Et, à lire certains commentaires, je conclus qu'il est urgent de le dire et de le répéter : je suis fier du Quartet, tout comme je suis fier de cette Tunisie qui l'a inventé ex-nihilo: une bien belle invention pour la résolution des problèmes politiques qui auraient pu bloquer ce pauvre pays ! Ma belle et pauvre Tunisie aurait dû avoir droit à son tour à une belle médaille dans une sorte de Concours Lépine pour la consécration de la Démocratie, n'en déplaise à certains esprits chagrins qui polluent ce forum !
Le monde entier aura les yeux rivés sur la Tunisie le 10 décembre 2015, date historique où le Quartet tunisien se verra décerner le prix Nobel de la Paix. Si les pays arabes nous snobent, le reste de la communauté internationale suivra, sans doute avec intérêt, ce qui se passe dans notre petit pays et s’interrogera sur la situation de la Tunisie de l’après. L’après 14-Janvier, mais aussi l’après Prix Nobel.
On entend partout que la Tunisie est le seul pays du « Printemps arabe » à s’en être sorti dignement et avec les honneurs. Elections démocratiques, nouvelle constitution fraîchement votée, vie politique relativement (!) saine et, pour couronner le tout, un Nobel de la Paix décerné à ceux qui auront réussi à faire aboutir le dialogue national. Qu’espérer de mieux ? Mais si cette expression purement occidentale sert à rendre l’horreur, dans certains pays, moins laide, il faut avouer qu’elle est quand même un peu déconnectée de la réalité.
N’est-il pas prématuré de s’interroger sur la Tunisie de l’après Prix Nobel ? N’est-il pas ironique que la Tunisie, secouée par un attentat sanglant en plein cœur de Tunis, soit aujourd’hui couronnée de ce prix ? Les plus cyniques diront que rien ne changera. Les plus fatalistes pensent d’emblée que le fait que la Tunisie ait reçu ce prix prouve à quel point le Nobel de la Paix ne vaut plus rien. N’allons pas jusque là…
En réalité, sans vouloir vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, et même si mon avis reste assez mitigé concernant le mérite même de ce Prix Nobel par le Quartet (voir précédent article), il y a lieu de s’interroger aujourd’hui sur ce qui changera réellement. Ou sur ce qui devra changer.
Dans deux jours à peine, les parrains du Dialogue national devront afficher leur plus beau sourire pour recevoir, ensemble, ce prix sous le regard de la communauté internationale mais aussi des Tunisiens du monde entier. Si l’émotion devra certes être au rendez-vous, elle devra aussi dissimuler les petites guéguerres qui fomentent entre les parrains. Ou plutôt entre le syndicat et le patronat qui n’hésitent pas, via les plateaux tv et les communiqués de presse, à se tirer dessus à boulets rouges. Le Quartet aurait pu (entendez par là dû) se rendre à Oslo, en ayant réglé ses problèmes et en ayant trouvé un accord sur les salaires du privé, avait dit Houcine Abassi dans un plateau tv, hier, ayant réuni les quatre lauréats.
Connu pour ses paroles pour le moins incisives, le secrétaire général du syndicat n’a jamais mâché ses mots. On se rappellera tous de son face-à-face tendu avec la patronne des patrons, lors de la grand-messe des entreprises l’année dernière. Face à lui, on retrouve une Wided Bouchamaoui ferme mais préférant mettre de l’eau dans son vin. Nul doute cependant, les tensions ne sont pas bien loin et un accord entre les deux grandes organisations du pays n’est pas près de voir le jour avant le 10 décembre. A moins d’un miracle…
Quoi qu’il en soit, les chantiers qui attendent la Tunisie de l’après ne se limitent pas aujourd’hui à un accord trouvé sur les salaires du privé. Si la crise du social est plus qu’urgente et devra, au plus vite, être désamorcée, la problématique des libertés l’est tout autant dans le contexte actuel.
En effet, un pays lauréat du Nobel de la Paix peut-il encore appliquer des lois contraires à cette même constitution dont il se vante aujourd’hui ? Comment des lois liberticides peuvent-elles encore être appliquées et tolérées, chez nous ?
Des lois qui permettent au violeur d’échapper aux poursuites en épousant sa victime, même mineure ; des lois qui permettent d’emprisonner des gens sur la base de leurs préférences sexuelles ; des lois qui entravent une liberté de s’exprimer et de manifester consacrée par la constitution ; des lois qui ne permettent pas de disposer de son propre corps en toute liberté et jettent des gens en prison à cause d’un joint fumé…et j’en passe.
Le prix Nobel de la Paix n’aurait plus aucun sens si ces lois restent appliquées. Le Nobel de la Paix ne servirait à rien si, au nom d’une lutte antiterroriste, on violait les valeurs universelles de droits de l’Homme et on bafouait les libertés individuelles. Ce Nobel de la Paix serait ridicule si ceux qui se présenteront après-demain pour le recevoir n’arrivent même pas à faire la paix, entre eux, sur des sujets qui trainent depuis des mois.
Les querelles entre syndicat et patronat ne sont pas très éloignées de celles qui secouent la scène politique aujourd’hui. Ils sont à l’image même de nos politiques qui se chamaillent afin de prouver que chacun dispose d’un plus grand pouvoir que son adversaire. Le parti fort du pays (fort du moins en nombre de voix obtenues aux élections) se déchire pour savoir qui fait quoi et qui occupe quel poste. Chaque clan organise ses propres réunions, chaque clan critique l’autre en direct à la TV et on recourt même à la violence pour saboter les meetings de ses frères-ennemis.
Un Nobel de la Paix décerné à quatre organisations que tout devait opposer mais qui seront réunies devant le monde entier pour récolter cette récompense, tout cela est bien beau. Mais ce n’est certainement pas en ce 10 décembre historique que tout va changer pour la Tunisie…
Commentaires (13)
CommenterRappels très utiles !
Et, à lire certains commentaires, je conclus qu'il est urgent de le dire et de le répéter : je suis fier du Quartet, tout comme je suis fier de cette Tunisie qui l'a inventé ex-nihilo: une bien belle invention pour la résolution des problèmes politiques qui auraient pu bloquer ce pauvre pays ! Ma belle et pauvre Tunisie aurait dû avoir droit à son tour à une belle médaille dans une sorte de Concours Lépine pour la consécration de la Démocratie, n'en déplaise à certains esprits chagrins qui polluent ce forum !
ISLAM, SIONISME, ET COLONIALISME : LECON 14
Je sais beaucoup de choses que vous ne savez pas et la preuve réside dans le simple fait que si vous saviez ce que je sais, vous n'auriez jamais choisi de vous révolter contre Ben Ali en ouvrant la porte aux ennemis de la Tunisie qui n'étaient autres que les ONG de la CIA et du Mossad, et le mouvement islamiste dont les sponsors sont le Qatar et l'Arabie Saoudite.
Je sais tout et vous ne savez pas grand-chose.
Comme par exemple lorsque je vous disais que la Russie pourrait utiliser la bombe atomique contre une ville occupée par DAECH. Ce matin même, Vladimir Poutine a déclaré qu'il espérait ne jamais à avoir à utiliser l'arme nucléaire pour combattre le terrorisme ce qui en lui-même est un message clair qui dit que cette option est déjà écrite dans les plans militaires de Moscou.
Autant que celle qui consiste à assassiner Erdogan par une destruction instantanée de son palais d'Ankara d'ailleurs.
La Russie est une puissance militaire que les Etats Unis et l'OTAN ont poussé à l'extrême par des provocations qui menacent la stabilité même du monde. Un peu comme les islamistes Tunisiens ont poussé Ben Ali à se défendre peu après le 7 Novembre 1987, accusant ensuite une défaite et une déroute totale.
L'on ne devrait jamais provoquer un pays dont la plus grande force est un peuple stoïque, cultivé, et courageux, sans compter un arsenal nucléaire qui est le dangereux au monde.
Les Russes ne sont pas les Tunisiens qui vivent pour des récompenses coloniales sous forme de prix Nobel et de légions d'honneur et qui se transforment en tapis des souks devant le premier blanc ou sioniste venu. Les hommes et les femmes politiques Tunisiennes sont des garçons de café et des femmes de ménage, ce qui n'est pas le cas de la Russie ou chercheurs et penseurs abondent.
Comme vous le savez, l'OLP est un mouvement qui depuis environ 1965 épouse la vision de Nasser du Nationalisme Arabe. Avant la guerre des six jours, le nombre d'islamistes Palestiniens dans les territoires occupés ne dépassait pas les milles. Ce mouvement était contrôlé par l'Egypte à Gaza, et la Jordanie sur la rive Ouest.
En 1967, le Cheikh Yassin, fondateur du Hamas, sera arrêté par les autorités Egyptiennes à Gaza dans le cadre du mouvement de répression de Nasser. Mais lorsque les Israéliens occuperont Gaza après la guerre des six jours, Yassin sera libéré par les Israéliens et avec leur support, débutera l'édification d'une véritable infrastructure islamiste sous forme de mosquées et d'organisations caritatives. De 1967 à 1987 et sous l'influence du Sheikh Yassine, le nombre de mosquées dans les territoires occupés augmentera de 200 à 750.
En 1970, des milliers de Palestiniens seront expulsés de Jordanie ou ils auront subi une défaite lors d'une guerre civile ou le roi Hussein utilisa l'aide de sa faction bédouine mais aussi l'aide des frères Musulmans.
En 1976, Israël autorisera Yassin à fonder Le Centre Islamique tandis qu'en 1978 et lorsque Menahem Begin sera élu Premier Ministre d'Israël, la droite Israélienne comprenant le Parti Herut et le Likoud verra en ce Centre Islamique le meilleur moyen de détruire l'OLP et Yasser Arafat.
Le Hamas était né et Israël avait trouvé le prétexte idéal qui ferait que l'Etat Hébreux ne signerait jamais d'accord de paix avec le peuple Palestinien.
David Shipler : Arab and Jews : Wounded spirits in a promised land, 1987.
F.M. Alias JOHN WAYNE
Ancien élève au Collège Sadiki
Diplômé d'Histoire et de Sciences Politiques de l'Université Paris-Sorbonne.
Ancien Fonctionnaire aux Ministères des Affaires Etrangères et de l'Intérieur Tunisiens des gouvernements d'Habib Bourguiba et de Zine El Abidine Ben Ali.
Diplomate de carrière et spécialiste de la sécurité et du renseignement.
@ Kairouan
Tunisienne| 09-12-2015 08:34
Bravo @Tunisienne pour cette belle contribution, une sorte de mise en perspective ideologique et politique des actes, des contextes, des missions et des ideaux, et une invitation a la reflexion contre l'inertie intelectuelle et la paresse (ou "economie" dirait A. De Rivarol)) de la memoire...
Bravo et bonne continuation!
@A4
Nobel ...
Ecrit par A4 - Tunis, le 11 Octobre 2015
Ils n'ont vu que quatre ...
Ils n'ont vu que quatre appelés quartet
De quoi m'enivrer et me tourner la tête
Me sortir de l'ombre comme une comète
Et me frayer chemin malgré la tempête
Ils n'ont vu que quatre...
Moi j'ai vu bien plus, j'en ai vu des dizaines
Qui avec audace ont payé de leur sang
En se dressant pour écarter de la scène
Des mauvais esprits stériles et impuissants
Ils n'ont vu que quatre...
Mais il y avait des centaines et même plus
Qui sans peur ont osé prendre la parole
Pour soudain mettre à nu vermines et virus
Et faire taire pour de bon pantins et guignols
Ils n'ont vu que quatre...
Moi ce que j'ai pu voir c'était des milliers
Qui ont sillonné avenues et ruelles
En usant le pavé longtemps sans plier
Pour finir vainqueurs et gagner le duel
Ils n'ont vu que quatre...
Mais ils étaient des millions de téméraires
Qui sans dérobade et sans attentisme
Ont mis à l'écart des idiots sanguinaires
Et scandé "non à l'islamo-fascisme !"
@ Noble et d'autres : MEME SI...
- Même si on peut reprocher plein de choses au tunisiens;
- Même si les mobiles profonds derrière l'octroi de ce Nobel à la Tunisie restent ambiguës (certains y ont vu une gifle pour les islamistes et d'autres, au contraire, un moyen de renforcer leur légitimité);
- Même si le Nobel de la Paix est devenu un instrument de la politique internationale permettant l'affirmation de l'hégémonie des plus grands de ce monde et de leur vision (on voit par exemple ce qu' un Obama-ayant obtenu "par anticipation" ce Prix- a fait par la suite...);
- Même si certains de nos compatriotes à l'étranger sont scandalisés par les "Récompenses dérivées" telles que celle accordée par la France (et il convient ici de souligner le caractère paradoxal de cette posture : ne recherchent-ils pas eux-mêmes dans une certaine mesure une forme de reconnaissance là-bas ? Cracheraient-ils sur des récompenses même moins prestigieuses ? Est-ce le résultat des dernières élections qui les met dans cette rage? Et dans l'affirmative, pourquoi cette confusion des genres ?...);
- Même si on peut déplorer le manque de cohésion entre l'UGTT et l'UTICA (il est vrai que M. Abbassi joue les rabat-joie et ne rate aucune occasion pour en remettre une couche. Mais qui s'en étonnera au fond ? N'est-ce pas justement le rôle premier d'un syndicat de travailleurs de tenir tête au Patronat et vice-versa ? Et n'est-ce pas justement parce que ces deux structures fondamentalement antagonistes ont su-à un moment crucial et critique de l'histoire de notre pays- se mettre du même bord, celui de l'intérêt de la Nation ?).
(En dépit de tous ces "même si" et de tous les scepticismes qu' on peut avoir), j'aime à croire qu' il y a un minimum de raisons "objectives" qui justifient cette consécration de notre pays. J'aime à croire que ce Prix représente encore quelque chose, à savoir un idéal de valeurs humaines suprêmes vers lequel on veut tendre même si l'Humanité est capable du pire. J'aime à croire qu' il en restera quelque chose d'élévateur et de stimulant dans notre mémoire collective.
Et malgré toutes les réserves plus ou moins légitimes et fondées, je ne peux être que PROFONDÉMENT ÉMUE lorsque je vois notre drapeau national flotter dans un endroit aussi solennel, prestigieux et chargé d'histoire. C'est ça aussi être tunisien...
LE NOBEL A NABEUL !!!!!!!!!!!
Amalgame et confusion
Ceux qui se présentent pour recevoir le Nobel de la Paix, sont récompensés pour avoir réussi une action SALUTAIRE pour le peuple Tunisien, à savoir, le DIALOGUE NATIONAL qui nous a préservé d' une guerre civile, ce qui n'est pas rien et encore moins ridicule; Sans le dialogue National, beaucoup d'entre nous seraient peut être aujourd'hui des réfugiés de guerre comme c'est le cas pour bon nombre de Libyens et de Syriens.En dehors du dialogue national, chaque organisme doit continuer à jouer son rôle naturel, l'UGTT défend l'intérêt des travailleurs, l'UTICA celle des patrons, par conséquent, il n'y a pas plus normal que ces deux organismes soient en désaccord, je dirai même que c'est rassurant!
Maintenant, si on a compris que le prix Nobel de la paix a été attribué à 4 ONG (UGTT, UTICA, LTDH et ordre des Avocats) pour avoir réussi UNE SEULE ACTION (le dialogue national), alors il serait plus aisé de comprendre pourquoi l'UGTT et l'UTICA continuent jusqu'à ce jour à se chamailler et pourquoi la Tunisie peut avoir le Nobel de la paix sans pour autant être un havre de paix ; Autrement dit, parler de l'après Nobel est inapproprié, car nous avons été récompensés pour avoir fait LE premier pas sur la voie de la démocratie en choisissant le dialogue national, mais c'est maintenant tout commence et le chemin vers la démocratie risque d'être long. . .
Fete pour une journre
Les tunisiens auquels les francais ont appris le nombrilisme,le provincialime,le patriotisme chauviniste, ainsi que les fanfaronnades francaises de la grandeur,de la gloire,du prestige aristocratique republcains,seron cependant largement servis par le spectacle feerique a Oslo pour une journee mais apres...