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Chroniques
Retour sur un remaniement obscur
Par Marouen Achouri
31/01/2024 | 15:59
5 min
Retour sur un remaniement obscur

 

Il y a une semaine, la présidence de la République a annoncé des nominations à divers postes gouvernementaux. Ce sont trois ministres et trois secrétaires d’État qui ont été nommés. Si les trois ministres vont occuper des postes vacants parfois depuis plusieurs mois, ce sont les nominations aux secrétariats d’État qui sont dignes d’intérêt, ainsi que les négligences à d’autres postes que l’on peut constater.

En vertu des nominations, trois secrétariats d’État ont été créés. Un secrétariat d’État aux petites et moyennes entreprises affilié au ministère de l’Economie, un secrétariat d’État à la transition énergétique affilié au portefeuille de l’Industrie et un secrétariat d’État aux sociétés communautaires affilié au ministère de l’Emploi. De manière générale, il faut noter que l’expérience des secrétariats d’État en Tunisie n’est pas franchement une réussite. Les relations ne sont pas toujours faciles avec le ministre de tutelle et le rôle du secrétaire d’État n’est, souvent, pas clairement défini. Trouver une complémentarité au sein du même département entre le ministre et le secrétaire d’Etat s’est souvent résumé, en Tunisie, à mettre le secrétaire d’Etat à l’écart.

Toutefois, au vu de la situation économique du pays et de l’urgence d’un rebond dans différents domaines, ces nominations peuvent avoir du sens, mais c’est dans l’architecture gouvernementale que cela pêche. Il n’y a pas si longtemps, nous avions un ministère de l’Industrie et des PME. Traditionnellement, c’est ce ministère qui est chargé de chapeauter le secteur des PME et de tenter de faciliter leurs activités et fluidifier leurs relations avec l’administration. Avec ce remaniement, ce rôle est désormais sous la tutelle du ministère de l’Economie et de la Planification, lui-même héritier du MDICI (ministère du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale). Cela ne semble pas très cohérent au vu de l’architecture gouvernementale habituelle : le ministère de l’Economie et de la Planification est plutôt tourné vers l’extérieur avec, en parallèle, la dimension théorique de la planification. Rien à voir avec la dimension pratique et immédiate des PME.

Néanmoins, il faut saluer la création d’un secrétariat d’État à la transition énergétique car il était temps que ce sujet soit placé à son réel niveau d’importance et d’urgence. Ce n’est un secret pour personne que l’énergie coûte un bras à l’État tunisien et assurer ces dépenses, au vu de la situation chancelante des comptes publics, devient de plus en plus problématique. Ainsi, tous les efforts sont les bienvenus pour faire bouger ce dossier en Tunisie. Il faudra que le jeune titulaire de ce poste ait la force de faire bouger les lignes et qu’il soit prêt à engager un combat véritable contre le protectionnisme et le conservatisme de certaines entreprises de l’État opérant dans le secteur énergétique, suivez mon regard.

Le dernier secrétariat d’État créé est celui des sociétés communautaires sous la tutelle du ministère de l’Emploi. Ce dernier a tourné sans ministre depuis presque dix mois, soit dit en passant. Le dossier des sociétés communautaires est un dossier très important tant le président Kaïs Saïed en a parlé en présentant cette alternative comme une solution miracle. C’est ainsi que le président compte créer de l’emploi et de la richesse un peu partout en Tunisie. Ce dossier épineux dont la portée politique est évidente était confié au ministère des Affaires sociales et chapeauté par un conseiller du ministre. Il est d’abord positif d’envisager les sociétés communautaires comme de véritables entreprises capables de créer de l’emploi, d’où leur affiliation au ministère de l’Emploi, et non pas comme une prestation sociale fournie par l’État. Selon les propos du régime, les sociétés communautaires souffriraient d’une résistance accrue de la part de l’administration tunisienne et des banques concernant leur financement. D’autres affirment que l’idée en elle-même est inapplicable et tient bien plus de l’utopie que de la solution économique viable. Dans les deux cas, Riadh Chaoued, le secrétaire d’État chargé de ce dossier, se trouve déjà dans de beaux draps. Il devra combattre le conservatisme administratif et bancaire tout en fournissant des preuves que les sociétés communautaires sont une solution qui marche, qui crée de l’emploi et de la richesse. On ne sait pas laquelle des missions sera la plus difficile.

 

D’un autre côté, ce remaniement a négligé au moins deux postes pourtant créés à l’occasion du gouvernement de Najla Bouden pendant l’après 25-Juillet. Souvenez-vous, c’était un gouvernement que la Tunisie a attendu pendant des mois. Le président nous disait que l’important était la vision, et non la nomination de personnes à des postes. La vision en question s’est, semble-t-il, brouillée depuis. Bref, pour en revenir à l’architecture gouvernementale, il existe un poste important dont le rôle est central mais qui est pourtant resté vacant, celui de secrétaire général du gouvernement. Depuis le départ à la retraite de Sarra Rejeb en novembre 2022, personne ne l’a remplacée. S’est-il avéré que le poste était inutile ou s’agit-il d’une simple négligence ? La question se pose également pour un poste qui est déserté depuis bien plus longtemps que celui de secrétaire général du gouvernement, le secrétariat d’État au ministère des Affaires étrangères chargé de la coopération internationale. C’est Aida Hamdi qui avait été nommée à ce poste en octobre 2021 au sein du gouvernement de Najla Bouden. Elle a démissionné quelques mois plus tard en mars 2022 sans qu’on ne lui connaisse d’activité particulière. Ce qui est sûr, c’est que depuis, le poste est resté vacant malgré les discours grandiloquents sur l’importance de la diplomatie et surtout celle économique. Encore une fois, aucune explication n’a été donnée pour justifier cette vacance et on ne sait même pas pourquoi la titulaire du poste a démissionné. Ce qui est sûr, c’est que le gouvernement ne communique pas et ne souhaite pas présenter d’explications ni d’éclaircissements. D’ailleurs, c’est un gouvernement qui n’a toujours pas de porte-parole…

Par Marouen Achouri
31/01/2024 | 15:59
5 min
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Commentaires
Abidi
Obscurantisme
a posté le 01-02-2024 à 15:10
L'obscurité c'est vous qui l'a dégagez car pour un génie comme vous qui connaît tout sur tout et tous pourtant il stagne dans sa marre sans rien apporter de positif a rien et en rien a part le pessimisme qu'il cultive encore et encore