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Chroniques
A quoi servent les déculottées, si elles ne sont pas suivies de démissions ?
13/01/2014 | 1
min
A quoi servent les déculottées, si elles ne sont pas suivies de démissions ?
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Par Nizar Bahloul,

Quinzaine laborieuse pour les troïkistes après les sérieux revers humiliants essuyés par trois ministres et un député. Malgré ces revers, aucun de ces responsables politiques n’a daigné présenter sa démission. Ni pour l’honneur, ni pour marquer le coup. Nos hommes politiques encaissent sans broncher, ils deviennent insensibles à tout ! Sous d’autres cieux, là où les démocraties se respectent, on démissionne pour beaucoup moins que cela. Mais on est en train d’apprendre ce qu’est la démocratie, parait-il, et on n’a pas encore atteint le chapitre consacré à la dignité.

Elyes Fakhfakh, lors des débats de la Loi de finances 2014, a été surpris par cette proposition de création d’un Fonds d’indemnisation des anciens prisonniers politiques. Une proposition d’Ennahdha de dernière minute, parachutée après minuit, quand tout le monde était épuisé. Le ministre des Finances est sorti de ses gonds, a rouspété, a gesticulé, mais s’est abstenu de faire l’unique geste adéquat en ces moments là : mettre sa démission.

Ce ministre devrait quitter son poste dans quelques jours, normalement, vu le calendrier du Dialogue national. Il aurait pu faire un coup d’éclat en manifestant sa désapprobation de ce manque flagrant de respect aux institutions de l’Etat. Indépendamment du bien-fondé ou non de la proposition de créer ce Fonds, on ne présente pas un pareil projet polémique à la dernière minute et après minuit. On a tellement glosé sur le respect de l’Etat, on a tellement dénigré les « médias de la honte » qui caricaturent ces institutions, et voilà que ces institutions sont clochardisées à l’ANC même, sans que le ministre ne réagisse. Encore moins le chef du gouvernement, assis à ses côtés.

Elyes Fakhfakh n’a pas eu la réaction adéquate pour défendre le respect des institutions, mais n’a pas eu le tact politique pour profiter de l’instant et marquer des points en faveur de sa propre personne et de son parti Ettakatol.

Cette proposition de minuit est humiliante pour le ministre et le ministère. En opposant sa démission immédiate, il aurait sauvé l’honneur de son poste et de son département et aurait brillé par son courage. Il aurait démissionné, son image serait devenue du jour au lendemain intacte, comme le fut son prédécesseur (qui a réagi à propos du même sujet). Il serait devenu un héros applaudi qui a su dire non quand il le fallait. Elyes Fakhfakh n’a pas eu le courage politique nécessaire de dire non et de quitter la table quand l’honneur est desservi. Il la quittera, malgré lui, dans quelques jours, sans avoir brillé par quoi que ce soit. Et c’est dommage et pour lui et pour Ettakatol. Ils auront cumulé les erreurs jusqu’à la dernière seconde. Quant à la question d’indemnisation, il faut juste rappeler que les anciennes victimes ont déjà été indemnisées par cette loi qui leur permet d’obtenir un siège dans la fonction publique. Et il faut aussi attirer l’attention sur cette grossièreté qu’est l’alimentation de ce fonds par des privés, car si c’était le cas, il n’y aurait aucune raison que sa création passe par la Loi de finances.

Abdellatif Mekki veut passer en force, et avec le mensonge, une loi obligeant les médecins spécialistes à travailler dans la fonction publique durant trois ans et dans des hôpitaux de province. Devant son ministère, sur le plateau télé d’Ettounsia en direct, il a été humilié maintes fois. On lui a prouvé en face, preuves à l’appui, qu’il ne disait pas la vérité et qu’il ne faisait que tromper l’opinion publique.

Un agent de sécurité de son ministère (qu’on voit parmi sa garde rapprochée dans une photo récente) ose donner un coup de poing et un coup de pied à un professeur hospitalo-universitaire devant les caméras et des centaines de témoins.
Pour beaucoup moins que cela, n’importe quel responsable ayant un minimum de dignité, aurait démissionné. Il s’est comparé à Ben Ali, alors que ce dernier a quitté le pays quand on lui a crié dégage. C’est ce même Abdelattif Mekki qui rappelait, pourtant, que le peuple a crié dégage à l’ancien régime et que celui-ci devait quitter la scène politique ? C’est bien lui et son parti qui défendaient les lois de l’exclusion, sous prétexte du dégage opposé à l’ancien régime ? Pourquoi lui et ses pairs ne dégagent-ils donc pas, malgré tous les « dégage » criés et qui sont nettement plus violents que ceux de 2010-2011 ? Qui est plus décent que l’autre en fin de compte ? La décence fait pourtant partie des critères par lesquels on « mesure » un « homme » comme il dit !

Abdelattif Mekki va quitter son ministère dans quelques jours et sa loi ne passera pas. Son image indécente est bien passée en revanche et ne quittera pas nos mémoires de sitôt.

Nadhir Ben Ammou a de sérieux problèmes avec les magistrats. Il a procédé à des nominations outrepassant ainsi ses prérogatives. Il se croyait encore à l’avant 2011, quand le Garde des sceaux décidait de tout et imposait ce qu’il voulait et qui il voulait. Les organisations professionnelles (SMT, AMT et OTIM) ont dénoncé l’acte du ministre et les magistrats ont observé des grèves pour protester contre son ingérence flagrante dans les affaires judiciaires. Le Tribunal administratif a désavoué le ministre, mais le ministre n’en a cure.

De quelle trempe est-il donc fait ? M. Ben Ammou va quitter le gouvernement dans quelques jours et devrait, normalement, rejoindre son poste d’enseignant universitaire. On ne lui connait pas d’ambitions politiques et quand bien même on lui connaitrait, il avait tout intérêt de sortir par la petite porte en avouant son échec, plutôt que de persister dans l’erreur et sortir par la porte de service donnant sur la noire impasse de l’arrière-cuisine.

Comment Nadhir Ben Ammou va-t-il affronter ses étudiants dans quelques semaines ? Quelle image donnera-t-il de l’enseignant qu’il est et du ministre qu’il était ? Quelles leçons va-t-il donner à ces étudiants qui seront demain nos avocats et nos juges ? C’est dommage, vraiment dommage. Comment peut-on détruire son image en si peu de mois pour un poste dans un gouvernement très provisoire.

Habib Ellouze:
Ses déclarations sont certifiées par des enregistrements et pourtant il ose mentir devant tout le monde pour dire « je n’ai pas dit, mes phrases sont sorties de leur contexte ». Ses collègues ont demandé son départ immédiat parce qu’il leur est devenu insupportable de rester, sous le même toit que lui. Il a été traité de « cheikh des menteurs » et de « terroriste » en plénière dans la plus haute institution de l’Etat. L’islam qu’on connait ne connait pas le terrorisme et a dit « le musulman ne ment point ! ». Lui, il connait et pratique l’un et l’autre. Il a marqué un but contre son camp en offrant à l’opposition, sur un plateau en or, un texte garantissant les libertés fondamentales. Avec tout ça, il aurait dû, non pas démissionner de l’ANC et d’Ennahdha, mais quitter définitivement la vie politique. Ce serait cependant sans compter avec cette évidence : quand on est terroriste, on est forcément indécent !
13/01/2014 | 1
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