé devant l’UGTT et a accepté de réintégrer au sein même de Tunisair toutes les sociétés qui avaient été externalisées sous le régime Ben Ali.
Car même si elle a été prise sous le régime Ben Ali, cette décision d’externalisation du Handling et du Technics est la même suivie par les plus grandes compagnies dans le monde. Tunisair n’a fait suivre qu’un modèle économique qui a prouvé son efficacité dans le monde et qui a permis à la compagnie aérienne nationale de garder sa belle image de compagnie moderne, d’avoir une flotte neuve et un personnel performant. Ce modèle permet, surtout, d'offrir des tarifs concurrentiels à Tunisair qui reste ainsi compétitive face à la concurrence de plus en plus rude dans le secteur.
Et c’est une question de bon sens puisque Tunisair peut se concentrer sur son cœur de métier (le transport aérien) pour laisser les questions techniques à une entreprise technique et les questions logistiques à une entreprise logistique. A chacun son métier.

Sauf que voilà, cette externalisation des filiales supprime aux agents de ces filiales les avantages (matériels) qu’ils avaient auparavant et où un bagagiste pouvait être rémunéré plus qu’un bac+6.
De quoi pousser ces agents vers la grève au lendemain de la Révolution. Et même ceux qui n’en voulaient pas étaient poussés par leurs collègues syndicalistes à arrêter le travail.
Bras de fer entre l’UGTT et l’ancien gouvernement de Mohamed Ghannouchi qui a fini par céder dans un délai record et sans même consulter la direction générale de Tunisair ! Les avions ont pu voler, les aéroports n’ont pas été longtemps bloqués et les syndicalistes ont crié victoire. Tout comme les concurrents qui regardaient de loin. Ils n’en espéraient pas autant de la fragilité du gouvernement, même dans leurs rêves !

Il se trouve cependant que Mohamed Ghannouchi semblait mal connaitre les syndicalistes ou, du moins, certains d’entre eux. Après leur avoir cédé ce « très gros morceau », à l’encontre de toute logique commerciale, les syndicalistes sont passés à d’autres revendications. Il y en aura toujours, de toute façon. C’est le personnel navigant commercial (PNC), cette fois-ci, qui rouspète et demande la titularisation des contractuels. Les avions sont bloqués et le gouvernement panique de nouveau. La direction générale de Tunisair refuse cependant de céder et fait appel à des compagnies extérieures pour transporter ses passagers. Et négocie, en parallèle, avec le PNC qui a fini par découvrir qu’il a été manipulé par les syndicalistes pour des fins purement politiques.
Le calme est revenu, le gouvernement Ghannouchi a disparu et l’UGTT a donné le mot d’ordre général pour cesser les grèves et les revendications.
Le nouveau gouvernement a, ensuite, créé une commission stratégique chargée d'évaluer la situation de Tunisair et d'élaborer un plan d'action pour sa relance après les difficultés économiques et sociales, dont notamment une baisse de trafic depuis le 14 janvier 2011.
Présidée par Habib El Fekih, ancien cadre de la compagnie et expert dans le domaine de l'aviation, cette commission est composée de cadres de la compagnie et de la direction générale de l'aviation civile ainsi que d'experts dans le domaine de l'aviation. On cherchait clairement le consensus.

Seulement voilà, le mot d’ordre patriotique de l’UGTT et la main tendue du gouvernement ne semblent pas être entendus par toutes les fédérations syndicales. Certaines d’entre-elles, comme nous le relations cette semaine dans Business News, ont continué leurs revendications, leurs grèves et leurs sit-in. C’est le cas chez Tunisair.
La direction générale n’a cependant pas fermé la porte et a programmé une réunion mercredi 23 mars 2011 pour voir les énièmes revendications. Il s’agit, cette fois, de recruter d’une manière définitive, le personnel saisonnier à qui on fait appel lors des pics d’activité et de trancher sur tous les dossiers relatifs à la gestion de l'entreprise.
La veille, hier mardi 22 mars, une dépêche de la TAP surprend tout le monde, aussi bien la direction générale que le personnel. Avant même qu’elles ne soient entamées, les syndicats de Tunisair annoncent la suspension des négociations avec la direction générale de la compagnie !
Dans une déclaration adoptée, au terme d'une réunion tenue mardi, les syndicats ont dénoncé "l'absence de visibilité et de transparence en ce qui concerne l'avenir de la compagnie".
Ils ont, également, critiqué les méthodes de la direction générale quant à la gestion des questions économique et sociale au sein de l'entreprise et dénoncé la création de la commission stratégique.

Un cadre de la compagnie est tombé des nues en lisant la dépêche de la TAP. « Mais comment peuvent-ils donc suspendre une négociation qui n’est pas encore entamée, s’interroge-t-il. Comment peuvent-ils dénoncer une commission qui est censée, justement, plancher sur leurs propres revendications ? A quoi jouent-ils ? Pour qui jouent-ils ? Ils veulent détruire la compagnie ou quoi ? ».
Il est de notoriété publique que les agents de Tunisair figurent parmi les personnes les mieux payées dans l’administration tunisienne. Alors que la révolution a été faite pour réduire la précarité et le chômage dans le pays, ces revendications de luxe ne représentent en aucun cas une priorité aux yeux de l’opinion publique, donc.

La solution ? Il faut que l’UGTT impose à ses fédérations indisciplinées le mot d’ordre lancé au lendemain de la nomination de Béji Caïed Essebsi. Où va-t-on si la base n’écoute plus sa centrale syndicale ?
La vraie solution réside surtout à un retour du bon sens et à la prise en main par le Premier ministre en personne du dossier Tunisair, le seul capable d’imposer la discipline et de sauver la compagnie aérienne nationale d’une mort certaine. Le seul capable d’expliquer aux syndicats que l’Etat ne peut plus venir au secours des entreprises publiques déficitaires et que Tunisair évolue dans un environnement compétitif et ne peut compter que sur sa clientèle pour renflouer ses caisses. Et cette clientèle ne choisira jamais Tunisair si ses prix ne sont pas compétitifs.
Revenir sur les décisions antérieures prises à la va-vite par Mohamed Ghannouchi et affronter courageusement et fermement les syndicats, pour l’intérêt de la compagnie et, surtout l’intérêt suprême de la Tunisie, de son tourisme et de son image, est impératif et urgent.
23/03/2011 | 1
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