Par Synda TAJINE
Tout comme le ministre français du redressement productif, Arnaud Montebourg, avait posé en 2012, en égérie pour la France, avec sa marinière, son blender Moulinex et sa Michel Herbelin au poignet, fièrement souriant devant le drapeau tricolore, notre ministre du Tourisme, Amel Karboul, joue les parfaites femme-sandwich.
Le sourire parfait, toutes dents dehors et en impeccable tailleur digne de la PDG d’une boite de Consulting qui a du chien, elle vente les bienfaits de la Harissa tunisienne. « Allez venez ! », dit-elle aux touristes canadiens qui devront sortir leurs cartes VISA et réserver leurs prochaines vacances en Tunisie appâtés par les 60 degrés de différence entre les deux pays.
Force est de reconnaitre que la dame a du charme. Elle sait séduire. Captivante et inventive, Amel Karboul, fraichement investie de la lourde tâche de sauver le tourisme local, est consciente que son mordant dépassera les frontières et fera des transits au-delà des océans.
« C’est exactement le profil qu’il faut pour redémarrer le secteur bien fragilisé du tourisme », commente un de nos fidèles lecteurs. Après le spot, très médiatisé certes, mais suscitant des réactions assez mitigées, des touristes canadiens s’exprimant le plus spontanément du monde au micro d’un de nos confrères ont répondu à l’appel. « Nous viendrons Mme la ministre », touchés par cet élan de créativité et ce message charmeur qui leur est adressé.
Le tour est joué et tout le monde est heureux dans le meilleur des mondes. Passons le poids que peut susciter un message adressé par une seule canadienne, interrogée sur la prochaine destination éventuelle de ses vacances, suffit-il aujourd’hui d’avoir les cheveux impeccablement lissés, le rouge à lèvres bien dessiné et une verve parfaite pour sauver le tourisme ? Miser sur son image de parfaite francophone et anglophone, patronne d’une société de consulting, n’est-ce pas une solution de facilité pour éviter de s’embourber dans des mesures drastiques et des réformes douloureuses ?
Mais au-delà de toute cette campagne com’, le secteur du Tourisme est plus complexe qui nécessite des réformes de fond. Une amélioration de la situation actuelle dans le pays, tant au niveau politique, que sécuritaire, ou encore, environnemental et sanitaire, devra également suivre pour éviter de faire saboter les mesures entreprises.
Une qualité de service, bien au-deçà des standards exigés en la matière, devra être améliorée et le produit touristique tunisien, repensé. Qu’a prévu Amel Karboul pour sauver le tourisme tunisien de sa détresse actuelle ? « Cette Ministre qui me fait plus penser à une petite fille qui a trouvé un super jouet avec lequel elle s'amuse », ironiseront d'autres. Force est de reconnaitre que la comparaison n’est pas dénuée de tout fondement.
Le produit touristique est-il condamné à évoluer uniquement dans cette sphère low cost , à être le minable produit d’une chaîne de grande distribution ? Des hôtels industriels à profusion, des plages de sable doré, du soleil à volonté, des restaurants touristiques où le typique n’a pas sa place et des rabatteurs à l’affût, est-ce là le plan com’ de la ministre ? Si l’étroite collaboration entre le ministère de la Culture et celui du Tourisme fait partie de la stratégie mise en place par Amel Karboul, qu’en est-il réellement sur le terrain ? Karboul réussira-t-elle à imposer une autre image de la destination Tunisie que ses hautes températures et sa Harissa piquante ? Mais est-ce tout simplement un problème d'image? Le tourisme balnéaire et de masse cédera-t-il la place à un tourisme culturel et historique plus élaboré ?
L’ancien ministre du Tourisme, Mehdi Houas avait promis de s’atteler à donner vie à ce projet mais a démissionné sans même avoir commencé… Après le départ d’une Karboul de charme, mais éphémère certes, la ministre étant en place uniquement pour une durée de quelques mois, qu’adviendra-t-il du secteur du Tourisme ? Survivra-t-il à un nouveau ministre chauve, bedonnant et grisonnant ?
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