Par médiocrité, la Tunisie perd ses enfants !
Par Ikhlas latif
Dans un pays embourbé dans la médiocrité à tous les niveaux et aux plus hauts sommets de l’Etat (le spectacle affligeant de nos députés ces derniers jours en est l’exemple). Dans un pays où le besoin de compétences est plus que jamais indispensable, voire vital, pour qu’on puisse espérer s’en sortir. Dans ce pays rien n’est fait, ou presque, pour retenir ses compétences, jeunes ou moins jeunes, les valoriser et leur donner les moyens pour faire avancer les choses à leur niveau.
De compétences, la Tunisie n’en manque pas, grâce à un système éducatif qui a su pendant longtemps viser l’excellence (aujourd’hui en pleine décomposition). Il ne passe pas une période où l’on apprend les belles découvertes, réalisations ou nominations de nos compatriotes, mais toujours sous d’autres cieux. Dernière en date, la nomination de Moez Chakchouk au poste de sous-directeur général pour la Communication et l’Information à l’UNESCO. Le quadra hisse les couleurs de la Tunisie dans l’une des institutions internationales les plus prestigieuses.
Nombreux sont les Tunisiens qui brillent à l’étranger. Nombreux sont les Tunisiens qui sont courtisés, sollicités. Nombreux sont ceux qui choisissent de quitter leur pays vers des destinations plus attractives sur les plans éducatif, scientifique ou professionnel. Ceux qui ont préféré rester accusent de plein fouet les conséquences de la médiocrité ambiante, certains préparent déjà leurs valises.
Ce n’est un secret pour personne, la fuite des cerveaux est un mal qui nous ronge depuis bien trop longtemps. Aujourd’hui, où tout part en sucette, cet exode s’est accentué et semble incontrôlable. Qu’ils soient étudiants brillants, ingénieurs, chercheurs, enseignants, avocats, médecins ou hauts cadres l’intention de s’installer ailleurs qu’en Tunisie est de plus en plus marquée. Ce ne sont pas les dernières études qui démentiraient cette tendance haussière, surtout après la révolution. Selon un rapport de l’OCDE (chiffres de 2017), pas moins de 94 mille compétences tunisiennes ont quitté le pays au cours des sept dernières années.
La raison principale de ces départs est bien évidemment d’ordre pécuniaire puisque les salaires perçus à l’étranger sont très supérieurs qu’en Tunisie. Des opportunités plus intéressantes attendent ces hauts potentiels que leur propre pays n’arrive pas à susciter, notamment dans le domaine de la recherche où le budget alloué est dérisoire. Nos chercheurs se retrouvant mains liées n’ayant pas les moyens concerts d’innover. Nos entrepreneurs et hommes d’affaires se voient obligés de partir face à un climat d’affaires qui s’est dégradé. Nos universitaires s’envolent vers d’autres contrées où l’enseignement supérieur est érigé en fer de lance. Nos jeunes médecins, par manque flagrant de moyens, désertent nos hôpitaux. Parmi nos élèves et étudiants brillants partis à l’étranger pour poursuivre leurs études, seulement 7% choisissent de rentrer en Tunisie, les autres préfèrent y rester…
Un bien triste tableau vous me direz ! C’est quand même l’affligeante réalité. Le pays se vide de ses meilleurs éléments et n’a aucun moyen de contenir l’hémorragie. Certains traiteront les compétences qui partent d’ingrats ou les accuseront facilement de manque de patriotisme. La question est plus profonde et il nous faudrait des années pour mesurer l’ampleur des conséquences de la fuite des cerveaux. Ce qui est toutefois sûr, c’est l’impact direct de ce phénomène sur l’économie tunisienne se retrouvant dépourvue d’un capital humain haut en potentiel. Et c’est justement sur ce capital humain qu’avait misé la Tunisie depuis son indépendance.
Cette Tunisie qui perd ses enfants et qui ne parvient pas à profiter de leur savoir-faire pourrait pourtant inverser la vapeur et le manque à gagner en le transformant en gain. Pour ce faire c’est à l’Etat de miser sur ces compétences pour qu’elles s’engagent dans le développement de leur pays, de créer des canaux d’échanges à son profit. En attendant de meilleurs jours pour la Tunisie.
