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Un dialogue national ne serait-il pas une vaine illusion d’un consensus chimérique
Par Houcine Ben Achour
12/11/2021 | 14:59
4 min
Un dialogue national ne serait-il pas une vaine illusion d’un consensus chimérique

Est-ce que le gouvernement aurait raison de faire cavalier seul afin de redresser la situation socioéconomique du pays, sans engager la moindre négociation avec les partis politiques, les organisations nationales et les représentants de la société civile ? Sans entrer dans un débat de fond sur l’éthique d’une telle démarche, l’expérience a montré que le dialogue pour dégager un dénominateur commun sur les mesures – est-il encore question de débattre sur les orientations ? – à entreprendre ou mettre en œuvre n’a été en fait qu’une voie de garage.

Il convient dans ce cadre de rappeler  Carthage 1 et Carthage 2. Les discussions entre les partis politiques et les organisations nationales ont abouti à l’élaboration d’une feuille de route qui est restée à chaque fois lettre-morte. Pouvait-il en être autrement dès lors qu’elles se suffisaient à des généralités, tout au plus à pointer du doigt les problèmes qu’il faudrait résoudre. Quant à l’approche à adopter pour les résoudre, aucun n’a été capable d’exposer franchement la manière de procéder. A telle enseigne qu’on peut se demander s’ils en ont vraiment une. D’ailleurs les exemples abondent dans ce sens.

 

Exemple : ont-ils fourni le moindre des détails sur les choix pour assainir, assainir-restructurer ou assainir-restructurer-libéraliser nos entreprises publiques ? Tous se sont défaussés derrière la formule passe-partout, « on procédera au cas par cas ». Car enfin, depuis le temps, n’y a-t-il pas au moins un cas d’assainissement d’une entreprise publique qu’ils pourraient exposer dans le détail et éclairer de la sorte l’opinion publique sur les réelles intentions dans la gestion des entreprises publiques.  Tunisair, la société El Fouledh, la société Les ciments de Bizerte ou la Sncpa (Société nationale de cellulose et de papier alfa) ou encore la Sts (Société tunisienne du sucre), par exemple ? Le choix n’est pas fortuit dans la mesure où les entreprises citées constituent un échantillon de la plus grosse entreprise à la plus petite et toutes évoluent dans un contexte concurrentiel. De plus, elles ont été auditées.

 

Malheureusement, il ne s’est trouvé aucun parti, ni organisation nationale et surtout l’UGTT, apte à énumérer de façon simple et claire les mesures et décisions qu’il pourrait introduire pour sortir l’une ou l’autre de l’ornière de la faillite, à tout le moins du déficit. L’assainissement signifie-t-il inéluctablement une vague de licenciements ? Si oui, quelle serait son ampleur ? Cet assainissement permettra-t-il de dégager des économies suffisantes ? Vers quoi ces éventuelles économies seraient-elles allouées ? Quel serait le calendrier de réalisation ? Ce sont les réelles questions auxquelles les partis et organisations nationales sont appelés à fournir des réponses et non plus se contenter de superficialité.

Autre exemple, celui qui concerne la politique de subvention et de transfert. Tous sont d’accord pour réformer le système. Mais aucun n’a pu définir la conduite d’une telle réforme. En matière de subvention à l’énergie, viserait-on à établir une bonne fois pour toutes la vérité des prix et l’autorité du marché ? Dans cet objectif, comment envisagerait-on de compenser les pertes conséquentes de revenus pour les entreprises et les ménages ? Pour quelles entreprises et quels ménages ? Il en est de même de la réforme du système des transferts, du sort du Pnafn (Programme national d’aide aux familles nécessiteuses) et de l’AMG I et II (Aide médicale gratuite). L’élaboration d’une nouvelle base de données à travers la plateforme Amen serait-elle la panacée alors que ce processus risque d’aboutir au même constat, à savoir établir une population de bénéficiaires qui dépasse largement la population-cible, parce qu’on ne s’est pas basé sur de seuls critères objectifs. Le clientélisme s’y est parfois invité sournoisement.

 

La problématique des finances publiques est un autre exemple. Combien sont les partis politiques et autres acteurs économiques à proposer des solutions précises à la dégradation des déficits jumeaux du budget et des paiements extérieurs ? Autant chercher une aiguille dans une botte de foin. Faudra-t-il s’engager dans la voie de l’austérité ? Si oui, quelle en sera la forme ? Dans l’éventualité où l’arrêt des recrutements nets ne suffirait pas, faudra-t-il se résoudre à une baisse des salaires ou à des licenciements massifs pour réduire la masse salariale dans le budget de l’Etat?  Serait-il judicieux de réduire les importations en rétablissant le système des autorisations d’importation pour une liste de produits dits « non essentiels ».

En 2017, cette option fut envisagée. La Banque centrale de Tunisie (BCT) avait établi une liste de produits susceptibles de faire l’objet d’autorisations d’importations. Selon une simulation, cette liste aurait permis de dégager quelque 5,5 milliards d’économie. Malheureusement, à la fin de sa navette entre les différents ministères concernés, il ne restera de la liste de la BCT qu’une portion congrue, ne rapportant que dix fois moins par rapport à ce qui était projeté.

 

On pourrait à loisir s’attarder sur tous les problèmes économiques, établir les mêmes diagnostics. Cela est bien loin de déboucher sur des solutions concrètes et opérationnelles. Et encore plus, consensuelles. Dans ces conditions, la nécessité d’instaurer un dialogue national qui répondrait aux attentes ne serait-il pas qu’une vaine illusion et la recherche d’un consensus, une chimère ?

Par Houcine Ben Achour
12/11/2021 | 14:59
4 min
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Commentaires
Nephentes
Président et gouvernement au pied du mur
a posté le 13-11-2021 à 19:19
J'aimerais souligner que Ben Achour semble être le seul a BN, avec deux ou trois autres journalistes dignes ce nom, a aborder des sujets de fonds donc dignes d'intérêt

Le sujet qu'il aborde aujourd'hui est crucial ; il revient a se demander si le gouvernement dispose encore d'une marge de man'?uvre, qu'il s'agisse de négociations internationales de levée de fonds ou encore de consultations a l'échelle nationale.

La vérité est que cette équipe gouvernementale est au pied du mur ; il lui faut agir au mieux en essayant de raisonner tout a la fois un président loufoque et analphabète en matière de gouvernance économique et également de raisonner des parties intéressées uniquement par leurs intérêts propres - si j'ose dire.

En raison de l'instabilité politique qui persiste depuis la révolution, le pays peine à regagner la confiance des investisseurs, de sorte que la croissance du PIB n'a été que de 1,5 % en moyenne entre 2011 et 2019. La croissance repose désormais de plus en plus sur la consommation tandis que les investissements et les exportations restent nettement inférieurs à leurs niveaux respectifs d'avant la révolution et le chômage demeure obstinément élevé à 17 %.

Ce gouvernement va tout bonnement, et contre les v'?ux du président, appliquer les exigences du FMI

Donc rationalisation budgétaire tous azimuts et en particulier rationalisation du secteur public et des subventions aux prix à la consommation. Evidemment il y a peu de marge de man'?uvre pour améliorer les perspectives budgétaires en réduisant la masse salariale et les subventions non ciblées.

Les réformes structurelles visant à améliorer les performances des entreprises publiques, de même que celles visant a lutter contre la corruption, vont être périlleuses mais décisives.

Warrior
@ TAZARKI ..... bien plus que des Maths
a posté le 13-11-2021 à 14:04
@ Tazarki ,

il semble tu ignores les entreprises publiques de l'intérieur.
voici une , je nomme pas, où j'ai passé un stage.

1. tu montres ton diplome et tu entres. ni interview, ni sélection. le culte du diplome hérité de cette p... de France.
il y avait 1 ingénieur par bureau, puis on a mis 2 .3.. 4. puis il n'y a plus de place, on les a mis dans le couloir.
bagarre: mon diplome meilleur qu ton diplome. mon papa plus fort. pourquoi je suis dans le couloir ?
tous ces ingénieurs ne font rien. absolument rien. ils passent la journée à lire le journal.
ils font semblant de travailler. ils touchent un vrai salaire. c'est de l'inflation.
le marché fermé, le consommateur obligé d'acheter au prix fixé. pas de concurrence. des produits 2 fois plus chers et 2 fois moins bons !!
parce que le marché est protégé. ce prix pour payer le salaire de ces ingénieurs qui ne font rien !! le consommateur paie le salaire de ces bons à rien. juste pour leur diplome !!

2. cette entreprise ne sera jamais compétitive, mème si tu renvois, 90 % de ces ingénieurs.
pourquoi les turcs moins chers ?
parce qu'ils sont compétitifs. ils n'ont pas de polytechniciens. n'ont pas été colonisés.
pour empècher les turcs de vendre, il faut produire moins cher, pour exporter en Turquie et dans les 176 pays où vendent les turcs.
mais pour çà il faut des c... pas des super diplomés, super polytechniciens qui ne font rien.

3. votre problème , c'est la France et son système, qui perdure après 56.
ce système n'est pas bon pour vous.
si la France forme ces polytechniciens à porter l'uniforme de l'armée française, c'est son affaire.
pourquoi la suivre, comme moutons écervelés ? c'est le FRANALPHABETISME.
aucun pays colonisé par la France n'est sorti du sous développement. Aucun.
Malta , sans pétrole ni phosphates se porte mieux.
la France est votre malheur.

Nephentres
@Dr Tazarki
a posté le 12-11-2021 à 21:51
Je vous félicite pour ce commentaire impressionnant; j'avoue honnetement que des fois je vous prend pour un fele mais avec ce commentaire vous demontrez plutot que vous etes un genie,

je me permets simplement d'insister sur le problème de surendettement global de l'économie tunisienne : il s'agit la d'une voie mortelle qui, au delà des réactions en chaine suite au collapse ce nombre d'entreprises publiques totalement exsangues,

Va probablement entrainer une méga inflation et une paupérisation inédite de la population

Donc le scenario libanais se profile bel et bien alors même que notre Chaab el karim contemple avec une indifference maussade la tornade qui va l'emporter
kol
le spectre de ce scenario me hante
a posté le à 11:54
Mais malheureusement je pense que les pronostics sont a 99 pour 1
Tunisie dans qqs mois = Liban d'auj :(
Dr. Jamel Tazarki
@Mr. Houcine Ben Achour,
a posté le 12-11-2021 à 20:55
@Mr. Houcine Ben Achour, j'ai beaucoup aimé votre article ci-dessus car il a une forme interrogative. En effet, j'ai horreur des hypothèses très vite faites

@Mr. Houcine Ben Achour, vous parlez "des intentions [encore inconnues de nos politiciens] dans la gestion des entreprises publiques"
-->
A mon avis, l'intention ne devrait pas seulement consister à privatiser les entreprises publiques et les offrir à un prix dérisoire à notre oligarchie entrepreneuse, non ce que dont ont besoin nos entreprises publiques est plutôt le fait de devoir opérer dans une mentalité commerciale et ceci même si elles sont la propriété de l'?tat tunisien. Il faut que l'on se débarrasse de cette idée archaïque que les entreprises publiques ne devraient pas être commerciales.
-->
Et ainsi on pourrait se demander, comment les entreprises publiques pourraient acquérir un esprit commerciale? La réponse est évidente, Il faut accorder à nos entreprises publiques plus d'autonomie, ce qui signifie qu'elles ne devraient pas fonctionner selon les désirs du gouvernement et de nos ministères Il faut y placer des directeurs commerciaux compétents avec un savoir-faire dans la gestion des grandes entreprises et les laisser faire sans l'intervention de nos fonctionnaires.
-->
Nos ministères et notre gouvernement devraient contrôler par contre la performance de nos entreprises publiques par des indicateurs prédéfinis.
-->
De ce fait, nos entreprises publiques ont plutôt besoin de conseils stratégiques et non pas administratifs dont les membres sont imposés par le parti politique gagnant de l'élection législative --> c'était la faute de notre ex-troïka qui n'acceptait que les considérations politiques qui n'avaient rien à voir avec le coté commerciale de nos entreprises publiques...

Puis, il faudrait mieux renoncer à certaines entreprises publiques déjà en ruine afin de ne pas entraîner la totalité de nos entreprises publiques vers le collapse --> je m'explique: la Sonede fait énormément de perte et elle est ainsi incapable de payer Steg, --> et de ce fait (par conséquent) Steg est aussi en difficulté --> et ainsi le collapse de Sonede pourrait entraîner aussi le collapse de Steg
-->
on avait au juste une entreprise étatique en très grande difficulté et voilà que l'on a deux'?'
-->
Fazit: Les dettes croisées sans remboursement entre les entreprises publiques sont complètement absurdes, et on risquerait ainsi même de ruiner la totalité de nos entreprises publiques par ce que l'on appelle "Réaction en chaîne"


2ème partie:
@Mr. Houcine Ben Achour, vous écrivez: "Combien sont les partis politiques et autres acteurs économiques à proposer des solutions précises à la dégradation des déficits jumeaux du budget et des paiements extérieurs"
-->
entre 2011 et de 2020 on a gaspillé 33 milliards d'euros (99 milliards de dinars), certes une partie a été dépensée afin de payer les salaires de nos fonctionnaires, ce qui ne dépasserait pas les 20 milliards de dinars --> Et ainsi on pourrait se demander où est passé le reste de 79milliards de dinars afin que l'?tat tunisien puisse récupérer une bonne partie de son argent? La réponse vous la trouvez sur les liens suivants:

1) 'Etat tunisien a recapitalisé en 2015/2016 implicitement les richesses des actionnaires privés et étrangers avec l'argent de l'endettement... Il est temps d'ouvrir les dossiers des créances douteuses/ irrécouvrables de notre système bancaire et de prier les débiteurs oligarques et étrangers de rembourser leur dettes afin que l'?tat tunisien récupère son argent:

https://www.businessnews.com.tn/oxford-business-group-presente-le-programme-de-reforme-du-systeme-bancaire-tunisien,520,66109,3

2) Où sont passés les 300 millions d'euros investis à la bourse de Malte?
https://www.businessnews.com.tn/aat-de-go-malta-par-tunisie-telecom--nizar-bouguila-repond-au-debut-de-la-polemique,519,65113,3

3) Exportation de nos capitaux de l'endettement en toute légalité:
https://www.businessnews.com.tn/article,520,70719,3

4) Combien de milliards ont quittés la Tunisie en toute légalités?
https://www.businessnews.com.tn/en-lhonneur-de-frederic-oudea-kamel-neji-reunit-le-tout-tunis-a-la-residence-de-france,520,66072,3

5) Où est passé le logiciel de promosport à 23 millions d'euros?
https://www.businessnews.com.tn/promosport-fete-sa-nouvelle-solution-pour-la-gestion-des-pronostics-sportifs,520,63054,3

6) Où sont passés les milliards accordés à la recherche des puits de pétroles?
https://www.businessnews.com.tn/letap--un-programme-de-forage-de-20-puits-de-petrole-entre-2019-et-2020,520,83340,3

https://www.businessnews.com.tn/La-Tunisie-accorde-C383C2A0-Shell-le-permis-pour-le-forage-de-4-puits-pC383C2A9troliers,520,33174,3


7) Notre banque BH s'endettait afin d'investir ailleurs qu'en Tunisie --> où sont passés les investissements de notre BH à l'internationale?
https://www.businessnews.com.tn/la-bad-accorde-a-la-bh-une-ligne-de-credit-de-60-millions-deuros,520,67763,3

https://www.businessnews.com.tn/la-bh-bank-reaffirme-son-ouverture-sur-lafrique,524,112546,3

etc., etc., etc.

Très Cordialement

Dr. Jamel Tazarki, Mathématicien

Tounsi Fakhour
@Jamel Tazarki
a posté le à 12:44
Bonjour,
Je serais très intéressé par vos publications scientifiques.
J'ai regardé sur Google Scholar, je n'ai rien trouvé.
Pourriez-vous les mettre sur ResearchGate ? Merci.
Bien à vous,
Warrior
publications ?
a posté le à 14:07
rien à part des maths abstraits, donc inutiles.
NEPHENTES
Houcine Ben ACHOUR. SI PRECIEUX
a posté le 12-11-2021 à 19:03
Merci si Hocine pour vos précieuses analyses

Vous etes le contributeur le plus utile a la compréhension des véritables enjeux auxquels ce pays est confronte , tel le sage qui montre la lune
kol
ditto
a posté le à 11:49
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