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Chroniques
Najla Bouden prise dans la tempête Kaïs
Par Nizar Bahloul
20/12/2021 | 15:59
7 min
Najla Bouden prise dans la tempête Kaïs

  

Vendredi 17 décembre 2021, le onzième anniversaire de la révolution s’est déroulé sans aucune festivité majeure. Pour la deuxième année consécutive, Kaïs Saïed, ténor autoproclamé de cette révolution, ne s’est pas déplacé à Sidi Bouzid, comme attendu. Et pourquoi se déplacerait-il ? Il a déjà obtenu ce qu’il voulait, le pouvoir absolu. Les Bouzidiens, il n’en a plus besoin, il peut les jeter comme des Kleenex. Aficionados du président de tous bords, vous aussi vous êtes des Kleenex, vous aussi vous serez jetés.

A Tunis, on a célébré la révolution en rangs dispersés, chacun dans son coin, chacun avec ses propres moyens. On est bien loin du 14 janvier 2011 où tout le monde était uni pour représenter un front commun face à la dictature.

Ainsi, les partis préhistoriques et microscopiques Ettakatol et Al Jomhouri se sont mis derrière Attayar pour sortir manifester contre le pouvoir absolu de Kaïs Saïed.

Les partis dits laïcs, modernistes, progressistes, libéraux et socio-démocrates se sont mis derrière leurs écrans de télévision ou de smartphone pour regarder les autres « travailler ».

Le parti destourien PDL, ne se sentant pas concerné par la révolution, a poursuivi son sit-in sous le froid de canard de décembre pour protester contre l’union des Oulémas musulmans, organisation-écran du terrorisme d’après sa présidente Abir Moussi.

Et puis il y a les islamistes et ex CPR qui se sont mis derrière un duo de comiques pour manifester bruyamment, sous l’œil des caméras, contre le « tyran ». Ils ont annoncé un sit-in, mais au bout de 24 heures, ils se sont rendu compte qu’ils n’étaient que des poules mouillées, incapables de tenir longtemps sous le froid tout en résistant à la pression d’une police aux ordres.  

Enfin, et pour finir, il y a eu quelques dizaines de flagorneurs sortis pour applaudir les décisions historiques du « sauveur » Kaïs Saïed. A ces derniers, le ministère de l’Intérieur a réservé le meilleur accueil et le meilleur espace de l’avenue Habib Bourguiba, face au Théâtre municipal.

 

Concrètement, pour résumer ce triste paysage politique tunisien, il n’y a que le PDL qui fait réellement de la politique et s’oppose courageusement au pouvoir absolu du président de la République.

Les islamistes font du bruit, certes, mais ils se cramponnent au deuxième rang, incapables de réunir des masses.

Les centristes font quasiment du surplace avec de timides réactions policées dans les médias (Afek, Attayar) ou en se cachant sous le lit (Tahya Tounes, Machrouû) le temps que la tempête Kaïs passe.

Il est évident et visible pour tous que Kaïs Saïed ne connait rien à la politique, à l’économie ou à la société. Malgré cela, il est là depuis plus de quatre mois à faire ce qu’il veut sans trouver un véritable opposant pour se mesurer à lui. Malgré la petitesse du président, l’opposition toute réunie ne réussit pas à atteindre sa taille ! 

Kaïs Saïed ne perdure pas parce qu’il est fort ou qu’il a l’armée et la police à ses ordres, Kaïs Saïed perdure parce que les autres sont divisés et faibles. Ils n’ont d’élevé que l’égo.

 

Pendant que la classe politique sautille, le gouvernement de Najla Bouden travaille. La dame travaille seule dans son coin, sans nous faire part de ce qu’elle prépare. C’est ainsi que fonctionnent les dictatures, elles n’ont pas besoin de rendre compte au peuple de leurs activités.

Aux yeux de Najla Bouden (et de Kaïs Saïed) nous ne sommes que des sujets, juste bons à payer des impôts et des taxes.

Pour savoir ce que nous réserve 2022, on doit encore attendre cette loi de finances qui, d’habitude, était dans les bacs depuis septembre. Nous sommes le 20 décembre et la fumée blanche n’est toujours pas apparue.

Pour savoir quelle est la stratégie de Mme Bouden pour remplir les caisses et connaitre son plan de réformes, il faut se fier aux rumeurs et aux petites phrases.

En recevant samedi 11 décembre le secrétaire général de l’UGTT, la cheffe du gouvernement (Première ministre plutôt) a indiqué qu’elle envisage de réduire de 10% la masse salariale, le gel des augmentations salariales pour une période de cinq ans, la levée de la compensation et la cession de quelques entreprises publiques.

Jeudi dernier, 16 décembre, Najla Bouden a reçu le patron des patrons Samir Majoul et lui a exposé son programme de réformes.

Et nous dans tout ça ? Allo, Mme Bouden ? Nous, le peuple. Nous, les contribuables. Nous, les premiers concernés, il y a quelqu’un pour nous parler et nous dire ce que vous nous préparez ?

Les médias ? Elle préfère les ignorer. Elle a même imposé des conditions aux interventions de ses ministres.

Même dans les pires dictatures, les gouvernants s’adressent au peuple et lui expliquent des choses. Chez nous, notre cheffe du gouvernement ne s’adresse qu’aux syndicats et au patronat. Et encore. Désormais, même les syndicats vont être écartés de la confidence, puisque Noureddine Taboubi a violé la confidentialité de la réunion. Il a été sanctionné tout de suite avec cet ordre de conditionner toute discussion d’un membre gouvernement avec le syndicat à un accord préalable de la Primature.

Le président a beau crier sur tous les toits qu’il est à l’écoute de ce que veut le peuple, la réalité du terrain est à l’exact contraire.

 

Najla Bouden se met à dos UGTT et médias

En dépit de toute son arrogance et de son mépris à l’égard des médias et du peuple, on arrive à comprendre le comportement de Najla Bouden.

Elle est entre le marteau et l’enclume. D’un côté, il y a ses obligations de cheffe de l’exécutif qui lui imposent de dire ce qu’elle fait aux premiers intéressés (c'est-à-dire nous) et de l’autre il y a les ordres de son patron Kaïs Saïed qui lui interdit de s’adresser aux médias et qui lui a imposé, la semaine dernière, de sanctionner l’insolence de Noureddine Taboubi.

Najla Bouden est entre deux feux et elle va finir par se brûler. En obéissant aux ordres du président, elle garantit sa tranquillité d’esprit sur le très court terme.

Mais tôt ou tard, elle est obligée de rendre publiques ses décisions et, à ce moment, elle va devoir affronter la colère populaire.

Pire, elle s’est mise à dos l’UGTT avec sa circulaire N°20 et Sami Tahri lui, porte-parole de la centrale syndicale, a demandé de la retirer de suite pour que les choses ne s’enveniment pas. Bien entendu, elle l’a envoyé balader, elle n’a d’ordre à recevoir que de Kaïs Saïed.

En optant pour ce choix de mépriser le peuple, les médias et la centrale syndicale, Najla Bouden joue assurément avec le feu. Pourquoi ?

Parce que Najla Bouden n’a plus d’argent dans les caisses et elle est obligée de prendre des décisions impopulaires et douloureuses. Elle se doit, de ce fait, de préparer l’opinion à ces décisions et cette opinion ne peut être préparée que par les médias et par l’UGTT. Il n’existe aucune autre solution, si l’on veut éviter cette colère populaire.

Najla Bouden a obéi au président et obtenu un sursis, mais le président ne lui servira plus à rien le jour où l’UGTT décrétera des grèves et quand les médias épingleront son amateurisme dans la gestion politique des dossiers brûlants.

Ce jour là, Kaïs Saïed la jettera comme un Kleenex, comme font tous les monarques.

Najla Bouden ne mérite pas d’être sacrifiée, car du peu que l’on sait de son plan de réformes, celui-ci peut sauver le pays. Mais ce plan a besoin de soutiens, beaucoup de soutiens dont celui des incontournables médias et des incontournables syndicats. Il suffit qu’elle lise l’Histoire de la Tunisie pour savoir ce qu’il est advenu des gouvernants qui ont joué au bras de fer avec l’UGTT. Il suffit de voir ce qui se passe dans le monde pour voir ce qu’il est advenu de ceux qui méprisent les médias.

En jouant avec le feu à la fois avec les médias et les syndicats, cette bonne dame va finir par se brûler.

Par Nizar Bahloul
20/12/2021 | 15:59
7 min
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Commentaires
BEN HASSINE MHAMMED
ce que vous nous préparez
a posté le 21-12-2021 à 17:45
PLUTOT MIJOTER
NON DE DIEU JE E DEMANDE QU'EST CE QUI CE PASSE DANS LEURS CRANES
ILS CE CROIENT EN IMMUNITEE ABSOLUE ?
LEURS PLANS DE SORTIE CERTINNEMENT AFFREUX
J'AI UNE GRANDE ET DOULOUREUSE PEINE POUR LE CHEF DE GOUVERNEMENT ET SON EQUIPE
JE LE PENSE SINCEREMENT
Soussi
Qui croire
a posté le 21-12-2021 à 16:09
Mme Bouden dans la tempete du Prrsident
Et les Tunisiens dans la tempete des Journalistes
BEN HASSINE MHAMMED
"tempete des Journalistes"
a posté le à 17:49
MAIS C'EST GRACE A EUX ( TOUTE L'EQUIPE BN) QUI S'ACHARNE ANOUS CLARIFIER LA SITUTION ET NOUS NOS ESPRITS
OUI BN DEVENUE L'UNIQUE JOURNALE QUE JE LISE ET CE N'EST PAS PAR HAZARD
Jihen Maatoug
Plan de réformes
a posté le 21-12-2021 à 14:29
Merci pour cet article, pertinent comme d'habitude. J'ai juste une question: vous dites "du peu que l'on sait de son plan de réformes, celui-ci peut sauver le pays." Que sait-on du plan de réformes?
Kafia
« '?'il n'y a que le PDL qui fait réellement de la politique »
a posté le 21-12-2021 à 12:18
C´est une farce. La politique de la casserole !
Forza
Analyse d'un analyste égyptien
a posté le 21-12-2021 à 10:27
Je ne partage pas son point de vue entièrement mais quelque points sont intéressants :
https://www.youtube.com/watch?v=7SsvRm9JZWE
Nephentes
Najla Bouden est entre deux feux et elle va finir par se brûler
a posté le 21-12-2021 à 02:40
Et un kleenex ca se consume tres rapidement

Et apres

Comment Mr Saed ne comprend il pas qu'il faut mettre temporairement en veilleuse certaines institutions et autorités publiques parce que trop gangrenées pour assumer leur rôle de plus en plus hypothetique

Soit Mr Saed fait intervenir a titre temporaire l'Armee soit il cramera avec Mme Bouden

Il joue gros
MH
Un air de déjà vu
a posté le 20-12-2021 à 23:58
Cette période de règne de KS nous rappelle le début de ZABA. KS est entrain de s'installer et d'assoir son pouvoir absolu sans contrôle ni compte à rendre. C'est le maitre absolu. Le fait qu'il ne s'est pas déplacé à Sidi Bouzid comme prévu est révélateur. Il quittera de moins en moins son tour d'ivoire comme au temps de ZABA. Il se barricadera dans son palais de plus en plus jusqu'à où il viendra le jour du réveil du peuple pour le faire sortir de force. Ce jour est encore lointain, très lointain.
takilas
M. Kamel Ben Massoud un computer obstiné écervelé.
a posté le 20-12-2021 à 20:13
M. Kamel Ben Massoud présent ce soir pour une interview sur une télé, n'a jamais voulu admettre ni répondre à la question de l'inexistence de tribunal de constitution (de destour) est une grande défaillance premiditée par nahdha, afin que ce clan de maniganceurs ne soit jamais questionné ni impliqué dans d'éventuelles arnaques.
Forza
La seule force de Kais Saied
a posté le 20-12-2021 à 19:06
Sont ses complices. Je vous laisse deviner qui ils sont. Ces complices ont choisi de suivre un despote au lieu d'être loyaux à la constitution et aux lois.
zozo Zohra
Un peu phylo
a posté le 20-12-2021 à 19:00
Pensée binaire
Nos jugement
Nos croyances
Il faut...
Les 4 pièges qui donnent des conflits dans nos sociétés

Cette vision du monde crée de la division, amène à considérer la différence comme menaçante et génère de la violence.

la crise que nous vivons provient de notre structure de pensée binaire

- Stimuler l'esprit critique
- Favoriser le vivre-ensemble et le savoir être
- Donner les clés pour comprendre les mécanismes psycho-sociaux à l'?uvre dans nos comportements
- Apprendre à s'affirmer dans le respect de l'autre
- Transformer la pensée binaire en pensée ouverte
La crise que nous vivons provient de notre structure de pensée binaire

Tout ce qu'elle a besoin notre tunisienne aujourd'hui
nazou de la chameliere
En même temps...
a posté le 20-12-2021 à 17:18
Mechichi qui avait choisi de ne pas obéir au facho ,n'a pas été soutenu par les médias, ou l'ugtt !!!
Pire encore, il avait eu affaire à une véritable cabale, de la part des fachos pro-facho !!!
Forza
pire
a posté le à 19:14
Bonsoir Nazou
Il a été même tabassé selon des médias étrangers, les dernières fuites de wikileaks arabic semblent confirmer cette implication étrangère.
nazou de la chameliere
Bonsoir forza
a posté le à 20:50
L'implication étrangère à manipulé tout le monde,depuis au moins une vingtaine d'années.
Pour arriver à la ruine du pays.

Tant pis pour eux , une majorité réclame le bâton et le mépris.
Lol
C'est la saison du kleenex
a posté le 20-12-2021 à 17:05
De populace à kleenex, il est clair que KS inspire du monde.
La réponse est simple pour Mme bouden. Elle n'est responsable que devant KS vu les conditions de son cdd et elle n'est là que pour du court terme.
Ses interlocuteurs, Utica et ugtt, sont à priori assez matures pour savoir à quel point ils risquent gros si le plan de réforme ne passe pas.'?a sera payé cash en 2022.
Quant à son statut de kleenex, je pense qu'elle est consciente d'etre sur un siège éjectable. Mais sans plan de carrière en politique pourquoi s'en soucier...
retraité
votre commentaire est partiel
a posté le 20-12-2021 à 16:35
tout le monde n'est pas bon dans le pays même la cheffe de gouvernement apolitique et travaille dans le calme et la sérénité est épinglée bref quelle est votre solution pour sortir le pays et son peuple de la plus grave crise de son histoire ? cette crise est engendrée par la gestion calamiteuse des islamistes et leurs differents alliés pendant 10 ans pour ma part nocif en politique puisque ces nouveaux politiciens et partis politiques après la révolution ont échoué dans la conduite du pays on peut laisser ce responsable novice en politique élu au suffrage universel à 73 % jusqu'à fin 2022 s'il peut sortir le pays de cette crise aiguë tout en le conseillant d'écourter la période et en lui faisant des propositions et des solutions concrètes et valables et en le critiquant objectivement s'il a des propositions insuffisantes pour sortir le pays de ses difficultés afin de revenir à une vie politique apaisée et démocratique dans le pays et que tous les citoyens se mettent au travail .
Fares
Les lois de Mère Nature
a posté le à 17:50
"on peut laisser ce responsable novice en politique élu au suffrage universel à 73 % jusqu'à fin 2022"

Dans le contexte économique actuel ce n'est plus au peuple, ni à S*** de décider. Il est trop tard, le dernier train a quitté la gare depuis longtemps. Un peuple affamé n'attendra pas sagement pour voir l'aboutissement d'une petite expérience menée par quelques juristes dans des bureaux obscurs.

La plus grosse erreur que S*** a commise est d'étaler son fameux référendum sur 3 mois. D'ici là, beaucoup d'eau coulera sous les ponts et beaucoup de pneus seront brûlés.

'?a ne sert plus à rien de critiquer S***. On critique uniquement lorsqu'il y a un espoir de changement. Dans le cas de S***, c'est une cause perdue, le mec n'entend que sa voix. Laissons le se casser les dents tout seul, il est son propre pire ennemi. Yaf3alou al jahilou (al ghabiou) bi nefsihi..