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« Si chacun assure sa propre sécurité, ce sera la loi de la Jungle », dixit Béji Caïd Essebsi
24/12/2012 | 1
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« Si chacun assure sa propre sécurité, ce sera la loi de la Jungle », dixit Béji Caïd Essebsi
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Les institutions de l’Etat se sont montrées, encore une fois, incapables de garantir la sécurité des activités politiques légales. Le meeting de Nidaa Tounes, organisé samedi 22 décembre 2012 à Djerba, a démarré péniblement et même son leader, Béji Caïed Essebsi n’a pu prendre la parole. Le meeting s’est d’ailleurs achevé en queue de poisson et au milieu d’une confusion générale marquée par des actes de violences contre les participants présents à la réunion.
C’est encore, selon les affirmations de toutes les parties présentes, un coup des fameuses et contrversées Ligues de protection de la révolution (LPR) que des responsables d’Ennahdha se sont précipitées à affirmer, à tort, qu’il s’agissait d’organisations yousséfistes. Et tout le monde se pose la question : qu’attend le gouvernement pour prendre des mesures énergiques afin de mettre fin à la violence politique et garantir les conditions adéquates à une vie politique plurielle et saine ?


En effet, samedi après-midi à Djerba, les forces de l’ordre n’ont pas « su », encore une fois, garantir la sécurité requise pour le déroulement du meeting de Nidaa Tounes. Des éléments perturbateurs ont pu, multiples vidéos à l’appui, saboter le déroulement du meeting de ce parti. De nombreux éléments ont même pu accéder à l’intérieur des lieux de la réunion pour y créer la confusion et la terreur, par des cris et des slogans hostiles voire des propos grossiers. «Ils étaient pourtant à peine une centaine au départ et les forces de l’ordre auraient dû et pu les contenir», a déploré le blogueur Achraf Riahi, présent sur place.

De plus, les forces de l’ordre ont mis des heures avant de venir secourir près de deux mille citoyens assiégés par ces milices. «Il est clair qu’il y a de la complicité entre les agresseurs et les donneurs d’ordres au sein du ministère de l’Intérieur», a accusé le leader du parti Al Joumhouri, Ahmed Néjib Chebbi.
Il s’agit d’une atteinte évidente à la liberté d’expression dans le sens où les forces de l’ordre ont mis des heures avant de réagir. Certains ont même prétendu qu’il s’agissait de faits similaires à ce qui s’est passé à Sidi Bouzid lors de la visite des présidents Moncef Marzouki et Mustapha Ben Jaâfar. A ces derniers, il est utile de rappeler que les forces de l’ordre ont assuré la sécurité des présidents à Sidi Bouzid et que c’était plutôt la population qui était en colère.

A Djerba, les forces de l’ordre ont failli à leur mission sécuritaire qui consiste à protéger le meeting et garantir la liberté d’expression de toutes les parties présentes. Or, les forces de l’ordre n’ont pas assuré ce rôle alors que tout laissait prévoir une vive tension en marge de cet événement. La prévention aurait dû être de rigueur dans la mesure où il s’agissait, en plus, d’une station touristique balnéaire qui connaît une grande affluence touristique en cette période de fêtes de fin d’année.
Cette défaillance ne saurait s’expliquer, selon plusieurs politiciens et observateurs, que par une complaisance voire une complicité entre les agresseurs et la direction politique du ministère de l’Intérieur, comme l’a dit, sans détours, Béji Caïd Essebsi, président de Nidaa Tounes ainsi que tous les membres de la direction de son parti.

D’ailleurs les masques sont tombés avec la démolition de l’argument massue, brandi par de hauts responsables d’Ennahdha, en l’occurrence Ameur Laârayedh et Ajmi Lourimi notamment, comme quoi il s’agissait, cette fois-ci, de Yousséfistes.
Or, à peine quelques heures après ces déclarations, le neveu de Salah Ben Youssef et le premier responsable de l’organisation yousséfiste ont rendu publics des communiqués officiels dans lesquels ils réfutent ces affirmations du parti islamiste et assurent qu’ils n’ont pas été de la partie, qu’ils n’ont jamais préconisé la violence et qu’ils refusent d’être mêlés dans des querelles entre des partis politiques.

De tels incidents annoncent d’une manière évidente des lendemains incertains sur la scène politique. Mais ils ne promettent, non plus, rien de positif pour l’environnement des investissements. La sécurité n’est donc pas de mise dans le pays. C’est à croire que ceux qui manipulent de telles milices et orchestrent de pareils incidents, ne sont pas concernés par l’image du pays.
Ne comptent aux yeux de tels instigateurs que leurs petits calculs électoralistes dans le sens où ils semblent déterminés, coûte que coûte, à empêcher le parti de l’ancien Premier ministre d’avoir une activité normale, car, selon les analystes, ce mouvement représente le plus sérieux rival pour le parti islamiste et constitue pour lui un « danger » rampant qu’il faut écarter par tous les moyens.

La persistance et la recrudescence de ces violences ont amené les politiciens et les défenseurs des libertés et de la démocratie à qualifier la situation de très grave, d’autant plus que le pays est censé préparer des échéances électorales devant concrétiser la portée plurielle des choix de la révolution tunisienne. Le peuple tunisien n’a-t-il pas chassé Ben Ali pour gagner la liberté d’expression, avant même de parvenir à l’équité sociale ?
C’est dur de se sentir dépossédé de cette liberté d’expression, considérée comme l’acquis majeur, voire l’unique, perceptible de cette révolution. Mais, jamais la roue de l’histoire ne fera marche arrière, comme l’a annoncé le poête Mohamed Seghaïer Ouled Ahmed, quelques minutes avant que ces milices, que certains n’hésitent pas à qualifier de fascistes, n’encerclent la salle du meeting.
«Les forces de l’ordre ont laissé faire les manifestants hostiles à Nidaa Tounes qui ont avancé sans aucun contrôle jusqu’à l’entrée de la salle», a raconté Nesrine, une jeune de 24 ans, présente sur place. Le porte-parole de Nidaa Tounes, Ridha Belhaj, accuse Ennahdha et parle d’atteintes systématiques à la liberté d’expression. «Nous allons porter plainte devant les instances internationales», a-t-il averti.

L’avenir de la transition démocratique en Tunisie n’était certes pas gris. Avec ce qui s’est passé à Djerba, il s’assombrit davantage. La situation exige une solution urgente avant qu’elle ne se complique davantage, surtout que les fans d’Ennahdha ne reculent devant rien.
Il est à mentionner, par ailleurs, que suite à l’interruption du meeting de Djerba, Béji Caïd Essebsi attaque, pour la première fois, de manière frontale, Ennahdha en l’accusant de manière crue de constituer «un danger pour l’avenir de la Tunisie». L’ex-Premier ministre a déclaré «n’avoir jamais imaginé que la Tunisie pourrait vivre une situation pareille, deux ans après sa révolution».
«L’unique véritable acquis de la révolution, c’est la liberté d’expression. Mais, apparemment, avec ce qui s’est passé aujourd’hui, Ennahdha essaie d’enterrer même cette liberté d’expression», a déploré le leader de Nidaa Tounes.
Béji Caïed Essebsi a déploré le fait que «l’Etat ne garantisse pas la sécurité de ses citoyens, ce qui risquerait d’aboutir à une logique similaire à la loi de la jungle». Il n’a d’ailleurs pas mâché ses mots contre le parti islamiste qu’il accuse de devenir «le plus grand danger pour la sécurité des Tunisiens dans la mesure où ses adhérents sont derrière ces atteintes à la liberté d’expression».

Les propos de Béji Caïed Essebsi traduisent son inquiétude pour l’avenir de la transition démocratique. «En l’absence d’un Etat fort et des conditions adéquates à la concurrence politique, il ne saurait y avoir d’élections», a récemment averti Kamel Jendoubi, ex-président de l’ISIE. Est-ce par hasard que les ailes dures d’Ennahdha jouent le pourrissement ?

Mounir Ben Mahmoud
24/12/2012 | 1
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