Une solution miracle a finalement été trouvée par la grâce de Kaïs Saïed, président de la République. Il n’y aura pas de dissolution de l’assemblée, il n’y aura pas de polémique autour de la lecture de la constitution, Ennahdha entrera bien au gouvernement d’Elyes Fakhfakh.
Lundi dernier, pourtant, tout semblait bouclé, la crise était à son apogée. La balle était entre les mains de Kaïs Saïed et c’était lui qui devait décider du sort de la Tunisie. On s’attendait (je m’attendais) à ce qu’il serve ses propres intérêts et dissolve le Parlement ou bien à se désavouer lui-même et à nommer quelqu’un d’autre à la place d’Elyes Fakhfakh. Finalement, il a choisi une meilleure solution, la plus improbable et la plus sage, celle de faire intégrer la centrale patronale (Utica) et la centrale syndicale (UGTT) dans les discussions. Cela nous rappelle 2013 et le fameux dialogue national qui s’est achevé par le gouvernement consensuel de Mehdi Jomâa et par un historique Nobel de la Paix. A entendre le discours enflammé et populiste de Kaïs Saïed avant, durant et après sa campagne électorale, on pouvait s’attendre à tout de sa part, sauf à impliquer l’UGTT et l’Utica. A ses yeux, ces deux centrales sont des pyromanes et non des pompiers. Et pourtant !
L’UGTT qu’on attaque tout le temps à cause des grèves à répétition était, une nouvelle fois, derrière la solution à une grave crise politique qui secoue le pays.
L’Utica, dont les membres sont tout le temps accusés de piller les richesses du pays et d’entretenir une économie basée sur la cupidité et l’affairisme de quelques familles, était, une nouvelle fois, derrière la solution à une grave crise politique qui secoue le pays.
En faisant appel à Noureddine Taboubi et Samir Majoul, Kaïs Saïed a fait preuve d’une étonnante clairvoyance et d’une grande responsabilité. Il a admis, sans l’avouer, son propre échec de convaincre les différents protagonistes de se réunir autour d’une table et de trouver une solution. Au lieu de jouer la fuite en avant et de mettre les partis inconciliables devant leurs responsabilités face au peuple et de profiter lui-même de la situation, Kaïs Saïed a fait appel à un tiers pour jouer le rôle du Sage. Pour un président de la République, cela n’est pas facile, car les arbitrages de ce type ne peuvent se jouer qu’à Carthage en théorie.
Il est important de rendre à César ce qui lui appartient et d’applaudir Kaïs Saïed, Samir Majoul et Noureddine Taboubi d’avoir fait ce qu’ils ont fait la semaine dernière pour résoudre, au moins provisoirement, une grande crise politique qui n’a que trop duré.
Mercredi 26 février, Elyes Fakhfakh devrait normalement prendre les rênes du pays. Sauf rebondissement spectaculaire de dernière minute à ne pas exclure. C’est une nouvelle page qui s’ouvre avec M. Fakhfakh dont la popularité est loin d’être au diapason. Il n’était pas voulu par les partis représentés au Parlement (à une exception et demie presque), il a cumulé les erreurs politiques et son score aux élections est proche du nul. N’empêche, l’Histoire nous prouve qu’un faible démarrage ne veut pas dire grand-chose, il peut remonter la pente rapidement s’il sait s’entourer de bonnes personnes. C’est peut-être mieux de commencer faible, car son prédécesseur Youssef Chahed a commencé fort, très fort, avec un a priori des plus positifs et un soutien presque unanime de la classe politique. C’est un laïc, jeune et non clivant.
Il avait été désigné par feu Béji Caïd Essebsi pour devenir chef du gouvernement le 3 août 2016 (tout un symbole avec la date de naissance de Habib Bourguiba). Ce jour-là, Youssef Chahed avait la bénédiction du président de la République, le soutien de son parti Nidaa et la bienveillance d’une bonne partie de la classe politique, des organisations nationales et de la société civile.
Ennahdha ne le regardait pas d’un mauvais œil et Attayar a promis de le soutenir s’il était sincère dans son entreprise, notamment sa guerre contre la corruption.
Du côté des médias, il était cet « intègre, fils de bonne famille » (dixit Zyed Krichen) avant de devenir leur (notre) coqueluche grâce notamment à son conseiller de communication Mofdi Mseddi.
Du côté des chancelleries, il devait être le poulain de Béji Caïd Essebsi, celui qui sauvera le pays et fera de la Tunisie la Suisse de la région Mena.
Du côté des sondages, il a longtemps été premier avec 68,9% d’opinions favorables en mars 2017 quelques jours après l’arrestation de Chafik Jarraya. En mars 2019, il avait 19,3% d’intentions de vote à la présidentielle, loin devant Kaïs Saïed avec 12,1%.
Du côté de l’endurance, il détient le record de longévité à la Kasbah depuis la révolution.
Comment se fait-il donc que ce même chef du gouvernement, si longtemps adulé, respecté ou, au moins, apprécié, a-t-il chuté à 7,38% à la présidentielle et 4,08% aux législatives de l’automne 2019 ? Qu’a-t-il fait pour devenir l’homme à abattre de suite pour l’ensemble de la classe politique et des Tunisiens (à l’exception des 116.582 personnes qui ont voté pour son parti et encore !) ?
Comment se fait-il que celui qui est entré par la grande porte de la Kasbah puisse sortir ainsi, si affaibli ? Le pouvoir use, diriez-vous ? Non, pas vraiment, pas comme ça !
Le premier à avoir vu sa véritable nature et ses limites politiques et intellectuelles fut le président Béji Caïd Essebsi. On se remémore encore son comparatif, repris chez James Clarke « Un politicien pense à la prochaine élection. L'homme d'Etat, à la prochaine génération ». C’était le 31 juillet 2018, lors d’un discours solennel à l’occasion de la conférence annuelle des chefs de missions diplomatiques et des consulats. Il a fallu moins d’un an pour feu Caïd Essebsi pour se rendre compte de son erreur d’avoir nommé Youssef Chahed à la Kasbah. Cette phrase, une véritable pique, était une piqûre de rappel, un recadrage, un rappel à l’ordre, un appel à la raison.
En bon as de la communication, Youssef Chahed a repris la piqûre à son avantage pour persuader tout le monde (avec succès) que Béji Caïd Essebsi cherchait à l’abattre pour dégager le chemin devant son fils Hafedh Caïd Essebsi. Le président de la République a beau dire et répéter qu’il était contre l’héritage du pouvoir et pour le respect total de la démocratie et de la constitution, il était à ce moment inaudible. Hélas.
L’adage d’Abraham Lincoln demeure cependant valable pour tout temps : «On peut tromper une partie du peuple tout le temps et tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps ». Après Béji Caïd Essebsi, c’est au tour du reste de la classe politique, des organisations nationales et des médias de se rendre compte de la supercherie Youssef Chahed qui ne doit, finalement, son salut que grâce à Rached Ghannouchi lors du dialogue national Carthage II. Mais même Ghannouchi a fini par déchanter de lui après le coup fourré d’il y a quelques jours sur Hannibal TV.
Ce qui a valu à Youssef Chahed des applaudissements au début, ce sont toutes ces belles paroles et jolies promesses.
- C’était la guerre contre la corruption au bout de laquelle on a vu nettement plus de « non lieu » que de condamnations. Il n’y a d’ailleurs eu aucune condamnation, parmi tous les « barons » spectaculairement arrêtés à l’époque. Il s’est avéré que les arrestations étaient bien sélectives, comme l’a répété à plusieurs reprises Samia Abbou.
- La guerre de succession à Carthage n’était finalement qu’un remake de mauvaise qualité de « Fight Club » entre Hafedh Caïd Essebsi et lui.
- La petite revanche avec l’utilisation de l’arme judiciaire dans de véritables fausses affaires bien vendues aux médias et ce pour contrer des personnalités de son propre camp idéologique, comme c’était le cas avec Hachem Hmidi, ancien secrétaire d’Etat aux Mines, resté dix mois en prison, et le limogeage humiliant de Khaled Kaddour poursuivi pour corruption. Deux affaires qui se sont avérées bidon.
- Autre limogeage, aussi humiliant et injuste si l’on se tient aux propos de feu Béji Caïd Essebsi, celui de Lotfi Braham, ministre de l’Intérieur. Cela a fait déchanter quasiment tout l’appareil sécuritaire tunisien déjà fortement troublé par la longue arrestation éreintante de près de deux ans de Imed Achour et Saber Laâjili. Il a fallu des pétitions de parlementaires et une plainte au Conseil des Droits de l’Homme à Genève pour que l’on mette fin à la détention (qualifiée d’arbitraire, puisqu’elle dépasse les 14 mois réglementaires) de ces deux hauts cadres sécuritaires, dont l’un était chargé de nos services secrets.
- Rappel et mandat de dépôt (non exécuté « grâce » à une évasion) contre l’ancien ministre de l’Intérieur et notre ambassadeur à Rabat, Najem Gharsalli.
- Arrestations spectaculaires en un temps record (contrairement aux usages) des personnalités médiatiques qui lui sont opposées : Borhen Bsaïes, quelques heures après sa condamnation ou Nabil Karoui sur une aire d’autoroute, par exemple.
- La tentative (avortée à la dernière minute par Béji Caïd Essebsi) de faire passer une loi rétroactive afin d’éliminer des adversaires politiques.
- Refus de libération d’autres personnalités médiatico-politiques en dépit des décisions de justice, ce qui a ébranlé tout l’appareil judiciaire : Nabil Karoui (dont la détention a été qualifiée de déni de justice par la cour de cassation) ou Sami El Fehri (encore en prison, en dépit d’une décision de la cour de cassation).
- Il cesse d’écouter ses véritables conseillers dès lors qu’ils osent lui dire la vérité en face, leur préférant les laudateurs intéressés.
Dans chacune de ces affaires, Youssef Chahed se défend de toute ingérence dans l’appareil judiciaire. On aimerait bien le croire, sauf qu’il y a beaucoup de coïncidences et que l’on ne croit pas aux coïncidences en politique. Et puis, on sait tous comment fonctionne l’appareil judiciaire tunisien et on sait qu’il n’a jamais arrêté quelqu’un deux heures après sa condamnation et encore moins ordonné un guet-apens sur un péage d’autoroute, en dehors de sa circonscription territoriale, une demi-heure après l’émission d’un mandat de dépôt et ce par le biais de la garde nationale et la police qui, théoriquement, ne se réunissent jamais autour d’une opération de ce genre.
A partir de ce mercredi, Youssef Chahed rejoindra théoriquement le rang des chercheurs d’emploi. Fera-t-il une traversée du désert pour s’arrêter sur ses propres fautes, retenir les leçons qui s’imposent et rebondir avec un mea culpa et un sang neuf en 2023-2024 ? Occupera-t-il une haute fonction de l’Etat, à Carthage ou dans une chancellerie ? A ce jour, rien n’est visible quant à son avenir et cela n’intéresse plus personne, il fait déjà partie du passé. Hélas, car il a bien symbolisé l’avenir flamboyant pendant un bout de temps.
N.B : Jeudi dernier, nous a quittés Jean Daniel, directeur-fondateur de l’Obs. Il a été un véritable mentor et modèle pour plusieurs journalistes francophones. Sa plume, ses analyses profondes, ses appels à la paix, ses conseils, il était influent pour beaucoup d'hommes politiques français, mais aussi étrangers. Il était écouté par Charles de Gaulle et Habib Bourguiba, Yasser Arafat et Zine El Abidine Ben Ali. Il venait souvent en Tunisie pour des cures, mais aussi pour voir plusieurs de ses amis... Lors de sa dernière venue, il a rencontré Marzouki (dont les services à la traduction primaire ont écorché son nom pour le présenter comme John au lieu de Jean) et il est sorti amer... Paix à ton âme, je te lisais jusqu'à la semaine dernière, Jean !
retiendra rien de ce personnage. Un épi-phénomène dans l'histoire de notre pays. Déjà oublié.
Mais quelle déception! On espérait tous, plus de la jeunesse de ce pays. Gageons que le suivant -presque aussi jeune- sera moins décevant.
LOL
B.N : Nous vous invitons à ne plus changer de pseudo pour faire circuler les mêmes propos pour éviter la censure.
Merci pour votre compréhension :)
Il a réalisé ce qu'il a pu! Pour être franc, lorsqu'il a été désigné chef de gouvernent, le pays n'était pas très riche! de plus, Il était affecté par la chute des touristes, les grèves, les demandes salariales, le terrorisme, la corruption, les établissements et les entreprises publics qui constituaient un fardeau pour l'Etat etc ..
Notre salut est loin avec ses pseudo politiciens qui jouent
entre eux à la roulotte russe.
La preuve de toutes ces magouilles politico-judiciaires sont
honteuses alors que le peuple souffre sous l'amteurisme de ministres incompétents, sans idées et sans aucune envergure. Encore plus incompétent les chefs de gouvernements qui ont succédé depuis 9 ans sans stratégie de développement et sans aucune vision de redressement de l'état agonisé sous les batons des mafieux, d'opportunistes et d'arrivistes.
Bref, nous ne sommes pas sorti de l'auberge et il y a du pain sur la planche.
Par jalousie fanatique, beaucoup ont perdu la raison et c´est pour longtemps!
PS. je n ´ai pas voté pour Y. Chahed !
Maintenant qu'il connait la maison et que l'avenir lui appartient , il y a fort à parier , que votre cauchemar n'est pas fini .
Hélas !
1. Victime de lui-même, parce qu'il a été trop pressé pour faire de l'administration au plus haut niveau sans tenir compte de son jeune âge, de sa formation faible (qualitativement), et de son expérience faible.
2. Victime de BCE, parce qu'il a été trahit par BCE. YC voyait en BCE un encadrant, alors que BCE voyait en YC un esclave, pour s'accaparer de la Kasba.
3. Victime de RG, parce qu'il a été exploité par RG. YC voyait en RG un sauveur, alors que RG voyait en YC un esclave, pour dominer la Kasba.
YC a aussi fait pas mal de manoeuvres pour servir lui-même et Tahya électoralement contre les intérêts de l'Etat, pour poser finalement la question: Est-ce que YC était assez mature, sur tous les plans, pour exercer le pouvoir? Sachant qu'en exerçant mal le pouvoir, on écrase des innocents, dans le présent et dans le futur, tous les politiciens doivent être assez prudents. Les plus matures/âgés doivent encadrer sincèrement les moins matures/âgés, pour le bien de ce pays, mais aussi pour leur propre bien!
YC est encore là , n'est même pas sorti de la scène politique et continue d'être influent .
Le YC a eu la grosse tete ,mais qui malheureusement ne se dégonflera jamais !!
Donc n'attendez pas de lui qu'il fasse sa propre introspection !!!
Le pire c'est qu'il a probablement le soutien du croque mort !!!
Mais entre ploucs débiles ,ils se sont bien trouvé !!
toute la population ont UNIQUEMENT travaillé pour boycotté son travail ..
En résumé et sans exagération, c'est une trahison globale pour notre pays !!
Sa session est une tragédie pour M. Youssef Chahed et pour le pays et cela on peut le dire haut : un contre tous, oua Rabbi Ya3lèm ..
Tout le monde doit se demander: qu'est-ce que j'ai fait pour notre pays pendant les dernières cinq années? pourquoi n'avons-nous pas manifesté et soutenu YC et son gouvernement?
Malheureusement, on n´aura pas si rapidement un tel Premier ministre aussi bien élevé, travailleur, assidu, courageux, intelligent, moderne et charismatique.
Quelqu'un peut-il me rappeler, si jamais une fois, une institution, un parti politique ou une ONG a déjà flatté l'engagement ou une bonne action de M. Y. Chahed, durant toute sa session?
Est-ce que c´est normal?
C´est la definition même de l´Ingratitude !
Lè Y3aichik Lé Ibèrek Fik !
Fakhfakh va décevoir, le pays n'a pas les moyens pour répondre aux attentes. La lutte contre la corruption est destinée à l'échec puisque comme le montre NB notre justice est instrumentalisée par le pouvoir.
L'économie mondiale sera en récession en 2020 à cause du covid-19. '?a fait presque deux mois que la Chine (20% de l'économie mondiale) est à l'arrêt, l'épidémie est à Milan, Italie l'un des plus important centre de l'économie européenne (20% de l'économie mondiale) déjà souffrante.
Le seul espoir pour les Tunisiens est de compter sur leur propres efforts, le gouvernement n'a que 5 milliards de dinars pour l'investissement ce qui est une somme dérisoire. L'UGTT ne défend que les intérêts de ses 750 milles membres qui sont en majorité des fonctionnaires et qui s'accaparent 20 milliards de dinars en salaires. L'UTICA défend les importateurs au dépend de l'industrie et de l'agriculture. La banque centrale defend les interets des banques et nos taux d'intérêts sont des plus élevés sur la planète, comme le montre Imen Nouira dans son excellente analyse les banques réalisent la majorité des profits.