alexametrics
samedi 01 juin 2024
Heure de Tunis : 15:28
A la Une
La nuit était chaude : ils ont transformé la Kasbah en Gaza !
16/07/2011 | 1
min
La nuit était chaude : ils ont transformé la Kasbah en Gaza !
{legende_image}
La nuit du vendredi 15 au samedi 16 juillet 2011 a été chaude du côté des quartiers de la Kasbah, Bab Menara et Bab Jedid.
Les échauffourées entre les agents de l’ordre et les manifestants ont continué pendant la soirée obligeant les riverains à se cloitrer chez eux. L’insécurité était totale avec les jets de pierre de tous bords et les bombes lacrymogènes.
Nous y étions, en milieu de soirée, et le spectacle a de quoi faire pleurer ceux qui connaissent ces quartiers mythiques de Tunis : elles rappellent ceux de Gaza !
A quelques kilomètres de là, à l’avenue Habib Bourguiba, à la banlieue nord ou à la banlieue sud de Tunis, la nuit était festive. C'est-à-dire ordinaire pour la mi-juillet. Tous les Tunisiens avaient droit, vraisemblablement, à vivre tranquillement leurs nuits d’été, sauf ceux habitant la Kasbah et les quartiers avoisinants. C’est un crime ! A qui profite-t-il ?

Il est 21 heures au boulevard 9 avril devant l’ancien siège du RCD. Le ciel, en cette nuit d’été, est dégagé et il fait doux. Une bande d’une vingtaine de personnes bloque la route en entonnant l’hymne national et en criant des slogans indéchiffrables. On est à quelques dizaines de mètres de la place de la Kasbah où, quelques heures plus tôt, ça a chauffé entre des manifestants se disant révolutionnaires ou gardiens de la révolution (on ne sait plus, il y en a tellement) et les forces de l’ordre.
Ça a chauffé au point que ça a débordé poussant les forces de l’ordre à retrouver leurs réflexes répressifs d’antan. Du moins selon la définition de la répression des manifestants. Car, dans n’importe quel pays au monde, l’affrontement entre forces de l’ordre et manifestants ne se fait pas sans bombes lacrymogènes et coups de matraque. Les nôtres en ont-ils fait un peu trop ? Y a-t-il eu débordements ? Vraisemblablement oui au vu des blessures observées chez plusieurs personnes, notamment les journalistes, qui n’ont absolument rien à voir avec la manifestation et le sit-in de Kasbah 3. La police tunisienne manque de formation pour ce type d’exercices qui n’est facile pour personne, c’est évident.

A 21 heures, il y avait espoir que ces débordements soient finis et qu’on va retrouver le calme. La paix. La joie de vivre. Celle que vivent l’ensemble des citoyens du pays en cette belle nuit de mi-juillet où tout le monde se retrouve dehors. Tout le monde sauf les habitants de la Médina, de la Kasbah, de Bab Menara, de Bab Jedid, de Bab Bnet. Pour ceux-là, « on » a décidé que leur nuit du 15 juillet sera cauchemardesque. Qu’elle sera chaude. Ils étaient acculés à se cloitrer chez eux et fermer les volets avec cette température de 30 degrés.
Impossible de sortir avec ces manifestants dispersés dans les rues et ruelles. Impossible de respirer l’air pur avec les gaz lacrymogènes et les barrages de roues incendiés et tonneaux en feu.
A 21 heures, en pleine avenue Bab Jedid, un barrage de feu bloquait la route. La chaussée était remplie de pierres et d’amas. Un peu partout, des jeunes cagoulés prêts, pierres à la main, à jeter leurs projectiles sur tout ce qui ressemble à une voiture de police.
Au boulevard 9 avril, toujours devant l’ancien siège du RCD, on a allumé le feu. Il est visible à des centaines de mètres et la fumée est observée à des kilomètres.
La place de la Kasbah ? Inaccessible, barrée par des voitures d’une police débordée et désabusée. D’un côté, on lui demande de maintenir l’ordre, de l’autre on lui demande de ne pas faire usage de la force. Allez du côté des riverains et ils vous diront : on veut la police pour mater ces « révolutionnaires » inconscients qu’ils sont manipulés par des partis politiques. Allez du côté des manifestants et ils vous diront : c’est quoi cette police de Ben Ali qui nous agresse, qui nous lance des lacrymos au visage. Vive la police, diront les uns. A bas la police, diront les autres.

A la radio, un certain Mohamed Héni crache son venin à tout va. On le présente comme journaliste et il demande le limogeage du Premier ministre, du ministre de l’intérieur et de Moez Sinaoui, responsable de communication du Premier ministre. Que vient faire Sinaoui là dedans ? A entendre Héni, qui dit avoir été agressé par la police, les médias ont reçu l’ordre de Sinaoui de ne pas dire la vérité, de cacher la réalité. Ah bon ? Nous n’avons pas reçu d’ordre, ni de consigne ! A la télé, la chaîne publique a donné la parole à tout le monde. On téléphone à quelques collègues et tous nous confirment qu’ils n’ont reçu aucun ordre de quiconque. C’est qui ce Mohamed Héni ? Il serait le frère de Abdelwaheb El Héni, du parti El Mejd, qui a témoigné, lui aussi sur la même radio, des graves débordements de la police.
El Mejd ? C’est l’un des rares partis à avoir soutenu le sit-in de la Kasbah 3. On ne dira pas qu’il est proche d’Ennahdha, il nous démentira. Ni qu’il est islamiste, comme nous le pensons, puisqu’il nous démentira aussi.
Mohamed et Abdelwaheb El Héni étaient à la mosquée Zitouna, empêchés par la police de quitter les lieux et de rejoindre les manifestants. Ils ont été agressés physiquement, disent-ils. A Mohamed, on a enlevé téléphone portable et paire de lunettes. Allez vérifier… Mais à entendre Mohamed, tous les maux viennent de Béji Caïed Essebsi, de Habib Essid et, bien sûr, de Moez Sinaoui.

Pas loin de là, à quelques deux-trois kilomètres seulement, Tunis vit tranquillement, normalement. Elle croque à pleines dents sa nuit d’été. Avec la rage au cœur. On n’est pas dupes.
C’est quoi ce sit-in, c’est quoi cette Kasbah 3, c’est quoi ces manifestations ? Depuis quand on se donne rendez-vous après une prière (du vendredi de surcroît) ?
Les élections sont prévues pour le 23 octobre et nul n’a remis en doute cette date. Pourquoi alors va-t-on manifester pour essayer de maintenir une date que personne n’a remise en question ?
Les slogans de Kasbah 3 prêtent à rire et sentent à des kilomètres la manipulation politique. Du moins pour ceux qui savent sentir. Ceux ayant le sens olfactif intact.
Ils veulent changer la composition de l’Instance Ben Achour. Tiens ! C’est la même revendication d’un parti islamiste bien connu ! Coïncidence !
On refuse toute normalisation avec Israël. Tiens ! C’est la même revendication d’un parti islamiste bien connu ! Coïncidence !
Mais qu’est-ce que le Tunisien en a à foutre d’Israël en ce moment ? C’est le dernier de ses soucis, lui qui cherche un emploi et une meilleure qualité de vie !
Ils veulent l’indépendance de la Justice ! Mais que peut faire le gouvernement ? D'un côté, on veut l'indépendance et de l'autre on demande au gouvernement de s'ingérer pour "imposer" l'indépendance. Ils veulent juger les assassins des martyrs et les symboles de la corruption. Mais n’est-ce pas là le travail des magistrats ? Qu’on les laisse travailler tranquillement au lieu de leur foutre la pression avec ces manifestations.
Le Tunisien veut d’une vraie justice et non d’une justice expéditive et encore moins d’une justice islamiste.

Le signal est en tout cas "excellent". En pleine période estivale, alors que tout le monde cherche à donner une bonne image de la Tunisie qui revit, d’un Tourisme qui renaît, d’un chômage qu’on combat, on vient tout bousiller avec des revendications purement politiques et totalement contre-révolutionnaires. La révolution est là pour créer de l’emploi et non pour en tuer, comme on l’a constaté hier soir à la Médina et aux alentours de la Kasbah.
Seulement voilà, plusieurs pays « frères » ne veulent pas que la révolution tunisienne réussisse. Il faut qu’elle échoue. Il faut qu’il y ait du chaos en Tunisie pour que ce « virus » de la démocratie et de la liberté n’atteigne pas leurs pays et leurs monarchies.
Et que l’on ne soit surtout pas étonnés si l’on apprend que, demain, tel ou autre parti a reçu des subventions venant de « gentils » donateurs du Golfe.
Les ennemis de la révolution ne sont ni Béji Caïd Essebsi ni Habib Essid (ils vont tous les deux partir dans trois mois). Le gouvernement n’est pas au dessus de tout reproche et il est loin d’être parfait, mais il n’est pas l’ennemi de la révolution. Les ennemis de la révolution sont ces « pays frères » qui financent nos partis dont les leaders vivaient à l’étranger et qui, aujourd’hui, manipulent à merveille, des citoyens majoritairement patriotes, sincères et politiquement désintéressés.
16/07/2011 | 1
min
Suivez-nous