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Tunisie - L'ANC accouche de la loi électorale dans la douleur
01/05/2014 | 1
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Tunisie - L'ANC accouche de la loi électorale dans la douleur
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Peut-on dire que tout est bien qui finit bien ? En effet, l’Assemblée nationale constituante (ANC) a bien bouclé, ce soir du 1er mai 2014 le vote de la Loi électorale dans son intégralité avec 132 voix pour, 11 voix contre et 9 abstentions, mais les péripéties ayant devancé ledit vote ont été émaillées d’embûches, de clashes, d’échanges d’accusations et autres insultes et humiliations. Retour sur deux jours pas comme les autres dans la vie de l’Assemblée…

Les deux derniers jours à l’Assemblée nationale constituante, consacrés au vote des articles 167 et 23 de la loi électorale, ont donné, en effet, une image peu reluisante du niveau des débats menés par certains élus, dont notamment Brahim Kassas, qui ont multiplié les clashes, les accusations à la limite de la diffamation et les insultes, les propos humiliants pour la femme proférés par M. Kassas étant la plus triste des illustrations.

L’ambiance a commencé à chauffer, mercredi 30 avril 2014 à l’occasion du débat et du vote, en séance plénière, de l’article 167 stipulant que ne peuvent se porter candidats aux législatives tous ceux ayant assumé des responsabilités au sein des gouvernements sous le régime de Ben Ali à part ceux n’ayant pas appartenu au RCD dissout, et tous ceux ayant assumé des responsabilités au sein des structures du RCD dissout selon le décret n°189 en date du 3 août 2011.
Cet article n’est finalement pas passé à une voix près puisqu’il n’a obtenu que 108 voix pour alors que 23 autres ont voté contre et 43 se sont abstenus.
Du coup, la colère monta de plusieurs crans dans l’hémicycle de l’ANC, certains députés étant allés jusqu’à qualifier cet « échec » comme étant une traitrise à l’égard des martyrs et des blessés de la révolution.

Deux avis résument l’ampleur du clivage existant entre les partisans et les opposants à l’article en question. Pour le député Khemaïs Ksila de Nidaa Tounes, l'article 167 est « anticonstitutionnel et représente une grande injustice » avant d’ajouter que « le rejet de cet article constitue en soi un acquis pour l'Assemblée nationale constituante ».
Nejib Mrad, député d’Ennahdha, a un point de vue diamétralement opposé. Pour lui, «vaut mieux annuler les élections que de voir des RCDistes y prendre part, a t-il indiqué avant de menacer de boycotter le vote de la loi électorale, affirmant que l'article 167 sera revoté en vertu de l'article 93 du règlement intérieur de l'ANC ».
Nejib Mrad et les partisans du principe d’exclusion ont dû, définitivement, déchanter suite à un nouveau vote, effectué en fin de cet après-midi du 1er mai. Les résultats ont été encore plus nets que lors du premier vote à savoir 100 voix seulement pour, 46 abstentions et 27 autres contre.
Ce nouveau vote, a pu avoir lieu après que l’ensemble des présidents des blocs parlementaires à l’ANC ait opté pour cette démarche.

Auparavant, lors du débat sur l’article 23 concernant la parité verticale et horizontale entre hommes et femmes, la séance plénière du jeudi 1er mai 2014 à l’Assemblée nationale constituante a été marquée par un incident majeur lorsque Brahim Kassas a prononcé son avis contre ledit article, indiquant que la place de la femme se trouve à la maison pour s’occuper de ses enfants et « pour laver les pieds de son mari. Si la femme devait se prosterner pour quelqu'un, ce serait pour son mari, c'est la religion, et la femme n'a pas le droit de contester. Au lit, elle ne peut tourner le dos qu'avec l'autorisation de son mari. C'est la religion, c'est la religion, que les efféminés aillent au diable !».
Et dans la confusion générale ayant suivi, Brahim Kassas s’est dirigé vers Mehdi Ben Gharbia et a tenté de l’agresser tout en poursuivant sa diatribe, en traitant les autres élus d'homosexuels. Ce qui a amené l’élue, Rym Mahjoub, à dire : « Au Bardo, on ne pourrait pas descendre plus bas, on touche le fond, c'est malheureux ».

Une autre altercation est survenue, juste après, lorsque Rabiaa Najlaoui voulait prendre la parole avant son collègue Hichem Hosni qui a répliqué : « Je veux bien offrir ma place à une femme pour prendre la parole avant moi à condition qu’elle n’appartienne pas à Nidaa Tounes. » Cette réplique a offensé Rabiaa Najlaoui de manière notable et l'a poussée à répondre : « Je suis une femme, une vraie et je représente une fierté pour toi ! »

Ces tensions et ces clashes démontrent la haute importance que revêt la loi électorale pour le bon déroulement des prochaines élections et pour tout l’avenir du pays. Ceci explique le souci de certains partis d’éliminer une bonne frange de candidats et des adversaires potentiels afin d’augmenter leurs propres chances.
Les partisans de l’exclusion semblent avoir été tellement obnubilés par les intérêts étroits qu’ils n’ont jamais voulu prendre en considération l’hypothèse que l’article en question est anticonstitutionnel et que cela risquait de rendre toute élection sur ces bases caduque.
Mais le bon sens a finalement prévalu dans la mesure où il est plus logique de traiter les citoyens électeurs en majeurs capables de différencier le bon grain de l’ivraie en ayant la liberté de voter pour les candidats de leurs choix.

C’est ce qu’on appelle un accouchement dans la douleur avec l’impression première qu’il s’agit, en fin de compte, d’une loi assez valable malgré certaines critiques à propos du financement des campagnes électorales ou le seuil minimum pour présenter ses listes au scrutin.

Sarra HLAOUI
01/05/2014 | 1
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