
Par Ameur Bouazza*
L’attention portée à la ministre des Finances, quittant le pouvoir par la petite porte dans une scène humiliante et dégradante, a éclipsé la question cruciale posée par le président de la République : « Où est le comité ? »
Ce comité, que le président cherchait dans les rues de la capitale, allant de l’avenue Mohamed V à la Kasbah, comme à son habitude, au comble de l’irritation, de la colère et de la tension, il aurait pu le trouver aisément, assis à son bureau au palais de Carthage, dans un rapport de la Cour des comptes publié il y a plus de sept ans.
Ce rapport contient des réponses à toutes les questions soulevées par le président, qui ne cesse de répéter que rien n’a été réalisé sur le terrain et que la durée des procédures de confiscation aurait suffi à accomplir de nombreux projets dans d’autres pays. Si cette déclaration constitue en soi un aveu explicite d’échec venant de la plus haute autorité de l’État, le rapport de la Cour des comptes en explique les causes de manière objective et en détaille les raisons avec une clarté indéniable.
Les biens confisqués : un fardeau pour le peuple
Le président, dans ses accès de colère, martèle que ces biens confisqués sont des « biens du peuple » et qu’ils doivent lui revenir. Pourtant, la réalité montre que c’est le peuple qui finance désormais l’entretien des biens saisis à leurs anciens propriétaires et censés lui appartenir ! Les exemples, à la fois risibles et tragiques, sont nombreux. En 2013, l’exposition des biens confisqués organisée par le gouvernement de la Troïka n’a couvert que 40% de ses coûts. De plus, le comité a mis deux années entières à restituer un siège qu’il louait, coûtant à l’État un million de dinars pour clore le dossier à l’amiable. Ainsi, ce bon peuple, désireux de se venger des « Trabelsia », a dépensé deux millions de dinars avec un « bonheur révolutionnaire » pour permettre à la ministre de la Femme, Sihem Badi, de poser fièrement à côté d’une paire de chaussures de Leïla Ben Ali !
Une gestion calamiteuse des biens saisis
Les exemples d’échec abondent dans ce rapport. De nombreux appartements et villas confisqués n’ont pas été vendus faute de certificats de propriété difficiles, voire impossibles, à obtenir. De nombreuses exploitations agricoles ne peuvent être cédées en raison de contraintes juridiques. Quant aux palais et villas luxueux, ils nécessitent un entretien constant, une surveillance permanente, sans parler des voitures de luxe négligées jusqu’à perdre toute valeur marchande. La plupart des entreprises confisquées ont sombré dans la faillite, obligeant l’État à en assumer le fardeau social. Le cas de la radio Shems FM n’est qu’un exemple parmi d’autres, rendu visible en raison de sa nature médiatique, mais l’invisible est sans doute bien pire.
Quand les impôts financent l’échec
Ainsi, les Tunisiens paient des impôts élevés non pas pour bénéficier de services publics de qualité, mais pour financer des entreprises publiques déficitaires comme la compagnie aérienne nationale, les usines de papier, de tabac et de sucre, pour surveiller les palais de Ben Ali et les fermes des anciens et nouveaux « Trabelsia », et pour rembourser les dettes d’entreprises confisquées en faillite imminente.
À cela s’ajoute le financement des sociétés communautaires et des projets fantômes. Dès lors, suspendre les confiscations paraît plus judicieux que de les poursuivre, car la confiscation est un « acte révolutionnaire » par excellence, et la majorité de ceux à qui on l’a confiée en sont incapables ou n’y croient pas.
Un échec structurel aux causes multiples
L’échec de l’État dans la gestion des biens confisqués ne s’explique pas uniquement par l’influence des centres de pouvoir liés aux anciens propriétaires des biens saisis — une explication que le président répète sans cesse pour justifier tous les maux de la planète ! Cet échec est aussi le fruit d’un mélange étrange de bureaucratie rigide, de lois figées, d’un manque criard de compétence, d’expérience et de probité chez la plupart des responsables qui ont occupé le pouvoir à divers niveaux au cours des quatorze dernières années, sans oublier la perte de conscience morale chez certains, la malhonnêteté d’autres, et surtout la facilité avec laquelle ce peuple malheureux est berné par des slogans creux.
Recourir à des boucs émissaires ne signifie donc pas affronter la réalité avec courage, mais persévérer dans la fuite en avant.
* Ameur Bouazza est un homme de médias et producteur tunisien vivant à Doha
Texte original publié en arabe, traduction Business News



Mais vu le rapport a la technologie si l' on puisse dire, constitue un irritant , ,restons tous au temps de la plume de paon au lieu de blâmer un innocent
On peux résumer à ça...