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Le 9ème congrès d'Ennahdha trace sa voie : régime parlementaire, proportionnelle absolue et exclusion des RCDistes
17/07/2012 | 1
min
Le 9ème congrès d'Ennahdha trace sa voie : régime parlementaire, proportionnelle absolue et exclusion des RCDistes
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Comme il aurait fallu s’y attendre, le 9ème congrès d’Ennahdha a tranché sur plusieurs questions fondamentales comme le régime politique, le mode du scrutin, l’indemnisation, etc. Il a donné une feuille de route avec des recommandations claires au gouvernement et à ses députés dans l’Assemblée nationale constituante. Le parti islamiste est pour un régime parlementaire, issu d’élections suivant un mode électoral proportionnel et dans lesquelles les RCDistes n’ont pas le droit de figurer, ayant contribué, selon lui, à l’institutionnalisation de la dictature. Ainsi, s’ouvre une nouvelle étape à l’Assemblée nationale constituante qui mettrait fin au flottement des députés de ce parti. Mais, comment Ennahdha justifie-t-il ses choix ?

La motion générale du 9ème congrès du mouvement Ennahdha a opté pour le régime parlementaire «plus indiqué pour la Tunisie en cette phase de transition», a indiqué le président du congrès, Abdellatif Mekki, lors de la conférence de presse tenue mardi 17 juillet à Tunis, soit quelques heures après la fin du congrès.
«La Tunisie est immunisée contre les risques du parlementarisme, étant un petit pays dont la population est homogène dans ses choix religieux et culturels», a-t-il expliqué, soulignant toutefois que «certaines prérogatives reviennent au président». «Mais, le dernier mot revient au parlement», a-t-il averti.
Partant de cette lecture, le 9ème congrès a recommandé aux membres du parti à la Constituante d’opter jusqu’au bout pour le régime parlementaire. Mais, le congrès ne s’est pas arrêté à cette recommandation, il est allé jusqu’à proposer à l’ANC d’adopter ce régime.
Sachant que le mouvement Ennahdha sait pertinemment que tous les autres groupes parlementaires sont pour un régime mixte, on pourra facilement conclure qu’Ennahdha n’est pas prêt à céder facilement du terrain. Et puisque la Constitution nécessite une majorité des deux tiers pour passer, il est clair que ce mouvement cherche le blocage, voire le référendum, sur cette question et, peut-être même, sur d’autres.
Le congrès a, également, choisi la proportionnelle absolue comme mode de scrutin électoral, rejetant la proportionnelle aux plus forts restes. Ce choix est, selon les spécialistes, plus indiqué pour les grands partis, surtout si la loi électorale l’associe à un seuil minimal pour accéder à un siège. Ils ont justifié ce choix par «leur désir de traduire les poids réels des colorations politiques, telles qu’exprimées par les électeurs».
Pourtant, cette logique parlementaire n’a pas été respectée dans l’architecture interne du mouvement et, notamment, la séparation entre sa présidence et son Conseil législatif "Majliss Choura".
Cheikh Rached Ghannouchi a tenu à préserver son indépendance par rapport à cette instance "législative", en insistant sur l’élection du président du mouvement directement par le congrès. La pilule n’a pas été facile à avaler. Le vote a été très serré (505 pour et 460 contre). C’est dire que les choses ne sont pas gagnées d’avance pour Ghannouchi.

Concernant la différence d’approche entre la logique parlementaire choisie pour le pays et la présidence renforcée du parti, Abdellatif Mekki, l’a justifiée par l’unanimité autour de la personne du président fondateur, Rached Ghannouchi, et la situation transitoire par laquelle passe le mouvement, qui vit un apprentissage dans l’action publique après des décennies de clandestinité.
Toutefois, il faut signaler qu’un congrès extraordinaire attend le président du mouvement dans deux ans et il aura à rendre le tablier si jamais les objectifs préconisés de s’emparer du pouvoir, avec plus d’aisance, ne sont pas réalisés. Le président du mouvement ne pourra, par ailleurs, pas être reconduit que pour deux mandats, chacun d’une durée de quatre ans, sans toutefois d’effet rétroactif.
Il n’empêche que, pour le moment, Rached Ghannouchi peut désigner le bureau exécutif. Son élection dès le premier tour avec plus de 73 % des suffrages traduit un large consensus autour de sa personne malgré les véritables accrochages ayant accompagné les discussions du rapport moral.
Fait important à signaler, les congressistes ont refusé d’adopter le rapport moral, présenté par la direction du mouvement, le considérant très léger et ne traitant pas, comme il se doit, des véritables problématiques ayant rencontré le mouvement durant ces décennies de clandestinité.
A partir de la manière avec laquelle ce différend a été résolu, il est clair que le parti Ennahdha connaît des dissensions en son sein mais il parvient à les dépasser et à se rassembler. Le congrès, décidé dans deux ans, constituera la prochaine étape pour rendre les comptes et trouver les bons remèdes.
La question de l’exclusion des symboles de l’ancien régime RCDiste de Ben Ali, a été, elle aussi, à l’ordre du jour. Le 9ème congrès a également recommandé de faire le nécessaire afin de les empêcher de refaire surface sur la scène politique. Abdellatif Mekki a indiqué que «l’on croyait qu’ils n’allaient pas s’aventurer de nouveau sur le terrain». «Tant qu’ils sont là, tous les moyens sont bons pour les exclure», a-t-il dit.

Le 9ème congrès a montré le vrai visage d’Ennahdha, celui d’un parti qui veut conforter sa position au pouvoir par tous les moyens. Ce mouvement a repéré le danger représenté par Nida’ Tounes et veut s’y opposer. Il a essayé d’amadouer l’UGTT en le considérant comme l’un des piliers de la révolution, rappelant étrangement les propos de Béji Caïed Essebsi.
La partie s’annonce donc difficile pour tout le monde.

Mounir Ben Mahmoud


Résultats du vote pour la présidence

Rached Ghannouchi : 744 voix ; Sadok Chourou : 63 voix ; Abdelkarim Harouni : 47 voix ; Habib Ellouze : 36 voix ; Ahmed Labiadh : 35 voix ; Abdelfattah Mourou : 34 voix ; Abdelhamid Jelassi : 22 voix ; Jamel El Aouay : 11 voix ; Mohamed Chammam : 09 voix ; Mohamed Akrout : 06 voix ; Abderraouf Mejri : 05 voix et Hédi Brik : 01 voix.
Sur les 1135 congressistes, 1025 ont voté et 12 votes ont été invalidés.

Les seize premiers élus au Majliss Choura

Sadok Chourou (731 voix) ; Ajmi Lourimi (721 voix) ; Abelkarim Harouni (718 voix) ; Habib Khedher (685 voix) ; Habib Ellouze (674 voix) ; Abdellatif Mekki (670 voix) ; Ali Laârayedh (662 voix) ; Abdelmagid Najjar (654 voix) ; Hamadi Jebali (651 voix) ; Noureddine Bhiri (644 voix) ; Ahmed Labiadh ; Rached Ghannouchi ; Moncef Ben Salem ; Samir Dilou ; Sahbi Atig ; Abdelfattah Mourou.
17/07/2012 | 1
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