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Chroniques
Sami El Fehri, victime incontestable
Par Synda Tajine
04/02/2020 | 15:59
3 min
Sami El Fehri, victime incontestable

 

Il est très difficile de savoir qui est victime et qui est bourreau aujourd’hui. On ne peut soutenir une personne sans être de son bord. On ne peut s’élever contre l’injustice subie par une personne sans automatiquement en épouser les opinions et les appartenances.

 

Sami El Fehri est incarcéré depuis 3 mois. On l’oublierait presque tellement ses passages par la case prison sont fréquents. On oublierait presque aussi qu’il n’est pas seul. Dans son infortune, il est accompagné de l'administratrice judiciaire et du mandataire légal de la chaîne El Hiwar.

Une infortune qui dure à cause d’une acrobatie juridique du plus mauvais goût. On a, depuis longtemps, dépassé les subtilités judiciaires et l’appréciation du juge pour tomber, les deux pieds joints, dans un abus juridique flagrant. Si ceci est clair comme de l’eau de roche, très peu de gens condamnent ou s’indignent de voir une telle énormité étalée au grand jour. C’est que Sami El Fehri lui-même dérange. C’est que l’affaire elle-même est tellement alambiquée qu’il serait hasardeux de le défendre.

Défendre Sami El Fehri dans sa cellule de fortune équivaudrait à défendre la personne, à se dire pour la corruption et le blanchiment d’argent, à se ranger de son côté et à se déclarer ouvertement appartenant à ce camp face à l’autre. Ceci est pourtant faux.

 

Il est de plus en plus difficile de soutenir aujourd’hui, tant les causes dont devenues nombreuses. Les militants d’hier étaient connus, catalogués, flanqués du badge de « cause légitime à défendre ». Aujourd’hui, on s’y perd.

Le cas Sami El Fehri est juste édifiant. Plusieurs violations de droits constitutionnels dans la même affaire et personne – ou presque – ne lève le petit doigt pour condamner cette injustice. Les gens sont trop mal à l’aise. « Si l’on soutient Sami El Fehri que dira-t-on de nous ? L’homme n’est pas aussi clean qu’on voudrait, il défend des « clans » qui ne sont pas les nôtres et il n’appartient pas à notre « famille ». Cela voudra-t-il dire que l’on se range de son côté ? » s’interrogent les amateurs des causes sur mesure. 

Peu importe si l’injustice est aussi grosse qu’un éléphant dans un couloir, elle mettra toujours mal à l’aise ceux qui choisissent soigneusement les causes qu’ils défendent.

 

Ceci a aussi été le cas pour l’affaire Nabil Karoui. Un candidat à la présidentielle incarcéré une semaine à peine avant le démarrage de la campagne électorale pour la présidentielle, alors qu’il est visé par une instruction judiciaire qui date de plusieurs années (2017). L’affaire était tellement grosse que certains avaient du mal à le dire et à l’assumer. Dire que l’incarcération de Nabil Karoui est une injustice équivaudrait à le soutenir face à un Kaïs Saïed blanc comme neige.

Aucun des deux n’aura fait, de toute évidence, un bon président. L’un d’eux se casse les dents en public à tenter de prouver le contraire, l’autre n’aura jamais cette chance. Tant mieux d’ailleurs.

 

Mais comment assumer de défendre ces hommes-là ? Comment pouvoir assumer de défendre l’ennemi et de pouvoir le justifier plus tard ?

Les affaires de corruption et de blanchiment d’argent qui entachent les deux hommes sont à prendre très au sérieux. Mais, si la justice ne joue pas son rôle comme elle devrait, elle perd toute sa légitimité. A force de faire du sur-mesure, la justice se noie et sans elle, nous serons perdus.

 

L’ennemi commun n’est plus là. Les ennemis sont devenus nombreux et nous faisons face à une multitude d’ennemis à combattre. Ils sont tellement nombreux qu’on se demanderait qui au juste est l’ennemi et qui sont ceux du côté desquels on devrait se ranger. Le noir et le blanc avaient aidé les militants d’hier à assumer leurs causes. Dans ces interminables nuances de gris, les militants se font rares et préfèrent fermer les yeux au lieu d’être associés à ces « scandales » teints de gris.

Pourtant les causes restent les mêmes et les injustices n’ont pas changé. Elles sont évidentes, criardes et incontestables. Ce sont les appréciations qui changent. C’est la multiplication des sensibilités et des appartenances qui entache certaines causes, pourtant justes, d’une bonne couche de gêne. Mais si on ne défend pas ces causes-là, indépendamment de la gêne qu’elles occasionnent, il n’y aura désormais plus rien à défendre…

 

Par Synda Tajine
04/02/2020 | 15:59
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Commentaires
Lol
Alhiwar et Nessma en parlent assez
a posté le 05-02-2020 à 14:48
Sami et Nabil ont des chaînes TV où ils sont défendus quotidiennement et où on leur adresse des messages de soutien pendant les émissions POLITIQUES. Quelle honte quand on regarde ça de l'étranger.
Je ne regarde plus la chaîne de karoui tellement ils s'adressent à des analphabètes. mais les messages de soutien quotidiens de Mariem belkhadi que je respectait sont tellement pathétiques. Imaginez de tels messages dans le JT de TF1 ptdr.
Sami a volé l'argent des tunisiens avec son associé trabelsi et il continue les affaires louches même après son emprisonnement. Le pire c'est qu'il a du talent et qu'il n'avait même pas besoin de faire ça.
Alors on ne va pas encore en faire une victime et sortir crier free Sami. Il y a tellement d'injustices a dénoncer dans ce pays que le cas de fehri ne mérite pas un article par jour ici

l'Irrévérentieux
Défendre le droit !
a posté le 04-02-2020 à 21:03
Dénoncer la manière avec laquelle est traîté le cas Sami El Fehri par la Justice de notre pays, ne revient pas à le défendre ou à défendre sa cause mais plutôt à défendre le droit et la justice !
Merci Madame Tajine de l'exprimer aussi clairement !
takilas
La seule faute de Sami Fehri c'est....
a posté le 04-02-2020 à 20:54
....originaire du sud.
Car il s'agit dun problème simple et non pas ambiguë, c'est celui du régionalisme qui est la resumtante du prinyltemps arabe qui a été en fin de compte destiné à mettre en valeur cette mentalité infecte usitée dans les mosquée (drôle de religion déformée ) et dans les réunions féeriques ( boites de nuit er beuveries) et de sincère à Hammamet dans le cadre de la commission des consultations; "majless choura" incomparable avec celui du prophète aalieh essalet wa essalem.
kol
Radhia Nasraoui et les islamistes
a posté le 04-02-2020 à 19:32
quand elle les defendait, on ne disait pas qu'elle etait islamiste ou qu'elle pactisait avec le diable mais qu'elle defendait les droits des tunisiens
pkoi quand il s'agit en effet de Sami El Fehri ou de Karoui, on catalogue les gens qui les defendent de corrompus et de trafiquants!?
cet article est bien a propos et j'espere vraiment que ceux qui le liront et qui excecrent Fehri/Karoui et leurs avocats reflechiront un peu plus aux consequences d'une justice dependante d'un systeme secret et qui finalement ne nous protege plus a en voir les abus
la tunisie est devenue un pays de non droit comme Dubai, l'Aarabie Saoudite, l'Iran, la Turquie, la Russie etc... pas vraiment une democratie et c'est tres tres tres regrettable pour nous tous
Welles
Bravo Madame
a posté le 04-02-2020 à 18:36
Vous l'avez bien dit et vous avez ainsi la conscience tranquille; nous aussi