C’est lui-même qui l’a dit : « ce n’est pas parce que le gouvernement n’a pas de couleur politique qu’il n’est pas politisé pour autant. » Hichem Mechichi, l’ex apolitique devenu chef du gouvernement, se doit de faire la politique et il la fait. On aurait aimé attendre les cent jours pour rebondir sur son œuvre, sauf que ses erreurs et ses fautes ne peuvent pas et ne doivent pas passer inaperçues.
Mardi dernier, l’assemblée devait discuter une proposition de loi relative à l’audiovisuel pour succéder au décret-loi 116. Juste avant, Hichem Mechichi n’a pas trouvé un meilleur timing pour retirer un projet de loi autour du même sujet déposé par son prédécesseur.
Sachant que la proposition de loi déposée par Al Karama (qui joue les mandataires des deux chaînes en infraction Nessma et Zitouna TV) est fortement polémique et ne bénéficie d’aucun soutien de la corporation ; sachant que le projet de loi déposé le gouvernement a été élaboré en collaboration avec le gendarme de l’audiovisuel et la corporation ; quel message envoie Mechichi en retirant le projet de loi du gouvernement la veille de la discussion (dans une ambiance très électrique) de la proposition de loi d’Al Karama ?
Alors non seulement, il met les pieds dans le plat et prend le risque de se mettre à dos la corporation et la présidence de la République (qu’il avait à dos déjà), mais en plus il envoie sa directrice de la communication nous dire que le projet déposé par son prédécesseur est inconstitutionnel !
Qu’entend Mechichi par là ? Que le gouvernement précédent, en collaboration avec une instance constitutionnelle, la crème des communicateurs et des juristes n’ont pas su ficeler un projet de loi ? Qui est-il lui, tout comme sa directrice de communication, pour nous dire ce qui est constitutionnel et ce qui ne l’est pas ?
En retirant le projet de loi du gouvernement, Hichem Mechichi a commis une grave faute et entache son mandat en s’attirant les suspicions de corruption ou, au moins, de conflit d’intérêts. Pourquoi ? Pour comprendre, il faut entrer dans les coulisses de la Kasbah, sans pour autant entrer dans le complotisme.
Comme chacun sait, la proposition de loi a été élaborée par Al Karama. Laquelle Karama œuvre pour les intérêts de deux personnes, à savoir Nabil Karoui, patron de Nessma et de Qalb Tounes et de Sami Essid, patron de Zitouna et très proche des milieux nahdhaouis. Durant sa campagne électorale, El Karama a parlé de tout sauf de la réforme des médias. Ils ont parlé pétrole, sel, France, Palestine, statistiques, mais jamais Seïf Eddine Makhlouf and co n’ont évoqué la question de réformer le code de l’audiovisuel. S’ils l’ont fait maintenant, c’est parce que les situations de Nessma et Zitouna sont devenus intenables. La Haica, gendarme de l’audiovisuel, leur a demandé pendant des années de régulariser leur situation, mais les deux chaînes ont refusé jusqu’à épuiser tous les délais légaux. La trouvaille, portant l’empreinte claire de Nabil Karoui, fut de proposer une loi qui minimise le rôle du gendarme dans la régulation du secteur. Il lui enlève carrément la possibilité, d’octroi des visas. Cela n’existe nulle part au monde, même pas dans les pays les plus libéraux, mais peu importe puisque Nessma et Zitouna vont pouvoir régulariser leur situation.
C’est dans un nid de vipères que s’est mis tout seul Hichem Mechichi en retirant le projet de loi du gouvernement.
Apolitique qu’il est, Hichem Mechichi n’a pas anticipé la réaction de la corporation. Mais cela reste un détail. Le plus grave est sa complicité dans cet ouvrage. Nous avons un chef du gouvernement qui est là pour rendre un service personnel à Nabil Karoui afin qu’il puisse régulariser sa situation. Et ceci est fondamental pour Karoui quand on sait que ses actionnaires de référence ont des sociétés cotées dans des bourses européennes.
Les relations entre Mechichi et Karoui ne sont plus un secret. On sait, par exemple, que Ghazi Karoui, député et frère de Nabil, a été son conseil en image et a ses entrées à la Kasbah. On sait que l’époux de sa directrice de la communication est rédacteur en chef à Nessma. On sait aussi qu’il s’est mis à dos Kaïs Saïed quand il a appris qu’il était en train de concerter avec lui pour obtenir le vote de son parti dans la séance de vote de confiance du gouvernement.
S’il n’y a aucun mal à ce que Mechichi concerte avec Karoui et autres, il en est autrement quand il s’agit de tordre les lois et d’utiliser la machine de l’Etat pour rendre service. Cela tombe carrément sous le coup de la loi.
La première responsable de cette faute s’appelle Samah Meftah Mechri, directrice de la communication. C’est à elle qu’incombe le devoir d’alerter son supérieur de la dangerosité de la manœuvre. L’a-t-elle alerté ? Si elle l’a fait et que Mechichi est passé outre, c’est qu’elle est faible. Si elle ne l’a pas fait, question de servir les intérêts du patron de son époux, c’est qu’elle est complice.
Le chef du gouvernement n’a pas le droit de se mouiller dans les affaires de Nessma et Zitouna. Il n’a pas le droit de se mouiller dans n’importe quelle affaire, il se doit de rester au dessus de la mêlée et d’agir pour l’intérêt général de l’Etat lequel est représenté, dans cette affaire, par la Haica.
Il n’a pas à dénigrer le travail de son prédécesseur en déclarant, via sa directrice de communication, que son projet est inconstitutionnel. C’est une faute de com.
Ce n’est pas la seule faute de com de la semaine quand on voit, trois jours plus tard, qu’il a accompli une visite dite inopinée au ministère de l’Intérieur. Tellement « inopinée » que tous les directeurs l’attendaient à cette heure tardive de la nuit avec jus et biscuits.
Ici aussi, c’est une grave faute de com qui entache son mandat et il aurait bien pu s’en passer s’il était bien conseillé en la matière.
Quelle est la suite ? Hichem Mechichi se doit de mieux porter son costume de chef du gouvernement. Il se doit d’avoir de bons conseillers politiques et en communication et de suivre leurs recommandations. Dépourvu de tact politique au départ, il se doit d’en avoir à l’arrivée. Nabil Karoui et les Nahdhaouis sont là pour servir leur chapelle et ils vont chercher à l’utiliser et à le manipuler comme une marionnette et c’est déjà le cas. Une fois qu’ils n’auront plus besoin de lui, ils vont le jeter comme un Kleenex. C’est pour cela qu’il se doit de servir l’Etat et non les personnes, le gouvernement et non les partis, les entreprises et non l’entreprise de X et de Y.
Il n'y a qu'à dire qu'il s'agit de révolution et que tout est permis.
Mais alors comment se fait-il que tous ceux que ceux qui se sont enrichis et de devenus des milliardaires, comme nahdha, sont libres et jamais déférés devant la justice ni concernés par des enquêtes sur l'origine de leurs colossales fortune ?
Très bon éclairage sur cette histoire de magouille d'El Kharaba, D'Ennakba et de Qalb Tounes au sujet du décret loi n° 116 et du rôle de porteur d'eau joué par Mechichi (pour rester gentil avec lui).
Non, c'est pas des fleurs que je vous jette par là, mais quand vous et vos journalistes vous faites du bon travail on applaudit des deux mains par contre quand vous faites des bourdes et elles sont nombreuses on n'hésite pas à vous le faire remarquer.
Cordialement votre.
Est-ce qu'il a rapidement retourné sa veste pour changer sincerement d'avis ?
Ya thnoubi !
Sa deuxième faute était , comme celle de EF, sa responsable de com . Le deuxième avait choisit la Sfaxienne ( fille de la même région ) et le second a choisi une vraie looser , de part ses origines .. et j'en passe ...
Bref, elle le conduira à sa perte .. et ce coup sera dure pour le reste des tunisiens ..