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Chroniques
Les députés d'Enahdha contre la levée du secret bancaire : Si seulement c'était une simple affaire de vote
13/11/2016 | 16:55
3 min

Le parti Ennahdha est-il prêt à adhérer au paysage politique civil et démocratique tunisien ? La question mérite d’être posée tant le comportement du parti islamiste prête à équivoque.

 

Au cours de cette semaine, la commission des finances au sein de l’ARP a voté contre l’article 37 du projet de Loi de finances 2017 portant sur la levée du secret bancaire. La quasi majorité des votants contre la proposition du gouvernement  sont des élus d’Ennahdha. Cela traduit la position première des dirigeants islamistes qui se sont positionnés clairement, dès le début de la discussion de cette mesure, contre la levée du secret bancaire avant de faire un repli tactique au niveau de leur discours pour annoncer qu’ils acceptent cette levée du secret bancaire sous conditions.

 

 En réalité, il ne s’agit pas de discuter le bien fondé de la proposition du gouvernement. Il ne s’agit pas non plus de savoir si les mesures actuelles en matière de secret bancaire sont une garantie pour les citoyens ou un frein pour l’administration. La question qui nous interpelle est de savoir pourquoi  Ennahdha et ses élus s’opposent-ils à une mesure qui devrait, en principe, mettre plus de transparence, lutter contre l’évasion fiscale, les malversations, le blanchiment d’argent, et toutes les pratiques financières frauduleuses. La logique, du moins la logique révolutionnaire, supposerait que le parti islamiste soit parmi les fervents défenseurs de la transparence. Du moins c’est ce que nous suggère son discours officiel.

 

Pour beaucoup, cette position du parti islamiste en faveur du maintien de l’opacité financière régnante dans le pays, trahit un embourgeoisement des dirigeants islamistes après la révolution, mais surtout depuis leur accession au pouvoir suite aux élections du 23 octobre 2011. Le changement rapide de standing chez les uns et le train de vie ostentatoire chez les autres alertent sur un rapprochement inquiétant entre les dirigeants islamistes et le monde des affaires et de l’argent. Ce rapprochement n’est malheureusement pas sans risque. Souvent, il flirte avec l’illégalité. Le cas le plus connu de cette aisance des islamistes avec l’argent, surtout quand il appartient à la communauté, est le cas du don chinois d’un million de dollars qui a atterri miraculeusement dans le compte personnel de Rafik Bouchlaka, gendre du leader d’Ennahdha Rached Ghanouchi  et ministre des Affaires étrangères de la troïka.

 

Certains, pour expliquer cet engouement manifeste des islamistes pour l’argent, interpellent leur passé assombri par beaucoup de misère et de privation. Ceci est vrai certainement pour la majorité des islamistes qui sont restés dans le pays et qui ont dû affronter l’arbitraire du régime de l’ancien président. Mais pour ceux qui ont réussi à quitter le pays et qui se retrouvent pour la plupart aujourd’hui dans les postes de commandement de leur parti, leur situation était beaucoup plus douillette que celle de la majorité des Tunisiens.

 

Ce qui est évident, c’est que bon nombre d’islamistes nourrissent toujours une haine profonde contre l’Etat et ses structures, ont du mal à s’adapter à leur nouvel environnement dans le contexte postrévolutionnaire du pays et gardent toujours, d’une manière consciente ou pas, d’anciens réflexes hérités de la période de la clandestinité. Les dirigeants d’Ennahdha, s’ils sont sincères dans leur volonté d’évoluer vers un parti démocratique, civil et républicain, doivent fournir plus d’efforts pour convaincre leurs troupes des fondements de la citoyenneté, la question fiscale étant l’un de ces fondements.

 

Déjà que les islamistes trainent toujours comme un boulet, la question de leur rapport avec la violence politique. Des épisodes dramatiques anciens et récents, continuent en effet de hanter la mémoire des Tunisiens. Il s’agit des attaques à l’acide contre les civils dans la rue, de l’affaire Bab Souika, des attentats de Monastir et de Sousse, du groupe sécuritaire. Mais il s’agit aussi après la révolution de la lapidation de Lotfi Naguedh, de la responsabilité des islamistes dans l’assassinat de Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, des attaques contre le siège de l’UGTT et les violences contre les représentants de la société civile. Sur ce dossier embarrassant pour les islamistes, on attend toujours une réponse politique claire. Pour le moment, Ennahdha et ses dirigeants continuent de nier tout et en bloc à chaque fois qu’ils sont confrontés à la question de leur implication dans la violence.

 

C’est cette incapacité des islamistes, sur le plan politique, d’avouer leurs erreurs passées et leur soif, sur le plan matériel, de rattraper le temps perdu, qui rendent légitime la question sur la capacité réelle du parti Ennahdha à intégrer pleinement le paysage politique civil et démocratique tunisien.

13/11/2016 | 16:55
3 min
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Commentaires (46)

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Samou
| 18-11-2016 01:39
oui monsieur ben Hmida ils ont des choses à dissimuler ils ont fait de la loi du silence une arme, de l'opacité un bouclier.
Aujourd'hui ils se permettent de parler au nom de l'islam mais la majorité des tunisiens le sont sauf que ceux qui sont modérés et progressistes se meurent dans un silence assourdissant
Alors ces personnages venus de nul part se permettent de nous débiter leur bêtise dans une langue de bois qui ne peux convaincre que des plus débiles qu'eux mêmes
Mais tel est pour l'instant le choix des tunisiens ....se taire

Tadhamen
| 17-11-2016 13:42
pour expliquer la rapacité des gens, qu'ils soient nahdaouis ou pas, ne devrait même pas avoir sa place dans le débat.
Si tous les gens qui souffrent ou qui ont eu à souffrir de la misère un jour devaient devenir cupides et malhonnêtes, le monde deviendrait un enfer généralisé.
Et en ce qui concerne les membres d'un parti conservateur qui s'appuie sur une religion prônant l'honnêteté, l'excuse devrait être encore moins envisageable que pour les autres.
Celui qui vole délibérément sa nation - quel que soit le moyen utilisé - vole aussi l'avenir de nombre de ses compatriotes à son seul profit.
Et à cela il ne peut y avoir aucune excuse.

Lamia benhassena
| 17-11-2016 10:21
On dit souvent que Rached Ghannouchi ne croit pas à la notion d'Etat. C'est complètement faux ! Il a une croyance profonde en l'Etat, mais qu'il soit MINIMAL. C'est uniquement à travers l'existence d'un petit Etat que les citoyens seront épanouis. A l'inverse, l'Etat totalitaire ou grand du moins, les citoyens se retrouvent souvent confinés, privés de leur sens de l'engagement et réduit à de simples travailleurs au service de l'Etat. On peut être d'accord avec cette vision ou pas. Mais le fait est que ce parti possède une idéologie qui lui sert d'ancrage. Elle l'aide à formuler ses décisions.

Citoyen_H
| 15-11-2016 14:53

que des imposteurs traitres affamés, gangsters, rapaces, voleurs, ces pseudos-représentants d'une religion revue et corrigé par leur don inné, de l'escroquerie, de l'appât du bien d'autrui et de la pleurniche.

Ce ne sont que des profiteurs, des fainéants congénitaux voulant vivre sur le dos de leur fan club d'idiots finis, croulant sous une termitière de complexes à ne plus en finir.

Si malgré tous les rebondissements issus de la nouvelle présence de ces chacals n'en révoltent pas plus d'un, cela veut dire que nous sommes définitivement cuit.

Je suis sûr que si un journaliste d'investigation intègre faisait une enquête sur le patrimoine fraichement acquis de cette vermine, une guerre civile éclatera aussitôt.





TOUNSI
| 15-11-2016 13:46
Merci pour l'objectivité mais pour être plus objectif il fallait remercier "le courage et l'honnêteté" des députés N T qui ont défendu la loi en question

labidis
| 15-11-2016 11:43
Bonjour Sofien,

Une analyse complètement logique mais peu objective, je pense également qu'il est temps de pouvoir se débarrasser des antécédents idéologiques contre la philosophie d'un parti ou d'un autre, la question est plutôt juridique : si aujourd'hui nous ne sommes pas capable de pouvoir dévoiler le secret bancaire pour des raisons qui touchent à la sécurité national sacrée, la vraie question est la suivante qu'est ce qui a été fait pour le fléau de financement de la propagande politiques de ces parties lors des élections?

Indépendamment du conflit entre l'intérêt personnel et celui national la Tunisie est aujourd'hui devant une seule vérité : une crise médiatisée avec un réseau ambigüe de capitaliste corrompus et un croisement d'intérêt international géo-politique.

henda
| 15-11-2016 09:11
Faire une analyse suppose que le journaliste donne son avis. Cependant, il faut qu'il donne son avis en se basant sur des faits et non sur des jugements personnels. L'analyse est complètement biaisée. Contre-preuve : moi !! Je n'ai rien avoir avec le monde des affaires et avec le monde que vous dites matériel, et je m'oppose à la levée du secret bancaire. La raison, que je pense partager avec Ennahdha, est toute simple. Je suis contre le mélange des deux sphères privée et publique.

Harki
| 14-11-2016 20:04
On a bien compris ...mais les voleurs sévissent depuis ..longtemps ...le bla bla. .ne change rien à l'affaire ...il faut que la justice se prononce ..les ragoûts des journalistes nous donnent la nausée. ..la justice pour quand ???

1/raisonnable
| 14-11-2016 17:09
La majorité des arabes sont corrompus et le vole et blanchiment d'argent le sont dans leurs gènes et nul ne peut leur être efficace sauf qu'il faut peut être limogé tous les anciens dans la politique en les remplaçant par des jeunes qui n'ont aucun appartenance au opportunistes précidents

IBN KHALDOUN
| 14-11-2016 16:45
Ennahdha ne l'oublions pas a une idiologie politique claire, réussir à imposer L ISLAM POLITIQUE, rien ne peut la dévier de cette trajectoire tant qu'elle n'a pas instauré le califat sur le trône. La dernière déclaration de RCHID GHANNOUCHI concernant les islamistes radicaux illustrent bien sa détermination jusqu'où il peut aller pour les soutenir. le pacte qu'il a signé avec les frères musulmans au CAIR( et sa photo le prouve) est inscrit dans le marbre, les islamistes ne changeront pas tant qu'ils ne changent pas leurs discours, il y a des signes qui ne trompent pas, n'appellent t ils pas leur assemblée MAJLES ACHOURA( ABOU BAKR 1er calife a été élu par majles achoura en l'an 10 de l'hégire 632 après j.c ) , n'interpellent t ils pas GHANNOUCHI par cheikh, n'entame t ils pas leurs travaux par la Fatiha etc. etc. Certes ils ont été privé par le passé, est ce une raisons suffisante pour détourner 1 million de dollars? est ce une raison suffisante pour bafouer et contourner les lois et passer des nuits douteuses dans des hôtels luxueux à Tunis payés par des démunis qui souffrent? bien sûr que non, dans un pays de droit ces gens là seraient entre les mains de la justice . Il est temps que ça change.