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Gouvernement Jomâa : La période de grâce est bien finie !
12/06/2014 | 1
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Gouvernement Jomâa : La période de grâce est bien finie !
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L'opinion tunisienne avait accueilli avec soulagement la venue d'un gouvernement de technocrates. Succédant au gouvernement calamiteux de Ali Laârayedh, celui de Mehdi Jomâa avait suscité de grands espoirs pour le redressement du pays. Cinq mois plus tard, ces espoirs sont en majorité déçus et une certaine grogne commence à pointer.

C'est sur la base d'une feuille de route que le gouvernement de Mehdi Jomâa a été adoubé. Avec le soutien du Quartet et de la majorité des partis politiques tunisiens, ce gouvernement a pour mission d'assurer un climat propice à la tenue d'élections en 2014, la pacification de la Tunisie en luttant contre le terrorisme et la révision des nominations partisanes dont Ennahdha a truffé l'administration publique.

Aujourd'hui, les exigences qui ont permis à ce gouvernement de prendre place sont loin d'être réalisées. Le scepticisme commence à atteindre des niveaux inquiétants car de plus en plus de voix accusent ce gouvernement de connivence et de manipulation. Il est vrai que le pays a connu une certaine paix sociale après la mise en place de ce gouvernement. toutefois, il est nécessaire de noter que plusieurs problèmes subsistent et, même, se prolifèrent dans certains secteurs.

Prenons l'exemple du Tourisme. La fédération tunisienne de l'Hôtellerie (FTH) a rendu public un communiqué au vitriol daté du 11 juin 2014. Dans ce communiqué, les professionnels de ce secteur dénoncent la baisse de la fréquentation de leurs établissements chiffres à l'appui. Ils pointent également l'attitude du ministère et particulièrement d'Amel Karboul qui privilégie les sorties médiatiques et la communication à la mise en place de réelles solutions.

Par ailleurs, plusieurs professionnels du secteur du tourisme comprenant hôteliers, agences de voyage etc, déclarent qu'il y a toute une série de mesures proposées par eux à la ministre afin de tenter de redresser le secteur. Ils précisent que ces mesures n'ont à aucun moment été examinées ni discutées avec les parties prenantes. "Un document de 86 mesures concrètes est jeté dans les tiroirs au ministère du Tourisme", s'indigne l'un d'eux. Toutefois, à la décharge de la ministre, celle-ci s'est hâtée de rencontrer les représentants de la FTH tout de suite après la publication dudit communiqué. Un début de dialogue sérieux est peut-être à espérer dans ce secteur.

Autre exemple du désenchantement ambiant : L'emprunt obligataire. La communication gouvernementale sur ce sujet sème la confusion dans les esprits. D'un côté, le gouvernement se félicite d'avoir réuni 300 millions de dinars et estime que la mission est en voie d'être accomplie. De l'autre côté, l'objectif qui avait été annoncé au départ est de 500 millions de dinars. Le tout en sachant que l'emprunt obligataire devrait être clôturé le 13 juin 2014, c'est-à-dire demain.

De deux choses l'une : ou bien la communication gouvernementale a été défaillante à ce sujet et l'opinion publique a mal compris les objectifs de cette mesure, ou bien le gouvernement, confronté à l'impossibilité d'atteindre l'objectif fixé, a édulcoré son discours et se contente de dire que 300 millions de dinars, ce n'est pas si mal après tout.

Il faut ajouter à cela les réserves exprimées par plusieurs experts économiques concernant l'emprunt obligataire. Radhi Meddeb, expert reconnu dans l'économie et la finance, a fait un passage remarqué sur Mosaïque FM le 9 juin courant. En effet, il a déclaré que les personnes ayant souscrit à l'emprunt obligataire lancé par l'Etat pourront à peine récupérer les sommes déposées. Par ailleurs, Radhi Meddeb conforte la thèse selon laquelle l'emprunt a été mal présenté dans les médias car le taux d'intérêt a été mis en avant. Il explique que le taux d'intérêt de 6% est égal au taux d'inflation. Ce qui fait que la personne qui participe à cet emprunt pourra, au meilleur des cas, récupérer sa mise de départ si l'ont prend l'inflation en considération.
Un autre exemple montre le début de désaffection de l'opinion tunisienne vis-à-vis de son gouvernement. Celui de la polémique et des incidents qui ont émaillé le déroulement des examens du Baccalauréat dans son édition 2014.

En ce début du moins de juin, pas un jour ne passe sans que l'on entende parler d'un réseau de fraude à l'examen démantelé, d'élèves attrapés en flagrant délit, de professeurs qui se sentent livrés à eux-mêmes et qui sont, parfois, agressés… Où est le ministère dans tout ça?

Dans la version livrée à l'opinion publique, le ministère de l'Education, épaulé par la présidence du gouvernement, assure que le nombre de fraudes cette année est inférieur à ce qu'il était les dernières années. Statistiquement, le nombre de fraudes a peut être baissé mais ce n'est pas cela qui va rassurer l'opinion publique et les parents d'élèves. Il voient que les moyens mis en place pour frauder sont de plus en plus élaborés. Ils constatent également que ce sont des réseaux organisés composés de professeurs, d'élèves et d'étudiants. Il ne s'agit donc plus de cas de fraude isolés mais d'un véritable business. A noter également que les professeurs de lycée se sont associés à ces cris d'alarme et dénoncent souvent des conditions de travail difficiles. Outre leurs revendications de primes et autres, ils ont alerté sur cette situation depuis un certain temps.

Plusieurs autres thèmes peuvent susciter le mécontentement des citoyens vis-à-vis de leur gouvernement. L'un des principaux sujets qui auront un impact social important est la Loi de finances complémentaire 2014 qui doit être rendu publique prochainement. Les fuites concernant ce projet aiguisent déjà la colère de l'opinion publique. Au menu sont prévues des augmentations dans les prix des hydrocarbures et des prélèvements supplémentaires sur les salaires. Autant de mesures susceptibles d'accroitre l'impopularité de ce gouvernement.

Autre sujet de discorde, la révision des nominations au sein de l'administration reste au stade de projet. Plusieurs hommes politiques ont dénoncé un certain laxisme de la part du gouvernement dans cette démarche malgré le fait que ce soit spécifié dans la feuille de route. Pour l'instant, les membres du Quartet continuent à fournir un soutien sans faille au gouvernement. D'un autre côté, certains partis politiques commencent à prendre leurs distances et à changer de langage concernant l'équipe de Mehdi Jomâa. Ce dernier devra rééquilibrer les choses afin de garantir, non seulement la tenue des élections, mais aussi la paix sociale sous sa gouvernance.

Marouen Achouri
12/06/2014 | 1
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