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L'ISIE entre indépendance et dépendance, l'Instance à l'épreuve des élections
05/08/2014 | 1
min
L'ISIE entre indépendance et dépendance, l'Instance à l'épreuve des élections
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A l’heure où les élections législatives et présidentielle approchent à grands pas, l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) peine toujours à convaincre les citoyens à s’inscrire, mais pas que ! En effet, l’ISIE a essuyé des critiques virulentes tout au long de son court parcours et continue de susciter l’ire de certains partis politiques et d’organisations de la société civile. Des multiples défaillances enregistrées, aux soupçons qui pèsent contre l’ISIE pour une éventuelle infiltration, état des lieux des déboires d’une Instance chargée d’une mission, dont dépend l’avenir de la Tunisie pour les cinq ans à venir si ce n’est plus.

Il est un fait indéniable, c'est que les potentiels électeurs tunisiens ne se bousculent pas pour s’inscrire sur les listes électorales. Une lassitude et un désintérêt total touchent une grande partie des citoyens qui ne voient pas la nécessité d’accorder leurs voix à une classe politique qui n’a pas su convaincre. En dépit des efforts déployés pas l’ISIE, le nombre d’inscrits sur les listes, a atteint jusqu’à ce jour plus de 5 millions de personnes. La nouvelle ISIE n’a donc réussi à inscrire qu’un million d’électeurs de plus à rajouter au 4 millions réalisés par l’Instance menée par Kamel Jendoubi.

Néanmoins, plusieurs voix se sont élevées pour imputer l’échec des opérations d’enregistrement à l’Instance. Différents partis politiques ont, effectivement, appelé à la prolongation des délais d’inscription sur les listes électorales. Arguant en cela une lenteur du rythme des inscriptions et le choix d’un calendrier inadéquat. C’est que l’ISIE avait annoncé l’ouverture des inscriptions du 23 juin jusqu’au 24 juillet 2014. Une période jugée insuffisante et inadaptée puisque cette période coïncide avec le mois de ramadan et les vacances d’été. D’aucuns accuseront l’ISIE d’avoir choisi cette période précisément en vue d’entraver le processus d’inscription. En cela, l’Instance a commencé à attirer les soupçons selon lesquels, elle suivrait l’agenda de certains partis politiques auxquels l’abstention des nouveaux électeurs serait profitable. L’une des principales accusations vise directement un lien avec le mouvement Ennahdha. D’autant plus que le parti islamiste, en réaction aux appels de prorogation des dates d’inscriptions, avait accusé les autres partis de tentative de saboter les élections. L’Instance indépendante a d’abord refusé catégoriquement une prorogation avant de se rétracter et d’accéder à la demande des partis. Cela étant dit, le revirement de la position de l’Instance est survenu précisément après que le chef du mouvement Ennahdha ait déclaré, à l’issue de la cérémonie de signature de la charte d’honneur du processus électoral, que son parti était d’accord pour une prorogation à condition que le calendrier électoral soit maintenu…

Autre polémique qui a entaché l’ISIE, les accusations concernant une infiltration des sections régionales de l’Instance, par le mouvement Ennahdha. Ainsi, plusieurs organisations de la société civile, le Front populaire et le parti Nidaa Tounes, ont dénoncé une certaine proximité entre des membres des instances régionales et le mouvement islamiste. Accusations graves, qui remettraient en cause l’indépendance et la neutralité d’une instance qui se dit le contraire. Le processus électoral est par là même remis en cause également par les soupçons de fraudes. Dans un communiqué, le Front populaire était en effet revenu sur les listes des membres des sections régionales publiées par l’ISIE, affirmant qu’elles contenaient un « grand nombre d’individus dont le manque notoire de neutralité est confirmé. Ces personnes sont par ailleurs connues dans leurs régions pour être proches du mouvement Ennahdha et même de la mouvance salafiste » (sic).

Nidaa Tounes a, quant à lui, exprimé ses réserves quant à la partialité de certains membres des sections régionales. Récemment, le leader au sein du parti, Khemaies Ksila a déclaré que certaines branches de l'ISIE en Tunisie et à l'étranger sont infiltrées par Ennahdha. Ksila a souligné que les noms des responsables de l’ISIE proches d’Ennahdha sont connus et que Nidaa Tounes détenait les preuves de l’infiltration. Il a, de ce fait, appelé le président de l’Instance, Chafik Sarsar à restaurer l’indépendance de l’ISIE et de ses branches.

Plus tôt, La section de l’étranger de Nidaa Tounes a condamné la négligence ouverte envers les principes de transparence, d’équité et d’indépendance par les représentants de l'ISIE à l'étranger. Elle a ainsi exprimé son indignation illimitée face à l'indifférence de l’ISIE à toutes leurs observations et leurs appels précédents dénonçant des infractions graves et violations flagrantes et délibérées, enregistrées sur la gestion des opérations d’inscription de la communauté tunisienne résidant à l'étranger.
Le mouvement fait porter au gouvernement actuel et à l'Assemblée nationale constituante tous les effets et conséquences qui découleront de ces actes imprudents et irresponsables, qui semblent être destinés à favoriser certains partis politiques, en provoquant l’aversion du Tunisien à accomplir son devoir de vote. La communauté tunisienne en Allemagne et en France a dénoncé les conditions d’inscription pour les prochaines élections et critiqué le choix d’un certain nombre de membres des instances sectorielles. Ils ont d’ailleurs, critiqué la partialité des membres de l’ISIE, accusés d’être proche du mouvement Ennahdha. Finalement le responsable de l’instance en France a été limogé.

Au niveau de l’organisation, l’ISIE laisse à désirer. L’Instance avait mis un temps fou à trouver les locaux et les outils de travail. La campagne de sensibilisation pour l’inscription des électeurs a aussi enregistré un retard conséquent, amenant différentes composantes de la société civile à prendre le relai. D’un autre côté, les défaillances du processus d’inscription sur les listes électorales à l’étranger ont été innombrables. On citera les problèmes rencontrés sur le site dédié à l’inscription des Tunisiens à l’étranger. Les personnes ayant renouvelé leurs passeports ne pouvaient pas s’y inscrire, en dépit de leur participation aux élections du 23 octobre 2011. En outre, le site ne donnait pas la possibilité aux prochains électeurs de s’inscrire avec leur numéro de CIN. Cette défaillance sera réglée après moult dénonciations. Une autre défaillance qui a empêché l’enregistrement de plusieurs personnes : de nombreux bureaux restés inoccupés et donc, n’ont pas pu faire leurs prestations jusqu’à il n’y a pas si longtemps. Les équipes censées accueillir les électeurs n’étaient pas présentes dans différents consulats et ambassades.

Au vu des accusations de non-neutralité qui fusent de toutes parts et des différentes défaillances constatées, le rendement de l’Instance supérieure indépendante pour les élections n’a su convaincre. Sachant que le bon déroulement des inscriptions sur les listes électorales est une prémisse de base pour la tenue d’élections libres, démocratiques et transparentes, il est nécessaire de tirer la sonnette d’alarme.

Ikhlas Latif
05/08/2014 | 1
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