
Avec les bouleversements géopolitiques qui se profilent, rendant incertaines toute perspective économique, avec les mesures sociales annoncées par le gouvernement non prévues dans le budget de l’État, le gouvernement ne serait-il pas condamné à d’inévitables ajustements budgétaires à travers l’élaboration d’un projet de Loi de finances complémentaire pour contenir la dérive budgétaire et éviter une dégradation des finances extérieures ?
Une croissance économique incertaine
Dès l’abord, l’hypothèse d’un taux de croissance économique de 3,2% en 2025 sur lequel repose le budget général de l’État semblait trop ambitieuse. À tel enseigne d’ailleurs que le ministère de l’Économie et de la Planification éprouverait d’énormes difficultés à établir des perspectives macroéconomiques 2025 cohérentes. Raisons pour lesquelles il n’a pas publié à ce jour le Budget économique 2025.
Maintenant, au vu des résultats de la croissance 2024, cette hypothèse est devenue illusoire. Du coup, elle rend difficilement réalisables les objectifs de ressources fixés dans le budget de l’État pour l’exercice 2025. Des ressources déjà incertaines compte tenu des objectifs d’emprunts fixés initialement, particulièrement d’emprunts extérieurs.
Un accroissement des ressources non fiscales serait-il envisageable pour compenser une probable diminution des ressources fiscales du fait de la faiblesse de la croissance ? L’application stricte des sanctions aux infractions et manquements au code de la route, d’autant qu’elles viennent d’être financièrement alourdies par le biais de la dernière Loi de finances, pourrait y répondre. Une telle piste mériterait amplement d’être explorée. Les contrevenants au code et les chauffards de la route sont devenus de plus en plus légion et le nombre d’accidents de la circulation avec ses morts et ses blessés n’en est que le pendant le plus visible.
Un ajustement des dépenses budgétaires inévitable
En tout cas, hormis ce genre d’option, un ajustement à la hausse des ressources budgétaires constitue une gageure tant les voies menant à cet objectif paraissent limitées. Ne reste alors que l’ajustement des dépenses du budget de l’État.
De ce point de vue, le rééquilibrage de certains postes de dépenses budgétaires est inéluctable pour maintenir autant que faire ce peut l’objectif d’un déficit budgétaire de 5,5% du PIB en 2025. Un rééquilibrage qui ne pourrait s’opérer qu’au détriment du budget dédié à la subvention et non plus à celui dédié à l’investissement afin de sauvegarder le minimum d’impact et de crédibilité de ce poste budgétaire.
La réforme de la politique de compensation : une nécessité
Une réduction des dépenses de compensation est possible. Elle serait de moindre douleur si elle concerne le budget de subvention à l’énergie et particulièrement la subvention aux carburants.
Depuis 2022, l’État n’a pas ajusté le prix des carburants à la pompe, faisant passer les dépenses budgétaires de compensation à ces produits de 3,3 milliards de dinars en 2021 à 7,6 milliards de dinars en 2022 et autour de 7 milliards les années suivantes. Une compensation qui ne profite qu’à 20% des plus pauvres. Une nécessité conjoncturelle qui constituerait une opportunité à l’engagement d’une véritable et radicale réforme de la politique de compensation sans qu’elle ne bouscule outre mesure le rôle social de l’État, surtout à l’égard des plus démunis.
Le gouvernement osera-t-il emprunter une telle démarche alors qu’elle était recommandée depuis 2013 par le Fonds monétaire international (FMI) lors des négociations autour du 1er accord de crédit accordé par l’institution financière multilatérale à la Tunisie ? Ce serait faire aveu de l’échec d’un refus et d’une politique basée uniquement sur le « compter sur soi ». Voilà d’où émane l’impasse budgétaire 2025.
Toucher aux subventions est vu comme un grand risque depuis les émeutes du pain de 1984, il serait plus facile de réduire la consommation de l'energie importée avec l'accélération des projets des énergies renouvelables.
-->
C'est très bien dit, Mr. Ben Achour
Dr. Jamel Tazarki, Mathématicien Résident à l'étranger

