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SUR LE FIL
Beaucoup de dictature, pas mal de poudre aux yeux et très peu d'économie
Par Faten Kallel
04/05/2023 | 15:59
4 min
Beaucoup de dictature, pas mal de poudre aux yeux et très peu d'économie

 

Sur la planète Tunisie, la dictature ne ralentit pas, voire, s'accélère. Voilà qu'une nouvelle vague de poursuites vient s'ajouter à la longue liste des persécutions que subit l'opposition depuis trois mois déjà. Cette fois c'est au tour de Bochra Bel Haj Hmida, Ahmed Nejib Chebbi et Ayachi Hammami de faire l'objet d'une enquête judiciaire, encore une fois sans spécification des motifs. Dans la lancée de cette pêche au gros, Saida Ounissi, ancienne ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle, a également vu le domicile de ses parents perquisitionné et scellé, dans le cadre d'une intervention qui s'est voulue spectaculaire et musclée. Ajouter à cela les poursuites de journalistes qui se succèdent sous l'égide du décret-loi 2022-54. Un décret censé lutter contre les infractions se rapportant aux systèmes d'information et de communication, normalement en faveur du citoyen, s'est avéré l'arme redoutable du régime pour faire taire toute voix dissidente.

Il est évident que le régime maitrise le jeu de la peur. Aujourd'hui, la majorité des médias s'autocensurent spontanément. Seuls quelques journalistes continuent encore à résister tant bien que mal, malgré la menace. Dans les cercles politiques, les activités se sont arrêtées net. Peu de militants de partis, particulièrement ceux engagés après la révolution, continuent à s'engager. Au niveau de la société civile, la situation n'est pas meilleure, et la menace du blocage des financements reste la principale source d'inquiétude. Quant au milieu des affaires, une certaine paralysie se fait remarquer. Malgré les tentatives de certaines organisations patronales de sauver la face, le pouvoir de nuisance de l'administration, à coup d'interdictions de voyage et de redressements fiscaux, s'érige comme une épée de Damoclès sur les investisseurs et les chefs d'entreprises, qui seraient tentés de s'exprimer en défaveur du coup d'Etat ou même de la pertinence des politiques économiques du gouvernement.

Mais si tous ces faits semblent devenus anodins pour les Tunisiens, l'incident de la Foire du Livre, à savoir la censure de "Frankenstein Tunis", de son auteur Kamel Riahi, s'est avéré une erreur impardonnable. Il est vrai que le peuple, par son dégout de la classe politique, des médias et de l'élite économique, et par son désir de vengeance, bien qu'exagéré, aime se satisfaire des persécutions injustes et arbitraires. Sauf que ce même peuple qui a goûté à la liberté, n'a pas l'air encore décidé, pour sa majorité, à renoncer facilement à sa propre liberté d'expression. Et les réactions ne se sont pas fait attendre, les Tunisiens n'ont pas hésité à exprimer leur choc et leur refus de tels agissements qu'ils pensaient révolus.

Et fort heureusement que cet épisode ne s'est pas passé sans qu'il ait eu raison de la sérénité du président qui, dans un désir de se racheter auprès de l'opinion publique offusquée, s'est déplacé dans une librairie de la capitale pour se procurer lui-même le livre en question, et montrer patte blanche, accusant au passage un ennemi extérieur et des esprits malveillants d'avoir fomenté le complot et d'avoir exagérément mal interprété l'opération de censure. En gros de la poudre aux yeux, histoire de cacher les défaillances du système qu'il a mis en place qui, une fois habitué aux abus, se voit tout permettre. Après tout, entre l'emprisonnement d'un opposant au régime et la censure d'un livre qui remet en question le chef de ce même régime, quelle différence y a-t-il ?

De la poudre aux yeux, le régime en met partout, principalement dans la gestion des affaires étrangères. Si la Tunisie semble totalement perdre pied dans ses relations avec ses voisins et alliés, avec très peu de résultats palpables, le ministre lui n'a pas l'air de renoncer aux méthodes, pour le moins que l'on puisse dire, approximatives qu'on lui connait. Les communiqués du MAE à ce sujet sont assez surprenants. D'un côté, ils nous rassurent quant à l'inexistence d'une quelconque intention d'ériger une dictature, et de l'autre ils nous affirment que les Tunisiens qui osent critiquer la Tunisie ne sont que des brebis égarées, traitres à la nation, qui devraient apprendre à laver leur linge sale en famille.

De son côté, l'économie est aux abonnés absents dans l'agenda des décideurs. Les entreprises sont aux abois, les financements se font de plus en plus rares, les banques sont à court de liquidités, et le système ne tient que grâce à la solidarité fragile de ses opérateurs, qui tentent de se maintenir mutuellement pour éviter le crash collectif. L'agriculture quant à elle, vit ses moments les plus sombres, à cause de la sécheresse, mais aussi de mauvais choix et arbitrages, et aucune stratégie d'urgence n'a été mise en place. Face à cela, les départs à l'étranger de la main d'œuvre et des compétences sont massifs, que ce soit régulièrement ou clandestinement, et l'espoir quant à une embellie semble s'estomper chez les Tunisiens.

Voilà comment de manière générale, la Tunisie vit une période où il est question de beaucoup de dictature, pas mal de poudre aux yeux, et très peu, voir pas du tout, d'économie. Et cela ne laisse rien présager de bon.

 

 

 

 

Par Faten Kallel
04/05/2023 | 15:59
4 min
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Commentaires
takilas
Et puis...
a posté le 08-05-2023 à 12:05
à combien de pourcentage évaluez vous les sabotages de nahdha ?
Un exposé, ou un écrit, incomplet et dépourvu des informations relatives aux innombrables et gravissimes catastrophes causées par nahdha et par les sabotages prémédités de nahdha.
Sinon votre écrit ne bénéficiera pas l'aval de votre commission.

Rabbi mâak, c'est tout que nous pouvons vous souhaiter !
Meskina tounis.
Patriote
Quelle dictature?
a posté le 05-05-2023 à 11:49
Bizarre de ne pas parler de la dictature durant la décennie noire " 0% ferme là "
Bizarre que l'application des loi et la législation en vigueur soit considérée comme dictature
Bizarre que des supposés défenseurs du pays qui se croient au dessus de la loi sont considérés comme des prisonniers politiques
Bizarre que les appels à la rebellion soit considéré comme de la démocratie
Bizarre que la publication de fausses informations et l'incitation à la haine soit considéré comme de la liberté d'expression
Bizarre de nous prendre pour des idiots pour croire les mensonges
Bizarre de vouloir nous cacher la realite et de transformer les vérités
Juan
bizarre, voir trizarre
a posté le à 13:30
trizarre, qu'un tank au parlement soit une dictature
trizarre, que le fait de piètiner la constitution soit une dictature.
trizarre, voir quadrizarre ....
Sael
Réponse
a posté le à 20:21
Bizarre que sous Ben Ali la Tunisie se portait mieux économiquement et pourtant on associe "peu d'économie" avec la dictature...
Ben Hassen Mondher
Pertinence
a posté le 04-05-2023 à 19:01
Analyse pertinente, rationnelle. Heureusement qu'il y a encore des voies lucides et qui refusent de faire partie des silencieux, passifs, dans le déni. Merci Madame dde l'approche éclairée , et la lumière fut...
DHEJ
La triptyque énergétique...
a posté le 04-05-2023 à 16:31
Non... Trop limitée...


Code pénal Section V des infractions portant sur le commerce et l'industrie... à titre d'exemple!