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Chroniques
L’argent sinon la prison
Par Marouen Achouri
08/11/2023 | 15:59
4 min
L’argent sinon la prison

 

L’argent sinon la prison, c’est en substance ce qu’avait déclaré le président de la République, Kaïs Saïed, en évoquant les travaux de la commission de conciliation pénale. C’était il y a deux mois jour pour jour. Au moins, le ton était donné et le chef de l’Etat s’est montré totalement transparent sur ses intentions, malgré les justifications de ses laudateurs. Il faut au moins ça pour récolter la somme faramineuse de 13,5 milliards de dinars annoncée avec assurance par Kaïs Saïed lors de la mise en place de cette commission. À trois jours de la fin des travaux de ladite commission, il semble établi, comme nombre d’observateurs l’avaient prévu, qu’il n’est plus du tout question d’une telle somme. Toutefois, pour ne pas perdre totalement la face, il faut bien trouver de l’argent et faire raquer ceux qui en possèdent. C’est que les entreprises communautaires, autre grand projet du président de la République, ne vont pas se financer toutes seules…

 

C’est ainsi que durant les dernières semaines, les hommes d’affaires et les grandes fortunes du pays se relayent derrière les barreaux. L’État tunisien s’est rendu compte que plusieurs personnes sont suspectées d’implication dans diverses affaires de blanchiment d’argent, de trafic d’influence et autres chefs d’accusation. Le fait que ces personnes soient, en même temps, très riches n’est certainement qu’un pur hasard. Donc, plusieurs de ces personnes se retrouvent sous les verrous et sont déjà en train de négocier avec la commission pour déterminer la somme d’argent à payer qui leur permettrait de retrouver leur liberté. Bien mal intentionné celui qui y verrait une forme de racket à grande échelle organisé par l’État. Au contraire, l’État se mobilise pour récupérer l’argent du peuple spolié par ces grandes fortunes. « Qu’ils rendent l’argent, plus les 10%, sinon point de réconciliation ! Ils seront poursuivis en justice sinon ! Qu’on arrête avec les avocats et les experts, nous n’avons pas besoin de rapports et d’expertises, nous avons les chiffres ! L’argent qui a été pris au peuple doit lui être rendu, c’est tout ! », avait fulminé le président de la République devant les membres, terrifiés, de la commission de conciliation pénale. On ne peut pas être plus clair que cela.

 

Cette commission mérite, par ailleurs, que l’on s’y attarde un peu. Rappelons d’abord que sa mission prend fin, d’après le décret présidentiel à l’origine de sa création, le 11 novembre 2023. Cela fera un an que la commission tente d’atteindre l’objectif totalement irréaliste que lui a fixé le président de la République. La courte existence de cette commission n’aura pas, non plus, été un fleuve tranquille, à défaut d’être long. En mars 2023, le président de la commission a été viré, sans ménagement, par Kaïs Saïed. On lui aurait reproché la faiblesse des résultats et la lenteur des procédures. Depuis, la commission est restée sans président. La commission, ou plutôt l’une de ses membres, s’est attirée les moqueries et les railleries d’une grande partie des Tunisiens en juin 2023. Devant le président de la République, dont la connaissance très superficielle des chiffres n’est plus un secret, une des membres de la commission a évoqué la possibilité de récupérer, auprès d’un homme d’affaires, la somme hallucinante de 30 « billions » de dinars. Le président Kaïs Saïed était ébahi devant une telle révélation et ne s’est pas du tout interrogé sur la fiabilité du chiffre qui lui a été donné. Il s’en est rendu compte plus tard, suite aux moqueries et aux critiques, et a donc procédé au limogeage de la membre de commission qui avait parlé de billions de dinars.

 

Le 7 novembre 2023, heureuse coïncidence, les hommes d’affaires Marouen Mabrouk et Abderrahim Zouari ont été placés en garde à vue pour cinq jours. Selon son avocat, Marouen Mabrouk a déjà entamé une procédure de conciliation avec la commission. Cela ne lui aura pas épargné le fait d’être placé à Bouchoucha. D’autres hommes d’affaires sont dans la même situation et sont emprisonnés, en attendant de voir combien ils vont mettre sur la table. D’une manière ou d’une autre, le projet présidentiel de récupération de l’argent volé doit réussir. Il s’agit de l’une des pierres angulaires de sa vision pour la Tunisie et puis il faut de quoi alimenter le récit de l’intrépide justicier qui va rendre justice au peuple. Devant l’échec de la commission, la colère du président sera terrible. Parions, dès maintenant, que les procédures, les avocats et le fait que l’administration soit infiltrée feront partie, en vrac, des éléments de langage qui seront utilisés pour justifier et expliquer l’échec. La commission de conciliation pénale ne réussira à récolter que des clopinettes pendant que les masses s’extasieront devant les arrestations.

 

La conciliation pénale est une mauvaise idée qui s’est avérée être inefficace et n’a pas donné les résultats escomptés. Personne, et surtout pas le pouvoir en place, n’osera évidemment l’admettre. On préférera, dans une tradition purement tunisienne, aller vers la dérive autoritaire et judiciaire plutôt que de se dire que l’idée du président n’a pas marché. On préférera invoquer mille et un prétextes pour dire que l’idée était lumineuse, mais on ne l’a pas laissé la mettre correctement en œuvre. Et puis, comme d’habitude, les masses passeront à autre chose…

Par Marouen Achouri
08/11/2023 | 15:59
4 min
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Commentaires
Hammadi
A la saoudienne
a posté le 11-11-2023 à 21:17
'?a me rappelle un certain ben salmen qui a mis les princes au prison pour collecter la somme de 400 milliards de dolars pour Trump.
IBn KHALDOUN
10 Milliards de Dt non recouvrés
a posté le 11-11-2023 à 09:09
Une mission, relative au recouvrement fiscal issue du 23ème rapport de la Cour des Comptes (CdC), a été réalisée entre 2013 et 2019. Ladite mission a été menée suite à la constatation que le montant du reliquat des créances fiscales, constatées et non recouvrées, totalisait 10.252 MDT (10 Milliards et 252 millions de Dinars tunisiens), avec un taux de recouvrement ne dépassant pas les 8,1 %.
G&G
Oui l'argent ou la prison mais pas de cette façon
a posté le 09-11-2023 à 18:20
Depuis le 14 maudit je n'avais pas cessé de gueuler et de tirer la sonnette d'alarme contre le déséquilibre flagrant qui s'accentue d'année en année aussi bien entre les citoyens que les régions.
Durant les deux décennies précédant le 14 janvier, le tunisien avait profité directement ou indirectement de la croissance économique du pays.
Aujourd'hui, avec la crise que traverse le pays, il est de son devoir national de contribuer solidairement pour le sauver.
Bien que les citoyens avaient profité disproportionnellement de la richesse du pays, et mis à part de ceux qui s'étaient enrichi illégalement et qui demeurent toujours responsable devant la loi, La contribution solidaire obligatoire consisterait à payer un droit d'enregistrement de 2 pour cent de la valeur actuelle de tous les biens immobiliers ( terrains, bâtiments, actions, société etc..) contre un certificat ou un titre bleu électronique à l'instar du titre bleu ordinaire.). Cette taxe serait payable une seule fois et par facilité sur la base d'une évaluation contradictoirement estimée par deux commissions indépendantes.
D'après une étude sommaire, cette contribution qui ne devrait épargner aucune propriété privée pourrait rapporter à l'Etat l'équivalent de 45 milliards de dinars et permettrait la régularisation des titres pour toutes les propriétés y compris celles laissées pour compte depuis des décennies.
AMMAR BEZZOUIR
@G&G: Bien que les citoyens avaient profité disproportionnellement de la richesse du pays?
a posté le à 19:09
Ils ont profité de la richesse de la Libye et de ses produits subventionnés à l'époque de Bourguiba et de Ben Ali, ainsi que d'un énorme marché du travail pour la moitié des Tunisiens du sud du pays: C'est la vérité !

Sarkosi et les US ont assassiné Kadhafi et depuis, tous les robinets sont à court d'eau ou complètement fermés en Libye. C'est la vérité, cher G&G, une économie florissante de la Tunisie - aussi au futur - sans la richesse de ses voisins n'est que de l'étopie !
Jad
Idée géniale
a posté le à 19:05
WAAOU!
Changement des titres de propriété et des billets de banque est une vraie révolution.
Abidi
Corruption
a posté le 09-11-2023 à 17:03
Tant qu'il y aura des corrompus et leurs défendeurs comme notre cas le pays continuera à sombrer,du moins Mr , sachez que le président essaie avec tous les moyens possibles de sauver ce pays avec toutes la racaille qu'il comporte et alors que lui il se casse la tête les grandes gueules ne font qu'aboyer
Chelbi
Rigolo
a posté le à 18:04
Les preuves ne comptent plus pour vous et votre gourou. Pourvu qu'une personne a exerce le pouvoir un jour ou était proche de lui, elle deviendra corrompue. Pire encore, pourvu qu'il y ait des pages facebook qui travaillent comme un parquet parallèle, et qui lynchent ces personnalités jour et nuit, ces dernières sont forcément corrompues. Les perceptions sont trompeuses parfois et a moins qu'il y ait des preuves concrètes, ça s'appelle une injustice flagrante. Elli ma 3andou chahed kadhab..
En parlant de corruption, on la chasse toujours dans le haut alors qu'elle gangrène dans le bas. Exemple, l'appareil coercitif celui qui est sensé appliquer la loi sur tout le monde, il n'est pas si propre pourtant ton gourou ne veut pas y toucher car il en a besoin. Il combat la corruption vous me dites LOL
Rationnel
Une procédure qui prendra des décennies
a posté le 09-11-2023 à 14:09
Les procédures en Tunisie ne vont aboutir que dans une décennie ou plus vu que le système est contaminé. Ce système a facilité à ces hommes d'influences et de proximité d'accumuler les biens mal acquis. En facilitant cette acquisition les responsables ont réalisé des petites fortunes. Comment voulez-vous que les gens qui se sont enrichis en facilitant le vol des biens publics dénoncent leurs collaborations?
Une meilleure option pour réussir à récupérer une partie des biens mal acquis seraient des procédures a l'étranger (surtout en France) ou des succès ont été réalisés par des associations tel que Survie et Sherpa (voir page 'bien mal acquis' sur Wikipedia). Les biens d'Omar Bango et ses 54 enfants sont confisqués en France, l'enquête et les procédures en justice ont pris plus de quinze ans et ne sont pas encore achevés.
Pourquoi mettre un terme aux travaux de la commission. Ce sont des affaires qui prennent des décennies et la résolution ne va pas s'achever sans que le système de justice en Tunisie se rajeunisse, une bonne partie de ceux qui tiennent les rênes du système ont participé à la facilitation de l'acquisition de ces biens.


FALLAG
L'argent sinon la prison?
a posté le 09-11-2023 à 13:40
Oui, MIN EIN'? ILEIK'? Hèthè !!
L'argent volé est remboursé ou en prison!
Alya
Certains homme d affaires avaient déjà sollicité la comission
a posté le 09-11-2023 à 12:03
Oui selon les avocats , certains hommes d affaires avaient déjà sollicité la dite commission ?
riri
encore un clou dans le cerceuil de la Tunisie, merci président
a posté le 09-11-2023 à 10:50
qui va investir dans un pays ou on racket les hommes d'affaires de manière totalement illégale?

On continue a couler le pays
Lol
On ne rackette que les rackettables
a posté le 09-11-2023 à 08:42
La famille affairiste du dictateur zaba s'y connait en racket. Ce n'est que le retour du bâton.
Certains masochistes peuvent défendre ceux qui les obligent à payer plus d'impôts et de taxes pour combler le manque a gagner de l'état. Mais un contribuable normal voudra toujours que tout le monde participe conformément à la loi.
Les politiciens comme partout dans le monde aiment ce pain béni. Et ça ne va pas s'arrêter de sitôt. Même si vous arrangez les choses sous la table avec le régime du moment.
Ben kemil
Pauvre tunisie
a posté le 08-11-2023 à 23:18
Pauvre Tunisie'?'.
Ou vont ils mener le pays?
Ils vont detruire l'economie et le travail fait depuis l'ère Bourguiba'?'
FOUED
JUSTICE DOIT ETRE FAITE
a posté le 08-11-2023 à 19:41
La forme peut prêter à discussion , mais l ETAT ne doit pas attendre éternellement que ceux qui avaient profité de leur proximité avec le pouvoir de BEN ALI daignent trouver un arrangement avec le gouvernement , BEN ALI est parti depuis 12 ans , ça fait un bail, et puis ces personnes qui ont commis des malversations financières de très grandes sommes d argent n ont aucune raison d avoir un meilleur traitement qu' un citoyen normal qui peut faire de la prison pour des sommes qui avoisinent des fois quelques centaines de dinars,
dans un monde parfait , on aurait exclu toute la classe politique du régime de BEN ALI , de façon définitive , ainsi que celle des médias et de la justice ,plus de façon temporaire la classe des hommes et femmes d affaire , malheureusement aucun gouvernement entre 2011 et 2021 n a été dans cette direction , bien au contraire , Gannouchi et ses complices avaient gardé ces différents acteurs de la scène nationale sous la main , ni condamnés , ni amnistiés donc susceptibles de subir tout sortes de pressions .Gannouchi avait privé les tunisiens d ouvrir les dossiers de notre pays de 1956 à 2011 , sous son prétexte farfelu de concorde nationale ,
à la fin notre pays a été privé de faire l inventaire d un demi siècle d indépendance , et au lieu de demander des comptes à ceux qui avaient commis des crimes et des délits , on a crée une nouvelle caste plus vorace et plus affamée , puisque avec cette concorde de Gannouchi , on donne de fait le droit aux puissants de notre pays de commettre des crimes et des délits puisqu' ils ne seront pas poursuivi par la justice , après tout si Gannouchi avait '?uvré à l impunité de ses anciens ennemis , il ne va pas juger ses amis et proches .
pour les intérêts de notre pays et peuple , passez une autre fois .
Tristesse
Tant que le peuple applaudit, croit à ce qu'on lui dit, ou se cache dans sa tour de sans souci, les dirigeants vont ce qu'ils veulent!!!!
a posté le 08-11-2023 à 18:30
Tout ce qui nous arrive est attendu et prévisible et nous le méritons. Et mazel mazel. Les gouvernants actuels se permettent tout enveloppés derrière des mythes qu'ils se sont fabriqués pour un peuple qui en est demandeur, un peuple qui adore les mythes, les images d'?pinal, les discours grandiloquents, les illusions, les fantasmes de tout type. Et ceci ds tous les thèmes en politique nationale ou internationale. La grande polémique qu sein du parlement le montre t. Bien. Certains vont plus loin que les Palestiniens voire Hames eux-mêmes. Et se lancent ds des hystéries qui sont à psychanalyser. L'autre jour g entendu un petit député (qui se croit un gd homme politique) dire en toute certitude que "la réalité n'est pas vraie" , si un député (au 21 e siècle) parle comme un philosophe de l'Antiquité (-Platon), comment s'étonner de ce qui nous arrive. Un seul souhait, que tous ces excités soient interrogés et jugés un jour
A4
C'est le naturel qui revient au galop !!!
a posté le 08-11-2023 à 16:50
L'ETAT
Ecrit par A4 - Tunis, Août 2009

Ce n'est ni la roue
Ni les vis-écrous
Ni même le rail
Ou d'autres trouvailles

Qui sont les plus belles
Les plus sensuelles
Les meilleures en somme
Inventions de l'homme

C'est plutôt l'état
Dans tous ses états
Qui sûr à mes yeux
Se classera le mieux

C'est l'état de guerre
Qui tue et enterre
Dans des fosses communes
Lors de nuits sans lune

C'est l'état de folie
Qu'on attache au lit
Et qui chante et danse
Puis qui entre en transe

C'est l'état de manque
Qui braque les banques
S'agrippe et s'accroche
Et te vide les poches

C'est l'état-major
Qui te fait du tort
Affame ta mémé
Et gave son armée

C'est l'état liquide
Des eaux pas limpides
Qui coulent et qui glissent
Puis qui t'envahissent

C'est l'état d'ivresse
Qui t'oblige sans cesse
A remplir son pot
De taxes et d'impôts

C'est l'état civil
Qui tel un débile
Note tes pointures
Et progénitures

C'est l'état de siège
Qui tourne en manège
Et où bien s'asseoir
Constitue un art

C'est l'état de fuite
Qui sait agir vite
Détournant les malles
De la banque centrale

C'est l'état de ruine
Qui crie et qui couine
Et te rode autour
Tel un vrai vautour

C'est l'état d'alerte
Qui cherche ta perte
Se frottant les mains
Te sachant défunt

C'est l'état de choc
Qui agit en bloc
Et qui par surprise
Te rafle la mise

C'est l'état gazeux
mouvant et vaseux
Qui grogne et aboie
En langue de bois

C'est l'état des lieux
Qui se prend pour dieu
Construit des enfers
Sur terre comme en mer

C'est l'état statique
Où des gars s'appliquent
A freiner encore
Des gars au point mort

C'est l'état de grâce
Qui devant la glace
Admire sa bedaine
Huit jours par semaine

C'est l'état d'esprit
Qui veut que tu pries
Au moins par décence
Et obéissance

C'est l'état de santé
Atteint de cécité
Ne sachant quoi dire
Ment comme il respire

C'est l'état de crise
Sans matière grise
Formé de tarés
Vivant à tes frais

C'est l'état solide
Serrant fort ses brides
Te rouant de coups
Et te tordant le cou

Puis c'est l'état d'âme
Qui pour rien s'enflamme
Spoliant un à un
Veuves et orphelins