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Dégage : un livre et 100 témoignages sur la révolution tunisienne
19/04/2011 | 1
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« Dégage » ! Le mot lancé d’une seule voix par plusieurs milliers de manifestants devant le ministère de l’intérieur un certain 14 janvier 2011, a fait le tour du monde et est devenu le slogan de milliers de révoltés dans le monde arabe en Egypte ou au Yémen. « Dégage » est aussi le titre d’un livre-témoignages signé des deux grands reporters de France Info, Isabelle Labeyrie et Grégory Philipps et édité conjointement par les Editions du Layeur et Alif. 240 pages, plus de 100 témoignages et 500 photos pour revenir sur les événements qui se sont déroulés du 17 décembre 2010 au 14 janvier 2011 et qui ont provoqué l’effondrement du régime despotique de Ben Ali.

Des Tunisiens d’appartenance ou de cœur, anonymes ou jouissant d’une certaine notoriété, des intellectuels, d’anciens détenus politiques, des journalistes, des artistes, des jeunes et des moins jeunes racontent la révolution, reviennent sur les années de plomb, évoquent leurs espoirs, leurs craintes.
Abdelmajid Charfi fait un diagnostic cinglant du régime Ben Ali : « à la tête de l’Etat, il y avait un homme inculte entouré d’opportunistes et d’arrivistes… ».
Taïeb Baccouche considère que « cette belle révolution est l’expression d’un ras-le-bol d’une véritable mafia qui a terni l’image de la Tunisie… », et que « le désespoir de Mohamed Bouazizi a été la goutte finale qui l’a déclenchée ».
Slim Chaker voit dans la révolution une conséquence de l’héritage bourguibien : « autant le 7 novembre a été la conséquence du manque de démocratie de Bourguiba, autant le 14 janvier a été la conséquence du système d’éducation obligatoire, gratuit et généralisé… ».
« Les vingt-trois années de règne de Ben Ali ont été un cauchemar » pour Omar S’Habou. Mais « le génie tunisien s’est libéré… qui est, à mes yeux, le plus important et le plus salutaire », estime-t-il.

Vue de l’extérieur, « la révolution de ce mois de janvier 2011 était inéluctable » mais « n’en était pas moins inattendue», juge Bertrand Delanoë.
Certains n’ont pas manqué d’exprimer leurs appréhensions, dont notamment Néziha Rjiba, allias Om Zied : « ce que je crains, c’est de nous voir acheminer vers un autre dérapage, celui de l’exclusion, mais d’une manière révolutionnaire.
Mais la révolution tunisienne c’est aussi de l’espoir. Taoufik Bouderbela rappelle que l’histoire retient toujours les noms des victimes, jamais des bourreaux. « Pour l’avenir Je suis excessivement optimiste, outrageusement optimiste », déclare-t-il.

Le secteur de l’information, une des innombrables victimes du régime déchu est décortiqué dans un chapitre qui revient sur l’œuvre du Goebbels tunisien Abdelwaheb Abdallah. « Abdallah a réussi la prouesse de transformer une presse de tradition libérale, qui était dans les années soixante-dix parmi les plus libres du Maghreb, en une immense caisse de résonance de l’unanimisme et du culte de la personnalité », excusez du peu. Il aura fallu la révolution Internet et des réseaux sociaux pour trouver la brèche dans cette chape de plomb. « Ben Ali a tout fait pour enlever à notre jeunesse ses racines arabo-musulmanes, sa culture, sa politique, son histoire… Mais, il y a eu une révolution technologique. A travers internet et les télés satellitaires, nos jeunes ont découvert des peuples qui revendiquent leur citoyenneté », estime Maya Jeribi.
Slim Amamou confirme, lui qui « a compris que la levée de la censure d’internet était primordiale comme levier du changement ».

Zouhair Yahyaoui, Néji Bghouri, Souad Ben Slimane, Lina Ben Mhenni… témoignent sur la difficulté d’informer : être journaliste ou un blogueur est un exercice à haut risque. Un exercice d’équilibriste aussi. Nizar Bahloul se rappelle les recommandations de Taïeb Zahar : « dénoncer sans en avoir l’air, jouer du compromis sans se compromettre et, surtout, rester propre ». D’autres ont choisi l’exil pour attaquer le système frontalement. Samy Ben Gharbia, créateur de Nawaat, n’est pas rentré en Tunisie de 1998 à 2011. Soufiane Ben Farhat s’exila dans son propre journal se confinant « depuis quelques années dans la rubrique monde avec quelques empiètements sporadiques dans la chapelle Culture ».
Le journalisme, un métier à réinventer. « Il faut confier et imposer de nouvelles compétences pour permettre l’émergence d’une nouvelle information libre et indépendante. Comme il faut de nouveaux organes d’information et de communication. De nouvelles télés, de nouvelles radios, de nouveaux journaux… indemnes des anciens virus », rêve Néji Bghouri.
Cabu, Georges Wolinski et Lotfi Ben Sassi mettent leur verve comique au service de l’ouvrage, des caricatures qui saisissent l’instant, taillent dans le vif, ressortent les aspects grotesques ou drolatiques se cachant derrière la gravité de ce bouleversement historique.
Dans la pure tradition arabe, Mohamed Sghaïer Ouled Ahmed glorifie dans des verres dithyrambiques la révolution « d’un peuple libre » : « Résistez dans la rue ! Dressez vos tentes s’il le faut ! Les hommes libres de par le monde attendent beaucoup de vous et si vous vous trahissez, vous les trahissez aussi. »

Un livre en hommage à « Mohamed Bouazizi, aux victimes du régime de Ben Ali, mortes, handicapées à vie, ou ayant subi des violences physiques et morales… aux familles endeuillées… aux habitants de toute la Tunisie et particulièrement à ceux de Sidi Bouzid, Thala, Kasserine, Menzel Bouzaïene… ».

Dégage – La révolution tunisienne 17 décembre 2010-14 janvier 2011, un livre de témoignages édité par les Editions Layeur et Alif, prix de vente 35 DT.
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